Chapitre : 7

Le lendemain, après une nuit de sommeil entrecoupée de songes agités, je me réveille avec l'impression que la journée sera interminable. C'est mon jour de repos, une rare occasion de m'évader du château et de trouver un semblant de tranquillité. J'ai hâte de quitter cet endroit oppressant, ne serait-ce que pour quelques heures, et de respirer l'air frais de la forêt environnante.

Je me lève en soupirant, mes jambes encore lourdes de fatigue. J'enfile rapidement une robe simple et confortable, de couleur claire pour attirer le moins d'attention possible. Je me regarde un instant dans le miroir, ajustant mes cheveux en une tresse négligée. Le reflet que je vois est celui d'une femme épuisée mais déterminée.

Une fois prête, je quitte ma chambre et me dirige d'un pas décidé vers la sortie du château. Les couloirs sont silencieux, seulement perturbés par les bruits lointains des domestiques qui commencent leur journée. Mon cœur bat plus fort à l'idée de cette évasion temporaire. Je descends les escaliers du grand hall, impatiente de franchir les portes massives qui mènent à la liberté.

Cependant, à peine ai-je atteint les premières marches que je me retrouve face à Adrian, le grand garde du roi. Son imposante silhouette bloque mon passage, et son expression est aussi sévère que d'habitude. Adrian est un homme robuste, d'une carrure impressionnante, avec des yeux perçants qui semblent lire dans les pensées. Son armure brille à la lumière des torches, ajoutant à son air intimidant.

"Bonjour, Adrian," dis-je en essayant de masquer mon agacement et mon impatience.

"Bonjour, Aurora," répond-il d'une voix grave. "Le roi a des instructions pour vous. Vous ne pouvez pas quitter le château.

Son ton est sans appel, et je sens mon cœur se serrer. Toutes mes attentes de liberté s'évanouissent en un instant. J'essaie de protester, de lui expliquer que c'est mon jour de repos, que j'ai besoin de cet air extérieur pour garder ma santé mentale, mais ses yeux ne montrent aucune pitié.

"Les ordres sont les ordres," conclut-il, me laissant comprendre qu'aucun argument ne le fera changer d'avis.

Je tourne les talons, la mort dans l'âme, et remonte lentement les escaliers, sentant le poids du château peser encore plus lourdement sur mes épaules. La journée s'annonce plus longue que je ne l'avais imaginé.

J'emporte avec moi l'encrier finement ouvragé et la plume sertie d'obsidiennes que le roi m'a offerts. Peut-être que l'écriture m'aidera à calmer mes pensées tourbillonnantes.

Les jardins du château sont un véritable havre de paix, un endroit où la nature semble conspirer pour offrir une évasion à ceux qui en ont besoin. Les allées bordées de fleurs colorées et les arbres majestueux créent une atmosphère apaisante. Je m'installe sur un banc de pierre, mon encrier et ma plume à portée de main.

En prenant une profonde inspiration, je commence à écrire. Les mots coulent doucement, portés par la beauté de la plume et la fluidité de l'encre. Chaque phrase semble absorber un peu de mon anxiété, transformant mes pensées agitées en une sorte de mélodie silencieuse. La brise légère qui traverse le jardin porte avec elle le doux parfum des fleurs, ajoutant à l'ambiance de sérénité.

Mais à peine ai-je commencé que je sens une présence approcher. En levant les yeux, je vois le roi Elian s'avancer vers moi, son expression indéchiffrable. Ses pas sont lents et mesurés, et malgré son apparence imposante, il semble presque vulnérable dans ce cadre naturel.

"Bonjour, Aurora," dit-il en s'asseyant sur le banc à côté de moi. "Tu écris ?"

Je hoche la tête, tentant de masquer mon agacement. "Oui, j'essaye de trouver un peu de calme."

Elian sourit légèrement, mais il y a une gravité dans ses yeux. "Nous traversons une période de sécheresse sévère, et nous espérons que les Ondines apporteront la pluie tant attendue."

Je sens la pression monter en moi. Cette responsabilité semble peser de plus en plus lourd sur mes épaules. "Pourquoi moi, Elian ? Je n'ai aucune magie en moi. Pourquoi m'impliquer dans quelque chose d'aussi crucial ?"

Il soupire, son regard se perdant dans le paysage des jardins. "Parce que tu es différente, Aurora. Et parfois, c'est la différence qui fait toute la différence."

Son discours, bien qu'inspirant, ne fait qu'accroître mon anxiété. "Je comprends, mais c'est une lourde charge à porter," dis-je, ma voix trahissant une pointe d'exaspération.

Elian se tourne vers moi, son regard sérieux mais empreint de compassion. "Je sais. Mais nous n'avons pas le choix. Le royaume a besoin de quelque chose de nouveau ... peut être d'une humaine. Et je suis ici pour te soutenir."

Je prends une profonde inspiration, essayant de calmer les battements frénétiques de mon cœur. "Très bien, je ferai de mon mieux. Mais sachez que je ne fais pas cela pour vous, mais pour les gens de ce royaume. Et je n'ai pas besoin de votre soutien"

Le roi sourit, une étincelle de fierté dans ses yeux.

Je hoche la tête, me sentant légèrement apaisée par ses paroles. Nous discutons encore un peu du temps, des espoirs pour les Ondines, et des préparatifs en cours. Mais bientôt, je ressens le besoin de m'éloigner, de me retrouver seule avec mes pensées.

"Si vous voulez bien m'excuser, je vais retourner à mon écriture," dis-je en me levant.

Elian acquiesce, comprenant mon besoin de solitude.

Après avoir quitté Elian, je me promène dans les jardins du château, cherchant un endroit calme où je pourrai écrire. Le murmure des feuilles et le doux parfum des fleurs m'apaisent, et je trouve finalement un grand arbre dont les branches étendues offrent une ombre accueillante. Je m'assois au pied de cet arbre, posant l'encrier et la plume à côté de moi, et je reprends l'écriture de mon histoire.

Absorbée par mes pensées et mes mots, je ne remarque pas tout de suite l'approche de Lyra. Elle s'agenouille doucement à côté de moi, jetant un coup d'œil curieux à mes écrits.

"Qu'écris-tu, mon petit Aerentia ?" demande-t-elle avec douceur.

Je lève les yeux et souris. "Je peux te lire le début si tu veux."

Lyra hoche la tête, son regard bienveillant m'encourageant. Je prends une profonde inspiration et commence à lire, essayant de capturer chaque émotion et détail dans mes mots. Alors que je lis, je sens une présence, légère et éthérée, à côté de moi. La voix enfantine, douce et claire, murmure à mon oreille :

"J'ai hâte d'entendre la suite."

Je sursaute légèrement, interrompant ma lecture, mais avant que je puisse réagir, de grosses gouttes de pluie commencent à tomber, mouillant le papier devant moi. Lyra se redresse rapidement et me prend le bras.

"Nous devons rentrer, mon petit Aerentia," dit-elle en me tirant vers l'intérieur du château.

Une fois à l'abri, trempées mais soulagées, Lyra me regarde avec une expression étrange, mélange d'émerveillement et d'inquiétude.

"Comment as-tu fait cela, mon petit Aerentia ?" demande-t-elle, essuyant quelques gouttes de pluie de son front.

"Fait quoi ?" Je suis perplexe, ne comprenant pas ce qu'elle veut dire.

"Être en lien avec l'esprit de l'eau," répond-elle, ses yeux scrutant les miens avec intensité.

Je me fige, le cœur battant. "Je n'ai pas de magie, Lyra. Je ne peux pas être en lien magique avec quoi que ce soit."

Lyra sourit doucement, secouant la tête. "Un Aerentia, c'est un petit oiseau qui n'a pas d'ailes, mais qui vole grâce à la magie du vent. Tu n'as peut-être pas de magie visible, mais tu as quelque chose de plus profond en toi. Quelque chose qui te lie à ce monde d'une manière unique."

Je reste silencieuse, essayant de comprendre ses paroles. Est-il possible que j'aie un lien spécial avec l'esprit de l'eau sans le savoir ? Les événements de ces derniers jours prennent soudain un sens nouveau et mystérieux. Mon esprit tourbillonne de questions sans réponse, mais une chose est certaine : quelque chose en moi est en train de changer, et ce changement est bien plus grand que tout ce que j'avais imaginé.

Lyra pose une main réconfortante sur mon épaule. "Ne t'inquiète pas, mon petit Aerentia. Nous allons découvrir cela ensemble. Tu n'es pas seule."

Le château s'anime soudain d'une effervescence nouvelle. Des mois de sécheresse oppressante, de ciel sans nuages et de terre craquelée sont soudainement rompus par des gouttes de pluie bienvenues. Un murmure d'excitation et d'émerveillement se propage parmi les habitants du château alors que tous se pressent vers les fenêtres pour contempler ce phénomène inattendu.

Lyra continue de m'emmener à l'écart, loin des regards et des oreilles indiscrets. Sous la pluie de questions qu'elle lance, je me sens comme un navire ballotté par une tempête. Elle aussi me demande de participer aux Ondines. Surprise, je lui réponds que le roi m'a déjà fait cette demande, et j'ai accepté.

"Mais que comptes-tu faire lors de la cérémonie ?" demande-t-elle avec insistance.

Je secoue la tête, déconcertée. "Je ne sais pas encore. Je suppose que je suivrai les autres."

Lyra me fixe avec un regard perçant, ses yeux brillant d'une lueur déterminée. "Tu devrais écouter ton cœur, Aurora. Il te guidera dans la bonne direction. Tu vas arrêter le ménage est te concentrer là-dessus

Je suis partagée entre l'envie de suivre les conseils de Lyra et le désir de faire comme les autres. Pourtant, une autre préoccupation me tourmente : le poids des responsabilités qui pèsent sur mes épaules. Comment pourrais-je abandonner mes tâches au château ?

Lyra semble lire mes pensées, car elle pose doucement une main réconfortante sur mon bras. "Tu ne peux pas tout faire, Aurora. Laisse-nous nous occuper du château. Toi, concentre-toi sur ton histoire, sur les Ondines."

Je me sens déchirée, partagée entre mes devoirs envers le royaume et mes propres aspirations. Mais Lyra a raison. Peut-être est-il temps de mettre de côté les préoccupations matérielles et de me concentrer sur ce qui compte vraiment.

"Je suppose que tu as raison," murmurai-je. "Je vais me consacrer à mon histoire, aux Ondines. Mais je ne peux pas laisser Asteria tout faire seule."

Lyra sourit doucement, son regard empreint de compréhension. "Ne t'en fais pas pour elle. Asteria aime travailler seule. Elle sera soulagée de te voir te concentrer sur d'autres choses."

Je hoche la tête, sentant un poids se lever de mes épaules. Peut-être que c'est ce dont j'avais besoin : une permission de me libérer des obligations qui m'entravent et de me consacrer à ce qui compte vraiment pour moi.  

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