11 | l'aire d'autoroute
guess who's back ?
nda : déjà, désolée pour cette longue absence, mais ma première année de fac ne s'est pas passée comme escomptée et j'ai eu beaucoup de mal à écrire (manque de temps surtout mais aussi démotivation et fatigue). finalement il y a eu le confinement et mon année se termine bientôt et puis y'a du soleil, du coup me revoilà avec de nouveaux chapitres en stock et avec l'espoir de terminer cette petite histoire un jour
je ne promets pas d'être active et constante parce que j'en sais rien mais je vais vraiment essayer de tenir le cap et de passer outre le syndrome de la page blanche et de me laisser mener par cette histoire
le but pour moi c'est vraiment de me vider la tête, je veux pas écrire quelque chose de compliqué donc j'espère que ça vous plaira aussi de venir goûter un peu à la douceur de l'été ;)
bonne lecture (pour me faire pardonner ce chapitre est un peu plus long que d'habitude)
•••
Le soleil pointa le bout de son nez un peu avant six heures.
Le ciel teinté de rose parsemait d'ombres chatoyantes les champs de blés. La route semblait bordée de bouquets de fleurs. L'Amérique possédait sans aucun doute des paysages à couper le souffle ; rien ne me paraissait plus beau que des étendues de prairies verdoyantes ou de fleurs colorées s'allongeant jusqu'à perte de vue. Le feuillage des arbres frémissait sous la légère brise, l'herbe ondulait gracieusement. Je n'avais jamais rien vu d'aussi apaisant.
Lorsque le temps fut plus doux, et que la nuit fut remplacée par l'aurore, je décidai d'abaisser ma vitre pour profiter du vent frais de l'été. Nous ne roulions que depuis quelques heures, Evergreen Park me paraissait bien loin derrière.
- Tu veux mettre un peu de musique ? Me proposa Miles, les yeux fixés sur la route. J'ai des CD dans la boîte à gants.
Je ne l'avais jamais vu aussi concentré que depuis ces derniers kilomètres, peut-être était-ce un moyen de ne pas s'endormir. Je ne savais pas où nous allions, d'ailleurs Miles ne le savait sûrement pas non plus, mais la route était encore longue.
J'acquiesçai joyeusement et me mis à chercher les CD en questions. Miles possédait une variété de CD très éclectique ; un peu de Metallica par ci, un peu de Mozart par là. C'était un méli-mélo tout à fait surprenant - ou du moins, surprenant pour quelqu'un qui n'était pas Miles.
- Certains CD sont à ma mère, et d'autre à ma sœur, expliqua-t-il en me voyant hésiter. Mais les meilleurs sont évidemment les miens.
Je roulai des yeux à ses propos, ce qui le fit ricaner. Finalement, mon choix se porta sur un album du groupe de rock Queen. Un indémodable. Je le glissai dans le lecteur prévu à cet effet et lançait la piste numéro 5.
"Don't stop me now" se mit à retentir dans tout l'habitacle et un large sourire se glissa sur les lèvres de Miles.
- Très bon choix, s'enthousiasma ce dernier. Tu vois, je t'avais dit que les meilleurs CD étaient à moi.
Je souris. Je n'avais jamais autant souris que depuis ma rencontre avec Miles au début du mois de juillet.
Nous nous mîmes à chanter à tue-tête les paroles comme des abrutis. Alors que mon talent musical laissait clairement à désirer, il fallait reconnaître que Miles ne se débrouillait pas trop mal. Peut-être que lui aussi se cachait derrière sa couche de peinture de clown, de peur d'en dévoiler trop aux autres.
J'avais tellement de choses à découvrir sur Miles que j'en regrettais presque de ne pas l'avoir fait plus tôt. Après tout, nous avions fréquenté le même collège, ainsi que le même lycée. Il avait tondu ma pelouse l'été dernier. Nous avions eu tant d'opportunités pour devenir ami, et j'avais tout gâcher. J'aurais pu avoir un vrai ami.
Avant que je ne sortes avec Gabriel, mon entourage se résumait à Lola et Alex. Lola était ma meilleure amie depuis l'école primaire, nos mères avaient sympathisés et nous forçaient à passer du temps ensemble. Si au début nous nous vouions une haine sans nom à cause d'un stupide garçon dont nous étions tombé amoureuse, le temps avait fini par nous rapprocher et en entrant au collège nous étions inséparables. C'est à cette époque que nous avions rencontré Alex.
Alex était sans aucun doute le garçon le plus drôle et le plus charmant d'Evergreen Park. Il était doué dans tout ce qu'il entreprenait et tout le monde l'adorait. Certains rêvaient de se pavaner à son bras, d'autres faisaient tout pour qu'il rejoigne leurs groupes d'amis, quant aux adultes d'Evergreen, ils étaient tous, sans aucune exception, contaminés par la fièvre Alex. Les parents s'extasiaient devant son magnétisme, les professeurs le louait pour ses excellents résultats...
Et pourtant, il s'était intéressé à nous ; Lola et moi, toujours à raser les murs du lycée dans l'espoir de ne pas être remarquée. Un midi, il s'était assis à notre table de la cafétéria, par hasard. Après ce jour-là, nous ne nous étions plus quitté.
J'aurais pu finir mes années de lycée comme je les avais commencé : invisible, entourée de mes deux meilleurs amis et comblée par cette situation. Malheureusement, le sort en avait décidé autrement. Il y avait eu l'accident, puis l'apparition de Gabriel dans ma vie, puis la fin du lycée et le retour à la dure réalité : j'étais toujours aussi invisible, sauf que désormais, j'étais seule.
Dans le schéma logique de la vie, c'est ce qui aurait du arriver. Je devais passer mes vacances à me morfondre sur ma fac et sur mon ex-petit-ami, avant que n'arrive la rentrée et que, peut-être, sonne le début d'une nouvelle vie, loin de l'hypocrisie parfaite d'Evergreen Park.
Mais un léger changement s'était ajouté au programme.
- Tu veux qu'on s'arrête pour manger quelque chose ? Proposa Miles. Il y a une aire d'autoroute dans quelques mètres.
- J'ai pas trop faim, répondis-je.
- De toute façon je comptais quand même m'arrêter, j'ai trop la dalle.
Je levai les yeux au ciel, me demandant pourquoi il me posait la question s'il comptait n'en faire qu'à sa tête, ce qui le fit rire.
- Et puis on risque de rouler encore longtemps, vaudrait mieux manger un bout histoire qu'on ne crève pas au plein milieu de notre aventure palpitante.
- Je crois que tu as une légère tendance à enjoliver ta vie, Miles, rétorquai-je alors qu'il s'engageait dans une route parallèle.
L'aire d'autoroute n'était en réalité qu'une station d'essence agrémentée d'un minuscule magasin, mais Miles ne perdit pas son sourire pour autant. Il descendit de la voiture et me somma d'aller chercher quelques sandwichs tandis qu'il s'occupait de remplir l'essence.
Je m'attelai à la tâche, non sans un grognement non dissimulé ; au vu de la tête de l'enseigne, j'étais déjà persuadée que les sandwichs auraient un goût de plastique dégueu.
À l'intérieur de l'échoppe étaient disposés quelques rayons éclairés par des néons vacillants. Je longeai les murs sans grande conviction, à la recherche des produits les plus attrayants. J'attrapai au passage un paquet de chips avant de me diriger vers les étagères comportant trois variété de sandwichs. Sans réfléchir, j'en pris au poulet pour Miles et me rabattis sur le seul sandwich sans viande : un thon-crudité à l'aspect douteux.
C'était bizarre de me dire que je partais en road-trip direction l'inconnu avec Miles sans même savoir quel goût de sandwich il prenait. Normalement, c'était quelque chose qu'on savait ; les goûts et les couleurs de ses amis, pas quelque chose que je devais apprendre au détour d'un magasin miteux.
Cette réalisation me fit paniquer. J'avais tout plaqué pour un garçon que je connaissais à peine - comment pouvais-je savoir si ce n'était pas un malade qui voulait m'enlever ? Si c'était son but, je lui avais drôlement facilité la tâche en sautant à pied joints dans les ennuis.
Bon, peut-être que m'imaginer Miles en tueur en série était un peu trop dramatique ; mais comment pouvais-je être sûre que ses intentions n'étaient pas mauvaises ? Comment pouvais-je lui faire confiance ? Qu'est ce qui me prouvait que lui, il était différent, qu'il n'était pas comme Gabriel ou comme n'importe quel lycéen d'Evegreen Park - profondément centré sur lui-même.
Personne n'agissait sans y trouver ne serait-ce qu'un minuscule intérêt, si ?
En arrivant à la caisse, la vendeuse me lorgna d'un air inquiet.
- Ca va ? T'es toute pâle, demanda-t-elle en attrapant mes articles.
En réalité, elle avait l'air plus ennuyée par la situation que paniquée par mon comportement. Sans doute que le patron ne serait pas ravi si un client tournait de l'oeil dans son magasin.
J'acquiesçai difficilement, encore perdue dans mon flot encombrant de pensées. C'était souvent comme ça, je me mettais à réfléchir et soudain je me sentais submergée par les nœuds qui se formaient dans mon crâne. Tout allait trop vite, j'oubliais comment respirer.
Le bruit de mastication du chewing-gum de la vendeuse et de la climatisation devinrent assourdissants, mon cerveau bourdonnait, mes mains étaient moites, ma gorge sèche.
- Eh oh ! Tu m'entends ? Ca fera 5, 95 !
Il y avait toutes ces interrogations qui s'entremêlaient, qui cognaient contre mes tempes. Il y avait mes parents, qui m'attendaient sûrement à la maison, ou peut-être pas, il y avait Gabriel qui m'avait déjà remplacée, Amanda qui n'était plus vraiment Amanda et Alex qui était déjà parti. Il y avait tout ça, et moi je me sentais minuscule, inutile, invisible. Je croulais sous le poids de mes angoisses, et je disparaissais petit à petit dans les abymes.
Tout devint noir et ma tête heurta le carrelage froid.
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