Dazai ou l'art de devenir un (faux) lapin
Hello !
Je tiens à préciser que cet os a été écrit dans la panique (et la fatigue aussi-)
Mais bref- on a finit par l'écrire ?
(Si vous voyez du angst sauvage passer, c'est éventuellement de ma faute-)
(Sur cette note inutile, je disparais~)
#Rainy ou Train pour Eiei
Je suis de retour pour une seconde nda (parce que second OS) mais plus courte parce que
1) j'ai pas grand chose à dire si ce n'est qu'on a galéré
2
) flemme de taper
3) j'ai à l'heure actuelle une fin à écrire ;-;
Sur ce bonne lecture des aventures de Bunnzai et Chuu-rros !
(Et n'oubliez pas : la ponctualité c'est surfait)
#Lu qui a froid et veut dormir-
Nyeeeeeh dormir...
#Ches
__
C'était un matin de printemps comme les autres, du moins en apparence. Les oiseaux gazouillaient, le ciel était d'un bleu pur et le soleil brillait sur Yokohama. Oui, un matin de printemps comme les autres semblait-il.
Aux environs de neuf heures, Chuuya Nakahara, jeune capitaine de la mafia portuaire, se décida à quitter le confort et la chaleur de son lit aux draps blancs. Bien sûr, il aurait pu rester encore couché ; après tout, il avait une journée de congé aujourd'hui, et absolument rien de prévu pour les vingt-quatre heures à venir. Mais il avait faim, aussi son estomac le poussa à se lever. Sortant de sa chambre en traînant des pieds, il se dirigea vers la cuisine, en faisant une halte aux toilettes (et oui, même les magnifiques créatures comme notre nain préféré doivent faire leurs besoins). Une fois arrivé dans ladite cuisine, il ouvrit les placards et le réfrigérateur, sortant divers aliments : lait, céréales, pain, beurre, confiture, pâte à tartiner au chocolat et à la noisette (dont on ne citera pas la marque afin d'éviter un quelconque placement de produit)... Il posa le tout sur le comptoir de sa cuisine ouverte des plus modernes et sophistiquées et s'assit lourdement sur l'un des hauts tabourets. Un peu trop haut pour sa petite taille d'ailleurs, il avait toujours du mal à s'asseoir dessus, même s'il ne l'avouerait jamais.
Chuuya mangeait donc sans dire un mot ; ce qui était plutôt logique puisqu'il vivait seul. Ses paupières se fermaient toutes seules à intervalles réguliers, et il devait lutter pour ne pas laisser sa tête retomber dans le bol de lait chocolaté et de céréales posé devant lui. Tartine dégoulinante de confiture (à moitié endormi, il avait abusé sur la quantité) en main, il se fit intérieurement la promesse de retourner se coucher une fois sa faim assouvie. Mais alors qu'il tentait tant bien que mal de fourrer la cuillère pleine de céréales ramollies par le lait dans sa bouche, il se stoppa net et lâcha le couvert qui retomba dans le bol, provoquant quelques éclaboussures couleur marron-chocolat au lait. Qu'il soit long à la détente ou simplement très fatigué, le petit roux venait de se rappeler, au bout d'un quart d'heure, qu'une des étagères de ses placards était vide. Une étagère où il entreposait normalement...
À présent bien réveillé, le jeune homme bondit de son tabouret, manquant par la même occasion de s'étaler au sol, et se précipita vers ledit placard. Il l'ouvrit à la volée, arrachant presque la porte, priant pour avoir rêvé. Mais non, l'étagère du bas était bel et bien vide. Il poussa un cri de rage. À l'endroit où étaient autrefois rangées ses précieuses bouteilles de vin, il n'y avait plus qu'un petit post-it jaune pâle. Chuuya le saisit pour lire le message écrit dessus. Il ne put retenir un second cri de fureur en comprenant qui était l'auteur de cette plaisanterie absolument pas amusante.
"Eh bien eh bien, comment va ma petite limace ? Bien dormi ? Comme tu peux le voir, je me suis permis de t'emprunter ta petite réserve (alcoolique que tu es) ! Ah, et j'ai aussi bu un peu d'une des bouteilles pour goûter, désolé pour le verre sale hehe. (Un coup d'œil vers l'évier lui confirma la présence dudit verre.) La suite du message est près de la télévision~"
Chuuya jura contre son idiot d'ancien partenaire et se dirigea furieusement vers le salon. Il vit un second post-it, celui-ci rose fluo, collé sur le bas de l'écran noir. Il aurait sûrement dû se demander, comme toute personne normale, comment quelqu'un avait pu entrer dans son appartement en pleine nuit alors qu'il le fermait à clé à chaque fois, mais en cet instant précis, il ne pensait plus qu'à exploser la tête de Dazai, et récupérer son vin bien sûr. Il décolla avec violence le petit papier coloré et le lut.
"Ma chère demie-portion préférée, si tu veux retrouver ta précieuse réserve d'alcool, tu vas devoir jouer avec moi et avec tous les autres ! Tu vas voir, j'ai tout organisé, on va bien s'amuser ! L'heure et le lieu de rendez-vous sont dans ta chambre, mon petit nain adoré"
"- Où est-ce-qu'il se croit cet abruti ? Dans une chasse au trésor ?" marmonna le mafieux en se rendant dans sa chambre pour trouver un troisième post-it, vert à présent, collé sur son armoire.
"Tu dois te demander si je me suis cru dans une chasse aux trésors. Ne mens pas limace, je te connais par coeur~ Bref, le rendez-vous est à la place principale de la ville, à 10h30. Ne sois pas en retard ! Ah, et tu es très mignon quand tu dors, avec la bave aux coins des lèvres, je n'ai pas pu m'empêcher de prendre une photo ♡"
Le roux hurla une nouvelle fois, et se promit d'étriper le détective à la première occasion.
__
Lorsque Chuuya arriva au point de rendez-vous, il eut l'agréable surprise de constater qu'il n'était pas seul. Non seulement plusieurs de ses collègues se trouvaient là, l'air particulièrement agacés, mais leurs ennemis jurés de l'Agence des Détectives Armés se tenaient le plus loin possible d'eux, les toisant avec mépris pour certains, crainte pour d'autres. Dazai avait vraiment décidé de faire chier le plus de monde possible. D'ailleurs, où était-il?
"-Youhou! Par ici!"
Comme s'il avait entendu sa question intérieure, le brun se montra, un mégaphone à la main, sur le toit d'un bâtiment. Comment était-il arrivé là, c'était un mystère, mais c'était loin d'être l'élément le plus choquant. Le détective avait troqué son imperméable habituel pour une combinaison de lapin jaune.
"-On dirait que vous êtes tous là, mes loulous! On va pouvoir commencer!
-Commencer quoi?"
Une des membres de l'Agence, habillée d'un uniforme d'étudiante et agrippée au bras d'un autre détective, avait pris la parole, une moue vaguement inquiète sur le visage.
"-La chasse aux œufs, évidemment!"
À ces mots, un murmure agacé parcourut la foule. Chuuya lui-même n'en croyait pas ses oreilles. Est-ce que cet imbécile heureux était vraiment sérieux?
"- C'est une plaisanterie?! s'écria un blondinet à lunettes, tapotant furieusement du pied.
-À toi de voir, Kunikida-kun! Ça dépend à quel point tu tiens à ton carnet~"
L'homme - Kunikida - laissa échapper un juron sonore. Visiblement, le rouquin n'était pas le seul à avoir été cambriolé la nuit précédente.
"-J'ai l'attention de tout le monde? Parfait!"
Le brun étira ses lèvres dans un sourire à donner des baffes, révélant une lignée de dents blanches parfaitement alignées, avant de porter à nouveau le mégaphone à sa bouche.
"Les règles sont simples! Vous avez tous des œufs attitrés, qui sont dissimulés un peu partout dans la ville. Votre objectif est de ramener les 25 qui vous appartiennent avant la fin de la journée si vous voulez revoir vos biens respectifs! Sur ce, joyeuses Pâques!"
__
Le discours de Dazai tournait en boucle dans la tête du rouquin, comme un message de propagande. Vingt-cinq œufs à trouver, comme s'il n'avait que ça à faire de sa journée.
"-Joyeuses Pâques à toi-même, bouffon, marmonna-t-il dans sa barbe, tout en jetant un regard noir à un groupe d'enfants qui passaient près de lui."
Comment Dazai avait pu, en une nuit, cambrioler les membres de la Mafia et de l'Agence et dissimuler des centaines d'œufs à travers toute la ville, c'était un mystère. Et les raisons qui le poussaient à accomplir un tel acte étaient encore plus mystérieuses, même si, pour sa part, Chuuya pensait que le brun n'avait pas besoin d'une meilleure motivation que de faire chier son monde.
Non loin de lui, un groupe de détectives inspectaient les poubelles d'un immeuble. Loin d'être répugnés par une telle activité, plusieurs d'entre eux discutaient et s'échangeaient des plaisanteries entre eux. Peut-être était-ce là la raison de l'attachement de Dazai à l'Agence: ils y étaient tous aussi tarés que lui.
Le mafieux se retint de pousser un petit cri de panique quand il manqua de rentrer en collision avec un arbre. Pestant contre lui-même et cet abruti de suicidaire qui avait placé cet arbre sur son chemin, il remit en place son chapeau avant de jeter un coup d'oeil vers les branches à sa hauteur.
Il s'apprêtait à faire demi-tour - Dazai lui avait pourtant assuré, dans un de ses foutus mots, que son premier œuf se trouvait dans ce parc - quand il remarqua un léger éclat doré au-dessus de lui. Inclinant la tête, il put clairement apercevoir un œuf, casé entre deux branches.
Tendant le bras, il tenta de l'attraper, sans grand succès. Il réessaya, cette fois-ci en sautant, mais rien à faire; c'était à peine si ses doigts frôlaient le papier. Sentant le peu de patience qui lui restait lui filer entre les doigts, il serra les dents et fit une troisième tentative, toute aussi infructueuse que les deux autres. Ne contenant plus sa rage, il frappa vigoureusement l'arbre avec son pied, dans l'espoir de faire tomber l'objet de son courroux, mais ce dernier était bien coincé et ne trembla même pas.
Pour n'importe qui, cela aurait juste été le fruit du hasard, mais en tant qu'ex-partenaire du connard en chef, il savait très bien que tout était minutieusement préparé, et que Dazai avait fait exprès de le placer hors de sa portée.
Ce simple fait suffit à le rendre définitivement fou de rage, et il déracina d'un seul coup de poing le pauvre arbre qui n'avait rien demandé. Se baissant pour enfin récupérer ce foutu œuf, Chuuya put remarquer qu'il s'agissait bien du sien, grâce à la caricature peu flatteuse qui était dessinée dessus.
Le rouquin décida qu'il fallait mieux ne pas y prêter attention, et déchira le papier. Il n'était cependant pas prêt pour ce qui l'attendait en-dessous, et faillit écraser l'œuf dans son poing sous le coup de la colère.
"-Du chocolat pour chiens?! DAZAI ESPÈCE D'ENFOIR-"
;-;
Malheureusement pour lui, Chuuya avait très vite découvert que cette aventure était loin d'être la pire que Dazai lui réservait. Entre les arroseurs de pelouse automatiques, les vieux bâtiments poussiéreux et les bombes déguisées en œufs, son costume était plus que ruiné. Et avec chaque dégât qui s'ajoutait sur le tissu noir, sa furie augmentait un peu plus.
Cependant, ses recherches avaient fini par porter leurs fruits, et c'était avec une certaine fierté qu'il récupéra l'avant-dernier œuf, enfoui dans un sac de farine d'une boulangerie. Il ne lui restait plus qu'un dernier à trouver, et ses chères bouteilles seraient de nouveau en sa possession.
__
Chuuya tenait le petit mot de papier dans son poing.
Il fixait encore et encore les mots qui y étaient inscrits dessus, tentant d'essayer d'en comprendre le sens. Et ce n'était pas une tâche aisée.
Le rouquin avait reconnu l'écriture de son ancien partenaire. Et quand Dazai Osamu avait décidé de créer une énigme, elle était tout sauf simple.
Le brun était un démon.
Juste pour son plaisir personnel, il s'était amusé à le rendre fou.
Cela expliquait pourquoi Chuuya se retrouvait avec des habits déchirés, mouillés, pleins de cendres sur le dos, au lieu de son habituel manteau noir.
Cette chasse aux œufs avait été un enfer. Dans tous les sens du terme.
Chuuya épousseta de son chapeau quelques brins d'herbes qui s'y étaient accumulés, suite à son passage dans les pelouses.
Dazai paierait pour toutes ces humiliations à la chaîne, le petit roux s'en faisait le serment.
Maintenant, il ne lui restait plus qu'à décoder le mot que son ancien partenaire lui avait gentiment laissé.
Trop aimable de sa part.
Sur la note qu'il persistait à maltraiter entre ses doigts, il pouvait distinguer l'écriture peu appliquée de Dazai.
"Amusante cette chasse, non ☆ ? Et pourtant, il te manque un dernier œuf... dommage pour toi~ À moins que tu arrives à utiliser ton cerveau microscopique pour déchiffrer cette devinette !
Deux choix s'offrent à toi. Tu peux abandonner, et te laisser emporter, ou alors tu peux choisir de lutter, et de te tenir debout face à la vie, envers et contre tout.
Alors ? Que choisiras-tu ?"
La note s'arrêtait là. Chuuya s'apprêtait à replier le papier, quand quelque chose de frais toucha sa paume.
Surpris, le jeune homme constata qu'une jolie fleur rondes aux pétales rouge orangé était désormais dans sa main.
Si pour un œil peu observateur elle aurait pu passer pour un pissenlit trop foncé, ce ne fut pas le cas pour Chuuya.
Il était habitué à voir ce type de fleurs. Et pour cause : Dazai avait pour habitude de toujours en laisser sécher un bouquet à sa fenêtre.
Du souci.
Mais qu'est ce que cette fleur foutait ici ?
Et quel était son rapport avec cette stupide énigme qui n'avait pas l'air d'en être une ?
Chuuya se pinça l'arrête du nez, refusant de laisser le désespoir et l'énervement avoir raison de lui.
Le rouquin n'avait aucune idée de pourquoi il s'entêtait autant à relever le défi de Dazai, et de ce fait, à entrer dans son jeu.
Il fit distraitement tourner le souci entre ses doigts.
Le brun lui avait expliqué la signification de la petite fleur il y avait longtemps. Chuuya tenta de retrouver ce fragment de mémoire, mais son cerveau resta désespérément vide.
Il n'avait plus qu'à se concentrer sur les mots alors.
Après avoir passé dix bonnes minutes à lire et relire les mêmes phrases, le rouquin sentait l'irritation le gagner peu à peu, malgré tout son bon vouloir.
Il semblait qu'il manquait des mots dans la note de Dazai.
Un adjectif de plus ou de moins, cela pouvait changer la donne complètement.
Sans réfléchir, Chuuya continua à faire tourner la fleur entre ses doigts, tandis qu'il faisait des aller-retours sur place.
Oh et puis merde, jura t-il mentalement.
Il n'arrivait pas à résoudre une simple devinette, c'en était d'une tristesse...
Le jeune homme se figea soudainement, arrêtant de faire tournoyer le souci dans sa main.
La tristesse.
Voilà ce qu'était la signification de la petite fleur. Dazai la lui avait expliquée des années auparavant, quand il était encore dans la mafia.
Si jamais il arrivait à mettre la main sur lui... Chuuya le balancerait dans le premier fleuve venu et le laisserait se noyer.
Un rictus satisfait sur les lèvres, le rouquin se figea une deuxième fois en l'espace de quelques minutes.
Se laisser emporter par le courant. Se tenir debout face aux remous.
Le fleuve.
D'un geste rageur, il referma son poing sur le souci, réduisant la fleur à de simples lambeaux végétaux. Cela ne lui disait rien qui vaille. Pourquoi Dazai avait-il cru bon d'ajouter la plante ?
Peu importait la réponse à la question pour l'instant.
Chuuya savait où trouver le dernier œuf.
Le fleuve.
Il se mit à courir de toutes ses forces.
D'une certaine façon, il avait peur que cela soit déjà trop tard.
__
Le fleuve s'étalait doucement devant lui.
À cette heure de la journée, toute personne avait déserté les rives.
Dazai Osamu passa une main absente dans ses boucles brunes qui bougeaient doucement au rythme du vent.
La scène avait tout d'un paysage féérique si ses pensées n'alourdissaient pas l'atmosphère.
Lors de ses heures perdues de sommeil, Dazai se demandait souvent ce que son existence apportait au monde.
Rien si ce n'était souffrance et douleur, était la réponse qui revenait le plus.
Et dans ces moments-là, il n'y avait plus qu'une seule envie qui subsistait.
Celle de disparaître.
Mais la plupart du temps, le prodige brun se contentait de balayer ses réflexions d'un simple mouvement de tête.
Les autres fois, cas plus rares, ses pensées s'accrochaient à lui avec l'énergie du désespoir.
Alors, il restait sur son lit, les bras croisés, à observer son plafond.
Dazai avait particulièrement conscience d'offrir un tableau ridicule à n'importe quel passant qui se déciderait à explorer les rives du fleuve.
Ce n'était pas tous les jours que l'on pouvait apercevoir un homme déguisé en lapin de Pâques, se tenant au dessus des eaux, les bras écartés.
Le tableau qu'il offrait était amusant. Pour n'importe qui ne se trouvant pas dans son esprit.
Dazai eut un rictus moqueur, tandis qu'il fit un pas vers l'avant.
Le cliquement qui résonna après son geste le rappela à l'ordre : le boulet de plomb qu'il avait de plein gré accroché à sa cheville était bien réel.
Le brun soupira. Il serait tranquille ici pendant encore une bonne dizaine de minutes : Chuuya ne résolverait jamais dans les temps sa "petite devinette". Et c'était mieux ainsi.
Dazai refit une tentative, se rapprochant de nouveau du bord pour avoir une meilleure vue des eaux étrangement calmes en cette fin d'après-midi.
Il plissa les paupières quand le reflet du soleil sur le fleuve étincelant lui agressa les yeux.
Sauterait-il, ne sauterait-il pas ?
Dazai avait organisé cette chasse aux œufs sans vraiment réfléchir, pris d'une impulsion soudaine.
Et cela avait été cette même impulsion qui l'avait conduit à l'endroit précis où il avait caché le dernier œuf. Le boulet autour de sa cheville n'était qu'une simple conséquence de ses actions.
Le jeune homme avança d'un dixième de centimètres, se rapprochant un peu plus du bord.
Sauterait-il, ne sauterait-il pas ?
La réponse n'appartenait qu'à lui. La décision finale lui revenait.
Personne ne comprendrait. Ils attendraient tous une note finale, une lettre expliquant son choix, ou même une simple farce visant à organiser sa mort.
Les gens étaient naïfs. Naïfs à en pleurer.
Parfois Dazai se subissait comme un revers de couteau le poids de toutes ses actions prises qui lui pesaient étrangement sur la conscience. Il n'aurait jamais imaginé être dans ce cas. Et pourtant, ses longues nuits d'insomnie prouvaient le contraire.
Dans ces moments-là, le poids de son existence devenait lourd, trop lourd à porter.
Sauterait-il, ne sauterait-il pas ?
Dazai eut un sourire.
C'était une décision irréfléchie, impulsive et non préméditée.
Il lança son corps en avant, dans le vide. Et pendant un court instant irréel, il crut voler, défier toutes les lois physiques.
La seconde suivante, la gravité le rattrapa.
Les yeux à demi fermés, il eut le temps d'apercevoir la silhouette noire qui se découpait sur la berge du fleuve.
- DAZAI !
Un sourire illumina ses lèvres.
Et il s'abandonna à sa chute.
__
L'urgence qui s'était emparée de lui ne s'était pas calmée le long du chemin.
Chuuya s'était mis à courir de toutes ses forces, écoutant son instinct qui lui soufflait qu'il n'aimerait pas ce qu'il allait voir sur les rives du fleuve.
Quand le rouquin déboula, le souffle court et les cheveux emmêlés, sur la berge, il s'avèra que son instinct avait une fois de plus eu raison.
La vision d'un Dazai déguisé en lapin de Pâques se jetant du haut du pont avec un boulet à la cheville, n'était malheureusement pas une image plaisante.
Chuuya ne prit même pas le temps de réfléchir pourquoi il se sentait si concerné par le sort de son ancien partenaire, lui qui avait passé les quatre dernières années de sa vie à le maudire.
Il aurait dû exulter de joie. Et pourtant ce n'était pas le cas.
Même s'il avait conscience que son geste était totalement inutile, il s'époumona, hurlant le nom du brun.
- DAZAI !
Si ce dernier l'avait entendu, il n'en montra rien.
Chuuya vit clairement le moment où tous les muscles du corps de l'ancien mafieux s'étaient relâchés.
Le brun venait d'accepter son sort.
Et quelque chose au fond de lui le nia avec toute l'énergie du désespoir.
Dazai pouvait bien l'abandonner, lui briser le coeur, mais mourir ?
Après avoir souhaité sa mort pendant tant d'années, le petit rouquin réalisa que cela n'avait été qu'une façade pour masquer son sentiment d'abandon.
Il n'avait aucune idée de ce que cette réalisation aurait comme impact sur sa vie, et ce n'était pas le plus important.
La seule pensée cohérente qui avait survécu au passage dévastateur de la peur emportant tout sur son chemin, était l'urgence. L'urgence de sauver Dazai.
Tant pis si le rouquin faisait un choix particulièrement égoïste, sans réfléchir une petite seconde aux désirs de son ancien partenaire, tout était relégué au dernier plan de son cerveau.
Seul Dazai et uniquement Dazai comptait.
Avec un cri de rage, Chuuya ne perdit pas une seule seconde de plus à tergiverser : il se lança corps et âme en avant, utilisant son pouvoir pour rester à la surface de l'eau.
Le bruit mat du corps de Dazai entrant violemment en contact avec le fleuve lui envoya une décharge électrique qui se répandit jusqu'au bout de ses doigts.
- Dazai ! hurla t-il une nouvelle fois, même s'il savait que cela n'aurait aucun impact.
Sans se débattre, le jeune homme brun se laissa couler, emporté peu à peu par le courant du fleuve.
Le souffle de Chuuya se coupa, et cela n'était pas dû à l'effort physique.
Sans réfléchir, il vola jusqu'à l'endroit où son ancien partenaire avait chuté, et il se laissa tomber dans les eaux froides.
Froide était un joli euphémisme pour décrire la température du fleuve.
Une douleur glacée le transperça de toute part, et pendant un moment Chuuya crut qu'un détenteur de capacité l'attaquait, avant de réaliser que cela était uniquement l'oeuvre des eaux glaciales.
Le petit roux avait, au préalable, gonflé ses poumons d'oxygène avant de se lancer à la recherche de Dazai.
Gardant les yeux ouverts au maximum, il tenta de distinguer le corps du brun parmi les algues et la vase ambiante.
Quelque chose de non identifié caressa sa joue, et Chuuya dût retenir l'envie pressante de remonter à la surface.
Dazai. Ne pas perdre de vue l'objectif.
Activant sa capacité pour faciliter ses déplacements, le mafieux fit un tour rapide sur lui-même, avant de repérer une forme sombre non loin de là.
Sans perdre une seconde de plus, il se propulsa dans la direction souhaitée.
Le soulagement l'atteignit quand il accosta sa cible, mais il fut de courte durée quand Chuuya aperçut le lourd boulet.
Son pistolet étant d'aucune utilité sous l'eau, le rouquin fit la première chose qui lui passa à l'esprit : il aggripa la pierre, et utilisant sa capacité pour alléger son poids, il commença à tenter de remonter.
Mais c'était sans compter Dazai, à moitié inconscient, qui passa une main sur l'épaule du petit roux.
Et en une fraction de secondes, son pouvoir fut annulé.
Chuuya redevint comme n'importe quelle personne en train de se noyer.
Il paniqua.
L'air manquait cruellement dans ses poumons.
Le rouquin se mit à battre des jambes de plus en plus fort malgré la douleur.
Le boulet pesait une tonne dans ses bras en feu.
Même si le mafieux était aidé par l'eau qui diminuait le poids, ses muscles hurlaient, protestaient contre la souffrance qu'il leurs imposait.
La tête rousse du jeune homme émergea enfin des eaux du fleuve. Il prit une longue inspiration bienfaitrice qui eut l'effet d'un baume sur ses poumons brûlants.
- Dazai ? murmura t-il en voyant nulle part la tête du brun.
Pourtant, il tenait toujours le boulet dans ses mains.
Un sentiment de panique le submergea totalement le noyant une seconde fois tandis qu'il se mettait désespérément à fouiller les eaux troubles.
À l'aveuglette, sa main se referma sur ce qui ressemblait le plus au toucher à un bras humain.
Sans réfléchir, il tira.
Les traits de Dazai qu'il connaissait si bien apparurent à la surface, et Chuuya tira dans ses dernières réserves afin de regagner une des rives.
Il n'y avait aucune description assez forte pour décrire le soulagement ressenti quand ses deux pieds touchèrent la terre ferme.
Le rouquin résista à l'envie de s'écrouler au sol et de ne plus bouger pendant les cinquante prochaines années, pour se tourner vers Dazai.
Et ce fut à ce moment précis qu'il remarqua que la poitrine du brun ne se soulevait plus.
Un cri inarticulé et inhumain traversa ses lèvres, tandis qu'il se précipitait aux côtés de son ancien partenaire.
- Dazai, Dazai, Dazai...
Chuuya répétait son prénom comme une litanie.
- Dazai, Dazai, Dazai...
Les doigts agités de soubresauts incontrôlables, il saisit le poignet du brun.
Il échoua à trouver un pouls.
Hors de question, hors de question. Il ne pouvait pas-
- Allez bordel !
Ses mains vinrent trouver le torse de Dazai, et d'un geste peu expérimenté, il appuya de toutes ses forces dessus.
Encore et encore.
Il crut entendre une côte se briser dans le processus mais il s'en fichait.
Dazai devait survivre.
Peu importait comment et dans quel état.
Au bout d'un temps qui lui parut infini, l'ancien mafieux déguisé en lapin se contracta, vomissant de l'eau du fleuve.
- Chuuya ? murmura t-il, les yeux vitreux.
Le rouquin recommença à respirer de nouveau.
Oui. Tout allait bien, tout irait bien.
Il voulait l'imaginer ainsi.
Ce léger calme qui l'envahit après que la peur soit passée fut cependant de courte durée.
- Dazai Osamu... Tu es un idiot fini ! Crétin de suicidaire, as-tu seulement pensé un seul instant à moi ?! À ce que ta mort provoquerait ?!
Chuuya hurlait. Il hurlait, retenant ses larmes brûlantes qui noyaient ses yeux bleus. Larmes de soulagement, de colère, de tristesse. Toutes ces émotions qui se bousculaient en lui.
Le roux fixa le brun, encore étendu au bord du fleuve. Il songea qu'ils devaient probablement être pitoyables vu l'état misérable dans lequel ils étaient. Mais il pensa aussi que cela lui importait peu. L'avis des gens ne comptait plus, le monde n'existait plus : à présent, il n'y avait que Dazai, bien vivant, qui avait de l'importance.
Les larmes de Chuuya se mirent à rouler le long de ses joues, épousant les courbes lisses de son visage. Dazai, dans un élan d'empathie pour le jeune homme, leva un bras pour venir essuyer du bout des doigts l'eau salée qui coulaient sur la peau de son ancien partenaire, mais celui-ci le repoussa d'un geste plus brusque qu'il ne l'aurait voulu.
- Tu es un personne détestable Dazai... Tu m'as trahi, abandonné, tu me provoques à la moindre occasion, tu viens de me faire passer l'une des pires journées de me vie uniquement pour ton bon plaisir, tu m'as causé la plus grande frayeur qui soit possible...
La voix rauque d'avoir crié et tremblante à cause des sanglots se brisa. Un silence plana durant quelques secondes. Chuuya finit par plonger à nouveau son regard azur dans celui sombre et impénétrable du brun, avant de murmurer :
- Pourtant je t'aime. Plus que tout.
Une nouvelle fois, le détective posa sa main sur la joue de Chuuya, qui le laissa faire cette fois-ci. Le petit mafieux ferma les yeux, savourant le contact de leurs peaux se touchant.
- S'il te plaît, chuchota t'il une voix tremblante, ne refais plus jamais ça. Je ne veux pas te perdre.
Le jeune homme en costume de lapin ne répondit rien, se contentant d'observer quelques instants le roux à genoux près de lui, avant de saisir son bras pour l'attirer contre lui.
Ce ne serait pas facile, mais peut-être qu'avec la présence de Chuuya à ses côtés, il saurait faire face à la vie et à toutes ces pensées négatives qu'elle lui inspirait. Peut-être qu'il pourrait finir par l'aimer, cette foutue vie.
Un sourire naquit sur ses lèvres, et tandis qu'il resserrait sa prise autour de son roux préféré, Dazai songea que ce dimanche de Pâques n'était pas si catastrophique.
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