Pâques abyssales

Ici Lily, et pour une fois avec un OS d'une taille normale ! (Youpi)

Il s'agit d'un crossover avec le manga Pandora Hearts.
Mais comme j'ai bien conscience d'être sur un fandom BSD, je vous propose des détails en commentaire sur l'univers et les personnages, suivez le guide -->

Je l'ai choisi car c'est un manga basé sur Alice au pays des merveilles ;) (encore vui X))

Néanmoins c'est une histoire très complexe et mes explications sont exhaustives donc je ne peux que vous inviter à aller lire ce chef d'œuvre uwu

Bonne lecture~

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Oz s'étira et bailla à s'en décrocher la mâchoire. Il venait de se réveiller, et ce sont des yeux encore tout ensommeillés qu'il posa sur la fenêtre à côté de lui, pour découvrir le paysage fort peu habituel qui s'offrait à lui.

Il bondit sur ses pieds dans le fiacre qu'il partageait avec trois autres personnes, les faisant sursauter par la même occasion.

« C'est magnifique ! s'extasia-t-il, tout content. Alice, tu as vu un peu ce paysage ? » demanda-t-il en passant la tête par-dessus son épaule pour interpeller la jeune fille.

Cette dernière regardait de l'autre côté, un petit filet de salive s'écoulant déjà du coin de sa bouche à la vue d'un troupeau de bovidés en train de paître tranquillement dans un champ, ses yeux remplis d'étoiles. 

« Crétin de lapin, reviens t'asseoir, tu ne mangeras certainement pas ces vaches, alors laisse-les en paix ! » s'énerva Gilbert en croisant les bras sur son torse, visiblement remonté contre la jeune fille.

Oz sourit devant cette scène devenue chose courante dans son quotidien, tandis que Reim détournait le regard en rajustant ses lunettes, désespérant de s'être retrouvé avec ces trois-là, mais surtout pressé d'arriver rapidement pour que son calvaire cesse.

L'avantage du long trajet, c'était que ses trois compagnons avaient un minimum dormi, lui laissant quelques heures de répit... Qui venaient de s'achever.

Tout Pandora avait été invitée, et ses personnes les plus éminentes, à savoir les familles ducales et leurs plus proches serviteurs, faisaient donc le déplacement. Même si les ducs Nightray et Vessalius ne faisaient pas partie du voyage car ils avaient d'autres affaires à régler. Ainsi, une grande concession de voitures se suivaient sur la route étroite menant au pays voisin.

Le duc Barma avait insisté pour monter dans le même fiacre que Sheryl Rainsworth, qui elle-même montait déjà avec sa petite fille et son serviteur. Les véhicules ne possédant que quatre places, Reim avait donc logiquement été évincé.

Enfin, il avait l'habitude. Et, à y réfléchir de plus près, il préférait nettement monter avec ces trois énergumènes qu'avec Vincent Nightray, ce qui avait failli se produire. Il ne s'en tirait donc pas si mal.

« Où est-ce qu'on se rend déjà ? demanda soudainement Oz, sorti de sa rêvasserie admirative.

-Vous faîtes le voyage sans même savoir pourquoi, messire Vessalius ? demanda soudainement, quelque peu paniqué, le pauvre Reim.

-Eh bien, non, je n'ai pas vraiment écouté durant la dernière réunion » dit-il en fermant un œil et en tirant à demi la langue.

L'employé blêmit brièvement, mais se reprit en réajustant de nouveau ses lunettes, véritable tic chez lui. Il aurait dû s'y attendre. Il soupira dans l'espoir de se calmer un peu, puis commença :

« Donc les quatre familles ducales se déplacent, et vous ne vous intéressez même pas aux raisons qui peuvent l'expliquer ? »

Le jeune homme blond se frotta l'arrière du crâne sans se départir de son sourire, Gilbert détourna le regard, ne souhaitant pas s'y mêler -après tout lui non plus n'était au courant de rien alors que, dans les faits, il avait le même statut qu'Oz, et même légèrement supérieur au sien grâce à sa chain- tandis qu'Alice regardait toujours avidement à l'extérieur le moindre animal vivant passant devant son regard, comme un chat derrière une fenêtre guettant un oiseau qu'il ne pourrait jamais atteindre.

« Très bien. Commençons par le commencement. La famille Mori nous a invité à passer des festivités propres à leur culture en leur compagnie en gage d'un futur pacte d'amitié...

-Vraiment ? Comme c'est généreux ! »

Reim soupira devant tant de candeur infantile, avant de poursuivre, ignorant le fait qu'il avait été interrompu.

« Evidemment, ce n'est pas dénué d'intérêt, ils font de nombreuses recherches sur l'Abysse, et une rumeur court depuis peu qu'ils possèderaient, eux aussi, une porte pour y accéder, en plus de Chains plus puissantes que les gardiennes.

-Mais toutes les portes ne se trouvent-elles pas en notre possession ? demanda le jeune homme, considérant enfin le fait qu'il était tout de même héritier, lui aussi, d'une des familles ducales.

-Justement, là se trouve le cœur du problème. L'homme à la tête de cette famille a invité Pandora par intérêt, et nous y avons répondu avec tout autant d'intérêt pour y participer.

-La politique est décidément bien trop compliquée et ennuyeuse, soupira le jeune homme. Et quant aux festivités ? demanda-t-il à nouveau.

-Il s'agirait d'une fête appelée « Pâques », où le but serait de récolter le plus d'œufs au chocolat au cours d'une grande chasse. Nous n'en savons pas grand-chose de plus.

-Est-ce qu'il y a aussi de la viande à chercher ? demanda vivement Alice, sa tête soudainement apparue sur l'épaule de son contractant à la simple mention de nourriture, les yeux pétillants d'étoiles.

-Je... Je ne pense pas. Toujours est-il que nous serons en territoire potentiellement ennemi, je vous prierai donc de vous conduire avec sérieux, tous les deux. Et messire Gilbert, enchaîna-t-il, je compte sur vous pour les surveiller. » 

Le concerné détourna le regard tandis qu'Oz esquissait un sourire narquois devant cette réaction digne de son serviteur. Cette journée promettait d'être intéressante...

Dans un autre fiacre un peu plus loin, d'autres parlaient à peu près des mêmes sujets, mais plus sérieusement.

« Apparemment, leur système serait basé sur deux familles dominantes, qui fonctionnent un peu comme nos duchés. Les Mori, qui nous ont invité, et les Fukuzawa. Leurs relations seraient aussi tendues que celles entre les Nightray et les Vessalius, à ce qu'on dit, mais ce ne sont que des rumeurs. Après tout, l'explication qui est donnée pour ce différent serait une idylle passée entre les deux chefs actuels, ce qui est difficilement envisageable, expliquait Leo calmement en feuilletant un livre tandis qu'Elliot regardait en apparence la fenêtre, mais surveillait en réalité du coin de l'œil son frère adoptif déchiqueter minutieusement une peluche de ses ciseaux, mal à l'aise.

-C'est effectivement ce que j'ai aussi entendu de mon côté » dit alors ledit frère adoptif sans lever les yeux de son ouvrage inquiétant.

Enfin, il se décida à abandonner sa tâche et relâcha la pauvre peluche en forme de lapin au sol, des morceaux éparpillés un peu partout.

Elliot détourna alors totalement le regard et se renfrogna du même coup en apercevant à la faveur d'un virage B-Rabbit tenter de s'élancer par la fenêtre de son fiacre pour rejoindre un marché où elle avait très probablement aperçu de la viande tandis qu'ils venaient d'arriver en ville.

« J'espère que Gilbert ne jettera pas une nouvelle fois la honte sur notre famille, il serait temps qu'il comprenne son rang et qu'il arrête de lécher les pieds de ces Vessalius ! » pesta le cadet des Nightray en se renfonçant finalement dans son siège. Franchement, pourquoi est-ce qu'il vient si c'est simplement pour nous ridiculiser encore plus qu'après son coup au lycée ?! continua-t-il tout seul, remonté à cause notamment de sa patience légendaire et du temps depuis lequel ils étaient chemin.

-Peut-être parce qu'il accompagne justement messire Oz ? hasarda Leo sans détourner le regard de sa lecture.

-Tss, c'est bien ce que je disais » répliqua-t-il en se renfrognant

Vincent se contenta de sourire et de détourner le regard sans même chercher à défendre son frère. Echo, qui avait logiquement suivi son maître, se contentait de regarder par la fenêtre de son regard vide, et Leo abandonna l'idée de le raisonner. De toutes manières, aucune conversation n'était possible en l'état. Mais l'attente serait bientôt terminée.

~

« Merci de nous honorer de votre présence, mesdames et messieurs, annonça Mori Ôgai avec une demi-révérence devant ses invités, qui venaient de sortir des fiacres. J'espère que votre court séjour parmi nous sera profitable à tous et que vous trouverez le temps de vous divertir durant nos festivités. Si vous voulez bien vous donner la peine » sourit-il en indiquant le bâtiment derrière lui.

Certains s'étirèrent et baillèrent avant de totalement émerger d'une sorte de sommeil comatique, ce qui était plutôt normal vu qu'ils venaient de passer la nuit complète dans des positions fort inconfortables sur la route.

Mais la plupart des agents de Pandora restèrent dignes, conscients des enjeux de leur visite. Un peu trop conscients, car nombreux étaient ceux qui regardaient suspicieusement leurs hôtes. Sheryl Rainsworth, la doyenne et à n'en pas douter la membre la plus respectée et redoutable de l'organisation, brisa alors la glace et s'avança dans son fauteuil, poussé par le duc Barma, avec son sourire tranquille habituel sur le visage.

Tous se détendirent alors petit à petit, et allèrent se joindre à la foule qui attendait dans une sorte de petit jardin luxueux un peu plus loin. Ce jardin semblait avoir été aménagé spécialement pour l'occasion.

En effet, de nombreuses banderoles colorées l'ornaient de multiples couleurs festives tandis que des œufs et des lapins géants étaient disposés un peu partout. De grandes tables de pique-nique terminait la présentation, semblant plus être là pour parler de tout et de rien que de politique. Il faisait plutôt beau et une brise légère soufflait, faisant virevolter les banderoles. Ainsi, le climat général était relativement calme et apaisant.

Certains comme Reim ne se sentaient pas très à l'aise en société et préférèrent se tenir à l'écart, tandis que d'autres, tout aussi peu à leurs aises comme Gilbert, étaient entraînés de force par leurs compagnons.

Les discussions commencèrent gaiement et de bon train. De nombreux enfants circulèrent librement parmi les pieds des adultes, tentant d'attraper des amuses-bouches disposés sur les tables de pique-nique, tandis qu'ils attendaient l'heure fatidique. En effet, d'ici trente minutes, la chasse aux œufs devrait débuter.

Alice trépignait d'impatience tout en se goinfrant largement, avalant tout ce qui passait à portée. Xerxes, plus subtil, dérobait discrètement une à une les sucreries à portée de sa main, bien qu'il fût obligé de tâtonner, et les engouffrait, avant de faire des tours de magie et de ventriloquie qui amusaient sa galerie d'enfants attentifs, qu'il entendait pépier tout autour de lui.

Pourtant, beaucoup des agents de Pandora étaient perturbés. On leur avait assuré un terrain de chasse énorme, mais ils n'en voyaient actuellement pas la couleur, même si ce jardin était somptueux. Enfin, eux n'y participeraient sûrement pas, mais y assister serait divertissant.

Vincent, lui, scrutait la foule à la recherche d'une chose digne de son intérêt tout en évitant subrepticement la cadette Vessalius, changeant de trajectoire dès qu'il l'apercevait. Il était à l'aise en société, mais cette jeune femme l'effrayait plus qu'il n'oserait se l'avouer à lui-même.

Il repéra, à moitié caché par les feuilles d'un saule, tout tremblotant, un jeune homme qui serrait contre sa poitrine un livre. Ses cheveux bruns recouvraient ses yeux, si bien qu'on ne les voyait pas, et il observait dans toutes les directions comme si un prédateur allait subitement lui fondre dessus.

Le jeune homme blond vint discrètement à sa rencontre par derrière et s'approcha au plus près de son oreille avant de murmurer avec un sourire narquois :

« Tu as peur qu'un rapace ne vienne te fondre dessus ? » Le jeune homme sursauta immédiatement et bondi d'un bon mètre en arrière, lâchant son livre au passage. On aurait dit un petit lièvre apeuré, ce qui fit encore plus sourire l'enfant maudit.

« Qui... Qui êtes-vous ? » demanda l'autre, cherchant à serrer dans ses bras un livre qu'il n'avait plus. Lorsqu'il se rendit compte qu'il l'avait lâché, il se jeta littéralement dessus, visiblement dans l'espoir que le perturbateur ne voit pas ce qu'il y avait d'écrit dessus, mais c'était déjà trop tard.

« ''Alice au pays des merveilles'' ? Je ne connais pas, mais je ne doute pas qu'il s'agisse d'une lecture fort intéressante, sourit encore plus Vincent. Il allait continuer à harceler sa nouvelle victime, quand soudain une voix transperça le silence, aigue et visiblement énervée. Tous les regards convergèrent dans sa direction.

« Abruti de Dazai, montre toi immédiatement espèce de crétin fini, que je t'enterre définitivement et dans les règles !!! » cria un jeune homme roux, d'environ seize ans, un chapeau sur la tête et visiblement fort remonté contre la personne qu'il venait d'interpeller.

De plus, il semblait bien se ficher du public qui l'observait, et courait dans tous les sens en cherchant du regard une personne qu'il ne semblait pas trouver, bousculant au passage de nombreux convives indignés mais n'en n'ayant cure. Il n'avait visiblement pas conscience d'être dans une réunion importante.

« Alors comme ça on aurait couché ensemble, hein ?! Je t'en foutrai des rumeurs comme ça ! Et pour l'amour du ciel, libère ma chain ! Bats-toi au moins à la loyale ! » Le jeune homme continuait de vociférer tandis que tout le public lui était désormais acquis.

Vincent regarda avec amusement un jeune homme brun marcher tranquillement à l'opposé de celui qui vociférait, et se cacher subitement derrière une jeune femme à l'allure élégante vêtue d'un kimono rose et se cachant du soleil grâce à son ombrelle.

« Mlle Ôzaki » récita le jeune homme dans sa tête. La personne la plus importante après le chef de famille lui-même, elle était son bras droit et aussi respectée, si ce n'était plus, que Sheryl Rainsworth. Et le jeune homme brun couvert de bandages qui venait d'être interpellé et de se cacher était très certainement le fils adoptif plutôt turbulent du chef Ôgai.

Il avait pris soin de retenir le plus d'information possible sur leurs hôtes, après tout, si les rumeurs concernant leur potentielle porte menant à l'Abysse étaient fondées, il avait lui-même son propre intérêt dedans. Même si les faucheurs pourpres n'avaient pas pu faire le voyage avec lui, il se débrouillerait bien d'une manière ou d'une autre.

Quant au rouquin, il n'était pas tout à fait sûr de son identité, mais il se pouvait qu'il fût le fils adoptif de Mlle Ôzaki et le valet du dénommé Dazai. La situation promettait d'être amusante.

« Je vais t'enterrer vivante, la momie ! Je vais tellement te réduire en charpie que M.Mori ne te reconnaitra même plus, sale maquereau défraîchi ! »

Le fameux M.Mori ne fit même pas un geste pour les arrêter, il arborait même un petit sourire qui semblait indiquer que le situation ne le dérangeait absolument pas, bien au contraire. Quant aux habitués, ils semblaient tous résignés et n'esquissaient pas le moindre mouvement.

Les deux semblaient jouer à cache-cache dans la foule, Mlle Ôzaki ayant chassé le jeune homme brun, il fuyait dès qu'il voyait son valet s'approcher un peu trop de lui. Il finit par aller se cacher derrière Gilbert, qui offrait une assez bonne cachette par sa stature haute bien que peu imposante.

Ce dernier commença à paniquer, il aurait préféré éviter de prendre parti, mais l'autre s'accrochait à son manteau pour l'empêcher de partir ou même de se tourner. Sa tête semblait chercher une solution en tournant à plein régime tandis que le rouquin se rapprochait dangereusement.

Evidemment, Oz pouffait discrètement, s'amusant de la situation de son propre valet, tandis que Vincent, de loin, souriait également. Il adorait son frère, mais il l'aimait encore plus lorsqu'il faisait cette tête-là.

Quand au principal trouble-fête, il s'était décidé à camper sur ses positions, trouvant la réaction de l'adulte qu'il avait pris pour cachette fort amusante et sachant pertinemment qu'il ne pourrait pas fuir éternellement.

Enfin, une dernière personne regardait d'un très mauvais œil la situation. Semblable à une cocotte-minute sur le point d'exploser, Elliot Nightray observait de loin et ce depuis un bon quart d'heure son frère adoptif se faire ridiculiser en acceptant toutes les bassesses, et ridiculiser sa famille au passage, devant son maître, qui était de surcroit un Vessalius.

Il se retenait à grand peine d'intervenir car il ne souhaitait pas s'afficher devant tous ces gens, mais voir son imbécile heureux de frère dans cette situation, c'en était trop. Alors, lorsque le jeune homme roux le percuta dans sa course, ayant enfin aperçu l'objet de son courroux, il explosa.

Il lui attrapa le poignet et le tira violemment en arrière, le stoppant net dans sa course et le forçant à se retourner vers lui. Le rouquin, ayant dans l'idée d'insulter copieusement cet obstacle qui se dressait soudain sur sa route, ouvrit la bouche pour protester, mais fut devancé.

« AVEZ-VOUS CONSCIENCE DE LÀ OÙ VOUS VOUS TROUVEZ ?! » s'insurgea le jeune noble, hors de lui. L'autre écarquilla d'abord les yeux, franchement surpris car il ne s'y attendait pas, puis, après une demi-seconde d'hésitation, tenta de se libérer et enchaîna.

« ET QU'EST-CE QUE ÇA PEUT BIEN VOUS FOUTRE ?! ÇA NE VOUS CONCERNE ABSOLUMENT PAS, ALORS FOUTEZ-MOI LA PAIX !!! » renchérit-il sur le même ton en se débattant de plus belle.

S'en suivit un débat relativement stérile et presque incompréhensible au vu du volume sonore, à tel point que nombre des convives se bouchèrent les oreilles. Ne trouvant ni l'un ni l'autre le moyen de se calmer, bien que Leo tenta vainement d'intervenir, ils dégainèrent chacun leur lame, visiblement prêts à s'affronter.

Vincent, avec son flegme habituel, décida alors de s'approcher d'eux. Ce n'était pas vraiment que la situation lui posait problème, au contraire elle était plutôt divertissante, mais ce serait embêtant si l'un ou l'autre venait à mourir et déclenchait par la même une guerre entre les deux pays. Il s'agissait après tout de deux fils de haute famille, ce ne serait donc pas étonnant que cela se produise si un tel évènement venait à se produire.

Les deux jeunes hommes, trop occupés à se fusiller du regard, ne remarquèrent même pas l'arrivée du blond. Il posa une main sur l'épaule de chacun d'eux, et ils s'écroulèrent alors chacun sur un bras du fils adoptif Nightray, tout le zèle et la tension soudainement envolés.

Trouvant cette situation embêtante, Vincent regarda autour de lui pour trouver à qui refourguer ces deux poids morts. Il aperçut le jeune Osamu lui faire signe de laisser tomber le rouquin, et, faisant franchement peu de cas de l'état de ce dernier, il le laissa aller s'écraser au sol.

En revanche, Leo s'approcha et récupéra Elliot par les épaules avant qu'il n'hérite du même traitement, mais il n'avait pas la force -ni l'envie d'ailleurs- de le soulever totalement. Tant pis, il le traînerait pour le sortir de la foule.

Désormais, tous les regards se portaient sur Vincent, qui bailla très largement. Dazai s'approcha du corps inerte de Chuuya et appuya à plusieurs reprises sur sa joue pour voir s'il n'avait effectivement aucune réaction. Il sourit largement, bien qu'il fût un peu peiné que sa distraction s'achève si tôt. Il se tourna alors vers le trouble-fête et lui lança un regard rempli d'étoiles.

« Votre chain est vraiment géniale, monsieur ! Et effrayante ! » dit-il comme un enfant s'exclamerait devant un nouveau jouet.

Vincent se contenta de sourire, mais, entendant les murmures monter de la foule, il leva la tête et vit que le Loir était à nouveau visible aux yeux de tous. Gilbert lui attrapa soudain le bras et le tira à sa suite loin de la foule tandis qu'il commençait à ricaner, absolument pas dérangé par la situation.

Reim soupira, désespéré. Alice, elle, demanda soudainement ce qu'il se passait lorsqu'elle vit que l'attention n'était plus tournée vers elle. En effet, depuis le début de l'altercation, elle n'avait que manger et n'avait rien remarqué.

Enfin, une fois la chain révoquée, l'organisateur de toute cette fastueuse journée se décida à lancer les festivités et monta sur une sorte de scène improvisée.

« Très bien. Suite à ce petit contre-temps, je vous invite à démarrer notre chasse aux œufs géantes ! » annonça-t-il avec un grand sourire, qui ressemblait plus à un rictus moqueur.

Leo, pendant ce temps, avait transporté son maître jusqu'à l'ombre d'un grand chêne et l'avait adossé à son tronc. Il lisait paisiblement désormais, quand une ombre vint le troubler. Il releva la tête de son ouvrage et fixa le perturbateur calmement, attendant des explications.

« Enchanté, je m'appelle Osamu Dazai, commença-t-il d'un ton enjoué.

-Je sais, répondit Leo tranquillement, tout en portant son regard sur le rouquin posé tel un sac de patate sur les épaules du brun.

-Bien, je ne vais donc pas passer par quatre chemins ! »

Le jeune homme lâcha alors sans aucune délicatesse son fardeau, avant de s'accroupir à côté du valet et de lui murmurer quelque chose à l'oreille. Puis il se recula, attendant tout sourire la réponse de l'autre, qui se contenta de hausser les épaules.

« Comme vous voulez, mais je ne serais absolument pas responsable de ce qu'il pourrait se produire.

-Evidemment ! »

Et, sur ces bonnes paroles, il se serrèrent la main, Dazai avec un sourire complice.

~

Chuuya entrouvrit légèrement les yeux, ne comprenant pas trop ce qu'il s'était passé. Il avait souvenir de s'être une énième fois disputé avec Dazai, de l'avoir pourchassé... Et après le trou noir. Pourtant il n'avait aucune marque, il n'avait pas été assommé de force.

Il observa son environnement, et constata avec agacement qu'une autre personne se trouvait à côté de lui. Ils étaient sur un banc, et l'autre somnolait encore. Subitement son altercation avec le jeune homme lui revint, et il grinça des dents avant de se lever subitement, sentant que s'il s'attardait ici il étranglerait l'autre.

Seulement, son geste fut freiné et provoqua la chute de son compagnon d'infortune, qui se réveilla alors soudainement face contre terre. Encore plus confus, Chuuya observa son poignet droit et découvrit avec horreur qu'il était attaché au poignet gauche du blond.

Il serra les deux points, tout simplement furieux. Cela ne pouvait qu'être un coup tordu de Dazai, qui avait pris un malin plaisir à profiter de sa faiblesse momentanée. Ce qu'il ne savait pas, en revanche, c'est comment il avait pu sombrer dans le sommeil si subitement.

Elliot allait se relever, encore confus à cause de la situation mais vexé d'avoir été mis à terre de cette manière, quand le rouquin lui attrapa soudain le col dans le but de le soulever de terre -ce qui ne fit finalement que le relever car il était trop grand pour que Chuuya puisse espérer soulever ses pieds du sol au vu de sa propre taille-

« Ohé, qui es-tu ? qu'est-ce que tu fous ici ? Et surtout comment on s'est retrouvés dans cet état ?! demanda-t-il tout en secouant à demi le blond. Celui-ci attrapa alors ses poignets avec sa main droite et se renfrogna aussitôt.

-Tu comptes vraiment que je te réponde avec des manières pareilles ?! » s'insurgea-t-il, ses yeux lançant des éclairs. Le rouquin lui renvoya son regard meurtrier, et pendant plusieurs secondes qui semblèrent durer une éternité ils se jaugèrent du regard en se fixant, aussi furieux l'un que l'autre.

Puis ils détournèrent enfin les yeux simultanément, Chuuya relâchant enfin le col du jeune homme.

« Je m'appelle Elliot Nightray, annonça-t-il sans décolérer, mais il fallait bien commencer quelque part.

-Nightray ? demanda à moitié confus le rouquin. Ça ne me dit absolument rien... continua-t-il, suspicieux.

-C'est normal, je ne suis pas du pays. Nous avons été invités par M. Mori pour assister à vos festivités. Mais ce n'est pas une...

-Je n'étais pas au courant ! le coupa le plus petit, ce qui eut pour effet d'énerver encore plus son interlocuteur. Dazai va vraiment me le payer quand je vais lui mettre la main dessus... » marmonna-t-il encore pour lui seul.

En effet, ils étaient seulement rentrés la veille d'une affaire à régler avec les Fukuzawa, et personne n'avait jugé utile de l'informer de la venue d'invités. S'il l'avait su, évidemment qu'il n'aurait pas débarqué en plein milieu des festivités pour se ridiculiser devant tous. Encore que, rien n'était moins sûr... Mais il aurait été un peu plus courtois. Il y aurait plus réfléchi, disons.

« Je m'appelle Chuuya Nakahara, j'ai été adopté par la famille Ôzaki et je suis au service d'une crapule de la famille Mori, malheureusement, annonça-t-il enfin, se rendant compte du regard insistant de l'autre, qui attendait visiblement un retour de politesse, et ayant enfin conscience qu'il se trouvait peut-être en présence d'un noble, même s'il n'en avait pas la certitude. Il avait beau être impulsif, si l'autre avait un rang plus élevé que le sien, il avait intérêt à se tenir à carreaux. Est-ce que tu sais ce qu'il s'est passé ? »

Le dénommé Elliot, ignorant ostensiblement le tutoiement de l'autre, secoua la tête en signe de négation en croisant les bras sur sa poitrine, un peu plus calme maintenant qu'il savait à qui il avait affaire. Il se fichait bien de la hiérarchie, l'autre aurait pu être un simple orphelin sans domicile ou un Mori, il l'aurait traité de la même manière, mais il ne supportait pas ses manières.

« Enfin, je sais juste que c'est le Loir qui nous a endormi, annonça-t-il.

-Le Loir ? demanda le rouquin, perplexe. C'est une chain ? »

En même temps qu'il posait cette question, il commença à observer partout autour de lui, semblant soudainement se souvenir de quelque chose.

« Celle de mon frère adoptif, acquiesça le blond. Il ne la maîtrise pas très bien, mais il peut endormir n'importe qui par simple contact physique. Où est-ce qu'on se trouve ? enchaîna-t-il.

-Disons que j'ai ma petite idée sur la question » répondit-il, à moitié distrait, ne semblant pas prêt à répondre. Elliot serra les poings tandis qu'une veine commençait à palpiter sur son front, mais il tenta de conserver son calme.

Soudain, Chuuya sortit un couteau d'on ne savait trop où. Le blond porta immédiatement la main à la garde de son épée, sur ses gardes, mais le couteau était déjà lancé dans la direction opposée. Il cloua à un buisson l'aile d'une créature bien étrange, une sorte de mix entre un écureuil et une chauve-souris, mais en beaucoup plus gros.

La créature se débattit tandis que le rouquin s'approchait, Elliot sur les talons -étant donné qu'ils étaient attachés, ils n'avaient pas franchement le choix-

« Comme on se retrouve, murmura-t-il à l'adresse du petit animal tremblant de peur. Je savais bien que tu étais dans le coin, je ne peux pas invoquer Arahabaki depuis tout à l'heure » annonça-t-il, victorieux.

Il prit d'abord le corps de l'animal toujours entrain de se débattre dans sa main avant d'enfin récupérer son couteau et de libérer son aile par la même occasion. Le blond, perplexe, préféra observer sans trop s'y mêler.

« Ohé, Dazai, je sais que tu m'entends, crétin ! Dis-moi immédiatement ce qu'il se passe ! » cria soudain le rouquin dans une des oreilles de la pauvre créature, qui sembla légèrement désarçonnée sur le coup.

Un long silence s'écoula tandis que la colère montait de plus en plus dans le corps du rouquin. Il serra son poing sans s'en rendre compte et la créature lâcha un couinement de détresse. Elliot s'apprêtait à l'arrêter pour violence animale, mais l'autre lui fit signe de ne pas s'en mêler avant de répondre.

« Tu as cinq secondes. Ensuite, je tue ta petite chain sans aucun état d'âme. J'en serais enfin débarrassé comme ça !

-Tu n'oserais pas faire ça à ton maître quand même ? répondit soudain une voix mentale à travers l'écureuil volant qui se débattait de plus belle, presque larmoyante et choquée, tandis que Chuuya arborait un sourire victorieux.

-Tu crois vraiment ça ? Elle nous accompagne juste pour que je ne puisse pas survoler le labyrinthe, hein ? demanda-t-il.

-Voyons, tu me vexes ma limace ! Je m'inquiète pour toi, j'ai peur que tu perdes encore le contrôle, c'est une simple mesure de précau... répondit l'autre d'une voix mielleuse avant d'être interrompu.

-A d'autres! Arrête de me faire marcher, et explique moi la situation, sinon tu peux lui dire adieu » enchaîna le rouquin en serrant un peu plus fort la créature dans sa main.

Un soupir se fit entendre, tandis qu'Elliot était de plus en plus perplexe.

« Je savais que tu ne voulais pas participer à la chasse aux œufs, je t'ai juste un peu forcé la main~

-Evidemment que je ne voulais pas participer à un truc aussi puéril ! enragea le rouquin en serrant encore plus fort la chain qu'il retenait prisonnière.

-Dis, Chuu, tu ne veux pas la lâcher ? quémanda alors son interlocuteur invisible. Tu lui fais mal, tu sais. 

-Pour qu'elle s'échappe ? Non merci ! Et d'abord, comment comptes-tu me forcer à participer ? C'est pas parce qu'on est arrivés ici qu'on ne peut pas rester inactifs !

-Oh, mais figure-toi qu'Edgar a accepté de rajouter discrètement quelques lignes juste avant que cela ne débute. Le pauvre, il ne trouvait plus Karl...

-Que... commença Chuuya avant de comprendre ce que cela impliquait. Quelles sortes d'instructions ?! demanda-t-il, une légère panique dans la voix.

-Oh, tu ne devrais pas tarder à le savoir, vu que ça fait maintenant cinq minutes que tu n'as pas bougé~ »

Soudain, un énorme bruit se fit entendre et une sorte de lapin blanc faisant trois fois la taille des deux garçons apparut, ses yeux injectés de sang et ses incisives écarlates comme s'il venait de déchiqueter une proie entre ses canines.

Les deux garçons blêmirent quelque peu, puis, soudain, Chuuya cria « COURS » après avoir lâché la chain qu'il retenait encore jusque-là et s'être lui-même mis à courir. Entraîné par la chaîne, Elliot n'avait de toute manière pas vraiment d'autre choix. En temps normal, il se serait battu contre la créature, mais actuellement il était entravé. Et il en était de même pour le rouquin qui, de surcroît, ne pouvait pas invoquer sa chain à cause de la présence de celle de son maître.

Ils s'arrêtèrent enfin, tous les deux essoufflés et les mains sur les genoux, mais ils avaient semé la créature cauchemardesque qui les pourchassait.

« Qu'est-ce que c'est que ce délire ?! C'est aussi une chain ? Et où est-ce qu'on est ?! » s'énerva Elliot malgré la fatigue de la course, confus.

Chuuya ne répondit pas et se contenta d'observer aux alentours dans l'espoir de trouver une issue, lui aussi sur les nerfs mais pour une autre raison. Incapable de contenir sa rage plus longtemps, Elliot explosa de nouveau.

« Tu m'écoutes minus ?! cria-t-il en saisissant à son tour le col de l'autre.

-C'est à moi que tu parles crétin ?!

-Tu vois quelqu'un d'autre ici le nain de jardin ?! »

Chuuya vit rouge, c'était déjà la deuxième fois, et c'était deux de trop.

« J'ai seize ans, je n'ai pas fini de grandir ! déclara-t-il en envoyant sa jambe dans le menton du blond.

-Moi aussi j'en ai seize je te signale, et tu peux toujours rêver ! A la limite tu gagneras encore deux millimètres ! répondit-il en interceptant le coup.

Ils s'écartèrent tous deux autant qu'ils le purent, fumants de rage, et dégainèrent en même temps l'un son couteau, l'autre son épée. Du même mouvement, ils appuyèrent leur arme contre le cou de l'autre tout en parant celle qui arrivait vers eux.

Ils restèrent ainsi sans le moindre mouvement, quand la chain-écureil revint soudain se poser sur l'épaule d'Elliot.

« Il vaudrait mieux que vous évitiez de vous entre-tuer, dit soudain une voix psychique différente de la première fois, plus calme et posée.

-Leo ? demanda le blond, de plus en plus perdu.

-Le problème, c'est que si l'un de vous deux venaient à mourir, une guerre éclaterait sûrement, ce serait à éviter...

-Leo est-ce que tu veux bien m'expliquer ce qu'il se passe et pourquoi ta voix sort d'une chain inconnue ?!

-J'ai été entraîné dans cette affaire par M. Dazai, déclara posément le valet.

-Tu n'es pas censé être mon garde du corps et me protéger ?! Es-tu incapable à ce point ?!

-Il a une chain, pas moi. Je n'avais aucune chance, j'ai préféré le laisser faire.

-Et quelle chain effrayante... marmonna Elliot. Est-ce que tu te fiches de moi ?!

-Je n'oserais pas. » répondit-il toujours aussi posément.

Elliot ne le voyait pas, mais il était sûr qu'un petit sourire venait à l'heure actuelle étirer les lèvres de son valet. Malheureusement, il ne pouvait actuellement rien faire.

« Est-ce que tu sais au moins ce qu'il se passe ? demanda-t-il, tentant tant bien que mal de contenir sa colère.

-Oui, vous êtes sur le terrain de chasse de Pâques. Il s'agit d'un grand labyrinthe situé dans une dimension qui se trouve quelque part entre l'Abysse et notre monde, un peu comme l'antre du chat du Cheshire. Il a été créé par Edgar Allan Poe, un contractant au service de la famille Mori.

-Et comment est-ce qu'on en sort ? demanda le blond, perplexe.

-Il faut résoudre l'énigme donnée. Apparemment, il s'agit d'un mot à prononcer. Normalement, un morceau d'indice est disséminé dans chaque œuf en chocolat. Mais il y a une durée limitée, donc tout le monde sortira avant la nuit tombée.

-Et dans combien de temps tombe la nuit ?

-Dans environ quatre heures, annonça Leo d'une voix taquine.

-C'est une blague ?!

-Non, il a raison, intervint Chuuya. Mais on devrait réussir à en sortir plus tôt.

-En participant ?

-Pas obligatoirement, il y a plus rapide... Mais il va falloir quand même attendre un peu.

-Ah, une dernière chose. Poe a modifié les règles au dernier moment, vous ne pouvez pas rester plus de cinq minutes au même endroit sinon une créature digne de l'Abysse vous tombera dessus. Bonne chance, et évite de mourir Elliot ! » jugea utile de rajouter Leo.

La créature s'envola avant qu'ils ne puissent répondre autre chose. Se rendant compte qu'ils avaient toujours leurs lames pointées l'un sur l'autre, ils les abaissèrent et les rangèrent, décidant d'un accord tacite de se déplacer avant d'être à nouveau attaqué.

Ils errèrent dans le labyrinthe de verdure à la recherche des fameux indices, mais la tâche s'avérait relativement complexe. Chaque œuf trouvé avait une lettre, une couleur et un numéro différents.

Il fallait vraisemblablement rassembler tous les exemplaires d'une même couleur pour obtenir un mot, mais il fallait les ramasser tout en affrontant des créatures peu commodes -quoiqu'elles l'étaient plus que le lapin rencontré précédemment- et en évitant de croiser d'autres concurrents qui tentaient parfois de voler la récolte des autres.

Enfin, heureusement, tous les participants connaissaient l'un des deux jeunes hommes, et comme il était de notoriété publique qu'aucun des deux n'était réellement fréquentable et même approchable, ils n'avaient pas encore rencontré de réel problème de ce côté.

En revanche, le plus dur pour les deux était de se supporter mutuellement, car l'autre représentait tout ce qu'ils pouvaient détester. Le chemin était donc ponctué de disputes plus futiles les unes que les autres et d'insultes en tout genre.

Ils entendirent subitement des cris et virent au loin un immense lapin noir armé d'une faux.

« Qu'est-ce que c'est encore que ce délire ? C'est autorisé des créatures comme ça dans un jeu de piste pour enfant ?! demanda Chuuya, de plus en plus agacé par la situation et par son compagnon qui lui rabâchait sans cesse sa taille inférieure.

-Non, c'est une chain. Tss.

-Quoi ? demanda le rouquin, surpris par cette réaction soudain méprisante.

-Pour être tout à fait exact, c'est la chain d'un Vessalius. Et mon frère se trouve sûrement avec eux. Ce traître.

-Comment ça ?

-Il a été adopté par ma famille, mais il a juré fidélité à nos ennemis jurés. Ça ne m'étonne absolument pas qu'il participe à ce genre de jeu crétin malgré ses vingt-quatre ans révolus, cet imbécile ! Il ne mérite même pas de porter notre nom et de s'afficher en public ! déclara Elliot, remonté contre son frère comme toujours.

-Hmm. Moi aussi, j'ai été adopté, et je respecte au plus haut point ma nouvelle famille, répondit alors le rouquin. Je sais que j'ai une famille biologique quelque part, et même cinq petits frères, mais j'ai été vendu quand j'étais plus jeune car mes parents n'avaient pas les moyens de s'occuper de moi.

-Et tu vas les voir parfois ? s'étonna Elliot, surpris que l'autre se confesse soudainement.

-Non, jamais. Je me considère comme faisant partie intégrante de la famille Ôzaki, et de toutes manières ils m'ont abandonné. Et puis j'ai bien assez de travail avec mon maître comme ça...

-Si seulement Gilbert avait la même manière de penser que toi... »

L'atmosphère s'était largement détendue suite à cette conversation. Elliot commençait à avoir de l'estime pour son compagnon, qui, malgré son impolitesse criante, avait une mentalité intéressante. Ils commencèrent à parler de sujets un peu plus personnels, bien que ce fut toujours ponctué de disputes, et ils continuèrent donc d'avancer, dépités. Ils venaient encore de trouver un œuf d'une couleur qu'ils n'avaient pas déjà dans leur panier, à croire que c'était sans fin.

Cela devait bien faire une heure qu'ils étaient dans cette dimension, et, soudain, ils se retrouvèrent à nouveau face au lapin blanc géant du début.

« On ne l'avait pas semé ?! » s'exclama Chuuya, à moitié paniqué.

Ils commencèrent à reculer, quand soudain une horrible musique retentit, déchirant les tympans des deux jeunes hommes. Ils se bouchèrent les oreilles, mais, visiblement, la musique avait le même effet sur le lapin.

Il se crispa, et fit soudain demi-tour, repartant dans un autre coin du labyrinthe. La musique cessa alors, et un homme brun-roux d'âge mûr s'avança vers eux.

« Oda, tu en as mis du temps ! s'exclama Chuuya, mi-soulagé mi-agacé.

-Moi je trouve que j'ai fait plutôt vite, dit-il en détachant les poignets des deux compatriotes. Tu sais combien de temps ça m'a pris de tirer les vers du nez de Dazai ? Je n'étais pas sur les lieux, c'est Mlle Ôzaki qui m'a prévenu, tu pourras la remercier d'ailleurs.

-Hmm, merci. Comment on fait pour sortir maintenant ?

-Elise » répondit mystérieusement leur sauveur.

Soudain, une étrange lumière apparue, et ils furent propulsés en dehors du labyrinthe, retrouvant le jardin dans lequel ils étaient auparavant.

« Qu'est-ce qui s'est passé exactement ? demanda Elliot, toujours déboussolé.

-Extorquer les informations sur son nouveau livre à Edgar était bien plus facile que pour Dazai.

-Tu l'as menacé ? demanda à moitié moqueur le rouquin. Je ne te vois pas franchement être convainquant dans ce rôle.

-Disons que je lui ai envoyé une touffe de poil de raton laveur lambda en sous-entendant qu'il était avec moi, même si en réalité c'est actuellement Dazai qui l'a enlevé.

-Il ne risque pas de le revoir alors, je le plaindrai presque...Entre les directives de M. Mori pour la chasse aux œufs et les menaces qui viennent de toutes part, il doit être débordé et paniqué, dit-il narquoisement. Mais quels indices il pouvait bien y avoir sur ces foutus œufs pour trouver la réponse ?!

-Petite, adorable, belle, mignonne, fille, ce genre de choses.

-M. Mori tout craché... Je sens que beaucoup des participants en ont encore pour un certain temps. Où est Dazai d'ailleurs ?! demanda soudain Chuuya, se rappelant de l'affront que l'autre lui avait fait.

-Il m'a fait juré de ne pas le dire, soupira l'adulte, dépassé par les directives qui venaient de toutes part lui aussi. Mais il est à la bibliothèque » annonça-t-il avant de tourner les talons comme si de rien n'était.

Le rouquin partit immédiatement d'un pas lourd vers ladite bibliothèque, Elliot sur les talons car son valet se trouvait sûrement au même endroit. A chaque pas leur colère semblait monter d'un cran, si bien que la porte ne résista pas et s'envola lorsqu'ils arrivèrent à destination.

Dazai lisait son sempiternel livre sur le suicide, allongé nonchalamment dans un canapé, tandis que Leo lisait tranquillement un livre, assis et adossé à un des piliers du bâtiment. Ils relevèrent simultanément les yeux de leur ouvrage en entendant les deux arriver.

« Tiens, tu n'as rien. Tant mieux, dit Leo en se levant promptement, feignant la surprise, en refermant son livre et en se dirigeant vers son maître. On peut y aller maintenant. »

Puis il esquiva le blond et sortit immédiatement par la porte, son livre sous le bras, suivi par un Elliot plus que confus qui ne sut comment réagir face à tant de calme.

Dazai, lui, se releva et salua le rouquin, tout sourire.

« Je me demandais où tu étais passé Chibi, ça faisait longtemps. Tout s'est bien pa... »

Chuuya l'avait saisi par le col et l'étranglait désormais, si bien qu'il ne put terminer sa phrase.

« Ne crois pas que tu vas t'en sortir si facilement Dazai. D'abord, les explications, ensuite, je te fracasse le crâne et te balance dans la rivière. »

Le brun ne protesta pas, d'un autre côté il ne pouvait plus parler et son visage commençait à devenir violacé. Néanmoins il continuait de sourire, aussi Chuuya le lâcha finalement, exaspéré.

« Si tu sautes avec moi, pourquoi pas~ » rétorqua-t-il dès qu'il put reparler en reprenant laborieusement sa respiration.

Le rouquin se détourna, exaspéré, et s'apprêtait à sortir de la pièce lorsque son maître se jeta subitement sur lui et entoura son cou de ses bras.

«Je suis content de voir que tu t'en es parfaitement tiré, sourit-il à côté de son oreille.

-Clairement pas grâce à toi, marmonna Chuuya en réponse tout en tentant de se libérer vainement. Lâche-moi, soupira-t-il finalement, n'ayant plus la force de s'énerver pour le moment.

-Tu n'es pas curieux? demanda alors le suicidaire toujours à côté de son oreille, un grand sourire aux lèvres.

-J'ai à vrai dire peu d'espoir que tu me répondes, mais puisque tu en parles... Qu'est-ce qu'il s'est passé pendant que j'étais ivre il y a deux jours?! commença à s'énerver Chuuya, sentant que la réponse pourrait lui déplaire. Il n'en avait malheureusement aucun souvenir.

-Voyons voir... commença mystérieusement Dazai, relevant les yeux comme pour se livrer à une réflexion intense.

-Ne me dis pas que... commença à paniquer le rouquin, devenant peu à peu écarlate malgré lui.

-Que la rumeur est vraie? Non, il ne s'est rien passé, sourit encore le brun. Mais ça pourrait changer~ » dit-il énigmatiquement.

Chuuya soupira alors. Son maître ne changerait jamais. « Dans tes rêves, oui, asséna-t-il tout en lui mettant une pichenette au front, se dégageant et sortant finalement de la bibliothèque.

-Tu n'es pas drôle » soupira le plus grand, dépité, avant de le suivre. 

~

Comme promis, à la nuit tombée, tous sortirent de la dimension créée par la chain de Poe, et les participants se rassemblèrent. Cinq groupes avaient réussi à sortir. Le premier était celui d'Elise, la fille de M. Mori, et personne ne s'en étonna.

Le deuxième était un membre de la famille Fukuzawa, qui s'était incrusté in extremis grâce à sa relation privilégiée avec l'organisateur -il fallait dire qu'aujourd'hui, ce dernier en avait vraiment vu de toutes les couleurs-

Les troisièmes n'étaient autre que le groupe secouru par Oda. Les deux jeunes hommes, à leur mention, écarquillèrent les yeux, incrédules. Ils n'avaient pas souhaité participer, et certainement pas gagner.

Sauf que les participants sur le podium repartaient tous avec un lapin géant, à l'effigie de celui qui les avait attaqués à l'intérieur du labyrinthe, grandeur comprise. Elliot ouvrit de grands yeux et son sourcil tressauta à tel point il était perplexe et anxieux.

« Il est... Hors de question... Que je ramène ça au manoir » affirma-t-il en regardant désespérément cette immense masse de chocolat qu'il était censé avoir gagné contre son gré.

Chuuya n'était pas en vue, s'étant visiblement défilé de honte, donc il lui revenait à lui et à lui seul... Mais c'était tout bonnement impensable.

« Tiens, Elliot, je ne savais pas que tu avais participé, déclara soudain Oz Vessalius, apparu comme par magie à côté de lui, goguenard.

-Je ne le savais pas non plus » marmonna-t-il.

-C'est impressionnant ! Comment comptes-tu ramener ce lapin ? sourit encore le jeune homme.

-Je ne le ramènerai pas, je n'en veux pas ! » cracha-t-il en détournant le regard.

Oz sourit encore, « Dans ce cas, ça ne te dérange pas si on le récupère ?

-Absolument pas ! Faîtes-en ce que vous voulez, si les Vessalius sont prêts à ramener ce genre de choses chez eux !

-Tu t'es fait un nouvel ami ? demanda soudainement le plus jeune, prenant au dépourvu son interlocuteur.

-Je... Il faut croire, marmonna-t-il en se frottant l'arrière de crâne et en fermant les yeux. Il ne savait pas vraiment comment considérer sa relation avec l'horripilant jeune homme qu'il avait dû supporter une bonne partie de la journée.

-Je suis jaloux dans ce cas » sourit encore Oz avant de s'éloigner, empêchant Alice de se jeter sur un des lapins décoratifs qu'elle pensait être en chocolat depuis qu'on lui avait dit que sous le papier de certains se cachait en fait quelque chose de parfaitement comestible.

Ils retournèrent ensuite tous dans leurs fiacres respectifs après de derniers adieux et se mirent en chemin. Elliot, qui à l'origine était venu pour motif diplomatique à la place de son père qui ne pouvait se déplacer, avait au final été entraîné contre son gré dans une affaire puérile et sans intérêt.

Il espérait donc que Vincent avait correctement tenu son rôle, même s'il s'en méfiait, au moins, lui était digne d'être un membre de la famille. En effet, les pourparlers entre adultes s'étaient déroulés parallèlement à la grande chasse aux œufs, évitant ainsi d'avoir des enfants à traîner dans les pattes des dirigeants.

Mais d'un autre côté, même si la journée avait été étrange, elle n'avait pas été franchement déplaisante. Pour peu, il se serait presque amusé, même s'il ne l'admettrait pas.

« Visiblement, cette journée t'a plu, déclara Leo en souriant à demi, le nez dans son livre.

-Attends un peu qu'on soit rentrés, sale traître » bougonna Elliot en réponse, toujours vexé du comportement qu'avait adopté son valet.

Enfin, peut-être que si les relations entre les deux pays restaient amicales, alors ils auraient l'occasion de revoir ce duo rocambolesque qui ressemblait à plusieurs égards au leur. 

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