Chapitre 16

La Capitale était couverte de grands arbres feuillus, empêchant nos voyageurs de remarquer que la nuit avait déjà pointé le bout de son nez. Parmi les arbres, de grandes maisons en toiles dont certains étages se cramponnaient aux branches les plus fortes. Presque comme un camouflage, leurs toits étaient couverts de feuilles.

Des rivières fines se déplaçaient parmi les habitations et desservaient des jardins sombres. De petit ponts en bois permettaient de les traverser sans se mouiller les pieds. La boue de la forêt était toujours présente, elle, bien que des pierres étaient disposées à quelques endroits pour former un chemin. Actuellement, Morgareth et ses compagnons claquaient leurs pieds dessus, soulagé de ne plus s'engouffrer dans la mare boueuse.

Le bruit des ruisseaux était apaisant. La capitale n'était pas bruyante, à peine étions nous capable d'entendre des chuchotement et des prières.

Les praeliens lançaient des regards ébahis, se penchant au passage du Prince, tout en reculant. Une impression de déjà vu, comme lorsque ce fut eux qui avaient foulés les terres alosiennes. Le peuple s'éloignait et s'enfermait chez soi, craintif.

Un homme à la longue cape, s'approcha du groupe. Il parla en praelien et Morgareth lui répondit. L'inconnu jetait de lourds regards aux étrangers. Sans doute parlait-il d'eux.

Leur discussion ne dura pas longtemps et l'homme s'en alla, tout en se courbant vers son Prince. Les voyageurs reprirent leur marche et se dirigèrent vers une structure gigantesque à même un arbre. Celui-ci devait être bien vieux. Il était plus grand que ses compères de la forêt. Creusé de son intérieur, il abritait le palais praelien. Ses branches accueillaient également quelques structures en toiles, qui nul doute avaient de l'importance.

Ils entrèrent au sein du résineux. D'étranges torches sur le mur éclairaient l'enceinte du palais. Elles étaient en métal et leur flamme était gardée dans une structure transparente, comme celle du bateau royal.

Des escaliers en bois étaient visibles de part et d'autres de l'immense pièce centrale, et permettaient d'accéder aux étages supérieur. Les voyageurs furent conduit vers l'un d'entre eux. Il était composait de nombreuses marches, semblant amener jusqu'au ciel. À chaque palier, une pièce fermée par un rideaux en toile, laissait vaquer l'imagination de nos étrangers.

Après plusieurs centaines de marches, ils arrivèrent enfin. Suivant le Prince, ils passèrent derrière l'une des toile qui faisait office de porte, et s'engouffrèrent dans un long couloir, éclairé aux torches métalliques. Des salles défilaient de chaque côtés, cette fois munies de portes en bois ornés de symboles ésotériques.

Morgareth s'arrêta, puis il prit la parole :

« Il se fait tard, le Roi voulait vous voir avant de faire quoi que ce soit. Je te demanderais donc Cirus, de bien vouloir attendre demain pour communiquer avec les reflets. En attendant, vous pouvez aller choisir une chambre d'invité, parmi les pièces de ce couloir. Celles derrière nous sont déjà prises. »

Il laissa un silence puis reprit :

« Si vous avez besoin de quelque chose, vous pouvez trouver des employés royaux qui se baladent dans l'enceinte du palais. Nous nous retrouverons à l'étage supérieur demain matin. »

Ils se séparèrent, laissant Mélia et Cirus dans le couloir.

« Alors demain ce sont les adieux ? » susurra la jeune femme sous une question rhétorique.

Il se tourna vers elle, à peine avait-il entendu.

« Il ne faut pas voir les choses ainsi, Mélia. Tu vas retrouver ta famille, ta vie d'avant.

– Je ne veux pas la retrouver. »

Il avala difficilement sa salive. Lui non plus ne voulait pas qu'elle parte, mais rester ici était trop dangereux.

« Je pourrais toujours venir te voir de temps en temps, dit-il. Tu sais aussi bien que moi, que tu ne peux pas rester à Edhira. Les alosiens ne l'accepteraient jamais, et le Prince Dicca le prendrait comme une trahison. »

Elle soupira. Ce n'était pas juste lui, qu'elle devait convaincre. Quoi qu'il allait se passer, peu importe les issus du voyage, la finalité serait la même : elle devra partir. Ce monde qu'elle avait appris à apprécier, ces gens d'origine différente, aux idées divergentes, aux capacités incroyable. Tout un univers, qu'il y a quelques jours encore elle n'aurait imaginé.

Une larme coula sur sa joue, alors que la réalité la frappa de plein fouet. Cirus la nettoya d'un mouvement de pouce, tout en caressant son visage. Pour elle, plus rien n'avait d'importance sur Terre. Comme un rêve qu'elle savait fini, elle allait bientôt rejoindre son cauchemar : une vie de solitude et de perdition, sans personne, sans nul part.

« J'attendrais ta venue sur Terre, chuchota-t-elle, alors qu'il retirait sa main de son visage.

– Et je viendrais. »

La tristesse à son apogée, ils se séparèrent, rejoignant ainsi leur nouvelle chambre. Jusqu'à la dernière seconde, elle avait espéré changer la fin de son histoire. Mais elle était incapable d'un tel pouvoir sur sa vie et de contrôler l'impact de celle-ci sur celle des autres. Elle se coucha, les yeux pleins de larmes.

Quelques heures plus tard, elle s'était réveillée en pleine nuit. Ne sachant exactement combien de temps il lui restait avant le lever du jour, elle demeura un instant dans son lit. Contemplant la chambre, s'imaginant d'une autre origine, elle laissa ses pensées voyager vers les contrées lointaines d'Edhira.

Elle imagina un grand jardin plein de bêtes extraordinaires. Au milieu des fleurs, elle se voyait assise dans sa longue robe d'été. Le vent frappait délicatement son visage et faisait voler ses cheveux, comme les feuilles des arbres alentour. Le temps clément se mariait parfaitement avec le bruit des animaux. Elle se croyait au paradis, où le temps s'était arrêté, et où les bêtes n'étaient point terrifiantes.

Fermant les yeux, elle tenta de mieux admirer cette image irréelle. Elle voulait ressentir la flore sur ses chevilles nues, le vent sur son visage et les sons naturels dans ses oreilles.

Bientôt, ce ne serait alors que l'unique moyen pour retourner sur Edhira. Sa mémoire en serait le seul voyage possible. Malheureusement celle-ci était vouée à faillir avec le temps. Mélia déglutit à cette pensée, retournant à la réalité.

Elle se leva, incapable de se rendormir et se prépara. Prael avait une météo plus fraîche et humide qu'Alos, forçant la jeune femme à s'habiller en conséquence. Elle enfila l'un de ces longs pantalons, qui s'attachait juste en dessous de sa poitrine, ainsi qu'un pull basique. Puis chaussa de longues bottes que Belorie lui avait donné.

De toute manière, elle ne pouvait se permettre de s'habiller de manière frivole, étant donné qu'elle allait bientôt retourner chez elle. Pour autant, elle ne voulait porter sa propre robe, synonyme d'un monde qu'elle souhaitait oublier.

Une fois sur Terre, comment pourrait-elle retrouver sa famille ?

Elle trembla, espérant que Cirus ne l'abandonnerait pas aussi vite, une fois de retour.

Elle laissa ses cheveux couleurs miel onduler sur ses épaules, et sortie de sa chambre. Le Prince avait dit qu'ils devaient se retrouver à l'étage supérieur. Cependant, le calme ambiant, lui affirma que la plupart dormaient encore. Elle profita de ce moment de solitude pour se promener dans le palais praelien. Sortant de l'étage dans lequel elle se trouvait, elle décida de monter le plus haut possible, curieuse d'y voir le ciel.

Chaque marche devenaient plus difficile de grimper au fur et à mesure qu'elle montait. Elle en avait presque le tournis, et le vertige lorsqu'elle regardait en bas. Parfois, elle croisait quelques employés quittant les paliers et la rejoignant dans les escaliers.

Ils s'écartaient toujours d'elle, s'ils ne la laissaient pas passer devant. Il lui fallut bien plusieurs longues minutes avant de pouvoir en atteindre le sommet. Son regard s'éblouit lorsqu'elle mit un pied au dernier étage. La grande place était dégagée et se trouvait sous un dôme transparent. Le ciel y était visible, et la lueur de l'aube faisait déjà son apparition.

De luxueux fauteuils étaient disposés de part et d'autres. À leur côté, une table contenant divers livres empilés les uns sur les autres. Prael ressemblait bien plus à la Terre qu'Alos. La simplicité de ses meubles et objets semblait pourtant datée d'une époque bien plus lointaine.

Mélia vint s'asseoir sur l'un des sièges. Elle admira un instant le ciel, puis déplaça ses yeux vers les livres à ses côtés.

Elle était incapable d'en lire les titres. L'écriture était cryptique et désordonnée. Elle se décida à en feuilleter un tout de même, mais rien ne l'aidait à comprendre le sujet abordé.

« J'étais pourtant sûr d'avoir été clair, sur le fait qu'il ne fallait toucher à rien. »

Mélia sursauta, reposant immédiatement le livre, comme une coupable prise en flagrant délit.

« Votre altesse, dit-elle. Je suis désolée, ce n'était que de la curiosité.

– Lorsque je dicte des règles, ce n'est pas pour contrarier qui que ce soit. Elles sont nécessaires et primordiales.

– Je suis sincèrement désolée. »

Elle se leva de son siège, presque aussitôt.

« Tu ne connais rien de Prael, n'est-ce pas ? demanda-t-il dans un calme plus amical.

– Je n'ai jamais eu la chance de voyager auparavant.

– C'est ce qu'avait dit Cirus, mais cela ne doit pas empêcher les gens d'apprendre et de se cultiver sur d'autres peuples. »

Elle se senti offensée. Il regarda aux alentours. Les employés royaux se ruaient à la tâche et la vie au palais s'éveillait.

« On m'a indiqué, annonça-t-il, qu'une étrangère avait quitté sa chambre pour se balader. J'ai cru bon venir voir. »

Elle osa à peine croiser son regard, préférant observer les gens aux alentours.

« Nous sommes un peuple qui se sacrifie pour les autres, dit-il. Toute notre existence est vouée à être vécue recluse. Lorsque je dis qu'il ne faut rien toucher, c'est pour vous. Nos objets, nos vêtements, tout peut-être maudit. Nous serions terriblement désolé, si l'un de vous venait à ramener une malédiction auprès de votre peuple. Comme une maladie, certaines se propagent rapidement, et son incurable. »

Elle tourna enfin ces yeux vers lui, et demanda :

« Vous êtes tous également impactés par ces malédictions ? »

Il souri, amusé par sa soudaine curiosité. C'était bien la première fois que Mélia apercevait une telle expression sur son visage, d'habitude monotone.

« Cela dépend des malédictions, répondit-il, mais nous naissons et vivons chaque jour avec, au point où nous finissons par ne plus en ressentir les effets. Jusqu'au moment où l'une d'entre elle nous décimera tous. Chaque jour qui passe, nous prions notre Dieu pour qu'aucune malédiction ne lâche l'épée de Damoclès sur nous. Malheureusement, celui-ci se fait silencieux ces derniers temps, et le peuple commence à craindre sa déchéance. »

Sa voix calme laissait entrevoir une peine profonde. Il était démuni face à son peuple, incapable de soulager une nouvelle tristesse accablante.

« Bien, conclua-t-il, rejoignons les autres. Ils doivent tous se trouver dans la salle de réception royale à présent. »

Mélia soupira. L'heure était venue pour elle de partir.


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