3. Je t'en prie

Comté de Haliburton,
Ontario, Canada.

15 juin 2062, à 16:24.

Venus et Keegan
marchent tranquillement dans les rues désertes de leur petite ville en revenant de l'école. Habituellement si débordantes de gens, surtout à l'heure de pointe, celles-ci sont vides. C'est étrange, mais cela ne préoccupe en aucun cas les deux jeunes qui n'y portent aucune attention.

— Alors, tu en as parlé à tes amis, du truc dans le ciel ? demande Kee.

— Celui d'avant-hier ? Ouais, répond sa soeur.

— Et ils ont dit quoi ?

— Bah, ils se sont foutus de moi... avoue-t-elle faiblement.

Son frère commence à s'esclaffer, en laissant à peine le temps à sa frangine de finir sa phrase.

— Arrêtes ! lui ordonne Vee, en donnant une petite poussée sur son épaule. Y'a rien de drôle.

Cette simple tape réussit à le déstabiliser et à le faire tomber dans la rue. C'est seulement lorsqu'il se retrouve en bas du trottoir que Keegan remarque la curiosité des évènements.

Normalement, quand il revient des cours, les gens se bousculent en sortant des bâtiments, se ruent dans leur automobile et se dépêchent à partir, manquant de frapper quiconque osant mettre le pied dans la rue. Aujourd'hui, ce ne semble pas être le cas. Mais pourquoi serait-ce différent ? Cependant, il décide de ne pas en parler à Venus. Peut-être remarquera-t-elle tout cela par elle-même.



à 17:58.

Les deux jeunes poussent la porte d'entrée et pénètrent dans leur maison. Après avoir enlevé leurs chaussures et les avoir déposées sur le tapis, Keegan se dépêche d'aller à la cuisine pour remplir son estomac, tandis que Venus s'installe à la table de la salle à manger pour commencer à étudier, ses yeux d'un bleu azurin rivés sur ses cahiers.

— Enfin ! Je croyais que vous n'alliez jamais arriver, s'exclame Dad en venant les rejoindre.

— Ce n'était pas si long que ça, quand même, rigole Vee.

— Normalement, vous arrivez au moins une heure plus tôt.

— On n'a pas pris l'autobus. On est venu à pieds, à la place, hurle Keegan, la bouche pleine de muffin et en se prenant une pomme dans le réfrigérateur.

Le garçon déglutit et vient ensuite rejoindre sa famille à la table, et, lui aussi, sort ses manuels et autres cahiers de son sac pour les poser sur la surface devant lui. Il tire une chaise et s'assoit.

— Tu décides d'étudier pour avoir de bonne notes, aujourd'hui ? Ce n'est pas trop tôt ! se moque sa sœur.

— Très drôle, dit-il, faussant un air exaspéré. J'ai juste des examens à faire signer à Mom. Elle est où, en passant ?

— J'en ai aucune idée, elle est peut-être passée à l'épicerie en finissant de travailler, répond leur père.

— Depuis quand quelqu'un prend une heure et demi à faire l'épicerie ? En plus, y'a pas des centaines de choses à racheter, et elle aurait téléphoné pour nous prévenir, remarque Vee.

— J'avoue que c'est un peu inhabituel de sa part. Je vais l'appeler pour en savoir plus, conclut Dad.

Il part ensuite au salon et dégage quelques coussins du canapé beige pour retrouver son téléphone. Il y compose le numéro de sa femme et attend sa réponse.

Cela sonne plusieurs fois. Une, deux, trois, et encore plus. Aucune réponse. Leur père décide de réessayer. La deuxième fois, c'est la même chose : il ne fait que tomber sur le répondeur. Il le refait à une troisième reprise. Cette fois-ci, il laisse un message dans la boîte vocale.

— Je t'en prie, ma chérie, rappelle-moi. On s'inquiète pour toi. J'espère que tu vas bien.

Il s'effondre sur le sofa, désespéré. Pourquoi est-ce que sa femme ne répondrait pas ? Habituellement, elle a toujours son téléphone en main et répond dans les secondes suivant la première sonnerie.

— Qu'est-ce qui se passe ? hurle Keegan de l'autre bout de la maison.

— Elle ne répond pas, dit Dad.

— Quoi ? s'écrient le frère et la sœur en chœur.

Ils se ruent dans le salon pour retrouver leur père affaissé sur le divan, plongé dans ses pensées. Les mains sur les genoux, il fixe le vide.

— Ce n'est pas normal, on doit absolument faire quelque chose ! panique Venus.

— Calme-toi, Vee. Ça ne doit pas être si pire que ça. Elle va sûrement bientôt arriver. Mom doit être prise dans un embouteillage.

— T'es sérieux ? Tu crois qu'avec le nombre de gens dans les rues, il y aurait un embouteillage ? T'es vraiment idiot, Keegan ! dit sa sœur, inquiète.

— Arrêtez cela maintenant, vous deux. Je ne veux pas vous entendre vous engueuler temps que je ne sais pas que votre mère est en sécurité, les réprimande leur père. On doit trouver une solution.

Ils se mettent tous à y penser longuement. Après quelques minutes, une idée vient finalement en tête de l'un d'eux, Keegan.

— Je propose qu'on demande aux gens du quartier s'ils l'ont vue à quelque part.

— En quoi ça nous aiderait à la retrouver ? questionne Vee.

— S'ils l'ont croisé à l'épicerie, on le saurait. C'est de même pour n'importe quel autre endroit, réalise Dad.

— Qu'est-ce qu'on attend, alors ? demande Keegan.



à 18:52.

Venus et son frère cogne chez leurs derniers voisins, ceux plus éloignés de leur demeure. Heureusement, ils sont chez eux, contrairement à la plupart des gens qui sont partis de la ville, du pays, et même du continent au complet. Pour la cinquième fois, ils demandent la même chose à des gentils propriétaires de maison. Ont-ils aperçu leur mère ? Ils ne reçoivent pas de réponse différente : leurs voisins ne l'ont définitivement pas vue.

Ayant perdu espoir, ils marchent jusqu'à chez eux. Pour savoir ce qu'il se passe, ils devront attendre le retour de leur chère Mom. La nuit s'annonce difficile.

Lorsqu'ils arrivent devant leur demeure, Venus et Keegan remarquent que la porte est entrouverte. Ils sont pourtant certains de l'avoir fermée avant d'être partis. Les deux frère et sœur, en un seul coup d'œil, savent que quelque chose ne va pas.

Ils montent doucement les quatre marches de leur perron et poussent cette même porte. Elle s'ouvre en un grincement sonore qui leur fait regretter de ne pas l'avoir huilé une semaine plus tôt. Si quelqu'un est entré dans leur maison, il sait certainement que Vee et Kee arrivent. Et leur père ? N'a-t-il rien fait pour défendre la maison ?

Alors qu'ils passent le cadre de porte, ils entendent leur père hurler du salon :

— Les enfants ! Partez !

En panique, les concernés ne s'enfuit pas. Au contraire, ils se lancent à la rescousse de leur père. Quand ils arrivent au salon après s'être rués dans les quelques couloirs beiges de leur demeure, les adolescents remarquent de quoi leur père les a avertis.

Devant Dad se tient un homme à forte musculature qui le retient au mur à l'aide d'une seule main portée à son cou. Il pointe une arme à feu sur sa tempe.

— Enfuyez-vous immédiatement ! Et Keegan, promets-moi de protéger ta sœur ! dit Dad, à veille de s'étouffer.

Ce n'est qu'une question de secondes avant que l'homme tire deux balles dans la tête de leur père. Alors que leur père se raccroche à la vie, les munitions pénètrent son crâne dans un bruit effroyable. Ne pouvant plus supporter une telle douleur, le pauvre s'écroule, inerte.

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