Un fils ?

Dunevaëlle

Aujourd'hui, c'est une journée sans mission, sans entraînement. Juste du temps pour moi, pour eux. Nathan, Ayden et moi, une simple balade en famille. J'enfile un jean et un pull blanc ample avant de les rejoindre au salon.

Ayden est assis au sol, absorbé par ses petites voitures, les faisant rouler en ligne droite comme s'il était concentré sur une tâche capitale. Nathan, de son côté, est plongé dans son téléphone, son expression neutre.

— Je suis prête, on y va ? demandé-je en ajustant mon pull.

Ayden lève immédiatement la tête, un sourire éclatant éclairant son visage avant qu'il ne se précipite vers moi. Ses petits bras s'enroulent autour de mes jambes, et mon cœur se réchauffe instantanément. Nathan, lui, se redresse, range son téléphone et s'approche.

— Tu es sublime, murmure-t-il, déposant un baiser léger sur mes lèvres.

Je lui souris, mais au fond de moi, je ne peux m'empêcher de remarquer combien ce genre d'échanges est devenu rare entre nous.

Nous partons enfin, la main d'Ayden dans la mienne, celle de Nathan tenant l'autre. La journée se déroule comme prévue : balade dans les rues animées de Colima, visites de boutiques remplies de jouets et de vêtements. Ayden est aux anges, et je me force à cacher ma fatigue. Chaque minute passée à marcher sur ces pavés me rappelle que je n'ai plus l'endurance d'autrefois.

Lorsque nous nous installons à une table pour manger des gaufres, Nathan s'éloigne pour passer commande. Ayden, épuisé par l'excitation, grimpe sur la banquette à côté de moi. Je l'observe en silence, admirant ses cheveux blonds en bataille, sa concentration lorsqu'il joue avec une cuillère.

— Dunevaëlle ?

Une voix féminine m'interrompt. Je lève les yeux et me retrouve face à Kate. Elle est tout sourire, ses joues légèrement rougies.

— Tu as besoin de quelque chose ? demandé-je, méfiante.

— Oui, je voulais savoir si toi et Andrew vouliez sortir ce soir. On va au club de Luis.

Ses mots résonnent en moi comme une cloche, et je sens mon cœur rater un battement.

— Le club de Luis ?

Elle hoche la tête, sans remarquer la tension dans ma voix. Elle m'explique qu'ils partent à 21h et propose que nous les rejoignions. J'acquiesce mécaniquement, plus par politesse que par réelle envie.

Lorsque Nathan revient avec les gaufres, je lui glisse l'invitation. Comme je m'y attendais, il refuse, prétextant qu'il préfère rester à la maison avec Ayden. Je fais mine de ne pas être déçue, mais au fond, je le suis un peu.

La journée passe tranquillement. Ayden s'endort tôt, et je commence à me préparer pour la soirée. J'enfile une robe noire longue, fendue sur le côté, avec un dos nu. Mes cheveux tombent en cascade sur mes épaules. Nathan me regarde sans un mot, mais ses yeux trahissent une pointe d'inquiétude.

— Tu es sûre que c'est une bonne idée ? murmure-t-il.

Je ne réponds pas. Un baiser rapide sur le front d'Ayden, un au revoir à Nathan, et je pars avec Andrew et Adam.

Le club de Luis est immense, un bâtiment sombre en retrait de la ville. La file d'attente est longue, composée majoritairement de filles. À l'intérieur, la musique est assourdissante, la lumière tamisée. Je reconnais rapidement Luis, assis dans le coin VIP, son allure imposante captant toute l'attention.

Nous le rejoignons, et nos regards se croisent. Son expression est indéchiffrable, mais je sens son regard glisser sur ma robe, s'arrêtant sur la fente qui découvre ma jambe. Je frissonne malgré moi. Adam, toujours fidèle à ses provocations, glisse sa main sous la fente de ma robe, un geste purement calculé pour défier Luis.

Le temps passe, et je finis par me détendre en dansant avec Andrew. Nous rions comme deux enfants, oubliant le reste du monde, jusqu'à ce que je remarque Juan, l'air sombre, tenant mon téléphone. Lorsqu'il décroche et s'éloigne pour répondre, mon instinct me hurle que quelque chose ne va pas.

Je cours après lui, laissant Andrew derrière. Dehors, l'air frais me frappe, mais ce n'est rien comparé à l'angoisse qui monte en moi. Juan marche nerveusement, les traits tendus.

Je suis immédiatement Juan dehors, la musique assourdissante du club s'estompe derrière moi, remplacée par le calme oppressant de la nuit. L'air est frais, presque glacial, et contraste brutalement avec la chaleur suffocante à l'intérieur. Il marche en cercles, son téléphone plaqué contre son oreille, son visage un mélange de colère et de panique.

Je reste à quelques pas, mes talons claquant légèrement sur le béton, mon cœur battant à tout rompre. Je ne distingue pas les mots échangés, mais le ton de sa voix, bas et sec, suffit à m'inquiéter.

— Juan, qu'est-ce qu'il se passe ? demandé-je, mais il lève une main pour me faire signe de patienter.

Les secondes s'étirent comme des heures jusqu'à ce qu'il raccroche brusquement, son téléphone à peine rangé dans sa poche avant qu'il ne recommence à faire les cent pas.

— Juan ? insisté-je, ma voix tremblante.

Il s'arrête enfin, se retourne vers moi. Ses traits sont tirés, son regard sombre, et je peux voir qu'il lutte pour contenir quelque chose.

— Emma... c'est Ayden, lâche-t-il.

Mon cœur manque un battement, ma gorge se serre instantanément.

— Quoi Ayden ?! dis-je, presque en criant.

— Nathan lui a donné du beurre de cacahuète, répond-il, sa voix chargée de colère et de dégoût.

Un bourdonnement remplit mes oreilles. Je fais un pas en arrière, presque vacillante.

— Mais... mais il sait qu'il est allergique... Il le sait ! je souffle, ma voix brisée.

Juan serre les poings.

— Il sait. Et il a appelé une ambulance avant de te prévenir, ajoute-t-il d'un ton tranchant.

À ce moment, les autres sortent à leur tour, visiblement alertés par mon agitation. Andrew et Adam s'approchent rapidement, leurs regards inquiets. Même Luis, habituellement impassible, apparaît à l'arrière du groupe, ses yeux immédiatement fixés sur moi.

— Qu'est-ce qui se passe ? demande Andrew en posant une main sur mon épaule.

Je n'arrive pas à répondre. Ma gorge est nouée, les mots restent coincés.

— Nathan a donné du beurre de cacahuète à Ayden, répond Juan à ma place, les dents serrées.

Un silence de plomb s'installe, brisé seulement par le bruit d'Adam qui frappe violemment un mur à proximité, jurant à voix basse.

— Je vais l'achever, grogne-t-il, la mâchoire crispée.

— Adam, calme-toi, intervient Andrew, bien que sa voix tremble légèrement.

Luis, lui, reste étrangement silencieux, son regard passant de Juan à moi, puis aux autres.

— Qui est Ayden ? demande-t-il finalement, sa voix grave tranchant l'air comme une lame.

Je lève les yeux vers lui, mais les mots restent coincés dans ma gorge. Le regard insistant de Luis me transperce, cherchant des réponses que je ne peux lui donner.

— On n'a pas le temps pour ça, lance sèchement Juan en se dirigeant déjà vers sa voiture.

Je suis son mouvement, sentant l'urgence m'envahir. Mes pieds avancent automatiquement, mais mon esprit est ailleurs, torturé par des scénarios que je m'efforce de repousser.

— Emma, attends, dit Luis en attrapant mon bras.

Je me tourne vers lui, les yeux brillants de larmes.

— Pas maintenant, Luis, dis-je d'une voix brisée, avant de dégager doucement mon bras.

Il me suit jusqu'à la voiture, sans dire un mot de plus. Adam et Andrew sont déjà installés à l'avant. Je monte à l'arrière, le cœur lourd, et Luis s'assoit juste après moi, son regard toujours posé sur moi. Je sens la tension monter dans l'habitacle, amplifiée par le silence pesant.

C'est alors que le téléphone de Juan sonne à nouveau, et il décroche en mettant l'appel sur haut-parleur.

— Juan, dit à Emma que je suis désolé, implore la voix de Nathan à l'autre bout du fil.

— Ta gueule, réplique Juan avant de raccrocher brutalement.

Un nouveau silence s'installe. Je tremble légèrement, incapable de regarder qui que ce soit. Tout le monde semble suspendu dans cet instant, Luis y compris. Ses yeux passent lentement de Juan à moi, puis il attrape ma main.

Dans la voiture, un silence oppressant pèse sur nous tous, à peine troublé par le bruit du moteur. Je suis assise à l'arrière, entre Andrew et Luis, mais je me sens seule, perdue dans une spirale d'angoisse. Mon cœur bat à un rythme effréné, presque douloureux, et mes mains tremblent sur mes genoux.

Chaque image d'Ayden me hante : son rire, ses petits pieds qui courent dans l'appartement, la façon dont il prononce « maman » quand il veut un câlin. Et maintenant, je l'imagine immobile, son petit corps fragile allongé sur un lit d'hôpital, entouré de machines qui le maintiennent en vie. Mon souffle devient court, mes pensées s'emballent.

Je ferme les yeux, mais ça ne fait qu'amplifier l'horreur. Je revois Nathan, son sourire tranquille, son air assuré. Comment a-t-il pu ? Il savait. Il savait qu'Ayden était allergique. Pourquoi n'a-t-il pas fait attention ? Ma gorge se serre, un mélange de peur et de colère m'envahit.

— Respire, murmure Andrew à ma gauche, posant une main rassurante sur mon épaule.

Je hoche la tête sans vraiment l'entendre, incapable de me calmer.

— Ce salaud... Je vais lui faire regretter, gronde Adam depuis le siège passager, les poings serrés sur ses genoux.

— Adam, ça n'aide pas, intervient Juan d'un ton sec, les yeux fixés sur la route.

Luis ne dit rien. Pas un mot. Je le sens, pourtant, tout près de moi, sa présence presque étouffante. Mon regard se perd à travers la vitre, mais mes pensées reviennent sans cesse à Ayden. Une boule de feu semble s'être formée dans ma poitrine, une douleur brûlante alimentée par ma peur de le perdre et ma rage contre Nathan.

— Comment a-t-il pu faire ça ? lâché-je enfin, ma voix brisée.

Je serre les poings, sentant mes ongles s'enfoncer dans mes paumes.

— Emma... commence doucement Juan, mais je l'interromps, les larmes coulant maintenant sur mes joues.

— Il savait ! Il le savait, Juan ! Et il l'a quand même fait ! C'est mon fils il a grandi avec lui ! hurlé-je, ma voix oscillante entre la colère et le désespoir.

Je vois Andrew détourner les yeux, mal à l'aise, tandis qu'Adam serre la mâchoire. Même Juan semble à court de mots, ce qui est rare pour lui.

Un mouvement à côté de moi attire mon attention. Luis, immobile jusque-là, tourne la tête brusquement vers moi. Ses sourcils se froncent légèrement, comme s'il venait d'entendre quelque chose d'étrange.

— Tu as dit... ton fils ? demande-t-il d'une voix grave, lente.

Son ton calme tranche avec la tension ambiante, mais je ressens l'intensité derrière ses mots. Je me fige, réalisant qu'il n'a jamais su. Mon cœur rate un battement.

— Oui, murmuré-je, ma gorge se serrant encore plus. Ayden. Mon fils.

Un silence glacial s'installe. Luis ne détourne pas son regard de moi. Son expression est indéchiffrable, mais je perçois quelque chose qui vacille dans ses yeux : de l'incompréhension, peut-être de la douleur, ou pire, de la colère.

— Tu ne m'as jamais dit que tu avais un fils, souffle-t-il, presque trop calmement.

Je baisse les yeux, incapable de soutenir son regard. Ce n'est ni le moment ni l'endroit pour expliquer, mais je sens le poids de sa frustration monter.

— Ce n'est pas le moment, Luis, murmure Andrew à côté de moi, cherchant visiblement à désamorcer la situation.

Luis ne répond pas. Il se contente de me fixer, comme s'il cherchait à comprendre tout ce qui lui échappait.

Puis, sans un mot, il tend la main et attrape la mienne. Je tressaille à ce contact inattendu, mais sa main reste ferme, ancrée, et son pouce commence à dessiner de petits cercles. Le geste contraste avec la tension entre nous, et une part de moi en est troublée.

— Ça ne sert à rien de te laisser submerger maintenant, dit-il finalement, d'une voix basse mais ferme. Tu dois rester forte pour lui.

Ses mots me frappent, durs et vrais à la fois. Une part de moi veut rejeter cette proximité, repousser sa main, mais une autre s'accroche désespérément à cette bribe de stabilité qu'il m'offre.

— Je... je ne peux pas le perdre, murmuré-je finalement, ma voix se brisant à nouveau.

Luis ne répond pas tout de suite. Ses doigts continuent de tracer des cercles apaisants, et je sens une chaleur inattendue monter en moi, contrastant avec le froid glacial de la peur.

— Tu ne le perdras pas, Emma, murmure-t-il, son ton bas mais chargé d'une étrange intensité.

Son assurance me trouble. La façon dont il prononce mon prénom comme il ne l'a pas fait depuis des années. Une partie de moi veut croire en ses mots, s'y raccrocher comme à une bouée. Mais la réalité me rappelle à l'ordre, brutale.

La voiture ralentit enfin, et je sais que nous arrivons à l'hôpital. Luis retire sa main, mais la sensation de son contact persiste, comme une brûlure agréable. Je prends une grande inspiration, tentant de refouler mes larmes.

— On y est, annonce Juan d'une voix tendue.

Mon cœur s'accélère à nouveau. Je jette un coup d'œil à Luis, qui me regarde encore, son visage empreint de quelque chose de nouveau : une tempête silencieuse. Puis, sans attendre, j'ouvre la portière et me précipite à l'intérieur de l'hôpital, prête à tout pour retrouver mon fils.

Les couloirs de l'hôpital défilent devant moi comme un long tunnel sans fin. Mes talons claquent sur le sol carrelé, résonnant dans l'atmosphère glaciale. Chaque pas me rapproche un peu plus d'Ayden, mais aussi de l'inconnu. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, prêt à éclater, et mes mains tremblent si fort que je dois les serrer pour ne pas perdre pied.

Andrew marche juste devant, échangeant quelques mots rapides avec une infirmière. Adam et Juan suivent, mais je ne les entends presque pas, trop concentrée sur ma respiration qui se fait de plus en plus hachée.

Puis, je le vois. Nathan. Il est là, adossé contre le mur près de la porte 24, les épaules voûtées, le visage tiré. Mon regard croise le sien, et une vague de colère pure m'envahit, suffocante. Comment ose-t-il se tenir là comme si de rien n'était après ce qu'il a fait ? Je serre les poings, me forçant à l'ignorer, et entre rapidement dans la chambre sans un mot pour lui.

Et là, je le vois. Ayden. Mon petit garçon. Allongé sur ce lit, son corps si frêle entouré de machines. Les tuyaux qui s'enfoncent dans son bras, les capteurs collés sur sa poitrine, le bip régulier du moniteur qui suit les battements de son cœur. Ses paupières sont mi-closes, et son teint est pâle, bien trop pâle.

— Maman... souffle-t-il faiblement, sa voix cassée.

Je fonds en larmes, m'approchant de lui d'un pas hésitant, comme si j'avais peur de le briser. Je m'assieds sur le bord du lit et prends son petit corps contre moi. Il se blottit immédiatement, cherchant ma chaleur, et je passe une main tremblante dans ses cheveux blonds.

— Mon cœur... murmuré-je en l'embrassant sur le front.

C'est alors que j'entends la porte s'ouvrir à nouveau. Je ne me retourne pas tout de suite, trop concentrée sur Ayden. Mais je sens une présence, une ombre lourde qui s'approche.

— Maman, c'est qui ? demande Ayden doucement, levant les yeux vers la personne qui vient d'entrer.

Je me retourne, et mon cœur s'arrête net. Luis.

Il est là, debout près de la porte, figé comme s'il venait de voir un fantôme. Ses yeux passent lentement d'Ayden à moi, puis reviennent à Ayden. Je lis sur son visage un mélange d'incrédulité, de choc et... de douleur.

— C'est ton fils, n'est-ce pas ? demande-t-il enfin, sa voix rauque, à peine audible.

Je reste figée, incapable de répondre. L'air semble quitter mes poumons, et je serre Ayden un peu plus fort contre moi. Luis fait un pas en avant, ses yeux brûlant d'une intensité presque insoutenable.

— Emma, réponds-moi, insiste-t-il, plus fort cette fois.

— Oui, Luis, c'est mon fils, dis-je enfin, ma voix brisée par l'émotion.

Un silence lourd s'abat sur la pièce. Ayden, fatigué, semble à peine comprendre ce qui se passe. Mais Luis, lui, reste immobile, son regard accroché à Ayden. Puis, quelque chose change dans ses yeux, un éclair de compréhension, et peut-être de colère.

— Depuis combien de temps ? demande-t-il doucement, mais son ton est chargé d'une tension palpable.

— Luis, je...

Je n'ai pas le temps de finir. Il détourne brusquement le regard et fait demi-tour, quittant la pièce d'un pas rapide.

— Luis ! appelé-je, ma voix pleine de désespoir.

Il ne se retourne pas. La porte claque derrière lui, laissant un silence assourdissant dans la chambre. Je serre Ayden un peu plus fort, les larmes coulant librement sur mes joues.

Nathan apparaît alors dans l'embrasure de la porte, mais un simple regard de ma part suffit à le faire reculer. Je ne veux voir personne d'autre. Je ne veux entendre personne.

Tout ce qui compte, c'est Ayden, blotti contre moi, et l'absence écrasante de Luis, qui vient de comprendre la vérité.

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Coucou ! Comment bien commencer le week-end ! 😌

Ce chapitre vous a plu ? Moi j'ai adoré l'écrire ! Minuscule rapprochement avec Luis mais on aime quand même...

Bref la suite la semaine prochaine ! 🥰

Bisous bisous 😘

Chloé ❤️

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