Chapitre 1
Elena Anderson.
Je courrais. Je courrais le plus vite possible. Je fuyais cette horrible chose qui me poursuivait depuis ce qui me paraissait des heures. C'était incroyable comme le temps semblait être au ralenti alors que je voyais les arbres et les arbustes défiler autour de moi.
Des bouts de ma robe violette s'accrochaient dans les branchages et se déchiraient, laissant une trace de mon passage. Pourquoi est-ce que je courrais déjà ? Je m'arrêtai, voulant reprendre mon souffle. Mais je l'entendis. Ce grognement sourd. Puis ce hurlement de loup. Je me retournai, mon cœur battant la chamade. Il était là. Ce pourquoi je fuyais. Il hurla une nouvelle fois à la lune. Je crus alors qu'il allait me sauter dessus. Mais il n'en fit rien. Il s'assit et me regarda. Une voix résonna en écho dans mon esprit. « Ce n'est pas moi que tu dois fuir. ».
J'inspirai un grand coup en me redressant dans mon lit trempé par ma sueur. Encore ce cauchemar. Je soupirai. Depuis quelques semaines, je n'avais eu aucune nuit de répit. Je rêvais toujours de la même chose, du même loup et des mêmes paroles. C'était comme une obsession de mon cerveau. Une fois que je ne le contrôlais plus, il faisait des siennes. J'avais l'impression qu'il était complètement détraqué.
Je me levai et manquai de trébucher à cause de mes membres engourdis avant de me diriger vers ma salle de bain qui était reliée à ma chambre. Je fis couler de l'eau dans mon lavabo et, mouillant mes mains, j'essayai de me rafraîchir le visage pour enlever toute cette sueur et le souvenir de ce rêve. Je m'essuyai et retournai dans ma chambre. Avant d'atteindre ma fenêtre, je m'arrêtai devant mon miroir.
Mon regard brun fatigué se promena sur mon corps plus ou moins formé. Ma chemise de nuit froissée tombait sur mes hanches proéminentes. Mes longs cheveux caramel étaient détachés et légèrement mouillés mais surtout ébouriffés par ma nuit agitée. Mes lèvres rosées s'entrouvrirent pour laisser s'échapper un long soupir. Je détournai le regard et allai ouvrir mes rideaux.
Le soleil s'infiltra alors doucement dans ma chambre et réchauffa ma peau blanchâtre. Pour une fois depuis longtemps dans la campagne anglaise, il faisait beau et chaud contrairement à ces derniers temps où nous n'avions vu que des averses plus ou moins violentes. Était-ce bon signe ? Je jetai un coup d'œil dehors et vis que mon père et ma belle-mère commençaient à installer des tables et des chaises dans notre grand jardin. J'avais failli oublier qu'aujourd'hui, nous devions fêter leur quinzième anniversaire de mariage.
Ma mère, elle, était morte il y a dix-huit ans. À chaque fois que je repensais à elle, la douleur envahissait mon coeur. Elle était morte en me mettant au monde et depuis ma naissance, mon père ne cessait de m'en vouloir. Même si ce n'était pas ma faute, pour lui, j'avais tué la femme qu'il aimait. Alors, il avait trouvé quelqu'un d'autre deux ans après et avait reformé une famille, avec une autre fille de seize ans.
Ma belle-mère, quant à elle, ne faisait pas vraiment attention à moi. À part nous ignorer mutuellement, nous n'avions aucun intérêt commun. Nous ne nous parlions jamais, sauf quand il fallait me réprimander pour des choses que ma demi-sœur faisait. Cette dernière adorait m'attirer des ennuis. Et quoi que je fasse, mon père et ma belle-mère trouvaient toujours quelque chose à me reprocher. C'était pourquoi je ne leur avais pas montré mon bulletin de ce dernier trimestre. Mes notes étant catastrophiques, je ne voulais pas décevoir mon père et encore moins me faire réprimander. Surtout que dans notre famille, la réussite scolaire était une chose fondamentale. Non, décidément, je ne pouvais pas leur montrer cet échec.
Après m'être préparée et habillée, j'allai rejoindre mes parents pour les aider à préparer le repas de ce midi. Toute la famille et les amis étaient invités. Il ne fallait donc surtout pas que quelque chose aille de travers, sinon la réception serait ratée. Mes parents avaient terriblement peur de ce que pensaient les autres personnes d'eux. Ils voulaient que tout le monde voie que leurs deux filles, moi et ma demi-sœur Emily, étaient les plus intelligentes et sérieuses qui soient. Malheureusement, ce n'était plus le cas pour moi.
Sur les coups de onze heures, ma belle-mère m'ordonna d'aller me changer et d'aller enfiler la robe qu'elle avait achetée à mon insu. Je retournai donc dans ma chambre, qui se trouvait à l'étage de notre somptueuse maison de campagne.
Cependant, ce qui me frappa en entrant dans ma chambre ne fut pas la robe qui ne devait sans doute pas être à mon goût, mais ma petite demi-sœur qui épluchait mon bulletin scolaire, jusqu'à présent caché dans un des tiroirs de ma chambre, un sourire victorieux collé au visage. Elle avait fouillé dans tous les recoins. Mes vêtements étaient dépliés et éparpillés au sol, mes cahiers avaient été retournés et feuilletés, mes livres auxquels je tenais tant avaient été jetés par terre et enfin, mes draps étaient défaits et mon matelas presque sorti de mon lit.
Cette scène de pagaille me fit enrager et je sus que la conversation qui allait suivre n'allait rien arranger. Il était vrai qu'elle et moi, nous ne nous étions jamais vraiment bien entendues, et ce depuis qu'elle s'était rendue compte que mon père me tenait responsable de la mort de ma mère. Elle avait toujours voulu être plus forte que moi, voulant montrer à nos parents que j'étais une moins que rien.
« Qu'est-ce que tu fais ici ? me contentai-je de demander, essayant de garder mon calme.
-Ça me paraît évident, répondit Emily d'un air désinvolte. »
Je m'avançai vers elle et lui prit la feuille de mon bulletin des mains. Elle fit un petit sourire sournois et leva les mains en l'air en guise d'innocence.
« Ça va pas trop à l'école en ce moment on dirait. »
Son sourire m'énervait au plus haut point. Elle connaissait mes points faibles et savait me manipuler. Mais, même si elle continuait à m'étonner avec les crasses qu'elle me faisait, je connaissais ses faiblesses également.
« Tu sais, pour une fille qui n'en a rien à faire de moi, je trouve que tu te mêles beaucoup de mes affaires quand même. Tu ne me détestes peut-être pas tant que ça ? »
Je lui fis un sourire espiègle tandis que les traits de son visage se crispaient. Je savais qu'Emily avait besoin de savoir qu'elle existait. Malheureusement pour elle, sa propre mère n'était pas très aimante. Elle venait donc chercher du réconfort auprès de moi, si l'on voulait dire. Elle était juste maladroite et extrêmement énervante. Même si je connaissais les raisons de son mauvais comportement avec moi, je ne pouvais pas m'empêcher de lui en vouloir. Pourquoi ressentait-elle toujours le besoin de me rabaisser auprès des parents ? Cela faisait des années qu'elle utilisait cette tactique et rien n'avait changé, alors pourquoi continuer ?
« Ils le sauront tôt ou tard, mais avec eux, tu sais que tôt est mieux que tard. »
Elle me reprit le bulletin des mains et s'apprêtait à sortir quand je l'interrompis, tentant le tout pour le tout. Je savais qu'elle avait raison, mais je préférais leur annoncer la mauvaise nouvelle moi-même.
« Emily... s'il te plaît, ne dis rien aux parents... ça gâcherait leur anniversaire de mariage, tu ne ferais pas ça quand même ? »
Elle me regarda d'un air dédaigneux, analysant mes paroles. Du haut de son mètre soixante-dix, elle me donnait l'impression d'être la petite sœur, mesurant cinq centimètres de moins qu'elle, alors qu'elle avait deux ans de moins que moi. Elle était resplendissante avec ses yeux bleus pétillants, son teint bronzé et ses cheveux blond platine qui retombaient de chaque côté de son magnifique visage. En plus de cela, je savais qu'Emily était intelligente et maligne. Mais son besoin d'attention l'emportait trop souvent sur la raison.
« Dis-toi que je te rends service ! lança-t-elle en ouvrant ma porte.
-Tu es totalement égoïste et immature, Emily.
-Si tu crois que m'insulter est le meilleur moyen pour toi de m'empêcher d'aller montrer ça aux parents, tu te fourres le doigt dans l'œil, rétorqua-t-elle en me lançant un dernier sourire sarcastique. »
Baissant les bras, je la laissai sortir de ma chambre. D'un côté, elle avait raison. Ils l'auraient su tôt ou tard. Je me rendis alors compte que l'heure avait tourné et que j'allais être en retard pour l'accueil des invités. J'enfilai donc ma robe en vitesse, qui au passage n'était pas celle dont j'avais rêvé. Elle ressemblait à une grosse meringue violette avec des bouts de tulle violet foncé qui étaient parsemés un peu partout pour représenter ce qui devait être des fleurs. Hideux. Je relevai rapidement mes cheveux caramel en un chignon sur le haut de mon crâne et je descendis les escaliers quatre à quatre pour essayer de ne pas aggraver mon cas.
Mais une fois arrivée dans notre grand jardin, je me rendis compte que c'était trop tard. En effet, tous les amis de mes parents et les membres de ma famille étaient arrivés pendant mon face à face avec ma sœur. D'ailleurs, je n'arrivais pas à localiser cette dernière dans la foule de gens tous très bien habillés pour l'occasion. Je commençai à dire bonjour à toutes les personnes que je connaissais, espérant pour que mes parents n'aient pas vu mon retard. Mon père fit alors signe à tout le monde de s'asseoir autour de la table. Malheureusement, ma sœur réussit à se placer juste à côté d'eux alors que j'étais assise à l'autre bout. Je pouvais voir d'ici le morceau de papier dans la main droite d'Emily. Je savais que c'en était fini de moi. J'aurais au moins voulu être à côté d'eux pour avoir une chance de m'expliquer.
Mon père se leva. Habillé de son fabuleux costume noir agrémenté d'un nœud papillon blanc, il paraissait vingt ans plus jeune. Comme si c'était le jour de son mariage. Ma belle-mère, assise à côté de lui, le regarda avec un sourire admiratif. Elle portait une simple robe blanche qui rappelait une robe de mariée. Ils étaient tous les deux magnifiques et étaient le modèle parfait du couple marié et heureux avec leurs enfants parfaits, même si ce n'était qu'une façade, du moins pour moi. Au premier pas de travers, je savais que je passerai un mauvais quart d'heure. Pour eux, je me devais d'être une fille exemplaire, ayant causé assez de problèmes comme ça.
Nous étions une famille très riche et puissante et si l'une de nous dérapait, y compris Emily, aussi bien sur le plan moral que sur le plan scolaire, cela ruinerait toute la réputation de notre famille si bien vue. Cette idée m'avait toujours parue complètement idiote et malheureusement je n'y pouvais rien. Nous étions obligées de paraître différentes de ce que nous étions réellement. Mais ma demi-sœur semblait s'y plaire. En montrant ce bulletin à mes parents, elle voulait me rayer du paysage, pour avoir toute la place dont elle avait besoin pour régner sur son petit royaume tyrannique.
Mon père tapota son verre à l'aide d'une cuiller. Il voulait faire un discours. Toutes les têtes autour de la table se tournèrent vers lui et affichèrent un sourire, plus ou moins faux. Ma demi-sœur, quant à elle, attendait impatiemment le moment glorieux.
« Je voudrais tout d'abord vous remercier de vous être déplacés pour célébrer les seize merveilleuses années de mariage que nous venons de passer, ma femme et moi-même. Mais j'aimerais surtout remercier mes deux chères filles qui sont entrées dans nos vies il y a dix-huit et seize ans, déclara mon père tandis que je m'enfonçais dans ma chaise au fur et à mesure de ses paroles. Elles ont toujours été les plus responsables. Elles sont un modèle pour n'importe qui d'autre et c'est pour cela que j'aimerais porter un toast à leur réussite. À Elena et Emily, scanda-t-il en levant son verre. »
Immédiatement, toutes les personnes autour de la table l'imitèrent, ainsi que ma demi-sœur qui me fit un clin d'œil. Mon père aimait enjoliver les choses et faire croire à tout le monde que j'étais égale à Emily. Tout le monde était dupe, à mon plus grand regret. Je ne pouvais rien faire mis à part attendre que la catastrophe se produise. Je vis alors Emily dire un mot dans l'oreille de mes parents et leur passer la feuille tant redoutée. Je retins mon souffle, m'attendant à voir leurs visages bouillir de rage. Mais, à mon plus grand étonnement, je ne vis que de la déception dans leurs yeux. Ce qui me fit encore plus mal. Les savoir déçus de moi était la pire chose qui pouvait arriver. J'aurais préféré qu'ils fassent un scandale, qu'ils me déshéritent, qu'ils m'interdisent de sortie ou même qu'ils me confisquent mes livres, mais qu'ils soient déçus était mon pire cauchemar. Habituellement, ils se contentaient de me gronder et ensuite, c'était terminé. Mais cette fois, c'était différent et je vis au regard triomphant d'Emily qu'elle avait gagné.
Voyant que je les regardais, ils me firent un signe de la tête pour me dire de venir leur parler dans la maison, en compagnie d'Emily, à l'écart des invités pour éviter les problèmes. Je me levai, m'excusant auprès de mes voisins et les rejoignis, tête baissée, dans la cuisine. Ils s'assirent silencieusement sur les sièges de bar qui étaient disposés devant le plan de travail. Je me mis en face d'eux, gardant toujours la tête baissée, de peur d'affronter leurs regards. Ils soupirèrent.
« Comment as-tu pu ? me demanda mon père dans un murmure. Sa voix semblait cassée et chevrotante. Tu nous as menti et caché ce bulletin. Tu nous déçois énormément, Elena. Nous pensions que nous pouvions compter sur toi, mais il faut croire que nous nous sommes trompés.
-Mais..., tentai-je de me justifier.
-Non, m'interrompit ma belle-mère. Nous allons réfléchir à ta punition pendant la journée, mais pour l'instant, remonte dans ta chambre. Nous dirons à nos invités que tu te sentais mal. »
Je voulu rajouter quelque chose, mais mon père me coupa la parole pour s'adresser à ma demi-soeur.
« Quant à toi, arrête de te mêler des choses qui ne te regardent pas. Je pense qu'Elena est assez grande maintenant pour nous dire ce genre de choses. »
Même si je venais de me faire gronder, je ne pus m'empêcher de ressentir un petit sentiment de victoire. Emily aussi n'avait pas fait ce qu'il fallait et le fait que mon père le remarque me rassurait. Alors que ma demi-soeur murmurait quelques excuses, je tournai les talons et sorti de cette pièce pleine de tension.
Je montai dans ma chambre et m'écroulai sur mon lit, déçue par la tournure de cette journée. Je songeai alors à appeler ma meilleure amie, Lexie. Elle était là pour moi depuis toujours, et parfois, juste le fait d'être avec elle m'apaisait. Décidée à me remonter le moral, je l'appelai. Les sonneries se succédèrent et je tombai sur la messagerie. Je raccrochai, décidant de ne pas laisser de message. Alors, je rabattis ma couverture sur moi et m'enfouis dessous, me disant que je serais à l'abri de tout.
J'entendis des bruits de pas. Le loup devant moi se mit alors à grogner. Apeurée, je me plaquai contre un arbre et retins mon souffle. Je vis alors apparaître une jeune femme blonde. Un serpent s'enroulait autour de son cou. Je voulus lui crier de faire attention, qu'il allait l'étouffer, mais aucun son ne sortit de ma gorge. Je ne pouvais pas parler. C'était comme si ma voix m'avait été enlevée. J'essayai alors de faire des gestes pour lui indiquer le danger. Le serpent tourna soudainement sa tête vers moi et ses yeux jaunes me fixèrent en faisant siffler sa langue.
Je sursautai. J'étais toujours dans mon lit. J'avais dû m'assoupir et j'avais à nouveau rêvé. Sauf que cette fois-ci, c'était différent. C'était comme si c'était la suite du cauchemar que je faisais depuis des semaines. C'était complètement dingue. Si ce rêve avait duré un peu plus longtemps, est-ce que ce serpent m'aurait sauté dessus ? Je ne voulais pas y penser. Fatiguée et énervée par cette journée et ce rêve, je poussai un grognement de mécontentement. J'en avais assez de cette vie que je menais. Je n'étais pas heureuse, loin de là. J'avais l'impression que tous les jours étaient une nouvelle épreuve qui n'attendait qu'un faux pas de ma part.
À vrai dire, je voulais juste m'en aller d'ici. Abandonner cette vie qui ne me correspondait pas. Après tout, ce n'était pas moi. Je n'étais pas ce genre de fille qui faisait attention à ce que pensaient les autres personnes. Qu'est-ce que j'en avais à faire moi de l'avis des gens ? Quelle importance si je me teignais les cheveux en bleu ou en vert, du moment que ça me plaisait ? Je me levai et sur un coup de tête, je descendis et sortis par la porte de derrière pour aller m'enfoncer dans la petite forêt qui bordait notre maison.
______________________
Bonjour :)
Ce premier chapitre est une version réécrite, il y aura donc peut-être quelques petites incohérences par la suite (par rapport au caractère et au comportement d'Emily).
Ce premier chapitre est peut être un peu ennuyant mais c'est pour tout mettre en place, j'espère que ça vous donne quand même envie de découvrir la suite !
Est-ce que cette longueur de chapitre vous convient ? Vous préférez que ça soit plus court ou plus long ?
Encore une fois, cette histoire n'est pas une histoire de loups-garous. Il y a des loups dedans mais ce n'est pas pareil, le prochain chapitre devrait vous éclairer un peu plus sur tout ça :).
Je voulais aussi préciser que je suis consciente qu'il y a beaucoup de ressemblances avec Cendrillon ou Harry Potter, mais j'ai envie de vous dire... c'est normal ! Inconsciemment, je m'inspire d'histoires qui m'ont marquées et qui m'ont plues. Ça ne veut pas dire que mon histoire sera une réécriture ou une revisite de Cendrillon ou d'HP, tout ce qui est ici sort de ma tête. Merci de votre compréhension.
Merci à vous d'avoir lu jusque là et j'espère vous retrouver pour les prochains chapitres !
Bisous, Clara ♥
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top