La Chute de la Tour
Bonjour amis lecteurs,
Je sais qu'il y a eu beaucoup d'attente et je m'en excuse. L'été est riche en projets pour moi ^^
Promis, je vais essayer de me motiver pour accélérer le rythme de publication ;)
En attendant, bonne lecture !
Nat'
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C'est étrange, la facilité avec laquelle je retrouve le chemin de la tour d'astronomie. La saison n'est pas la même, mais je pourrais me croire revenue plus d'un an en arrière. Lorsque j'étais encore en septième année à Poudlard, qu'Harry s'était séparé de moi pour s'éprendre de cette gourde de Ginny Weasley, et que j'envisageais de me jeter dans le vide, du haut de cette fameuse tour...
Les choses n'ont pas tellement changé aujourd'hui. Si ce n'est qu'Harry est mort.
Avec un soupir, je gravis les dernières marches et contemple le paysage magnifique en contrebas. Je n'avais jamais vraiment prêté attention à la vue jusqu'à présent. Mais je suppose que lorsque l'on s'apprête à quitter quelque chose pour la dernière fois, on veut en accrocher chaque détail... A quoi cela me servira-t-il ? Je ne veux rien emporter de cette vie avec moi. A part Harry...
Des larmes familières perlent à mes yeux. Pleurer, c'est donc tout ce à quoi je suis bonne. Pleurer Cédric, pleurer Harry. Pleurer un homme qui ne m'aimait plus, et ne m'aurait sans doute jamais aimée davantage s'il était resté en vie. Pleurer sur tous ces futurs possibles qui ont disparu, et qui ne pourront jamais renaître. Il n'y aura pas de futur pour Cho Chang.
Laissant libre cours à mes larmes, j'enjambe le petit muret de la tour d'astronomie et laisse mes jambes pendre dans le vide. Il y a quelque chose d'hypnotisant dans cet abyme qui m'aspire. Quelque chose de terrifiant, également. Je n'ose pas imaginer dans quel état je serai si jamais je saute en bas du château, là, sur ces rochers épars qui flanquent les contreforts des murailles. Moi qui ai toujours eu la réputation d'être une beauté à Poudlard, quelle triste conclusion... Mais je ne vois pas de meilleur moyen de mettre fin à mes jours. Le poison est douloureux, et inaccessible depuis que les Mangemorts ont la mainmise sur le château. J'ai déjà trop souffert dans mon âme pour supporter de souffrir à nouveau dans ma chair. Hors de question de m'ouvrir les veines, de me pendre. Que reste-t-il alors ? Provoquer l'un de ces imbéciles de Mangemorts pour qu'il me tue ? Voldemort lui-même ? Non, certainement pas. Ils me gardent ici parce que j'étais une proche de l'Elue, ce qui fait de moi un otage précieux. Ils ne me tueront pas. Et même s'ils le faisaient, je ne veux pas mourir aux mains d'un monstre ennemi. J'aurais dû mourir de ta main, Harry. Entourée de tes bras, de ton amour, un dernier baiser sur mes lèvres et un regard aimant pour me contempler...
En un sens, je crois que tu m'as tuée il y a longtemps. Tu m'as tuée ce jour où tu as rompu avec moi à cause de mon amitié envers Marietta. Tu m'as tuée lorsque tu as commencé à regarder cette pute de Ginny Weasley, et lorsque tu es sorti avec elle. T'imaginer avec elle, dans ces instants-là, était la pire des tortures... Le cri qu'elle a poussé lorsqu'elle a reconnu ton corps...
Ce cri, j'ai poussé le même, Harry. Mais dans mon cœur. J'ai toujours eu du mal à exprimer mes émotions. Contrairement à ce que la plupart des gens pensent, je ne suis pas de ces princesses divas qui éclatent en sanglots au beau milieu du champ de bataille. Non, je t'ai pleuré, dans le secret de mon âme, et je me suis perdue un peu plus chaque seconde depuis que tu es parti.
C'est pourquoi je me retrouve à nouveau en haut de cette tour aujourd'hui. Je m'y serais rendue plus tôt s'il ne m'avait pas fallu si longtemps pour repérer une faille dans la ronde des Mangemorts. Cette nuit, j'ai pris tous les risques pour me rendre ici, mais les risques n'importent plus pour moi. J'en ai plus qu'assez de servir de moyen de pression, prisonnière dans ce château qui ne m'aura apporté que des malheurs. J'en ai plus qu'assez d'être seule, sans amour, sans famille, sans amis, entourée d'ennemis et d'anciens camarades qui ne voient en moi qu'une fille transparente et insipide, le vieil amour d'un héros déchu. J'en ai plus qu'assez de tout ce que j'incarne. Le monde entier me regarde comme si je n'étais déjà plus qu'un souvenir. « La première petite amie d'Harry Potter », se disent-ils. Les restes fantomatiques d'une époque qui n'a plus lieu d'être. D'un garçon qui avait déjà cessé de m'aimer avant que ce cauchemar ne commence.
Le cœur déchiré à présent, je presse compulsivement mes mains contre ma poitrine. Je n'étais pas née pour n'être qu'un second rôle, dans cette vie. Je n'étais pas née pour que l'on me délaisse, me méprise, m'abandonne. Je devais être la dulcinée, et non la veuve délaissée. Je devais être la reine. Je devais être ta reine, Harry.
Le regard dans le vide, je m'y perds. Je suis tellement fatiguée de ressasser encore et encore ces mêmes pensées. De ne vivre que dans le passé, dans mes regrets, et dans tout ce que je n'aurai jamais. Parfois, j'en viens à me haïr moi-même pour ma faiblesse. Alors, je regarde vers l'avenir, et je comprends mieux... Comment pourrais-je vouloir d'un tel avenir, avec ce que le présent me réserve déjà ? Que me reste-t-il aujourd'hui ? Plus rien ne me retient. Certains diront sans doute que je me pose encore en victime, et peut-être auront-ils raison. Mais à ce stade, je n'en ai plus rien à foutre. Je les emmerde tous. Essayez de ne pas avoir l'air d'une victime avec la vie que j'ai eue. La vie fait de nous tous des victimes.
Prenant une profonde inspiration, je m'apprête à disparaitre dans cette froide nuit d'hiver, mais un bruit de pas dans les escaliers me retient :
- Cho ? fait une voix féminine.
Je me retourne. La vie n'aurait pu me jouer de tour plus cruel. C'est Ginny Weasley.
- Qu'est-ce que tu fais là ? s'exclame la Messaline de Poudlard sans oser s'approcher de moi.
Sans doute a-t-elle rem arqué mes jambes dépasser du parapet. Parfait. Ça ne pouvait pas être mieux, vraiment. Même mes derniers instants, il aura fallu que cette garce me les gâche. Comment suis-je censée quitter ce monde sous les yeux de ma pire ennemie ? Celle que j'ai enviée, méprisée, honnie, au point que mon estomac se serre à la seule mention d'elle ?
- Laisse-moi tranquille, je réponds en détournant le regard.
Je déteste l'accent de désespoir dans ma voix. Elle ne va pas me lâcher, évidemment :
- Comment est-ce que tu as pu sortir en pleine nuit ? me demande-t-elle en se rapprochant subrepticement.
- Et toi ? je lui rétorque, narquoise.
Elle hausse les épaules :
- Ils ne me surveillent pas. Ils n'en ont pas besoin : ils me tiennent et ils le savent. Si je tente de m'échapper, ils tueront toute ma famille.
Je reste silencieuse. Même devant le constat terrible de la situation qui est la sienne, elle semble animée d'une sérénité inébranlable. Il émane d'elle une force silencieuse, un calme magnétique, grave, posé, qui me fait la détester plus que jamais, car aujourd'hui, Ginny Weasley apparait bel et bien comme l'héroïne de l'histoire. La reine, la jeune fille courageuse qui reste digne même dans la défaite, qui n'a pas courbé l'échine face aux malheurs du monde. Harry est mort, bordel de merde ! Comment peut-elle tenir encore sur ses jambes ?
- Cho..., articule Ginny doucement. Tu ne devrais pas faire ça.
- Laisse-moi seule, s'il-te-plait !
- Tu ne peux pas me demander ça. Pas maintenant que je t'ai trouvée comme ça.
- Mais qu'est-ce que tu peux bien en avoir à foutre de moi ?! Laisse-moi crever comme tous les autres et fous-moi la paix !
Ma réplique lui fait l'effet d'une baffe. Pourtant, elle ne recule pas :
- Cho, murmure-t-elle comme si j'étais trop stupide pour la comprendre. Tout n'est pas encore perdu. Nous avons des alliés entre ces murs. Il ne faut pas perdre espoir.
Je ricane :
- Quel espoir ? Quels alliés ? Et même si nous triomphions par miracle demain, pour quoi est-ce que je vivrais ? Qu'est-ce qu'il me reste, à moi ? Tu m'as tout pris !
Cette fois, Ginny n'ose pas répondre. Elle reste en retrait, les lèvres closes, se demandant sans doute si elle doit m'insulter ou battre en retraite. Pour moi, il est trop tard : les émotions me submergent et franchissent mes lèvres :
- Il aurait dû être à moi, je sanglote sans parvenir à me retenir. Je l'aimais, il m'aimait, il m'avait choisie, il aurait dû rester avec moi !
- Cho...
- Non ! Ne m'approche pas, salope !
A nouveau, Ginny se fige comme si je l'avais giflée. Je la dévisage, avec ses grands yeux de biche, ses cheveux incandescents, sa silhouette parfaite, ses jambes interminables et sa poitrine de sirène. Elle transpire tellement la luxure par tous les pores de sa peau que cela en devient vulgaire. Je l'ai toujours trouvée ainsi : vulgaire, scandaleuse, un gouffre destiné à attirer toutes les queues de cette Terre. Pendant un temps, d'ailleurs, c'était ce qu'elle faisait. Jusqu'à ce qu'Harry se fasse lui aussi prendre au piège :
- Regarde-toi, je lui lance. Il t'a suffi de tortiller du cul une ou deux fois pour qu'il te tombe dans les bras, pas vrai ? Comme si tu n'avais pas déjà le monde entier à tes pieds ! Non, il te fallait l'Elu. Il fallait absolument que ce soit lui, pas vrai ?
Lentement, Ginny secoue la tête :
- Cho, je... J'ai toujours été amoureuse d'Harry.
- C'est pour ça que tu as couru tous les plumards de Poudlard ?
- Je n'ai pas à me justifier devant toi.
A nouveau, je ricane :
- Non, bien sûr... Je l'aimais, et tu me l'as volé.
Quelques secondes s'écoulent. A peine une poignée. Après quoi, Ginny vient s'asseoir à côté de moi sur le parapet :
- Je ne suis pas là pour me disputer avec toi, dit-elle très calmement.
Son ton paternaliste me met aussitôt en rage, mais elle poursuit avec une détermination ferme :
- Nous avons toutes les deux aimé le même homme, et nous le pleurons aujourd'hui. Chacune à notre façon, mais l'issue reste la même. Il ne reviendra pas, Cho.
Doucement, elle tend la main pour prendre la mienne :
- Il y a encore une vie après Harry. Tu restes une personne à part entière, indépendante de lui. Tu peux encore construire ton avenir.
Emue malgré toi, je baisse la tête. Les mots de cette garce me touchent malgré moi et me font si mal que j'enfonce mes ongles dans mes paumes jusqu'au sang :
- Luna m'a dit la même chose, je réponds d'une voix basse.
- Luna ?
- Oui, Luna.
Me retirant en moi-même, je songe à cette fameuse nuit, des mois plus tôt, lorsque Luna m'avait trouvée ici même, juste avant que je ne saute, et qu'elle m'avait convaincue de rester... Nous avions partagé quelque chose, cette nuit-là. Quelques baisers, quelques caresses, et le sentiment que cela valait encore la peine de vivre. Qu'en penserait Luna aujourd'hui ? Comme tout le monde, je sais très bien ce qui lui est arrivé. M'aurait-elle conseillé le même choix, si elle avait su ce qui lui était destiné ? Désire-t-elle toujours vivre, aujourd'hui ?
- Luna vient de reprendre ses esprits, me dit Ginny comme en écho à mes pensées. C'est une de nos alliés. Elle a un plan pour défaire Voldemort.
- Un plan ? Quel plan ?
- Nous ne savons pas encore. La réussite dépend du secret. Mais cela signifie que tu ne dois pas perdre espoir, Cho. Très bientôt, ce cauchemar sera fini.
Je lui retourne un regard vide :
- Et qu'est-ce qui restera ensuite ? Nous règnerons sur des cendres ? Nous deviendrons les meilleures amies du monde, toi et moi ?
- Je n'y ai jamais été opposée, rétorque-t-elle posément. Tu partages sûrement plein de souvenirs que j'ignore sur Harry. Je pourrais le retrouver un peu à travers toi, comme tu le retrouverais à travers moi.
Eperdue, je fuis son regard en affrontant la nuit sans rien dire. Il me vient à l'esprit que l'univers est décidément bien farceur. Il m'envoie toujours un ange gardien pour me sauver au dernier moment, comme s'il importait que je survive pour assister à tout ceci. Et pourtant, jamais rien de bien ne m'arrive...
Combattant une nouvelle montée de larmes, je réalise que c'est la colère qui m'anime. Je me sens si impuissante depuis tellement longtemps... Je suis fatiguée de n'être qu'un jouet du destin. Me tournant vers Ginny, je lui adresse pour la première fois un léger sourire :
- Désolée, j'articule. Mais je connais un meilleur moyen de le retrouver.
Alors, sans plus aucune hésitation, je prends appui sur le parapet et je me jette dans le vide.
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