3

Bonjour les copains ! Je suis trop heureuse de vous retrouver aujourd'hui pour un nouveau chapitre d'éclipse. Promis l'attente sera moins longue entre les chapitres désormais, parce que j'avoue que j'ai un peu abusé haha.

Bonne lecture !


✮⋆˙.⋆✮ ✮⋆˙.⋆✮ ✮⋆˙.⋆✮

Dans les années 60, Maxwell Maltz affirmait qu'il fallait trois semaines pour s'habituer à un changement. Voilà trois semaines que je suis à Séoul, et je commence à douter de cette théorie. Certes, je me sens moins dépaysé qu'au début, mais l'ombre de ma première journée plane encore dans mon esprit. Je suis tiraillé entre l'espoir de m'intégrer et la peur de ne pas y parvenir.

Les mots tranchants de Taehyung résonnent en boucle dans ma tête, et je dois admettre que j'ai été bien plus frustré que je ne voudrais l'admettre. Je n'imaginais pas qu'il puisse être aussi abject. C'est évident, je ne pouvais pas me faire une idée précise de sa personnalité en me basant seulement sur quelques photos et les maigres anecdotes racontées par Luka, mais je ne m'attendais certainement pas à ce qu'il soit un véritable connard.

Cependant, alors que débute ma deuxième semaine ce lundi, je me sens plus déterminé que jamais. Durant les premiers jours, je n'ai cessé de l'insulter mentalement chaque fois que je croisais sa silhouette, mais en réalité, je me fiche de ce qu'il pense ou fait de sa vie. Après tout, j'ai réussi à me repérer dans l'école sans son aide.

Explorer des endroits encore inconnus reste une tâche ardue, mais pour l'instant, je me contente de mes classes, du self et du gymnase, et cela me suffit amplement. Certes, j'ai besoin de lui pour découvrir ce qui est arrivé à Luka, mais il est hors de question que je me jette à ses pieds pour obtenir des réponses. S'il choisit de se comporter comme un con, je peux l'être tout autant.

En parlant du gymnase, à ma grande surprise, j'y suis retourné plusieurs fois. Après avoir remis la feuille d'inscription à Rin et être parti précipitamment, je m'étais juré de ne plus y remettre les pieds. Pourtant, l'envie et le besoin de jouer étaient plus forts que jamais, bien qu'il fût hors de question de revenir dans un endroit où je ne me sentais pas le bienvenu.

Cependant, j'ignorais à quel point mon nouvel ami, Rin Hirano, pouvait être tenace. J'ai rencontré quelques personnes comme lui au cours de ma vie, mais je dois avouer qu'il mérite la médaille d'or.

Dès le lendemain, il est venu me voir en affirmant que son capitaine pouvait parfois être idiot, qu'il traversait une période difficile, et qu'il ne fallait pas lui en tenir rigueur. Je lui ai adressé une grimace peu assurée et j'ai poliment décliné son invitation à venir m'entraîner. Rin a répété son manège tout au long de la semaine, obtenant toujours la même réponse de ma part. Puis, vendredi, j'ai craqué.

Je ne sais pas si c'est parce qu'il a su se montrer convaincant ou parce que j'étais simplement agacé, mais j'ai finalement accepté.

Je me suis donc rendu au gymnase deux fois. La première pour observer comment l'entraînement se déroulait, et la seconde pour faire quelques passes avec lui. Même si une partie de moi était encore contrariée par ce qui s'était passé le jour de la rentrée, je dois avouer que cette séance m'a fait du bien.

Rin est un joueur exceptionnel. Il a arrêté la majorité de mes frappes, bien que celles-ci n'étaient pas particulièrement impressionnantes. J'ai un peu perdu en agilité, et mon niveau est loin d'être aussi extraordinaire qu'autrefois, mais ce n'est pas grave. J'ai pris beaucoup de plaisir à rejouer un peu et avoir un adversaire de sa qualité a été très agréable.

Les passes ont duré plus longtemps que je ne l'imaginais, et nous sommes sortis du gymnase presque à la tombée de la nuit, avec un Rin plus joyeux que jamais. Bien que j'aie tenté de rester indifférent pour ne pas lui donner raison, je n'ai pas réussi à cacher mon sourire. J'étais trop réjoui pour y parvenir.

Pomme à la main, je sors de l'appartement et me retrouve immédiatement dans les rues animées de Séoul. Il commence à faire un peu frais, mais pas suffisamment pour que je ressente un froid désagréable. Musique dans les oreilles, je savoure le fruit qui me sert de petit-déjeuner tout en observant les voitures qui défilent.

Bien que je sois nettement plus enthousiaste à l'idée de commencer cette nouvelle semaine, le réveil a été difficile ce matin. J'aurais bien aimé manger des tartines à la confiture si j'en avais eu le temps, mais je vais me contenter de cette délicieuse pomme à la peau verdâtre pour aujourd'hui. C'est de ma faute, j'ai voulu grappiller quelques minutes de sommeil, au détriment de mon petit-déjeuner.

Je jette le trognon en passant près d'une poubelle et range mes écouteurs au fond de mon sac, prenant soin d'ignorer le nœud que je crée et que je regretterai certainement ce soir.

J'inspire profondément en voyant la foule au loin, déjà rassemblée devant l'école, avec des éclats de rire qui atteignent même mes oreilles. Souris, Jay, sois aimable.

Alors que je m'apprête à atteindre l'entrée de l'établissement, dépassant de peu le parking bondé de voitures de luxe, je sursaute brutalement en entendant un grondement puissant à ma droite. Une voiture noire manque de me foncer dessus, s'arrêtant à quelques centimètres de moi. J'ai à peine le temps de lire la marque, une Jaguar XE, qu'un visage familier apparaît à la fenêtre du côté conducteur.

Ses yeux, d'un noir profond, semblent percer mon âme, créant une atmosphère palpable. Pendant presque une minute, nous restons figés dans cette confrontation silencieuse. Chaque battement de mon cœur résonne dans ce silence, et je suis pris dans une spirale de sentiments contradictoires, entre colère, surprise et une curiosité incontrôlable.

Soudain, un klaxon puissant éclate derrière la voiture, brisant brusquement cette bulle étrange qui s'est formée autour de nous. Le bruit perçant me ramène brutalement à la réalité, mettant fin à cette interaction incongrue. Je secoue la tête pour chasser l'effet de cette rencontre et sans jeter un regard en arrière, je traverse la rue en direction de la grande porte où une horde d'élèves se presse déjà.

Je n'ai pas besoin de me retourner pour sentir ses prunelles sombres encore fixées sur moi. C'est comme si ses regards invisibles traçaient des lignes sur mon dos, rendant chaque pas plus lourd. L'impression qu'il continue de me scruter, même après que j'ai franchi la porte de l'école, est intimidante et laisse une trace indélébile dans mon esprit.

C'est avec bien plus d'aisance que la semaine passée que j'accède à mon casier. Un faible sourire quitte mes lèvres quand j'arrive à ouvrir le cadenas sans difficulté, tel un professionnel. Je récupère le livre qui m'intéresse et n'oublie pas d'attraper la feuille qui voltige entre deux cahiers.

M. Lee nous a laissé la semaine pour choisir nos options et aujourd'hui est le dernier délai. En réalité, elle est prête depuis plusieurs jours, mais j'ai totalement oublié de la prendre. Alors que je ferme le compartiment, je n'ai même pas le temps de ranger mes affaires dans mon sac que Rin arrive dans mon dos et attrape ma feuille. Le sourire aux lèvres, il s'adosse contre les casiers, m'observant avec une mine amusée.

— Voyons voir ce que tu as mis d'intéressant, dit Rin en observant la feuille avec un air malicieux.

Je pourrais lui arracher le papier des mains et me précipiter directement en classe. Mais quelque chose dans son regard me dit qu'il trouverait quand même un moyen de découvrir mon choix avant même que le document n'atteigne les mains du professeur.

— Option artistique et boxe ? C'est un choix des plus... variés, remarque-t-il en scrutant la feuille avec un sourire amusé.

Il lève les yeux vers moi, visiblement diverti.

— J'adore peindre, alors autant en profiter, répliqué-je en haussant les épaules.

Il y a tellement d'options à notre disposition, alors autant en profiter. Je vais passer le reste de l'année dans cette école, et je n'ai pas envie de la passer à déprimer et à la subir. J'ai toujours été quelqu'un de sportif et créatif, et toucher à tout me fait du bien, plus que jamais ces derniers mois.

Mon regard se tourne vers le plafond lorsque la première sonnerie retentit, marquant le début de la journée. La plupart des élèves se dispersent rapidement, rejoignant leurs classes avec l'efficacité d'une fourmilière en mouvement. Toutefois, quelques courageux restent encore dans le hall, bavardant et traînant en attendant la seconde sonnerie qui les incitera à se mettre en route. Rin, quant à lui, s'active, et je le suis lentement dans le couloir.

— Et la boxe ? C'est plutôt inattendu, commente Rin avec un sourire en coin.

Il semble intrigué par ce choix qui contraste fortement avec ma première option.

— C'est au cas où quelqu'un aurait envie de recevoir un de mes poings dans la figure un jour, répliqué-je en plaisantant.

Rin arque les sourcils, laissant échapper un rire franc. Il semble amusé par ma réponse et ne manque pas l'occasion de me taquiner davantage.

— Tu as quelqu'un de précis en tête ?

Je fais la moue, mon sourire s'élargissant malgré moi. Ce n'est pas du tout mon genre de parler ainsi, mais je dois admettre que le concerné le mérite.

— Ça se peut, dis-je avec une expression mi-sérieuse, mi-amusée.

Rin bouscule brusquement mon épaule tout en secouant la tête, comme s'il trouvait ma réponse particulièrement divertissante. Évidemment, il sait de qui je parle.

— Il n'est pas si terrible, je te le promets.

— Mm. Pour ma part, tant qu'il ne me prouvera pas le contraire, je resterai sur ma position. Je n'ai pas encore vu de raison de changer d'avis.

Rin ricane. Il semble vraiment apprécier notre échange, et même si je fais de mon mieux pour rester sérieux, je ne peux m'empêcher de sourire en retour. La conversation se poursuit alors que nous continuons à marcher dans le couloir. Lorsque nous arrivons dans la classe, je récupère ma feuille et la dépose sur le bureau de M. Lee. Pour une raison que j'ignore, un faible rictus se forme sur son visage en consultant mes options. Je ne sais pas s'il s'attendait à ça, mais cela n'a pas l'air de lui déplaire, et honnêtement, ça me convient. Je n'aurais pas vraiment souhaité modifier mes choix, si par malheur il me l'avait demandé.

— Les plannings seront affichés en fin de semaine. Pense à aller les consulter avant de partir vendredi.

En guise de réponse, je me contente de lui sourire et d'acquiescer poliment, avant de rejoindre ma table. Sans surprise, il est déjà là. Il arrive toujours à l'avance, alors que je suis pourtant rentré dans l'école avant lui.

En posant mes affaires et en m'asseyant sur ma chaise, je m'efforce de ne pas lui jeter un regard. Celui qu'il m'a lancé tout à l'heure, lorsqu'il a failli me percuter avec sa voiture, me hante encore.

Une fois que la classe est complète, M. Lee prend une craie et la brandit avec une certaine théâtralité pour écrire un nom au tableau. Mes yeux s'arrondissent en découvrant la personne dont nous allons parler aujourd'hui.

Lors de notre second cours, Rin m'avait annoncé que M. Lee était quelqu'un de versatile. Il n'enseigne pas qu'une seule matière, mais touche à tout. C'est sûrement pour cela qu'il est aussi doué et apprécié. Bien qu'il reste toujours un personnage singulier à mes yeux, je dois admettre qu'il grimpe dans mon estime.

— John Ronald Reuel Tolkien. Nul besoin de vous dire de qui il s'agit. Et si certains ne savent pas qui est ce grand homme, je vous demande de vous rendre immédiatement à la bibliothèque.

Des rires résonnent dans la classe, et je ne peux retenir mon sourire. J'ai l'impression d'avoir atterri dans un autre monde. L'ambiance est clairement différente de celle du premier jour. Je ne sais pas si c'est à cause du sujet ou parce qu'après deux mois de vacances, la routine des cours commence petit à petit à s'installer, mais cette sensation est agréable.

— Bien. Le cours va être très simple, vous allez débattre. Écrivez la question si besoin, car je ne la répéterai pas.

Étant un connaisseur du sujet, je me contente d'être attentif lorsqu'il la pose. Grand fan des livres comme des films, je dois avouer que je n'ai jamais connu une lecture aussi spectaculaire que celle du Seigneur des Anneaux. Alors, si j'étais déterminé à affronter cette nouvelle semaine, ce cours ne fait qu'accroître ma bonne humeur.

— Frodon fait preuve de pitié envers Gollum, malgré ses actions passées. Pensez-vous que cette pitié soit justifiée ? Que dit cette décision sur la nature de la justice et de la rédemption ?

Quelques élèves notent la question sur une feuille, tandis que d'autres semblent déjà en pleine réflexion. Je fais partie de ces derniers.

— Nous allons procéder table par table, chacun son tour. Vous pouvez commencer.

Les premiers avis sont plutôt favorables envers le protagoniste. On souligne que la pitié de Frodon démontre son humanité et sa compassion envers un être souffrant et corrompu. En épargnant Gollum, Frodon lui offre une chance de rédemption, même si ce dernier est considéré comme irrécupérable. La deuxième rangée poursuit avec une élève qui accentue les éloges du personnage.

— Pour moi, la pitié de Frodon influence totalement la destruction de l'Anneau à la fin de l'histoire. Sans Gollum, l'Anneau n'aurait peut-être pas été détruit, étant donné que Frodon était sur le point de renoncer à le faire. Cela montre que les actes de miséricorde peuvent parfois avoir des conséquences positives imprévues.

C'est un excellent point. À la fin, lorsque Frodon se retourne vers Sam avec un regard presque corrompu, on comprend que la quête de la communauté pourrait basculer à tout moment. Et c'est en grande partie grâce à l'intervention de Gollum que l'Anneau est détruit. Le professeur acquiesce avec concentration, et le garçon à côté continue.

— La décision de Frodon reflète les valeurs des Hobbits. Ce sont des personnes gentilles, généreuses et tolérantes envers les autres, même envers ceux qui ont commis des actes condamnables. Cela illustre leur bonté, je trouve.

Nous agitons la tête en écoutant attentivement chaque réponse. Je me redresse un peu lorsque notre rangée prend la parole. Si les avis concernant le protagoniste ont été plutôt positifs jusqu'à présent, il semble que notre groupe soit déterminé à renverser la balance.

— Frodon commet une erreur de jugement en faisant confiance à Gollum, un personnage connu pour sa duplicité et sa traîtrise. Sa pitié est aveugle et naïve, ce qui met en péril sa propre vie ainsi que celle de Sam.

Les regards adverses se froncent et les yeux s'arrondissent. Ceux devant moi prennent la parole, tandis que je m'efforce de formuler mon avis dans ma tête pour rester cohérent dans mes propos.

— Frodon aurait pu adopter une approche plus prudente envers Gollum, comme le garder captif durant la quête et établir une certaine barrière entre eux.

Malgré moi, mes yeux se posent discrètement sur lui, car c'est son tour de parler. Cependant, il met presque une minute à répondre, au point où je m'apprête à intervenir à sa place. Mais je referme aussitôt ma bouche lorsqu'une voix rauque se fait entendre à ma gauche.

— Je préfère me pencher sur le cas de Gollum. Je pense qu'il n'y a aucune sympathie à avoir pour lui, compte tenu de ses actes et de la façon dont il a fini. Dès qu'il a trouvé l'Anneau, il a été directement condamné.

Je reste silencieux, ne sachant pas s'il va développer davantage, mais je décide de prendre la parole lorsque je vois qu'il ne rajoute rien de plus. Bien que je veuille simplement donner mon avis, je ne peux m'empêcher de rebondir sur ce qu'il vient de dire.

— Je ne suis pas d'accord. Certes, l'Anneau a eu un effet sur lui dès qu'il l'a trouvé, mais on ne connaît jamais le destin d'une personne avant sa fin.

Je remarque que les mains de Jungkook se contractent légèrement sur son pantalon, visiblement surpris par ma réponse directe. Mais un débat est un débat, et je ne partage pas son opinion.

— Il a été sous l'emprise de l'Anneau dès le début, répond-il d'une voix grave pour contredire mon argument.

— Cela a sans doute aussi été le cas pour Frodon, mais l'emprise se fait sur la durée, étant donné que c'est l'un des protagonistes principaux de l'histoire.

Je tourne complètement la tête vers lui, le fixant attentivement. Lui, en revanche, reste immobile, les yeux rivés sur le mur en face de lui.

— C'est différent, souffle-t-il.

— Pas vraiment, non, rétorqué-je aussitôt.

Des murmures parcourent la classe, me voyant tenir tête à Taehyung. Je ne sais pas s'il est souvent contredit, mais je ne vais pas me taire simplement parce qu'il s'appelle Kim Taehyung. Je ne partage pas son point de vue, et j'ai le droit de l'exprimer.

— Frodon n'est pas si différent de Gollum quand on y réfléchit deux minutes, même s'il n'a jamais commis de meurtre.

Il me regarde enfin, mais reste silencieux, me laissant l'opportunité de poursuivre.

— Gollum aurait peut-être eu une fin plus heureuse s'il avait été isolé moins longtemps et s'il avait eu quelqu'un comme Sam à ses côtés. Frodon n'a jamais été seul dans son aventure, ce n'est pas le cas de Gollum.

— Mais je pense qu'au fond, il n'a jamais été vraiment gentil. Si tel avait été le cas, il n'aurait jamais tué son cousin uniquement après avoir découvert l'existence de l'Anneau.

— C'est vrai. Mais nous ignorons les effets directs que l'Anneau a eus sur lui dès qu'il l'a trouvé.

La bouche de Jungkook se referme après s'être légèrement ouverte, ravalant ses idées.

— Quand il s'agit de Frodon, on éprouve de la pitié et de la tristesse pour lui. Mais quand cela concerne Gollum, on ressent seulement du dégoût et de la colère. Je trouve ça injuste. Il a dû mener une vie misérable.

Il acquiesce en silence, et, comme nous n'enchaînons pas, M. Lee donne la parole aux deux tables restantes derrière Ensuite, à ma grande surprise, il revient vers moi avec un sourire amusé.

— Quelle conclusion tires-tu donc Jungkook ?

Je racle ma gorge pour clarifier mes pensées.

— Frodon est un homme bon qui a probablement voulu voir une forme d'humanité en Gollum. Je pense également qu'il ne pouvait pas le détester complètement, non seulement à cause de son apparence, mais aussi à cause de l'Anneau. Frodon savait très bien le mal qu'il pouvait causer.

Je tripote nerveusement mes doigts, sentant les yeux de mon voisin sur moi.

— Son histoire souligne les dangers de la tentation et de la corruption. Gollum est un exemple frappant des conséquences dévastatrices de la convoitise et de l'obsession. Il illustre la lutte entre le bien et le mal présente en chaque être humain, ainsi que les implications de nos choix et de nos actions sur notre propre destinée.

Je réalise alors que j'ai parlé plus rapidement que prévu et je dois reprendre mon souffle après avoir terminé. Certains élèves hochent la tête, visiblement impressionnés, tandis que mon professeur affiche un sourire de satisfaction. Le garçon à ma gauche reste de nouveau stoïque, et la classe redevient calme, écoutant attentivement l'opinion de M. Lee.

C'est avec un sentiment de soulagement, que je trouve une place au réfectoire. À peine quelques secondes après m'être installé, des mèches noires apparaissent dans mon champ de vision. Rin pose son plateau et me sourit, comme si sa présence ici n'était pas du tout surprenante. J'ai pris l'habitude de manger seul à la cantine, et cela ne me dérange pas vraiment. Je suis ici pour manger, pas pour discuter.

— Que me vaut cette visite, Hirano ?

Ma fourchette plonge sans grande conviction dans la purée de brocoli, étalée comme de la bouillie dans mon assiette. Je n'ai rien contre, au contraire, mais je dois admettre que l'aspect visuel est assez déroutant.

— Quoi, je n'ai pas le droit de m'asseoir à ta table ?

Il lève un sourcil, et je ne suis pas surpris de le voir attaquer d'emblée son cordon bleu.

— Si. Mais quelque chose me dit que tu vas me demander quelque chose.

Il sourit, comme pour me confirmer silencieusement que j'ai raison.

— Tu me connais déjà, c'est effrayant, Jeon.

— Disons que tu es assez prévisible.

Nous échangeons un sourire complice et il grimace lorsque je fais un signe du menton vers la purée.

— Quoi, tu veux que je mange cette chose ?

— Tu es un sportif, c'est important de manger des légumes.

— Oui, mais pas ceux qui semblent tout droit sortis d'un plat congelé et dont le goût a été génétiquement modifié.

Sa réponse me fait secouer la tête et un sourire s'étire sur mes lèvres. Je ne peux pas vraiment le contredire. Malgré la réputation de l'école, je doute que la nourriture soit préparée par un chef étoilé.

Ma mère me préparait des purées de toutes sortes quand j'étais enfant. Pendant plusieurs années, je mangeais quasiment uniquement des légumes sous cette forme, et aujourd'hui, je peux affirmer reconnaître un bon plat fait maison. Celui que j'ai sous les yeux, en revanche, ne l'est absolument pas, et ça se voit rien qu'à sa texture.

— Ils n'ont pas les moyens de se payer un cuisinier ?

— Ils préfèrent sans doute investir dans les infrastructures, dit-il en haussant les épaules.

— Si ta performance est mauvaise, tu sauras vers qui te plaindre, dis-je en coupant mon cordon bleu.

— Malheureusement, ça fait deux ans que je suis au top. Ce serait hypocrite de ma part de parler maintenant.

Il a raison. Un silence apaisant s'installe quelques instants alors que nous continuons à manger. Mes yeux se portent malgré moi vers lui. Il est assis au milieu du réfectoire, entouré de membres du club de volley. La présence de Rin ici me semble alors encore plus suspecte, bien que cela ne me dérange pas. Soudain, comme si un éclair de compréhension me traversait, je saisis enfin la raison de sa présence.

— Tu veux que je vienne m'entraîner ce soir ?

Il acquiesce.

— Tu sais que je ne suis pas inscrit, hein ? Si ton coach l'apprend, il va me tuer.

— Je te défendrai au péril de ma vie, ne t'en fais pas.

Il plisse les lèvres et fait un signe de tête sérieux, comme s'il me faisait une promesse. Je secoue la tête et ne peux m'empêcher de ricaner. Si je me souviens bien, ils ont entraînement tous les jours de 18 h 15 à 19 h 15, bien que certains aiment bien traîner un peu, même après le départ du coach. Rin et Taehyung en font partie, et ça ne me surprend pas vraiment. Du peu que j'ai vu d'eux, je sais qu'ils sont fous de sport.

— Je doute que tout le monde soit d'accord.

Je prends une gorgée d'eau et racle ma purée. Je suis tout de même rassuré de voir que Rin mange la sienne.

— Taehyung ? Tant que ce n'est pas pendant l'heure de l'entraînement, n'importe qui peut venir jouer. Il ne pourrait pas te l'interdire, même s'il le voulait.

Il termine son cordon bleu qu'il n'a même pas pris la peine de couper et s'essuie la bouche.

— Tu penses ?

— Évidemment. Rejoins-moi avant 18 h. Puis, si jamais il te voit jouer en arrivant, il ne pourra rien dire. Tu es un bon joueur, Jungkook.

Un rire nerveux m'échappe.

— Je suis rouillé, tu veux dire.

Il grimace, comme si je venais de dire une bêtise.

— Eh bien, si tu es rouillé, j'ai hâte de voir ton niveau quand tu es en pleine forme ! Tu n'es pas très grand pour un attaquant, mais je dois avouer que tu es assez impressionnant.

Ma poitrine se serre face à ces mots. J'ignore s'il dit ça pour être gentil, par pure politesse ou s'il le pense vraiment, mais ça embrase quelque chose à l'intérieur de moi. J'aime tant le volley, et entendre qu'on est peut-être encore au niveau, sans avoir joué en équipe depuis longtemps est agréable à entendre.

— Tu as encore le short et le t-shirt que je t'ai passés l'autre jour ?

Nous finissons notre yaourt en même temps et débarrassons nos plateaux. Je n'ai pas besoin de me tourner pour savoir que la table des joueurs de volley nous dévisage. Face à cette constatation, mes joues s'empourprent et je remercie Rin qui me tient la porte en sortant.

— Oui, je les ai encore, mais pas avec...

— Ne mens pas, je suis certain qu'ils sont dans ton sac. Je sais que tu les prends avec toi au cas où tu aurais envie de jouer ou si jamais je te le demandais.

Rin m'a prêté une tenue la semaine dernière quand il m'a attiré de force au gymnase. Une chance que je passe la plupart de mon temps en baskets, je doute que me prêter une paire aurait été aussi simple, même s'il en possède sûrement d'autres dans les vestiaires.

Depuis, je la garde avec moi. Parce que j'aimerais lui rendre, même si je sais, au fond de moi, que la raison honnête est totalement à cause du deuxième point énoncé.

Mais je mourrais de lui avouer qu'il a raison. Si je le fais, je lui donnerai toutes les raisons de me pousser à aller davantage au gymnase. Si je le faisais, ça lui prouverait que j'en ai envie, et même si c'est le cas, je reste tout de même réticent, alors autant me taire.

— Rejoins-moi devant les vestiaires directement, à ce soir, Jeon !

Je n'ai même pas le temps de riposter que Rin balance son bras dans les airs en signe d'au revoir et court vers un garçon qui lui tape le poing.

Nous pourrions y aller directement ensemble, mais l'après-midi, nous avons nos cours communs jusqu'à 16h. Après, c'est quartier libre. Bien que la majorité des élèves rentre chez eux sans hésiter, beaucoup restent sur le campus jusqu'à au moins 17h, voire 18h, principalement pour les devoirs ou le sport.

Je déglutis, le cœur lourd, alors qu'une étincelle au fond de moi s'agite déjà à l'idée de reposer mes pieds sur le parquet une nouvelle fois.

🏐🏐🏐🏐🏐🏐🏐🏐

Le cri de mon nouvel ami résonne dans le gymnase alors qu'il lève le poing en signe de victoire. Son sourire, immense et sincère, fait battre mon cœur plus fort, tandis que ses yeux brillent d'adrénaline en se posant sur moi.

L'entraînement va bientôt commencer, et presque tous les joueurs de l'équipe sont présents. Je devrais partir, n'ayant rien à faire ici, mais mes jambes semblent réticentes à quitter le gymnase.

— Je gagne ce set, Jeon ! 3 à 2.

— Ce n'est pas un set, on se contente juste de faire des passes, rétorqué-je.

— Tu dis ça parce que tu as perdu.

Je laisse échapper un rire discret en observant mes mains rougeâtres. Pourtant, je n'éprouve aucune douleur, seulement une vague immense de bonheur et d'émotion qui serre ma poitrine.

Les garçons, visiblement excités par l'enthousiasme du moment, se joignent à nous. Deux d'entre eux se mettent avec moi, tandis qu'un autre garçon, nommé Jeremiah si je ne me trompe pas, rejoint Rin. Un seul joueur manque encore à l'appel, et je suis surpris de constater qu'il est le dernier à arriver, à l'exception du coach, bien sûr.

— Sois plus clément avec lui, Rin. C'est peut-être notre futur attaquant, annonce Nathan, l'attaquant central à ma gauche.

Bien qu'il soit extrêmement grand et quelque peu intimidant, ses taches de rousseur et ses fossettes lui confèrent un air bien plus avenant. En tout cas, il semble l'être.

— On remonte pour un dernier set, Jeon, me dit Felix en me lançant un clin d'œil.

— Bien sûr, je ne vais pas rester sur une défaite !

Les deux garçons ricanent tandis que nos adversaires poussent un cri de guerre. Bien qu'ils ne soient que deux, leur voix résonne puissamment dans tout le gymnase. Felix se place en arrière pour le service, et le bruit de sa main frappant le ballon, ainsi que la vitesse à laquelle il parcourt le terrain, me fait frissonner.

La balle est réceptionnée avec une précision impeccable par Rin, qui fait une passe à Jeremiah, parfaitement positionné et prêt à attaquer. Mes pieds font de petits sauts de droite à gauche pour rester en mouvement et me préparer à toute éventualité. Lorsque je devine de quel côté Jeremiah s'apprête à tirer, je me positionne non loin derrière Nathan, prêt à contrer l'attaque du joueur.

Toutefois, le ballon tombe légèrement à sa droite lorsqu'il la réceptionne, et je m'accroupis presque pour le rattraper. Avec un mouvement rapide, je fais une passe plutôt correcte à Félix, qui affiche un sourire ravi.

Ignorant la sueur qui coule le long de mon menton, je me redresse et me précipite à toute vitesse vers le ballon qui traverse notre zone. D'un bond, je m'élance dans les airs et frappe le ballon d'une main ferme, produisant un bruit sourd sur le parquet en face.

Mes jambes tremblent légèrement en touchant le sol, et je n'ai à peine le temps de reprendre mon souffle avant que les garçons, Rin et Jeremiah inclus, ne se jettent sur moi.

Alors qu'ils m'engloutissent de compliments et d'accolades, mes oreilles bourdonnent, et je peine à entendre ce qui se passe autour de moi, à l'exception des battements effrénés de mon cœur. Leur joie et leurs sourires me donnent soudainement envie de pleurer. J'avais oublié combien il était incroyable d'avoir une équipe, des coéquipiers à ses côtés.

Je pratique le volley depuis mon enfance. Dans la campagne où j'habitais, les possibilités étaient donc assez limitées, alors j'ai toujours joué pour le plaisir uniquement.

Malheureusement, mon club a fermé lorsque j'avais douze ans, faute de joueurs. Je me contentais alors de taper le ballon contre le mur de la maison, ce qui agaçait certains voisins. Et j'ai pu le faire avec Luka, bien qu'il ne soit pas un grand fan de sport. J'ai gardé le contact avec les garçons quelque temps, mais au fil des années, le contact s'est éteint et d'autres ont quitté le village.

Malgré tout, j'en garde un excellent souvenir. C'est grâce à ces années que j'ai appris le volley et que j'ai progressé. Aujourd'hui, retrouver cette sensation de fraternité, de passion ardente et de bonheur avec d'autres joueurs est profondément bouleversant.

— Merde ! Tu déchires, Jeon, lance Nathan en me tapotant l'épaule.

Mon corps penche en avant sous l'impact, bien qu'il ait essayé de modérer sa force. Je ne peux contenir mon rire. Rin pose une main sur sa taille avec fierté.

— Je vous avais dit qu'il était bon, dit-il en me lançant un clin d'œil.

— Pitié, dis-moi que tu comptes t'inscrire, demande Félix, dont les cheveux dorés collent à son front.

Sa chevelure est si longue qu'elle semble presque lui cacher la vue.

— Je ne sais pas encore. Mais ne vous enflammez pas, il y a encore les sélections, répliqué-je en passant une main dans mes cheveux mouillés.

— Pff, ce n'est qu'une formalité. Le coach serait idiot de ne pas te prendre, affirme Jeremiah les yeux froncés.

— C'est clair, renchérit Rin en me dévisageant.

Je suis presque exaspéré en réalisant que je viens de gagner trois Rin. Formidable. Alors que je m'apprête à répondre, un bruit vers la porte attire notre attention simultanément, faisant tourner nos têtes.

Ma respiration se bloque tandis que tout mon corps se tend en voyant deux silhouettes. Un homme à la chevelure poivre et sel, et Taehyung à ses côtés. Ce dernier lâche subitement son sac de sport noir, qui résonne lourdement sur le parquet, et on pourrait presque entendre les mouches voler.

— C'est quoi ce cirque ? demande l'homme d'une voix rauque, ses yeux noirs perçant les miens.





















Oh merde.

✮⋆˙.⋆✮ ✮⋆˙.⋆✮ ✮⋆˙.⋆✮




Je sais, j'ai arrêté au pire moment, haha, désolé.

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? La technique de Rin pour ramener Jungkook dans l'équipe semble lentement porter ses fruits. ( en meme temps le gars il force mdr )

Nous avons finalement fait la connaissance de Nathan, Félix et Jeremiah, les autres joueurs de l'équipe. Comme vous l'aurez compris, ils feront partie de la bande de Taekook et Rin.

J'ai hâte de d'écrire la suite !

À très vite, love you.🏐🌘

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top