2

Je suis entrée dans la chambre. Il est  encore très pâle, mais il est  hors de danger, pour cette fois.

- Salut.
Il m'a regardé, et m'a sourit brièvement.
- Salut.
Sa voix est rauque, éraillée, parce qu'il a été intubé.

- Je t'ai apporté des vêtements.
- Merci.
- Dylan...
Il soupire.
- Allez, Manon, dis le, je t'ai déçu ? Je le sais.

A mon tour de soupirer.
- J'ai eu peur Dylan. J'ai vraiment eu très peur.
- Je sais, je suis désolé.
- Non, tu l'es pas. Je t'ai laissé entrer dans ma vie,   je fais jamais ça, avec personne. Pire, je t'ai fais entrer dans la vie de mon fils ! Mon fils Dylan.
- Qu'est ce que tu veux que je te dise ? Que tu as eu tort ? Bein voilà, je te le dis.
- C'est tout ? C'est tout ce que tu trouve à me dire ?
- Je suis comme je suis, Manon, tu ne peux pas me changer, personne ne le peux.
- Tu n'es pas né drogué, ça c'est quelque chose que tu peux changer.
- Et si j'en ai pas envie ?

Je m'attendais pas à ça. C'est idiot, hein.
- Je ne veux plus vivre ça, Dylan. Je peux pas vivre comme ça.
- Je ne te demande rien, Manon. Ne t'inquiète pas, je passerais récupérer mes affaires  et je sortirais de ta vie.

Je suis au bord des larmes. Ça peut pas se terminer comme ça. Ce n'est pas possible. Ça fait trop mal.

- Ce n'est pas ce que je veux.
- Mais c'est ce qu'il y a de mieux à faire.
- Tu pourrais te faire soigner, allez en désintox.
- Même si je le voulais, je ne pourrais pas, je n'ai même pas de couverture sociale.
- Mais tu pourrais, il suffirait de dire à la sécurite sociale, que tu es mon coloc. Ce qui est vrai d'ailleurs.

Il sourit.
- Un coloc qui ne paie rien ?
- Ca c'est mon problème.
- De qu'elle planète  viens tu au juste ?
- Quoi ?
- Tu es un ange tombé du ciel Manon. Ça n'existe pas les gens comme toi.
- Je comprends pas.
- Manon, qui accepte d'héberger un SDF ? Tu me nourris, tu m'habilles, tu me loges, quand je suis malade, tu me soignes, quand je rentre bourré que je dégueule partout, tu t'occupes de moi, tu nettoies, sans rien dire.
Ton comportement n'est pas humain, ce n'est pas ce que les gens font. Donc  ou tu es un ange égaré dans ce monde cruel, ou tu es une extra terrestre.

Je souris.
- Je suis  une humaine  tu sais, et je n'ai rien d'un ange.
- Pour moi, tu es le plus bel ange qui soit au monde, Manon mon ange  gardien.

Je déglutis. Il a le don de me mettre mal à l'aise.
- Sérieusement, Dylan, il y a une assistante sociale, ici, accepte de la rencontrer, elle pourra t'orienter vers un centre de désintox.

Il ne répond pas.
- Manon, je pourrais jamais assez te remercier, pour tout ce que tu as fait pour moi, mais...j'irais pas dans ce centre.

Je ferme les yeux. Je m'attendais à cette réponse.
- Dans ce cas, récupére tes affaires, et va t'en. Je ne veux plus te revoir.
- Manon...

Je pleure, voilà, les larmes que j'essaie de retenir ont finalement gagné, elles dévalent mes joues, sans que je puisse les en empêcher.
- Si tu veux te suicider, alors je ne peux plus rien pour toi.
- Je ne veux pas me suicider, mais...
- Si. C'est un suicide, lent, et cruel  et je ne veux pas en  être le témoin.

Je quitte la chambre, je n'en peux plus. J'arrive chez moi, et me jette sur le canapé, je m'enroule dans un Plaid, et je fonds en larmes.

Trois jours. Il a quitté l'hôpital. Je ne sais pas ou il est. J'ai été convoquée à l'hôtel de police.
Ils ont même perquisitionné chez moi.
Ils espéraient trouvé de la drogue, ils n'ont rien trouvé, parce qu'il n'y avait rien à trouver. Dylan n'a jamais consommé chez moi  à part un peu de Beuh, mais, j'y ai vite mis les haut là.

Dylan, ou es tu ? Comment vas tu ?
J'ai tellement peur.
Il n'est pas revenu chercher ses affaires.
Sa guitare est toujours posée sur son lit, de même que ses carnets de compositions.

Les jours passent, j'appelle l'hôpital, la police, tous les jours, de   peur de découvrir qu'il est mort.

Ça fait maintenant trois semaines qu'il est parti.
J'ai le sentiment que je ne le reverrais pas.
Je erre dans cet appartement, trop calme, trop silencieux.
J'allume la télé, parce que le silence me tape sur les nerfs. J'ai tout le temps envie de pleurer, je n'arrive pas à me concentrer sur mes études.
Comment je faisais, avant  qu'il n'entre dans ma vie ?  j'ai l'impression qu'il a toujours été là.
Il a mis de la folie, dans ma vie, du désordre, aussi, mais, surtout, des fous rires, des discutions  jusqu'à l'aube.
Il est mon ami, mon complice, mon confident.
Je ne sais plus vivre sans lui.

Et puis, un coup de sonnette. J'ouvre la porte.
- Dylan ? Mais...
- Salut Manon.
- Tu viens récupérer tes affaires ?

Il est sale, et ses vêtements sont déchirés, il est couvert de bleux, mais je refuse de me laisser attendrir.

- Je...heu.. Je peux entrer ?
Je m'efface, il entre. Il a l'air gêné, ça ne lui ressemble pas du tout. J'ai envie de me jeter dans ses bras, il m'a tellement manqué.

Il s'assoit sur le canapé, il n'a pas enlevé son manteau trempé, ni ses bottes boueuses, je grimace.

- Manon, tu crois que c'est trop tard, pour ton assistante sociale ?
Je le regarde, bouche bée.
- Tu...tu veux...
- Aller en désintox ? Oui.
- Pourquoi ?
- Il faut une raison ?
- Oui.
- Je m'en veux, tu sais. Tu es la seule qui m'ai tendu la main, tu as fait tellement, pour moi, et moi...Je t'ai fait du mal. J'avais pas le droit.
- Alors c'est pas la peine.
- Quoi ? Pas la peine de quoi ?
- La désintox. Si tu le fais pas pour toi, ça ne marchera pas.
- Mais...c'est aussi pour moi.
- sûr ?
- Oui. Je ne veux plus vivre comme ça. Ethan et toi, vous me manquez.

Je hoche la tête, plus émue que je veux bien l'admettre.
- Je vais te faire couler un bain.
- J'ai l'air d'en avoir besoin ?
Je grimace, il rit.
- D'accord j'admets que je ne sens pas la rose. Mais je boirais bien un café, avant.
- Bein, tu sais, ou est la cafetière.
- J'espérais que tu me le préparerais.
- Il n'y a pas marqué bobonne sur mon front.
- Non, il y a marqué Ange gardien.
- Les anges gardien ne sont pas des bonnes. Tu veux un café, tu te sers.
- Oui m'dame.

Je ris en me rendant dans la salle de bain.
Ça m'a manqué, ces plaisanteries.
La vie a reprit son cours, mais chaque fois que je m'absente, je me demande ce qu'il fait, s'il sera encore là, quand je rentrerai.

Le rendez vous avec l'assistante sociale c'est bien passé, Dylan va être pris en charge, je respire.
Les six prochains mois vont être longs, mais au moins, je saurais ou il est  et ce qu'il fait, je saurais qu'il est en sécurité.

Ce soir  là, après qu'il se soit endormi, j'ai du mal à trouver le sommeil.
Je repense à notre rencontre.
A ce soir  de pluie, ou je l'ai trouvé devant la FAC.

- Ce n'est pas un bon jour, pour jouer. Lui ai je dit.
- Non, je ne suis pas venu pour ça.
- Pour quoi alors ?
- Pour un repas gratuit ?
Je ne peux pas m'empêcher de rire
- Ah d'accord.
- Mais pas que. J'avais envie de te voir.
J'ai rougi, ça la fait rire.
- le resto U est fermé, mais on peut aller au Macdo.

Après le repas, il pleuvait encore plus.
- Ou tu vas dormir ce soir ?
Ce n'est pas la première fois que je lui pose la question, d'habitude il répond evasivement.
- Je ne sais pas, je trouverais bien.
- Il va faire froid, cette nuit, et puis  la pluie.
- J'ai l'habitude tu sais.
- Je sais. Mais.. Il y a un formule un, pas loin, si tu veux...
- Tu veux me payer l'hôtel ?
- Trente euro, ça va  c'est pas cher, et puis...Il y a une douche.
- Pourquoi tu fais tout ça ?
Je hausse les épaules. J'en sais rien moi même. J'ai jamais fais ça. Mais...Dylan, il a quelque chose.. D'attachant, il me fait rire, et j'aime parler avec lui. J'aime sa façon désinvolte d'aborder les choses, même les plus sérieuses.

Je l'accompagne jusqu'à l'hôtel, et je rentre chez moi.
Quelques jours plus tard, Il fait vraiment très froid.
Je n'ai pas vu Dylan, à midi.

Je suis sorti tard de la FAC, le resto U est fermé, j'ai hâte de rentrer.
- Salut Manon.
- Dylan ?
- Ouais. Je voulais te remercier pour l'hôtel.
- Il n'y a pas de quoi.

A la lueur du réverbère, je vois les bleux sur son visage.
- Qu'est ce qui t'es arrivé ?
Il hausse les épaules.
- Rien, un type a essayé de me prendre ma guitare.
- Ça fait mal ?
- J'ai l'habitude.
- Je...j'aimerais pouvoir te prendre une chambre, mais...Je suis fauchée.
- Je suis pas venu pour ça.
- Ah tu es venu pourquoi alors ?
- Je voulais juste te voir. Mais j'ai l'impression d'être mal tombé. Ça c'est  mal passé ?
Je hausse les épaules.
- C'est rien, juste...une petite crise d'angoisse, j'ai l'habitude.
- C'est pas toujours facile hein ? A nous deux  on fait la paire, avec nos encombrantes casseroles.
J'ai souris. Et sans même comprendre ce que je faisais, ni pourquoi, je lui ai dis, viens, suis moi.

Il l'a fait, et on s'est retrouvé devant mon immeuble.
On est entré, mais devant ma porte, j'ai hésité.
Qu'est ce que j'étais en train de faire ? J'emmenais un inconnu chez moi. Ça allait à l'encontre de tous mes principes ! Moi qui sursautais chaque fois qu'un mec me frôlait, qui courrait me réfugier dans les toilettes lorsque je me trouvais entourée de trop de monde.

Mais à ce moment là, alors que je cherchais un moyen de lui dire, que j'avais changé d'avis, il s'est mis à crier.
- Non, Manon, je ne rentrerais pas chez toi, on se connaît à peine, ne me force pas à te suivre.

J'ai éclaté de rire, et j'ai ouvert la porte.
- Entre, avant que les voisins appellent les flics.

Il est entré, et...Il est resté.

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