Chapitre 5

Elena Anderson

  Le doux soleil du printemps se couchait tranquillement quand Lexie et moi arrivâmes chez elle. Nous saluâmes ses parents, les remerciant au passage de m'avoir accueillie chez eux le temps de la fin de l'année scolaire. En effet, après l'obtention de mon diplôme, je prévoyais de m'installer sur le campus de l'université où j'irais faire mes études supérieures. Je n'avais pas encore de projets ou d'idées de métiers en tête pour l'instant et j'espérais en trouver grâce au nouvel univers dans lequel je serai une fois là-bas. Ma meilleure amie et moi allâmes donc déposer mes bagages dans sa chambre que nous allions à présent partager ces prochaines semaines. Puis, nous sortîmes de la maison pour aller nous asseoir sur les marches de la terrasse et admirer le coucher de soleil.

Cette journée avait été vraiment éprouvante pour moi. Je repensai alors à ma rencontre avec le loup, Dylan et son serpent. Dit comme cela, cela ressemblait vraiment une rencontre sortie tout droit de mon imagination. Pourtant, la femme blonde m'avait annoncé qu'elle et moi avions un don commun : communiquer avec les animaux. Et le pire était que nous n'étions pas les seules. Apparemment, nous faisions parties d'une communauté et d'une « élite ». Elle m'avait dit que si je les rejoignais, je pourrais enfin vivre ma différence et être avec des gens qui me ressemblent. Il est vrai que cet argument m'avait tenté, mais la réalité m'avait vite rattrapée : tout cela était complètement fou.

Et je pense que ce qui fut le pire, c'était d'affronter le loup. Nous avions parlé – dire ça me faisait toujours bizarre étant donné que c'était impossible – et je m'étais sentie incroyablement en sécurité et aimée. C'est sûrement ce qui me mettait le plus en colère. Pourquoi est-ce que je ressentais ça ? Ces sentiments que l'on n'éprouve que quand on a une vraie famille ? Dylan disait-elle vrai ? Ce loup était-il ma famille ?

« Comment te sens-tu ? me demanda soudainement Lexie, brisant le silence paisible qui nous entourait il y a deux secondes. »

Plusieurs réponses me vinrent à l'esprit. Heureuse. Perdue. Brisée. Pourquoi ces trois sentiments complètement opposés étaient les seuls que je ressentais à ce moment même ?

J'étais heureuse d'avoir enfin pu quitter cette famille qui n'en était une que sur les papiers officiels. Ces personnes qui m'hébergeaient depuis mon enfance sans comprendre qui j'étais et ce que je ressentais. Ce père qui n'avait jamais été présent, pensant que j'avais tué ma mère. Oui, j'étais heureuse d'avoir la chance de recommencer une nouvelle vie. En effet, cette chance n'était pas donnée à tout le monde et j'espérais bien en profiter. Je voulais faire mes preuves. Réussir mes études le mieux possible et revenir leur montrer qu'ils se trompaient à mon sujet et que je n'étais pas une bonne à rien. C'était mon objectif et j'avais bien l'intention de l'atteindre.

Cependant, j'étais également perdue. Toutes ces choses qui m'étaient arrivées aujourd'hui... était-ce possible de ne pas céder à la folie ? Depuis la découverte insensée de mon soi-disant don, j'avais juste envie de me défouler sur quelque chose, de taper n'importe quoi. Je voulais extérioriser ma rage et mon incompréhension face à ce qui s'était passé. C'était inhumain de vivre ce sentiment, le fait de se dire qu'on était fou. Que la différence que l'on croyait extraordinaire et que l'on espérait être notre force n'était que le fait que l'on était cinglé.

Enfin et surtout, j'étais brisée. Dès que je m'autorisais à croire que j'avais réellement ce don et que tout ce que Dylan et le loup avaient dit était vrai... Alors oui, j'avais abandonné ma famille. Celle qui m'aurait aimée pour ce que j'étais et qui m'aurait enseigné de nouvelles choses par rapport à ce monde qui m'attirait de plus en plus chaque minute. Mais ce qui me faisait le plus mal, c'était le fait que j'avais tourné le dos à ce loup qui se déclarait être mon coéquipier. Et je ressentais ce fichu vide en moi qui me faisait me poser des milliers de questions dont une revenait constamment : avais-je fait le bon choix ?

Je tournai donc la tête vers Lexie, abandonnant mon admiration du coucher de soleil et, la regardant dans les yeux, lui dit la première chose qui me vint à l'esprit :

« Libre. »

Ses doux yeux verts d'eau parcoururent mon visage et un sourire satisfait se dessina du bout de ses lèvres roses. Elle en était heureuse. Mais était-ce une bonne chose que je sois libre ? Libre de quoi après tout ? Libre de mon ancienne vie, ça c'était sûr. Libre de ce don, de cette communauté et cette élite... ça, était-ce bien pour moi ? Peut-être que ma place était avec eux.

Lui rendant son sourire, ne voulant pas l'inquiéter, je reportai mon regard sur ce soleil qui n'était plus qu'un demi-cercle avalé par la terre. Ses rayons réconfortants n'étant plus là pour nous réchauffer, nous décidâmes de retourner dans la maison. Et nous rentrâmes juste à temps pour passer à table. C'était le premier dîner dans ma nouvelle vie.

*

*            *

L'année scolaire était presque terminée, il ne restait plus que deux jours et nous aurions notre diplôme. J'avais justement appris il y avait quelques jours que j'avais été reçue dans l'université que je souhaitais. Cinq semaines étaient passées depuis que j'avais emménagé chez Lexie. Pour mon plus grand bonheur, je m'entendais très bien avec ses parents et je me sentais de plus en plus chez moi. Au fur et à mesure, j'avais réussi à oublier cette histoire de don et de loup, ne laissant plus qu'un sentiment au fond de moi : la joie.

Les seules petites parties d'ombre étaient les fois où mon père m'avait appelé pour prendre de mes nouvelles et me parler de papiers administratifs, étant donné que j'avais dix-huit ans, que j'étais donc majeure, et que je ne dépendais plus d'eux pour vivre. C'était sa façon de me dire au revoir et de me laisser partir pour un nouveau départ sans eux.

Les deux jours qui suivirent, Lexie et moi profitâmes de nos amis et nous nous préparâmes pour recevoir nos diplômes. Une fête était organisée le soir-même de la remise des diplômes chez l'un des joueurs de football du lycée, prénommé Scott. Bien évidemment, ce dernier était considéré comme le plus beau garçon de l'école. Et je devais avouer que ce n'était pas faux. Avec ses épaules carrées et viriles, son regard brun ténébreux et ses cheveux d'or... Il en faisait tomber plus d'une. Et c'était compréhensible. Quoiqu'il en soit, Lexie et moi étions invitées et nous nous étions achetées des robes de soirée pour l'occasion. J'étais plutôt excitée d'y être, voulant profiter au maximum de ces personnes que je ne verrais plus et avec qui j'avais passé toute mon adolescence. Nous devions nous dire au revoir.

Le jour-même, Lexie et moi nous levâmes à l'aube pour ne rien oublier. Nous prîmes une longue douche chacune et nous nous aidâmes à nous préparer pour n'oublier aucun détail. Nous voulions que cette journée soit parfaite. La cérémonie était en fin d'après-midi mais nous étions prêtes dès huit heures du matin. Nous profitâmes donc de ces quelques heures d'avance pour faire nos valises. Effectivement, nous avions prévu de partir dans nos universités respectives dès le lendemain. Nous voulions faire le programme d'été, ne pouvant pas attendre la rentrée. La seule chose qui nous attristait était le fait que nous allions devoir nous quitter pour pouvoir nous épanouir dans nos études. Cependant, nous pensions toutes les deux que cette séparation était nécessaire. Et nous nous verrions toujours, de toutes manières. Après tout, nous étions les deux meilleures amies du monde, elle et moi. Et rien ne pourrait nous séparer.

L'après-midi avançait à petits pas, et l'heure tant attendue arriva enfin. Lexie et moi allâmes au lycée où nous retrouvâmes tous nos camarades. Nous étions tous aussi excités et impatients, même si cette étape signifiait que nous devions nous quitter. La cérémonie débuta par le discours de Scott, qui nous fit un speech sur ce qu'était l'amitié et l'esprit d'équipe. Et je devais avouer que tout ce qu'il disait était juste et que je n'avais pas pu détacher mon regard de lui durant ses dix minutes de parole. 

Puis, s'ensuivit le discours du proviseur et les noms commencèrent à être annoncés. J'étais l'une des premières. Quand j'entendis mon nom prononcé, Lexie me donna une petite tape dans le dos pour me donner du courage et c'est avec des papillons se baladant dans mon ventre que je me levais et avançai le long de l'allée pour rejoindre l'estrade. Le proviseur me tendit le diplôme avec un sourire fier. Je l'attrapai, les mains tremblantes et le brandit au-dessus de ma tête dans un signe de victoire. Lexie se leva, hurlant mon prénom et applaudissant. Les autres firent de même. Je descendis donc de l'estrade et attendis la fin de l'appel. Tous ces visages familiers obtenaient leur clé pour un nouveau départ et une nouvelle vie. Nous entrions dans la cour des grands. Nous devenions des adultes.

La cérémonie terminée, nous passâmes chez Lexie pour déposer nos diplômes et nous changer. Nous enfilâmes nos robes de soirée et nous maquillâmes. La robe de Lexie était sublime et lui convenait parfaitement. Verte émeraude, elle s'accordait parfaitement à sa magnifique chevelure rousse. Le bustier était orné de milliers de paillettes argentées et le reste de la robe moulante épousait chacune de ses formes, faisant ainsi ressortir son corps très musclé.

La mienne ne contenait qu'une bretelle qui partait de l'extrémité droite du bustier et passait sur mon épaule gauche. Elle m'arrivait au-dessus des genoux. Le bustier était rose pâle et il y avait de nombreux motifs de fleurs noires serrés dessus. Quelques centimètres en-dessous de ma poitrine débutait la jupe qui était faite de plumes roses.

Nous arrivâmes chez Scott vers vingt heures. Tout le monde était déjà là. Ils étaient tous vraiment bien habillés et les voir comme ça me fit un pincement au cœur. Ils allaient me manquer, ça c'était sûr.

Scott vint nous accueillir. Il était habillé d'un pantalon noir, d'un tee-shirt blanc et d'une veste noire également. C'était simple mais pourtant il était vraiment élégant. Il nous fit son sourire craquant et nous entraîna dans sa maison. Celle-ci était immense. Dans le salon, de grandes baies vitrées étaient ouvertes et je remarquai qu'elles donnaient presque directement sur la forêt. C'est alors que l'image du loup me revint en tête. Était-il là ? Voulait-il toujours de moi ? Secouant la tête, j'essayai de chasser ces questions. Ça n'avait aucune importance, dès le lendemain je devais partir pour l'université. Alors je devais rapidement oublier toute cette histoire.

La soirée se déroula tranquillement. Nous parlions, profitions de nos derniers instants ensemble. Nous évoquions tous nos projets. Puis à un moment, ayant chaud à l'intérieur, je décidai de sortir m'asseoir sur la terrasse en bois pour admirer la forêt. Je ne savais pas pourquoi, mais j'espérais entendre le hurlement d'un loup pour prouver qu'il était toujours là. Mais non, rien du tout. Je soupirai, exaspérée par moi-même. Pourquoi n'arrêtais-je pas de penser à lui ? Pourquoi fallait-il que ce fichu vide soit présent ? J'avais l'impression de regretter... Et je n'aimais pas cette sensation.

J'entendis alors des pas claquer sur la plancher de la terrasse. Je levai la tête et vit Scott tout sourire me rejoindre. Il s'assit à côté de moi et resta silencieux pendant un petit bout de temps. Sa présence me rendait plutôt nerveuse et je ne pus empêcher un frisson de me parcourir le corps. Scott le remarqua, enleva sa veste et me la mit sur les épaules.

« Merci, murmurai-je timidement. »

Pour seule réponse, il me sourit. Puis, un nouveau silence s'installa entre nous. Mais ce n'était pas un silence embarrassant, au contraire, c'était plutôt paisible. Cependant, Scott décida de parler.

« C'est bizarre de se dire que c'est notre dernière soirée tous ensemble, tu ne trouves pas ?

-C'est vrai. Tout ça va me manquer, répondis-je en lui faisant un sourire triste. »

Il posa son regard sur moi et j'eu l'impression qu'il me dévisageait, comme si c'était la première fois qu'il me voyait. Il me sourit également. Puis, il me prit soudainement la main et me fit lever.

« Qu'est-ce que tu fais ? lui demandai-je, plutôt tendue.

-Chut ! m'ordonna-t-il en faisant un sourire malicieux. »

Il m'entraîna alors vers la forêt et avant que je ne puisse protester, nous étions déjà au milieu des arbres et des buissons. J'inspirai un grand coup et l'odeur de la terre séchée et des feuilles envahit mes narines. C'était si bon de revenir ici. J'avais l'impression que le vide se comblait un petit peu, comme si j'avais besoin d'être là pour aller mieux.

« Tu ne trouves pas ça magnifique ? me demanda-t-il en me montrant le ciel étoilé un peu caché par les branches des arbres.

-Si, très, répondis-je en admirant le paysage. »

Scott n'avait toujours pas lâché ma main. Il la serrait même encore plus fort qu'avant et ce contact me fit alors frissonner. Croyant que j'avais encore froid, il m'attira contre lui et me colla contre son torse brûlant. Mon cœur se mit à battre de plus en plus vite, n'étant pas habituée à une telle proximité.

« Tu es vraiment belle, me murmura-t-il. »

Levant les yeux vers lui, je plongeai mon regard dans le sien. Je fus envoûtée. Je ne pouvais plus me détacher de lui, voulant rester dans ses bras pour toujours tellement j'y étais bien. Il leva son bras et sa main vint doucement caresser ma joue. Puis, je vis son visage s'approcher de moi. Je savais ce qui allait arriver et j'en avais envie. Se faire embrasser par le plus beau garçon du lycée était vraiment tentant.

Mais avant qu'il ne puisse poser ses lèvres contre les miennes, nous entendîmes un grognement sourd. Scott redressa la tête et regarda partout autour de lui, ses yeux ayant perdu toute son assurance. Le grognement retentit à nouveau et je me rendis alors compte qu'il m'était familier.

« Qu'est-ce que c'est ?, murmura Scott, tremblant de peur et me serrant le plus fort possible contre lui. »

Je me rendis alors compte qu'il était plus peureux qu'autre chose et c'est comme s'il comptait sur moi pour le défendre. Pathétique, me dis-je.

« Un loup. »

___________

Bonjour, bonjour ! 

Je vous vois déjà venir... Le cliché du mec le plus beau du lycée avec la fille fragile et innocente ? Et bien non ! C'était une feinte, hinhinhin

Bref, tout ça pour dire que notre cher Scott n'a pas beaucoup d'importance, même s'il est très beau, c'est bien dommage. 

Ce chapitre est un peu lent au début, mais il introduit le prochain chapitre qui sera tout sauf lent, préparez-vous ;)

J'espère en tout cas que ça vous plaît toujours et je vous dis à la semaine prochaine ! 

Bisous, Clara

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