Chapitre Kyle
TW : femmes séquestrées, allusion à abus sexuel, descriptions pouvant être explicites.
« C'est si facile de retomber dans ses travers. »
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— Putain, quelle horreur, siffla Acacia en maintenant son arme entre ses mains.
Des femmes dans un sale état se trouvaient dans des cellules, les cheveux gras, portant des sous-vêtements crasseux, alors que leur peau était couverte d'hématomes, de sang séché, mais également de crasse. Leurs yeux affolés étaient hantés, miroir de l'horreur qu'elles avaient pu vivre, ici. Du vomi couvrait parfois le sol, se joignant à des excréments. L'odeur qui régnait retournait l'estomac aux personnes présentes.
Déshumanisées, elles se voyaient séquestrées, et je savais qu'elles avaient vécu les pires des atrocités. Et ça me rendait malade.
Ignorant mes membres crispés, je m'agenouillai devant l'une des cellules pour chercher le regard de la jeune fille qui y était enfermée. Elle ne devait même pas avoir la majorité. En me voyant, elle se tassa, et son corps se mit à trembler en m'observant avec effroi. Je devais faire peur, avec le sang qui me recouvrait, après avoir fait face à l'adversité. Mais qu'elle me toise comme si je ne valais pas mieux que ses geôliers... Ça me touchait plus que je ne voulais me l'avouer.
Je continuai mon inspection sans prêter davantage d'attention à son regard jaugeur. Ses côtes saillantes montraient la maigreur alarmante dont elle était victime.
En silence, je m'attardai sur ses joues rondes, ainsi que ses traits juvéniles, et mon sang s'enflamma de rage. Elle était si jeune. Son innocente volait me foutait en rogne.
— Depuis quand sont-elles ici ? siffla Zack à l'attention d'un homme menotté qu'on avait réussi à appréhender sans trop le blesser.
Du moins, pas mortellement. Je mourrais d'envie de lui exploser la cervelle, mais il nous serait bien plus utile vivant, si on voulait obtenir des réponses.
Des indices, au moins.
— Allez... Allez... Vous faire... foutre, pesta-t-il faiblement.
J'aperçus Zack se tendre, et avant que l'homme ne réagisse, mon coéquipier lui lança un coup dans la mâchoire qui retomba sous sa puissance, avant qu'Acacia ne le relève en le fusillant des yeux, furieuse.
— Zack, ne l'amoche pas trop, on a encore besoin de lui..., lui dit-elle avant de poser son attention sur moi.
J'étais assailli de questions. Ce matin, j'avais reçu des messages m'indiquant qu'on pourrait trouver des indices concernant ce mystérieux gang. Si je m'étais d'abord attendu à un piège, j'avais fini par en parler à mes coéquipiers, qui avait décidé de m'accompagner. Ils s'étaient donc tapis dans l'ombre en attendant que j'entre dans la prison afin de chercher mon interlocuteur.
Et quand j'avais aperçu Melina, la surprise m'avait empêché de prévenir mes collègues. Le coup de feu avait été salvateur, dans un sens. Sans ça, mes coéquipiers ne se seraient jamais déployés.
Ce type qui m'avait envoyé des messages... Gab, me semblait-il. Il ne m'avait pas menti en disant que des femmes étaient séquestrées dans ce sous-sol. Et je savais qu'elles n'étaient pas les seules à vivre un tel enfer à cause de ce foutu gang, mais où pouvaient être les autres ?
Victor nous rejoignit, l'œil gonflé après s'être pris un coup lors de la mêlée face à certains guets surveillant le sous-sol. Ancien militaire, il était dans la brigade antigang depuis maintenant une dizaine d'années.
— Les secours sont arrivés, nous prévint-il.
Émilie, médecin, mais aussi amie de longue date, pénétra dans la pièce. Ses yeux se voilèrent de chagrin avant qu'elle ne s'approche de l'une des cellules où une femme recula, le regard vide.
Je me détournai pour souffler à la jeune fille :
— On va vous sortir d'ici. C'est terminé, d'accord ?
Elle ne répondit rien, trop effrayée pour cela. Mon attention se posa sur ses cuisses nues, couvertes de sang, mutilées par la torture. Je sentis ma colère s'amplifier. Je savais que ce n'était là qu'un aperçu de ce qu'elle avait subi.
Je ne le savais que trop bien.
Bientôt, d'autres coéquipiers vinrent nous aider à sortir les femmes apeurées de leur prison, tout en cherchant à les apaiser. Certaines se débattirent, quitte à attaquer, quand d'autres suivirent le mouvement en silence, les épaules voûtées et le regard fuyant. Torturées, affamées, et abusées, elles étaient complètement vidées, dominées par la peur, mais également par leurs geôliers qui, je le savais, cherchaient à les rendre dociles.
Oh oui, j'en avais vu, des horreurs, que ça soit quelques années avant, ou au sein de cette brigade. Les hommes menant de tels trafics cherchaient à revendre ces femmes après leur avoir infligés la pire des choses, après les avoir humiliées, dans l'espoir qu'elles ne deviennent que des objets.
C'était barbare, et pourtant si commun.
Ces hommes méritaient le pire des sorts. L'envie d'en finir avec ceux qu'on avait appréhendé me bouffait. Je mourrais d'envie de les malmener tout autant qu'ils l'avaient faits avec ces femmes. Cette soif de sang me démangeait.
Quand les femmes furent emmenées, je continuai de chercher des indices dans cette prison, le sang martelant violemment contre mes tempes. Zack, à mes côtés, scrutait les alentours. Je passai devant la cellule dans laquelle j'avais demandé à Melina de se planquer, et en la voyant entrouverte, mon sang se glaça, et pendant un instant, une légère angoisse se diffusa dans mes veines.
Méfiant, je lançai un coup d'œil à l'intérieur avant de me détendre en constatant qu'elle était vide.
Elle avait réussi à s'échapper. Il aurait été inconcevable que des ordures lui mettent la main dessus. Je n'avais aucune envie qu'elle souffre davantage. Son cœur saignait assez comme ça.
Si seulement je pouvais contribuer à atténuer son fardeau.
Mais je n'avais aucun pouvoir sur son passé. En revanche peut-être pourrais-je l'aider quant à son avenir ? Lui permettre de repousser ses démons ? L'aider à affronter ses peurs ?
Malgré si c'était moi qui les avait incarnés, ce soir-là.
Cette pensée me fit serrer la mâchoire. J'étais incapable d'oublier mon acte. Putain, j'avais été si con, et elle avait réussi à me laisser une chance. Melina était étonnante. Malgré ses traumatismes qui pesaient sur ses épaules, elle parvenait à avancer.
Si je lui avais arraché des larmes, elle continuait de me sourire.
Un sourire qui m'ensorcelait bien plus que je ne voulais l'admettre.
— T'arrêtes pas de faire les mêmes gestes, me fit remarquer Zack, me sortant de mes pensées troublantes avant de chuchoter. Rassure-moi... T'as pas rechuté ?
D'un clignement de paupières, je repoussai l'image obsédante de Melina hantant mon esprit. Si elle m'attirait de plus en plus, je n'avais aucune envie de céder, ni de m'incliner. Elle demeurait mon adversaire de jeu. La Reine de cette partie captivante. Mais le Roi ne se soumettrait pas.
Jamais.
C'était une preuve de faiblesse.
— Non, sifflai-je enfin.
Non, je n'avais pas retouché à ces merdes. Je n'en étais pas dépendant au point d'en ressentir un manque. Zack savait que, autrefois, j'avais consommé plus d'une fois de la drogue, histoire d'oublier, le temps d'un soir. Et il avait été présent, lorsque j'en avais repris, il avait essayé de m'en empêcher.
En vain.
Je savais qu'il avait eu peur que j'en devienne accroc, mais il était aussi rassuré de voir que, depuis un moment, je n'en avais plus touché. Il s'était montré méfiant, en me répétant que je risquais de rechuter, même si je lui affirmais ne pas en être assez dépendant. Et c'était vrai. Ce n'était pas une addiction. C'était occasionnel, même si, pour lui, c'était déjà risqué. Plus encore en vue de notre métier.
Zack n'avait rien dit quant à mon faux pas. Il avait hésité à en parler à nos supérieurs, mais il n'avait rien dit. Par loyauté, mais surtout, par amitié.
Quand j'avais rechuté, ce soir-là, Zack avait souhaité rester près de moi pour me surveiller, comme on le ferait avec un gamin, mais il avait été appelé et contraint de partir. Il culpabilisait, comme s'il était fautif de MON erreur. Raison de plus pour ne plus replonger dans cette merde. J'avais fait assez d'erreurs.
— Je sais, t'es pas accroc, murmura Zack, mais je m'inquiète, c'est tout. C'est si facile de retomber dans ses travers.
Mes lèvres se soulevèrent en un rictus.
— Je suis capable de résister. C'était juste... Passager.
Zack sembla hésiter à m'interroger. Il m'observa longuement avant de hausser un sourcil.
Il savait que je n'aimais pas m'attarder. Je n'aimais pas étaler ma vie, qu'on soit amis ou non.
— Par rapport à quoi ? osa-t-il pourtant.
Je me braquai, et avant qu'on ne puisse poursuivre, une voix nous interrompit :
— Les garçons, vous trouvez quelque chose ?
Astrid, une trentenaire nous rejoignit, également armée. On secoua la tête avant qu'elle ne nous annonce :
— Émilie va prendre en charge ces femmes. Elle nous tiendra au courant quant à leur état.
— L'une d'entre elle avait perdu beaucoup de sang, lui apprit Zack d'une voix blanche. Est-ce qu'il n'est pas trop tard ?
Elle haussa les épaules avant de se pincer tristement les lèvres.
— Je ne sais pas... Elles étaient toutes complètement affaiblies. Certaines à moitié mortes. J'espère qu'elles seront sauvées à temps.
Mais même si elles étaient prises en charge, il serait impossible de sauver ces femmes entièrement. Pas après ce qu'elles avaient subi. Leur cœur devait être complètement tailladé, leur âme souillée, et leur être piétiné. Il leur serait difficile de se relever. Après s'être pris d'innombrables coups, l'envie d'abandonner nous bouffait à tel point qu'il était compliqué de reprendre les armes.
Mais je voulais croire qu'elles continueraient de se battre, encore et encore. Je voulais espérer pour elles.
— On n'a plus rien à faire ici, nous dit Astrid. Sortons.
Bientôt, on se retrouva dehors. J'écoutai les indications de l'un de mes supérieurs en gardant le regard égaré dans le vide, retenant une grimace quand mes membres manifestèrent leur douleur. Mes adversaires ne m'avaient pas loupé. En repensant à l'un d'eux, qui avait tenté d'emmener l'une des femmes avec lui, mon sang s'enflamma encore, et je manquai de sourire en me remémorant de ses yeux affolés, lorsqu'il avait compris qu'il n'y échapperait pas.
Revisualiser son corps ensanglanté, après que je l'ai passé à tabac, et à son dernier souffle après qu'une balle ait traversé son crâne m'apportait une énorme satisfaction. Une chaleur malsaine. Mais je m'en foutais. Ce connard avait peut-être emmené avec lui des informations dans sa tombe, mais j'avais pu venger un minimum ces femmes.
Même si ça ne suffisait pas.
Je savais aussi que mon geste m'apporterait quelques problèmes auprès de mes supérieurs. Mais ça aussi, je n'en avais rien à faire.
Ils pouvaient bien dire ce qu'ils voulaient, du moment qu'il était crevé.
Et puis, j'étais trop furieux pour y penser. Trop chamboulé par les démons de mon passé. Comme quoi, leur tourner le dos ne m'avait pas permis de m'échapper. Je n'étais pas libéré de leur emprise.
Je me haïssais pour cela.
Parce que je savais également que je ne le serais jamais.
Helloo 😘
Voilà un chapitre permettant un peu de voir ce qu'il s'est passé, du côté de Kyle, lors de la découverte du sous-sol.
Lâchez-vos coms !
Gros bisous ! ❤️
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