Il faisait beau dehors, très beau. Les nuages étaient peu nombreux, laissant la couleur azur du ciel enchanter l'esprit des gens. C'était un charmant début d'après-midi.

C'est au milieu de ce décor paisible, presque éphémère, qu'un ange tombait du ciel.

Ses ailes étaient grandes, d'un blanc si intense que l'on pouvait se demander si elles étaient réelles. Ses cheveux étaient bruns, avaient l'air duveteux et présentaient quelques reflets caramel. Ils étaient survolés d'une charmante auréole dorée qui scintillait au-dessus de sa tête. 

Il avait atterri sur le toit de la gare de Séoul et s'était empressé de se cacher pour échapper au regard de certains passants. Il inspira à s'en gonfler les poumons, respirant avec curiosité l'aigreur, la douceur et l'intensité des émotions humaines. C'était comme sentir un bouquet de fleurs et en savourer toutes les nuances, de la joie, de la frustration, de la colère et des rires...

C'était dans ce monde bien moins parfait que celui duquel il venait, que Luhan avait décidé de faire sa vie.

Accroupi sur le toit du bâtiment, il sillonna rapidement les alentours d'un coup d'œil avant de bondir dans une rue écartée de vie et dans laquelle il ne risquerait pas de croiser quelqu'un. Un claquement de doigts, tous ses attributs disparaissaient et il glissait sa main sur le manche de la valise qui se tenait désormais fièrement à ses côtés.

Il fouilla dans la poche de son pantalon, en tirant un morceau de papier qui contenait toutes les informations dont il avait besoin. Son arrivée n'avait pas été faite au hasard, au contraire, elle avait été pointilleusement organisée. Inscription à l'université, appartement... Tout avait été pris en charge par l'Ordre du Paradis qui avait sciemment planifié sa venue. Il avait toujours beaucoup de mal à réaliser que sa requête avait été acceptée et qu'il était actuellement en train d'arpenter les prestigieuses rues de Séoul.

Son cœur ne cessait de palpiter dans sa poitrine. La Terre Neutre, il en rêvait depuis si longtemps... Après toutes ces années passées au Paradis, Luhan avait fini par s'y ennuyer. Sa routine avait eu raison de lui et sa curiosité avait pris le pas. Les Humains, c'était sa plus grande fascination. Depuis tout petit, il passait ses heures la tête coincée entre les nuages pour tenter de percevoir un fragment de ce qui se passait sous leur royaume.

On ne lui avait pas confié d'humain à veiller dessus, on le jugeait trop rêveur. Sans aucune occupation, il avait fini par écrire plus d'une dizaine d'études sur ce qui vivait sous ses pieds. Des centaines de croquis anatomiques, des milliers de paragraphes sur la physiologie des émotions... Ces Humains avaient beau être dénudés de toutes les belles qualités qui faisaient de lui un ange – et être surnaturel – n'égalaient pas tout ce que ces Hommes pouvaient ressentir. Luhan était curieux, lui ne ressentait qu'une approche limitée de ce ces humains appelaient « émotions ». Et cette curiosité, aussi prise de tête soit-elle, avait réussi à le sauver de l'ennui mortel qu'il ressentait dans le ciel. Un comble !

Luhan passa une main dans ses cheveux, s'assurant que son auréole avait bel et bien disparue. Une fois le pied posé dans le monde des Hommes, toute appartenance au Bien ou au Mal devait être cachée. Souvent, des anges partaient en pèlerinage ici pour mieux comprendre le fonctionnement général des individus sur lesquels ils devaient veiller. Mais Luhan, affranchi de ce rôle, s'était décidé à vivre pour toujours dans ce monde de corruption.

Attention cependant, ne pas être Ange Gardien ne signifiait pas être rejeton de sa communauté ni même être mauvais ange. Il avait une mission différente mais respectait grandement ses origines et adhérait pleinement aux principes angéliques.

Ce que Luhan ne savait pas, c'est qu'il venait de, malgré lui, mettre le Paradis en danger.

Après plusieurs minutes à trouver ses repères, il reconnut le bâtiment qu'ils avaient choisi et s'empressa d'y trouver son appartement. Enfonçant sa clé dans la serrure, il ouvrit sur un charmant studio meublé à ses goûts. Un grand sourire étirait le coin de ses lèvres tandis qu'il entrait dans ce qu'il pouvait officiellement considérer un « chez-lui ».

Il se sentit aussitôt fier et comblé. Il pourrait enfin vivre sa vie et non celle que l'on souhaitait pour lui. Ici, il aurait l'indépendance.

Ou du moins, un semblant.

Il ne prit pas le temps de vider sa valise, la laissant vacante dans un coin de la pièce principale tandis qu'il s'asseyait sur la chaise de son bureau avec enthousiasme. Ses pieds battaient l'air avec amusement, il avait quelques fourmillements dans les jambes, encore peu habitué à marcher autant. Il vida son sac et ouvrit rapidement ses nombreux cahiers pour venir y noter le peu qu'il avait croisé aujourd'hui. Ses recherches allaient enfin devenir plus concrètes. Il avait de tout, de l'anatomie, de la physiologie mais aussi beaucoup d'esquisses historiques et de géographie. C'était si différent de là où il était né ! Il y passa plusieurs heures, relisant ses notes pour mieux comprendre comment il devrait se comporter une fois que ses cours universitaires commenceraient.

Il avait réussi à intégrer une faculté d'histoire, ce n'était pas l'aspect qui l'intéressait le plus mais c'était celui dont il manquait d'informations. Ici, il pourrait trouver les réponses à tout ce qui expliquait le fonctionnement sociétal de ces petites créatures mortelles. Bien souvent, les anges faisaient un court passage d'une semaine pour intégrer aussi rapidement que possible ces connaissances avant d'être promus et de s'occuper de leur humain choisi. Lui, puisqu'il s'agissait d'un aller sans retour, avait choisi de prendre son temps et d'apprendre lentement, rien ne pressait de toute façon.

Une note glissa du dernier manuscrit qu'il fermait délicatement, l'écriture était rouge et le sigle du Conseil y était tamponné. Il fronça un sourcil, certain de ne pas être celui qui avait glissé cette feuille entre les pages de son livre. Le titre résonna dans sa tête et une vague de frisson glissa de sa nuque au bas de son dos : Règlement de Conduite en Terre Neutre, il eut envie de rouler des yeux. C'était très certainement sa mère qui avait glissé une page du RCTN dans ses affaires. Il lut les lignes rapidement, il les connaissait déjà par cœur. Tout le monde au Paradis devait les connaître par cœur.

Premièrement, aucun immortel, qu'importe son rang et sa fonction, n'est autorisé à montrer signe d'appartenance au Bien comme au Mal.

Deuxièmement, il est formellement interdit d'utiliser ses qualités magiques au risque de bouleverser la stabilité de ce monde.

Troisièmement, toute relation amoureuse entre deux immortels d'appartenance opposée est soldé d'une sanction avec les plus lourdes conséquences. 

Luhan pinça les lèvres, avec toute l'euphorie qui avait enflammé son corps depuis son arrivée, il avait oublié une des questions les plus évidentes :

– Comment reconnaître un démon ?

Il se leva, marchant en direction de sa valise pour enfin l'ouvrir et ranger ses derniers effets personnels. Dans sa tête, un milliard de questions bourdonnaient.

– Ils ont sûrement un regard sournois et calculateur. Les yeux trahissent toujours.

Un petit sourire éveilla les traits soucieux de son visage. C'est vrai qu'ici, il serait certainement voué à côtoyer des démons sans le savoir. Et cette idée lui glaçait le sang, il n'avait certainement pas envie de passer une seule minute avec de tels êtres corrompus. Ils défendaient une cause qu'il ne soutenait pas et même si leur présence était nécessaire à l'équilibre du fonctionnement humain, Luhan avait entendu suffisamment de choses horribles sur eux pour être convaincu de ne pas vouloir se mêler à eux.

– Ou alors ils envoient des ondes négatives autour d'eux, comme un signal pour se reconnaître. Ils ne sont pas du genre à vouloir respecter les règles, la peur, la douleur et les cris sont la recette de leur bonheur.

Si les mortels intriguaient fortement Luhan les démons, eux, étaient certainement un mystère encore plus grand.

La semaine passa rapidement, si rapidement qu'il en oublia bien vite cette histoire de démons et embrassa avec joie sa nouvelle vie. Aujourd'hui, il serrait un peu trop fort les anses de son sac. C'était son tout premier jour à l'université.

Tout était si stimulant qu'il en avait presque envie de vomir, ça tournait dans tous les sens. Il y avait des bâtiments partout, des lettres et des numéros à en perdre la tête. Il avait reçu un long mail dans la mâtiné avec toutes les directives, ça lui avait semblé facile. Mais il avait réussi à se perdre, marchant dans un couloir avec une infinité de nombres qui ne ressemblaient en rien à la salle où il devait se rendre.

Les battements de son cœur sonnaient terriblement fort dans ses oreilles tandis qu'il regardait autour de lui sans comprendre où il se trouvait. Plus il se perdait et plus il se sentait ridicule, ne retenant que les sourires moqueurs et les attroupements féroces qui l'éloignaient de sa destination. Ici, il se sentait ridiculement petit et monstrueusement insignifiant.

Trop occupé à chercher, il ne fit pas attention à ses chaussures et marcha sur son lacet malencontreusement défait. Il tituba ridiculement dans le couloir avant de fièrement s'écraser au sol. Les gens s'écartèrent et continuèrent leur passage, le laissant à terre. Un rouge cramoisi lui brûla le visage tandis qu'il se dépêchait de renouer le lacet de sa chaussure, il osa même murmurer quelques jurons.

– Tu ne t'es pas fait mal ? avait demandé un étudiant en s'arrêtant à son niveau.

Luhan sursauta, il n'avait pas vu qu'un garçon s'était approché de lui. L'inconnu rigola et lui tendit la main pour l'aider à se relever. Le brun accepta l'offre sans broncher.

Devant lui, le jeune homme le regardait avec un sourire chaleureux, presque compatissant. Il était grand, des cheveux d'ébènes qui lui recouvraient presque les yeux et un regard sombre aux allures énigmatiques. Luhan eut un désagréable frisson dans les doigts, lâchant rapidement la main de l'inconnu avec une expression de surprise. L'ange était secoué d'une vague d'angoisse qu'il ne comprenait pas.

Était-ce ça ? Entrer en contact avec un humain ?

Sa main resta engourdie quelques secondes encore avant que la sensation ne s'évapore.

– Tout va bien, un peu sonné mais je n'ai rien, répondit poliment Luhan avant de se détourner pour continuer ses recherches.

Il était encore un peu déboussolé par l'avalanche qui avait fendu les membres de son corps.

– Excuse-moi, saurais-tu où trouver l'Amphithéâtre Héraclès ?

Il avait fait demi-tour, vaincu par son manque de sens de l'orientation pour demander, d'un regard presque suppliant, à l'inconnu de l'aider. Le noiraud esquissa un fin sourire et lui fit signe de le suivre.

– Suis-moi, c'est de l'autre côté du bâtiment.

Luhan hésita, devait-il le suivre ? L'inconnu lui tournait déjà le dos, s'enfonçant dans la foule étudiante sans regarder une seule fois dans son dos. Il avait un sourire amusé qui trônait sur ses lèvres. Luhan ne sut s'il se montrait aimable ou s'il se moquait de lui, malgré tout, il accéléra pour se retrouver à son niveau et se faire guider. Qu'importe les expressions étranges de ce mortel, il n'allait pas refuser qu'on lui montre le bon chemin.

– Tu es ancien ici ? demanda timidement Luhan en levant la tête dans sa direction.

– Non, pouffait le plus grand. J'ai demandé à mon grand-frère avant de venir, je suis en première année.

Leurs épaules se frôlèrent lorsqu'ils esquivèrent deux retardataires qui couraient dans les couloirs. Luhan se raidit mais fit de son mieux pour ne rien laisser paraître. Dans sa tête explosaient à nouveau une quantité infernale de questions. Il n'avait pas anticipé ce genre de réactions de la part de son corps, les touchés humains le surprenaient en tout point.

– Qui es-tu ?

L'inconnu fronça un sourcil en baissant la tête pour le regarder droit dans les yeux.

– C'est une bien drôle de façon de demander mon prénom.

Le brun sursauta d'embarras, il écarquilla les yeux et balbutia :

– Excuse-moi c'était maladroit... Comment t'appelles-tu ?

S'il y avait eu un trou à côté de lui, Luhan aurait certainement sauté dedans et n'en serait jamais ressorti. Il s'était entraîné un nombre incalculable de fois la veille mais il venait de royalement se rater. Le jeune homme allait le prendre pour un fou, il en était convaincu.

– Pourquoi est-ce si important de connaître mon prénom ?

La surprise submergea le brun de la tête aux pieds, il hoqueta et baissa la tête honteusement. Cette situation aussi il ne l'avait pas anticipée. Il y avait quelque chose de mystérieux qui rodait autour du jeune homme, quelque chose qui le statufiait, il ne savait plus comment réagir face à lui.

C'était comme s'il se faisait dominer, enserrer entre des doigts de maître.

La main de l'inconnu se glissa sous son menton et lui fit relever la tête. Une esquisse provocatrice dansait sur ses lèvres roses. Luhan se perdit dans le détail des iris du plus grand, certain d'y croiser une lueur d'amusement.

Était-il en train de se moquer de lui ?

– Oh Sehun, lançait le noiraud, un rictus dans la voix.

Luhan le regarda avec incompréhension, que venait-il de dire ? Était-ce un langage mortel dont il ignorait l'existence ? Cette fois-ci, ce fut un rire franc qui franchit les lèvres du plus grand. Il glissait sa main dans les cheveux de l'ange et ébouriffait gentiment ses cheveux.

– Tu m'as demandé mon prénom, non ? ajouta-t-il en reprenant sa route, un nuage de mystère sous les pas.

Seulement cette fois-ci, il entraînait Luhan avec lui, scellant leurs mains d'une promesse muette.

«  Tu ne t'es jamais demandé si notre relation avait un sens ? 
Ne te complique pas la vie. Notre relation n'a aucun sens. »

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Bonjouuurr ! Voici le grand retour de notre bon vieux chapitre 1 ! Je suis un peu nostalgique, mon dieu ça fait si longtemps ! Je suis un peu émue haha. 

Luhan et Sehun se rencontrent dès le début de l'histoire et leur rencontre laisse de grandes impressions à notre cher ange qui découvre le monde des Hommes ! J'espère que vous avez aussi hâte que moi pour la suite !! 

Cette histoire est complètement réécrite, relue et corrigée par moi-même. Des fautes sont susceptibles d'être trouvées, je m'en excuse d'avance. 

Merci à tous ceux qui découvrent l'histoire et ceux qui la relisent <3 
On se retrouve le week-end prochain, Winnie.