23.
Niall ne voulait pas que l'on fasse toute une histoire de son rendez-vous à l'hôpital, il n'autorisa donc que la présence d'Elodie et Clark. J'étais légèrement surpris qu'il puisse voir un neurologue un dimanche, mais Harry s'en était mêlé et l'avait baratiné -disons plutôt qu'il avait grondé et usé de certaines de ses relations siégeant au conseil d'administration de l'établissement- afin qu'il accepte de recevoir son frère au plus vite.
Elodie et Clark étaient venus le chercher une heure plus tôt, nous laissant au passage la charge de Hannah et Declan. Harry et Liam étaient restés avec moi. Nous étions donc tous les cinq assis dans le salon à fixer l'horloge ou notre écran de téléphone. Je me levai pour aller aux toilettes. Harry retourna préparer du café. Liam ne bougea pas une fois.
Deux heures plus tard, Hannah était blotti contre moi ; Harry surveillait Declan, qui s'était endormi dans l'autre fauteuil ; quand à Liam, il fermait si fort les paupières que même Hannah s'en rendit compte et lui serra la main. Il la remercia d'un sourire, et je l'embrassai sur le haut du crâne, d'autant plus ému qu'elle était aussi adorable que celui-ci pour qui nous nous faisions tous tant de soucis.
La porte d'entrée s'ouvrit.
Nous nous relevâmes tous d'un bond. Enfin, sauf Declan. Lui ouvrit les yeux tout ensommeillés et sembla presque tomber sur ses pieds.
Elodie fut la première à pénétrer dans le salon, mais je fus incapable de déchiffrer son expression. J'observai donc Clark, qui tenait Niall par les épaules, et je jure que je dus me mordre les jours pour ne pas éclater en sanglots.
« Qu'est-ce que c'est ? »
Liam se précipita vers Niall, et Clark le lâcha immédiatement. Niall se blottit contre Liam et eut un sourire craintif.
« Asseyez-vous. Je vais vous expliquer. »
« Je vais faire du thé. »
Elodie ressortit de la pièce alors que nous nous juchions tous sur le bord de nos fauteuils respectifs.
Niall poussa un profond soupir.
« La bonne nouvelle, c'est que ma tumeur est en réalité un gros kyste renfermant deux petites tumeurs. Il se trouve en surface de l'hémisphère droit de mon cerveau, ils peuvent donc la retirer en intégralité. Le docteur Dunham pense, selon toute vraisemblance, que les tumeurs sont bénignes. D'après lui, le kyste est là depuis longtemps, il a grossi lentement et doit aujourd'hui être enlevé pour des raisons évidentes. Je me fais opérer dans deux semaines, et ils enverront ensuite les tumeurs en analyse. » Il sourit, les lèvres légèrement tremblantes. « J'ai bien sûr un peu la trouille, mais le docteur semble très confiant et dit que le risque s'élève à, genre, deux pour cent, et que les possibilités sont minimes que les tumeurs soient cancéreuses. »
Nous soufflâmes tous à l'unisson, tandis que le soulagement manqua nous faire tomber de nos sièges. Harry fut le premier à se précipiter vers son frère pour l'étreindre jusqu'à ce qu'il se plaigne de ne plus pouvoir respirer. Ce faisant, Clark rassurait Declan, toujours à moitié endormi, lui affirmant que Niall allait se rétablir. Harry finit par le lâcher en l'embrassant bruyamment sur le front, et avant même qu'il ait eu le temps de reprendre sa respiration, Liam l'embrassait sur la bouche devant tout le monde. Et un vrai, baiser, en plus. C'était gonflé.
« Bon, on va vous laisser. » déclara Clark avec un soupir.
Niall éclata de rire sur la bouche de Liam. Apparemment, il commençait tout juste à prendre conscience que j'avais eu raison depuis le début. Liam et lui n'avaient vraiment pas été discrets ces derniers mois.
« Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? » s'enquit Elodie en s'empressant de venir nous rejoindre.
Je profitai de cette diversion pour aller étreindre Niall à mon tour.
« Ce furent les pires vingt-quatre heures depuis une éternité. »
Il s'écarta de moi pour me contempler.
« Je suis désolé de t'avoir fait subir tout ça. »
« Pourquoi tu t'excuses ? Ça n'est pas ta faute. »
Je soupirai lourdement puis observai le thé et le café qu'Elodie avait rapportés. Je lui adressai un regard navré.
« J'ai bien peur que ce ne soit pas assez fort. »
« Vous avez quelque chose de plus costaud, ici ? »
« Pas vraiment. » Je me tournai vers Niall. « Mais il y a un pub un peu plus loin où nous ne sommes encore jamais allés. C'est peut-être le moment. »
« Ça me va. » répondit Niall.
« A moi aussi. » renchérit Clark.
« Et les enfants ? » tempéra Elodie.
J'attrapai mon porte-monnaie, qui traînait sur la table basse.
« Ils ont le droit d'entrer s'ils sont accompagnés d'un adulte. Je leur paierai un Coca. »
Elodie semblait hésiter. Je la rassurai d'un sourire.
« Juste un verre. Pour fêter ça. »
« Clark n'aura qu'à boire, je conduirai au retour. » accepta-t-elle à contrecœur.
Nous nous apprêtâmes à sortir.
Harry et moi fermions la marche, et j'eus un avant-goût de ce qu'il avait voulu dire un peu plus tôt. Ses doigts m'effleurèrent le bas du dos pour me guider vers la porte, d'un geste si ostensible que ça n'en avait rien d'amusant.
Il savait qu'il s'agissait chez moi d'une zone érogène.
Je tentai de réprimer un frisson en me retournant pour verrouiller l'appartement ; comme Harry se trouvait derrière moi, je lui rentrai bien sûr dedans.
« Désolé. »
Il eut un sourire affecté et se décala très lentement, de sorte que nos corps se frottèrent.
« Mais bien sûr. »
Il rit doucement quand je me penchai pour introduire ma clé dans la serrure, et je sentis son ombre se poser sur moi. Je levai les yeux sur ma droite et vis sa main apposée contre la porte, juste à côté de ma tête. Je me tortillai pour voir son visage, et me rendis compte qu'il m'emprisonnait complètement.
« Tu veux de l'aide ? »
J'étrécis les paupières.
« Recule, avant que je transforme tes couilles en porte-clés. »
Je devinai qu'il s'efforçait de ne pas éclater de rire.
En vain, malheureusement.
« Bébé, tu devrais savoir que chaque fois que tu dis des insanités pareilles, je t'aime d'autant plus. »
« On dirait un méchant de série B. »
« Je m'en fiche, tant que ça marche. »
« Ça ne marche pas. »
« Ça marchera dans quelques jours. »
Il m'embrassa doucement sur la joue, puis s'écarta rapidement avant que je puisse l'occire.
« Allez les jeunes ! » nous apostropha Niall depuis le trottoir. Elodie, Clark et les enfants étaient sans doute déjà dans le pub. « Qu'est-ce qui vous prend tant de temps ? »
« Lewis me suppliait de faire l'amour, mais je lui ai expliqué que ce n'était vraiment pas le bon moment. » répliqua Harry à voix haute, provoquant les rires des passants.
Furieux après lui pour d'innombrables raisons, je m'empressai de rejoindre Niall.
« Ce n'est pas grave, mon chéri, j'ai de quoi m'amuser à la maison. »
Sur ces bonnes paroles, je claquai derrière moi la porte du pub, où il n'oserait pas me harceler devant les enfants.
Et même si c'était parfaitement immature -et oui, complètement déplacé étant donné la situation-, je ne pus m'empêcher de me réjouir d'avoir enfin eu le dernier mot.
***
Je dois bien le reconnaître. J'étais un gros froussard.
Je n'allai pas retrouver Zayn et James le mardi comme je l'avais promis. Au lieu de quoi, j'envoyai un e-mail pour expliquer la situation de Niall, en précisant que je ne voulais pas le laisser seul à un moment pareil. Si Zayn trouva bizarre que je ne puisse pas me libérer même deux heures pour le voir, il n'en laissa rien paraître. S'il trouva bizarre que je lui écrive plutôt que de l'appeler, il n'en montra rien non plus.
En vérité, j'avais à peine vu Niall durant les derniers jours, car Liam avait quasiment emménagé dans sa chambre, et tous deux n'en émergeaient que pour un passage obligé à la cuisine ou aux toilettes.
Je ne voulais pas voir Zayn et James. C'était ça la vérité.
Et pourquoi ?
Parce qu'il n'y avait pas si longtemps, j'avais sermonné Zayn, qui fuyait James parce qu'il craignait ce que l'avenir pouvait leur réserver. Et je n'étais pas d'humeur à recevoir un sermon de sa part pour avoir rompu avec Harry et avoir fait preuve d'une parfaite hypocrisie.
Ma relation avec Harry n'avait rien à voir avec la leur. Sincèrement.
Franchement.
Bon d'accord, j'étais juste effrayé. Non. Terrifié. Et j'avais toutes les raisons de l'être. Il me suffisait de me rappeler comment j'avais réagi au drame de Niall pour savoir qu'Harry en verrait de toutes les couleurs avec moi. En outre, mon existence avait été bien plus calme avant qu'il s'y immisce. Je m'étais rarement soucié de quoi que ce soit, mes sentiments avaient toujours été relativement stables, et j'avais baigné peut-être pas dans la plus grande quiétude, mais au moins dans un certain calme. La vie avec Harry était tumultueuse et, tout bien considéré, vraiment éreintante. Mis à part nos extraordinaires parties de jambes en l'air, il ne restait qu'un tas d'émotions plus moches les unes que les autres. De l'inquiétude : qu'il se lasse de moi et cesse de m'apprécier. De la jalousie : ça n'avait jamais été mon genre avant que je le rencontre mais, désormais, je sortais les griffes chaque fois que je voyais une femme lui tourner autour. De la crainte : comme si mon bien-être ne me suffisait pas, voilà que je commençais à me soucier du fait qu'il soit heureux et en bonne santé. Et que je m'en souciais plus que de moi-même. C'était difficile à supporter.
Je préférais le Louis d'avant Harry.
Il était plein de cran, d'assurance et d'indépendance.
Le nouveau Louis était une sorte d'idiot mollasson. Pour couronner le tout, Harry tenait parole : il se pointait à l'appartement dès qu'il en avait l'occasion et, même si je lui serinais que Niall était très occupé, cela ne le dissuadait pas de rester.
***
« Je faisais la vaisselle, quand ce salopard s'est glissé derrière moi pour m'étreindre par la taille. Et il m'a embrassé. Juste ici. » Je désignai l'endroit précis sur mon cou. « Je ne peux pas porter plainte contre lui, ou un truc dans le genre ? »
Le docteur Pritchard ricana.
« Pour être tombé amoureux de vous ? »
Je me rencognai dans mon fauteuil, secouant la tête de dégoût.
« Docteur Pritchard. » la réprimandai-je doucement. « De quel côté êtes-vous ? »
« Du sien. »
***
C'était un jeudi soir, deux jours après Noël, et je remplaçais une collègue au bar. L'opération de Niall était programmée trois jours plus tard.
J'avais passé une semaine épuisante à éviter Harry et, chaque fois que Niall quittait sa chambre, à tenter de le rassurer quand à son passage sur le billard. Eviter Harry n'était pas chose facile. Même si Darren, le manager du Fire, avait démissionné parce que sa femme était enceinte et qu'elle voulait qu'il ait des horaires de travail normaux, Harry lui avait dégoté un boulot équivalant dans un hôtel en ville appartenant à un ami. Et, en dépit du fait qu'il devait encore former son successeur, Harry trouvait le temps de venir m'ennuyer. Il y eut bien sûr l'incident de l'évier -auquel j'avais sans doute mal réagi parce qu'il avait fait remonter un souvenir avec mes parents.- mais aussi la fois où il était rentré dans la salle de bain pendant ma douche pour me demander où était la télécommande de la télé, celle où il avait petit-déjeuner torse-nu -affirmant qu'il avait « accidentellement » renversé du café sur sa chemise et avait dû la mettre au sale-, ainsi que les innombrables fois où il se contentait de me scruter sans raison apparente. Je vous jure que j'étais littéralement en train d'user mes boxers. J'avais été sur le point de craquer quand il s'était fait un peu moins pressant.
Bien entendu, je n'aurais de toute façon pas cédé.
Parce que je voyais la situation dans son ensemble.
Il avait commencé à se calmer quelques jours avant les fêtes, et s'était même remarquablement bien comporté lors du dîner de Noël chez les parents de Niall. Le seul moment de malaise survint lorsque nous dûmes échanger les cadeaux. Nous avions chacun acheté les nôtres bien longtemps auparavant, et ils étaient tous deux plus significatifs que de simple présents entre amis. Harry avait réussi à m'obtenir une version dédicacée de mon livre préféré par mon autour préféré. J'ignore comment il s'y était pris. Pour ma part, je lui avais trouvé une première édition de son bouquin favori. C'était le cadeau le plus élaboré que j'avais jamais acheté, mais je compris que ça en valait la peine en apercevant son sourire quand il le déballa.
Merde.
Putain de merde, bordel.
Je m'étais peut-être attendu à ce qu'il place la barre plus haut après ça, mais il avait fait tout le contraire et s'était contenté de... disparaître.
Je me demandai s'il s'agissait d'une nouvelle tactique de sa part.
Je fus donc décontenancé de ne pas le voir accompagner Niall et Liam au bar ce jeudi-là. Il les avait pourtant forcés à venir la semaine précédente, quand j'avais fait des remplacements après que Niall avait exigé que je sorte de l'appartement -il avait dû me trouver encombrant-, et il s'était installé sur le canapé juste en face du comptoir, droit sur ma ligne de mire, et avait passé son temps à m'observer tout en flirtant avec de jolies filles. Je supposais qu'il s'agissait là de sa promesse consistant à me mettre hors de moi.
Tout ça pour dire que je fus surpris de ne pas le voir ce jeudi-là.
Niall était encore réveillé quand je rentrai du boulot. Il sortit de sa chambre en refermant doucement la porte derrière lui.
« Liam s'est endormi. » chuchota-t-il en me suivant au salon.
Je lui lançai un sourire par-dessus mon épaule.
« Pas étonnant. Tu as dû l'épuiser. »
Il leva les yeux au ciel et se laissa tomber à côté de moi.
« Ça ne se passe pas comme ça. Enfin... pas complètement. » Il rosit, rayonnant de bonheur. « On se contente surtout de discuter. D'aplatir les choses. Tous ces malentendus. Apparemment, il est amoureux de moi depuis un moment. »
« Oh, sans blague ? »
« Très marrant. »
« Tiens, en parlant de trucs marrants : Harry n'est pas passé au bar, ce soir. »
Il m'étudia avec soin.
« Son nouveau manager avait besoin d'aide. Tu étais déçu de ne pas le voir ? »
« Non. » répondis-je rapidement. Sans doute trop rapidement. Dieu que le Louis d'avant me manquait. « J'ai juste constaté l'absence d'égo dans la salle, et je me suis dit : « Tiens, où est Harry ? » »
Cela ne le fit pas rire. Il m'adressa au contraire un air de reproche.
« Harry a raison. Tu l'aimes. Alors pourquoi tu le fais tourner en bourrique ? Ça te plaît, qu'il te coure après ? C'est ça ? »
J'arquai un sourcil interrogateur.
« Ce sont les tumeurs qui te rendent bougon, pas vrai ? » Il fit la grimace. « C'est encore trop tôt pour faire des blagues sur les tumeurs ? » Il étrécit les yeux. « Est-ce qu'on pourra en rire un jour ? »
« Jamais, Louis. Jamais. »
Je fis la moue.
« Désolé, c'était méchant. »
« Non. Ce qui serait méchant, ce serait de t'en servir pour détourner la conversation. Je t'aime très fort, Louis. Mais j'aime aussi mon frère. Pourquoi tu lui infliges tout ça ? »
« Je ne lui inflige rien du tout. Je fais tout ça pour lui. » Je le dévisageai avec sincérité, tentant de lui faire comprendre mon point de vue. « J'ai du mal à gérer les mauvaises nouvelles. Je n'en suis pas très fier, mais c'est la vérité. Regarde comme j'ai déguerpi quand tu as eu besoin de moi. Quand Harry a eu besoin de moi. »
« Mais tu es revenu. » contra-t-il. « Tu étais sous le choc, mais depuis, tu ne m'as plus lâché d'une semelle. »
« Harry m'en a convaincu. » avouai-je. « Il a dû me bousculer un peu pour me faire réfléchir. C'est alors que je me suis rendu compte que je ne pouvais pas empêcher que des choses terribles ne m'arrivent, ou n'arrivent à mes proches. Et apparemment une sorte de malédiction s'abat sur tous les gens auxquels je tiens, ça ne devrait donc plus tarder à recommencer. Et à ce moment-là, je ne peux pas promettre de ne pas dérailler complètement, et je refuse de faire subir ça à Harry. Sa vie ne serait pas stable avec moi et, après ce que sa salope d'ex-femme lui a fait endurer, il mérite quelqu'un qui puisse lui apporter la paix. »
« Louis, tu parles de toi comme d'une maladie mentale. Ce n'est pas le cas. Ton seul problème, c'est que tu refuses d'accepter ce qui est arrivé à ta famille, et que tu n'as pas fait ton deuil. »
Je me cognai la tête sur le dossier du canapé.
« On croirait entendre le docteur Pritchard. »
« Qui ça ? »
« Ma psy. »
« Tu vois une psy ? Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ? »
Il me donna une tape sur le bras.
« Hé ! »
Je m'éloignai de lui en grimaçant.
« Voilà, c'est ce que je disais. » Niall semblait hors de lui, ses yeux brûlaient comme ceux de Harry lorsqu'il était furieux. « Je suis ton meilleur pote, et tu ne me dis pas que tu vas voir une psy. Est-ce que Harry est au courant ? »
« Oui. » répondis-je tel un ado pris en faute.
« Bon, c'est déjà ça. » Il secoua la tête d'un air incrédule. « Il faut vraiment que tu acceptes ce qui est arrivé à ta famille, Louis. Je pense qu'après, rien ne te paraîtra plus si terrible ou insurmontable. Et tu te rendras compte que tu peux vivre au jour le jour avec Harry. Tu n'as pas à le protéger de toi. C'est un grand garçon, et il en sait à l'évidence beaucoup plus que moi sur ton compte. Et, miracle, il veut quand même être avec toi. »
« C'est drôle. On croirait vraiment entendre le docteur Pritchard. »
« Très sérieusement, Louis, je crois que tu devrais arrêter de jouer avec lui. »
« Je ne joue pas. » Je le dévisageai longuement, saisissant soudain quelque chose sur son expression. « Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que tu me caches ? »
Il hésita une minute, comme si il rechignait à partager une information avec moi. J'eus soudain un terrible pressentiment.
« Liam et moi, on est sorti déjeuner, aujourd'hui. »
« Je sais. Moi je suis resté là à contempler un manuscrit auquel je n'ai plus touché depuis des jours. »
« Eh bien... » Il avait le regard fuyant. « On est tombé sur Harry, avec le nouveau manager du Fire. »
« Et alors ? »
Il riva enfin ses yeux aux miens, et j'y lus une certaine inquiétude.
« Son nouveau manager s'appelle Kendall. Une grande brune étonnante, qui s'avère en outre être drôle et intelligente. »
Je crus alors sentir mon coeur défaillir.
« Louis, ils semblaient bien s'entendre. » Il secoua la tête. « Je ne voulais pas y croire, mais ils flirtaient, et Harry était... très attentionné. Ils semblaient particulièrement... proches. »
La jalousie est un sentiment terrible -la douleur qu'elle cause est presque aussi brutale qu'une déception amoureuse, et j'étais bien placé pour le savoir, car j'endurais les deux en même temps. J'avais l'impression qu'on m'avait ouvert la poitrine à mains nues pour en retirer mon cœur et mes poumons et les remplacer par un tas de pierres. Je contemplai notre sapin, le cerveau en ébullition. Voilà pourquoi il ne passait plus ces derniers temps.
« Louis ? »
Niall me toucha le bras.
Je me tournai vers lui, résolu à ne pas pleurer. Je lui adressai un sourire malheureux.
« Dans ce cas, j'imagine que j'avais raison depuis le début. »
Niall commença à secouer la tête.
« Non, ça va. » Je me levai, ayant soudain grand besoin de me retrouver seul. « J'ai rompu avec lui parce qu'il mérite de trouver quelqu'un de bien et d'équilibré. Et je n'ai plus à me sentir coupable, parce que j'avais raison depuis le début : il ne m'aime pas. On ne tombe pas sous le charme de quelqu'un d'autre juste après avoir été plaqué par l'amour de sa vie, si ? C'est mieux comme ça. »
Je me dirigeai vers la porte du salon et entendis Niall se lever précipitamment.
« Non ! » siffla-t-il. « Ce n'est pas ce qui se passe, ni pour ça que je t'en ai parlé. » Il me suivit dans le couloir, mais je ne l'écoutais plus vraiment tant le sang me battait aux oreilles. « Louis, je t'ai dis ça pour que tu arrêtes de jouer les imbéciles et que tu te remettes avec lui. Ecoute, j'ai peut-être... »
Je lui claquai la porte au nez. Il se mit immédiatement à tambouriner dessus.
« Louis ! »
« Bonne nuit, Niall. »
« Merde. » l'entendis-je murmurer.
Puis le bruit de ses pas s'éloigna dans le couloir.
J'essayai. J'essayai vraiment. Mais une fois roulé en boule dans mon lit, je ne pus contenir mes larmes.
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