J'attends que Tyler se décide de poser cette fameuse question. Cinq minutes passent. Puis dix. Puis quinze. Inquiet, je craque :

(A) « C'est si tordu que cela que tu n'oses pas me poser ta question ? »

(C) « Non. Juste, je n'ai pas envie que tu te sentes bousculé ou que tu interprètes mal mes pensées. »

(A) « Sans vouloir te vexer, je pense que je commence à bien te cerner. Et si j'avais un doute sur tes intentions, je t'aurais envoyé balader depuis longtemps. Crache le morceau, Tyler »

(C) « D'accord. J'aimerais continuer cette conversation que nous n'avions jamais terminée. Tu parlais de critères sérieux pour déterminer si un mec pouvait te plaire ou non. »

(A) « Je ne vois pas pourquoi tu avais la trouille de me poser la question. C'est légitime. Toi et moi nous cherchons la même chose. Et si nous voulons aller plus loin, c'est le genre de choses qu'il faut se dire. »

Je me demande si Tyler va saisir le sous-entendu. Jusqu'à présent, je n'ai jamais rien indiqué sur un potentiel début de relation entre nous. Même s'il est trop tôt pour affirmer que Tyler me plait, en deux mois, je n'ai jamais pris autant de plaisir à discuter avec quelqu'un. Je sais que certains se rencontrent après quelques jours ou quelques semaines mais moi, je vais avoir trente ans. Je ne veux pas me planter. Je veux être sûr, avant de rencontrer quelqu'un, qu'il puisse réellement me plaire. C'est bien parti, mais je ne veux rien précipiter. Je souris en découvrant la réponse de Tyler :

(C) « Alors, hum...tu crois que...nous pourrions aller plus loin toi et moi ? »

(A) « C'est possible. Nous sommes sur la même longueur d'onde concernant beaucoup de sujets. Je crois que nous défendons les mêmes valeurs. C'est très important pour moi. Plus important que le physique. »

(C) « Je partage ton point de vue. Mais, le physique compte quand même un peu ;-) »

(A) « Oui, évidemment. Du coup, je présume que c'est là que tu vas m'indiquer quel est ton type de mec ? »

Je retiens mon souffle. Je suis un peu anxieux, je l'avoue. J'ai les yeux verts et les cheveux châtain foncé. Si jamais Tyler m'indique qu'il préfère les blonds aux yeux bleus, je suis dans la merde. Comme s'il devinait mes pensées, il se permet de blaguer sur le sujet :

(C) « Stressé, Edward ? »

(A) « Moi ? Je ne vois pas pourquoi... »

(C) « Menteur ! Si cela peut éventuellement te rassurer, je me fiche de la couleur des cheveux et des yeux. Je préfère un gars sportif, pas le genre qui va rester affalé devant la télé. »

(A) « Bon, jusqu'à présent, je m'en sors bien ! »

Je plaisante mais nous savons tous les deux que ces considérations sont importantes dans l'optique d'un éventuel rapprochement entre nous. J'encourage Tyler à poursuivre :

(A) « D'autres choses ? »

(C) « Avoir des centres d'intérêt commun c'est primordial, pour faire des activités ensemble. Mais je ne suis pas fermé aux découvertes. J'aime tenter de nouvelles expériences. Je me demandais...»

(A) « Oui ? »

(C) « Sincèrement, qu'est-ce qui te fait craquer chez un homme ? »

Je prends le temps de réfléchir quelques instants. Le combo parfait serait un gars au naturel désarmant et à l'humour débridé. Qu'il soit bienveillant, spontané et authentique. Et puis surtout...

Je tape ma réponse en essayant d'imaginer à quoi pourrait ressembler Tyler :

(A) « Son sourire »

(C) « Son sourire ? Genre, si j'ai quelques dents en moins, je n'ai aucune chance, c'est ça ? »

(A) « C'est mal barré ouais. Et à part une dentition mal foutue, quels sont tes autres défauts ? »

(C) « Mes cheveux. J'ai une tignasse de merde. Il parait que ça fait hyper sexy le fameux coiffé décoiffé mais... »

Je ferme les yeux. Je m'imagine passer mes doigts dans cette fameuse tignasse. J'essaye aussi d'imaginer son regard, sa voix et sans trop savoir pourquoi mes pensées dévient vers cette suite de luxe à Chicago où je me suis conduis comme le pire des connards.

Je n'avais pas prévu de m'envoyer en l'air avec un inconnu. Pas depuis que j'ai compris que Tyler m'intéressait vraiment. Dois-je lui en parler ?