Chapitre 15


Au-delà du voile


Emily ouvrit les yeux péniblement. Une douleur atroce s'empara de ses côtes, comme si quelque chose la broyait de l'intérieur.

- Emily ? Appela une voix, la tirant de sa léthargie. Emily, ça va ?

La rouquine remarqua les cheveux violets de Tonks, assise sur une chaise paraissant peu confortable, à côté de son lit. Les yeux gris pâle de la métamorphomage la vieillissaient, lui donnant un air triste.

- Ça peut aller... la rassura-t-elle. Que s'est-il passé ?

- Tu t'es faite enlever par un Mangemort. Remus, Sirius et moi sommes restés un moment au parc et un portail s'est ouvert. En entendant ta voix, Remus s'est précipité dedans et le portail s'est refermé. Il t'a sauvée et était sur le point de se battre avec tout un tas de Mangemorts quand nous sommes arrivés, guidés par Rogue. Remus t'a amenée là et t'a veillée toute la nuit.

Emily essayait de tout assimiler, remettant chaque bribe de souvenir à sa place. Elle se rappelait du cri qui avait mis fin à sa souffrance mais tout le reste lui était totalement étranger. L'Aurore se tourna dans tous les sens, cherchant quelqu'un de ses yeux fatigués.

- Où est-il ? Demanda-t-elle, troublée.

- Il est au QG avec les autres, ils t'attendent. Sirius a demandé à ce qu'on revoie toute la sécurité et les planques de l'Ordre. Mais Lupin a dit qu'il s'en voulait, que c'était de sa faute ce qu'il t'était arrivé, il a demandé à sortir de l'Ordre, expliqua l'Aurore à son amie.

La jeune femme n'en revenait pas. Il jouait encore à ça ?! Elle était prête à tout lui pardonner et lui, il voulait encore fuir ? Faisant fi de la douleur, la rousse se leva d'un bond et se dirigea vers la sortie.

- Qu'est-ce que tu fais, Emily ? Appela Tonks derrière elle.

- Je vais au QG, j'ai des baffes à distribuer !


La porte d'entrée claqua, attirant l'attention de toutes les personnes de la maison. Le portrait de la mère de Sirius injuria copieusement le nouvel arrivant de son timbre suraiguë. Une autre voix énervée leur parvint du couloir de l'entrée.

- Où sont-ils ? Criait la voix.

La porte du salon-salle à manger s'ouvrit brusquement, laissant apercevoir le visage furieux d'une Emily tout juste réveillée. Tonks suivait, l'air étonné.

- Ah, vous voilà ! S'emporta-t-elle en se campant devant Rogue, debout au milieu de la salle.

Sa main partit toute seule et vint s'écraser sur le visage pâle du Maître des Potions, y laissant la trace bien visible de ses cinq doigts.

- Ça, c'est pour m'avoir caché votre double-jeu ! Hurla la jeune femme.

Severus s'apprêtait à lui rendre son geste insolent et inadmissible mais la rouquine était déjà partie vers le fond de la salle, faisant face à un Remus écroulé dans un fauteuil. La claque eut un bruit sec.

- Et ça, c'est pour vos remords à la con ! Cria l'Aurore, à bout, indignant Mrs Weasley par de tels propos. J'attends toujours que vous trouviez du courage, je ne désespère pas !

Leur attirance l'un pour l'autre n'était plus un secret à présent, et remonter les bretelles à Lupin en public lui ferait sûrement le plus grand bien, ce dont il ne s'apercevrait naturellement pas...

Le ricanement de Rogue énerva davantage Emily dont le visage prit une teinte encore plus rouge. Elle se tourna vers lui, un air menaçant peint sur ses traits d'ange.

- Cessez donc de rire bêtement, vous ! Parce que, quand vous êtes arrivé comme une fleur, hier soir, au milieu de tous ces Mangemorts, si j'avais eu ma baguette, je vous jure que vous auriez été le premier sur ma liste à recevoir une montagne de sortilèges peu sympathiques ! L'autre squelette articulé sans nez n'aurait eu qu'à attendre son tour, Seigneur des Ténèbres ou pas !

Tous la regardaient, choqués par l'humeur massacrante de l'Aurore. Aucun n'osa parler. Emily ferma les yeux et inspira profondément pour se calmer. Lorsqu'elle les rouvrit, toute la colère qu'elle avait en elle semblait s'être dissipée. La rousse reprit d'un ton plus calme et plus doux :

- Merci de m'avoir sauvée. Tous, précisa-t-elle en lançant un regard peiné à Lupin.

La jeune femme sentit une haine farouche monter en elle quand elle vit que Remus ne la regardait même pas. Elle tourna les talons avant d'exploser une seconde fois, le loup-garou s'en était déjà assez pris pour aujourd'hui. Elle sortit en lançant à la volée :

- Je vais chez ma mère.

Puis la porte d'entrée claqua pour la deuxième fois et la maison retrouva son calme.

- Ça, c'est ce qui s'appelle avoir un tempérament de feu, rigola Sirius, encore chamboulé par le changement brutal d'humeur de la jeune femme.


Emily était penchée au-dessus de sa tasse de thé, dans la cuisine, son index dessinait de petits cercles dans l'air, faisant tourner la cuillère avec régularité. La vapeur du breuvage brûlant lui réchauffait le visage. La jeune femme était perdue dans ses pensées, les yeux rivés sur le mouvement du petit couvert en métal. Une main se posa délicatement sur son épaule.

- Qu'est-ce qui ne va pas, ma chérie ? Lui demanda Mrs Johnson. Tu es toujours contente quand tu viens me voir d'habitude !

La rouquine soupira. En réalité, rien n'allait mais elle ne voulait pas inquiéter sa maman-poule. Elle releva la tête et afficha un faux sourire.

- Ne me dit pas « tout va bien », je sais que ça ne va pas, l'avertit sa mère en devançant son mensonge. Depuis quelques temps, tu es bizarre. D'abord, tu ne bois plus du jus de citrouille mais du thé, ensuite, tu ne me donnes presque plus de nouvelles, il t'est arrivé des tas de trucs étranges dont tu ne me parles pas. Et maintenant, on dirait que tu viens me voir pour éviter quelque chose !

L'Aurore rigola. Décidément, les mères avaient un troisième œil plus qu'efficace. Catherine s'assit en fasse de sa fille, à l'écoute.

- T'as raison, céda Emily en écartant la tasse de thé. En fait, ce qu'il s'est passé, c'est que je suis tombée amoureuse.

- Mais c'est génial ! De qui ? Depuis combien de temps ? Il est comment ? J'espère que ce n'est pas « elle », au moins, la taquina-t-elle.

Devant cette foule de questions, la rouquine resta muette quelques instants.

- Il s'appelle Remus John Lupin et heu... ça fait environ deux ans.

- Deux ans ?! Et tu ne m'avais rien dit ? Mais... attends voir... tu étais encore à l'école, il y a deux ans ! S'indigna sa mère.

La jeune femme sourit et haussa les épaules, comme pour dire « c'est trop tard, de toute façon ! ». Mrs Johnson retrouva son sérieux d'un coup et demanda :

- Il a déjà quelqu'un, c'est ça ?

- Euh... non... non, pas du tout ! C'est juste qu'il n'a pas le courage de me l'avouer, il dit qu'il ne peut pas...

La rouquine baissa la tête, complétement dépitée. Catherine se leva, contourna la table et prit sa fille dans ses bras. Leur étreinte dura longtemps, le temps de consoler Emily.

Puis, après un long moment, elle se dégagea gentiment des bras de sa mère et lui sourit.

- Bon, je vais y aller. Merci.

Mrs Johnson ne la retint pas. Elle savait que sa fille travaillait beaucoup et qu'elle ne pouvait jamais rester bien longtemps. Elle la regarda quitter la maison et l'entendit transplaner. Catherine lâcha un long soupire de nostalgie. Qu'il lui paraissait loin, le temps où il fallait lui donner à manger et la border le soir...


Emily arriva de bonne humeur devant le 12 Square Grimmaurd et pénétra dans la bâtisse, plus calmement que quelques heures auparavant. Elle traversa le long couloir sombre de l'entrée sans se faire insulter par la peinture de Walburga Black. Bizarre, remarqua simplement la jeune femme. Elle ouvrit la porte de la salle à manger et son sourire disparut instantanément de son visage. Tous les membres étaient répartis dans la pièce, le regard triste, aucun ne parlait. Même Rogue fixait le bois de la table, silencieux. La panique la gagna et instinctivement, elle chercha Remus des yeux. Son cœur se calma quand elle le vit, de dos, dans le fond de la salle comme à son habitude, regardant par la fenêtre, abattu.

- Que s'est-il passé ? S'inquiéta Emily.

- Une attaque de Mangemorts au Ministère, répondit doucement Kingsley. Ne t'en fait pas pour Nymphadora, elle est à Ste Mangouste, elle va bien, la rassura-t-il.

Cette nouvelle tétanisa la rouquine. Des Mangemorts ? Au Ministère ? Son esprit réfléchissait à cent à l'heure. Elle n'avait même pas remarqué l'absence de Tonks. Comme après chaque combat, la jeune femme compta les membres. Il en manquait un. Elle chercha de ses yeux désespérés les onyx de celui qui était devenu, avec le temps, son meilleur ami.

- Où est Sirius ? Demanda-t-elle, tremblante.

Le Chef des Aurors leva à nouveau ses yeux sombres vers elle et lui sourit tristement, en secouant négativement la tête. Emily ne pouvait y croire. Comme pour certifier l'annonce silencieuse de Kingsley, tous la regardèrent, certains pleuraient, d'autres n'en étaient pas loin. Tous la fixaient, tous sauf Remus, toujours à contempler la rue par la fenêtre. L'Aurore sentit son cœur se serrer et ses yeux se remplirent de larmes. Elle avait du mal à respirer, elle avait besoin d'air. Emily fit demi-tour et alla s'asseoir sur le perron. Elle craqua, pleurant toutes les larmes de son corps. L'Ordre s'était battu contre les Serviteurs des Ténèbres et elle, elle n'était pas là. Elle aurait dû être avec eux, peut-être que Sirius ne serait pas mort... Elle se prit à penser à Remus. Qu'elle avait envie de se trouver dans ses bras pour pleurer ! Mais il devait être beaucoup plus affligé qu'elle... Alors elle renonça, prenant sur elle.


La jeune sorcière se tournait et se retournait mille fois dans ses draps chauds et collants. Son oreiller était trempé par les litres de larmes qu'elle avait versé sans pouvoir s'en empêcher. Son esprit vagabondait de souvenir en souvenir, s'attardant sur les moindres détails du visage de Sirius qui s'imposait à elle à chaque instant. Le revoir en train de rire, de se disputer avec Rogue, de lui sourire ou bien de taquiner Remus, toutes ces images lui broyaient le cœur.

Ne pouvant supporter cette situation de malaise intense plus longtemps, elle jeta négligemment son long manteau sur ses épaules dénudées et descendit dans la cuisine en pyjama et robe de chambre improvisée. Ses pieds nus rencontrèrent le carrelage froid du couloir de l'entrée, elle se monta donc sur ses pointes en sautillant pour atteindre le plus rapidement un des vieux fauteuils en cuir du salon. Après avoir pris, au passage, des biscuits secs dans le placard de la cuisine, Emily saisit le livre qui traînait sur la petite table basse et se laissa lourdement tomber sur les coussins moelleux. Sa cuisse rencontra quelque chose de peu confortable et elle leva une fesse pour retirer l'objet gênant. La rouquine tira une baguette et l'observa un instant, se demandant à qui pouvait bien appartenir celle-ci. Elle n'eut pas le temps de mettre un nom sur le propriétaire du bout de bois joliment sculpté qu'une odeur si familière s'imposa tout à coup à ses narines. Ce parfum enivrant la libéra de toute sa tristesse d'un seul coup. L'Aurore chercha des yeux celui à qui appartenait cette douce senteur et elle tomba sur la cape rafistolée de Lupin, bien pliée à sa manière sur l'accoudoir de fauteuil d'en face. Elle se pencha en avant, déposa le livre et la baguette de Remus sur la table, puis tira le vêtement à elle. Emily enroula son petit corps dedans et ferma instantanément les yeux, blottie dans ce nuage de rêve, le cœur gonflé d'un bonheur indéchiffrable et le sourire aux lèvres.


Remus se faufila silencieusement dans le manoir des Blacks. L'air chaud de la demeure le revigora et détendit ses muscles crispés par le froid tenace de cet hiver interminable. Il était parti marcher dans les rues désertes de Londres endormie, laissant volontairement sa baguette au Square Grimmaurd. En revanche pour ce qui était de sa cape, la tristesse et la douleur avec lesquelles il était sorti l'avaient peu à peu abandonné, soumettant à nouveau son corps à l'air glacial de l'extérieur. Le sorcier se dirigea vers le salon pour récupérer son manteau et sa baguette avant de rentrer chez lui, bien décidé à quitter l'Odre pour de bon. Il se sentait lâche d'abandonner Harry et les autres, de partir alors que la situation ne faisait qu'empirer, mais la perte de son dernier ami l'avait brisé. Personne ne pourrait plus l'empêcher de prendre cette décision à présent... Personne ne pourrait le sauver de cette infinie tristesse qui s'était emparée de lui et qui ne le lâcherait plus jamais...

Personne, c'était sans compter sur les boucles fauves qui étaient étalées dans le désordre le plus total sur le canapé. Il soupira de désespoir en la voyant dormir ainsi, paisiblement, enfouie sous deux couvertures et...son manteau ? Pour une raison qui lui resta inconnue, Remus se mit à rigoler doucement. L'ironie du sort ! Il venait de se jurer de partir d'ici, de laisser tout ça derrière lui, de passer à autre chose, et maintenant qu'il était décidé, quelqu'un l'en empêchait sans en avoir conscience. Et pas n'importe qui, celle qui avait volé son cœur... Vaincu par la fatigue et le surplus d'émotions qui rythmaient aléatoirement son palpitant, il se laissa tomber sur le fauteuil en face d'Emily et l'observa dormir, jusqu'à se laisser emporter à son tour dans les méandres d'un sommeil sans rêves.



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Hey !

Par Merlin, je viens de tuer Sirius Black ! Ne m'en voulez pas, s'il vous plaît !! Et puis, de tout façon, c'est pas ma faute, c'est Rowling qui l'a écrit en premier...^^ (oui, je sais, c'est tout de même inadmissible et horriblement triste)

Bon, ce chapitre commence par une de mes meilleures scènes humoristiques, j'espère que ça vous a plu... Moi j'ai trop aimé l'écrire! 

Laissez-moi vos petits commentaires et n'hésitez pas à voter !

Un immense merci pour toutes ces vues, c'est juste incroyable !

A lundi pour un petit saut dans le temps et un chapitre plus drôle,

Votre dévouée, Lupalya <3

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