Chapitre 1

Lorsque la cloche sonna, tous les élèves se précipitèrent vers la sortie et, comme à chaque fin de journée, Raise s'étonna de leur rapidité. Elle n'était pas lente et pourtant elle était une des dernières à sortir. Sa meilleure amie, qui semblait avoir un ressort dans les jambes programmé au son de la cloche, était souvent la première à être hors de la pièce et, comme d'habitude, lui cria de se dépêcher. Elles marchaient souvent ensemble pour rentrer chez elles, bien qu'elles n'habitaient pas du tout dans le même quartier. En réalité, le matin, Larra garait sa belle voiture neuve, qu'elle n'avait l'âge de conduire que depuis un mois, dans un stationnement public à deux coins de rues de chez sa meilleure amie et marchait le reste du chemin avec elle. Alors qu'elles sortaient de l'école, Larra soupira:

- Mon père m'a dit qu'il allait vendre ma voiture si je doublais encore une fois.

- Mais pour l'instant tu coules pas...

- Je suis pas loin.

- T'en fais pas Larra, je vais t'aider avec ça. On va travailler fort dans les prochaines semaines et tu vas passer tes examens du Ministère!

Un grand sourire étira les lèvres de la jeune femme. Elle s'attendait à cette réponse de la part de sa meilleure amie. Raise était un ange. Elle était toujours prête à aider les autres et faisait passer leurs intérêts avant les siens.

- Mais pas ce soir, ça c'est sûr!

- Pourquoi? demanda Raise.

- Parce que demain c'est ta fête! Donc ce soir, pas de devoir ou je ne sais quoi! Ciné ça te dit? Il y a un nouveau film de zombie avec de l'action, pleins de sauts et un beau gars badass!

- Wow... tout ce que je veux dans la vie, ricana Raise, sarcastique.

Sa meilleure amie rigola. Elle savait bien qu'elle plaisantait.

- Alors c'est décidé! On va dire «coucou» à ta mère, puis on prend ma voiture et on va manger puis au ciné.

- D'accord, si ça va à ma mère.

Raise se sentait un peu mal de laisser sa mère seule, même si elle savait que ça ne la dérangeait absolument pas. Son père était rarement à la maison à cause du travail, donc la jeune fille tentait d'y être le plus souvent possible et d'aider sa mère du mieux qu'elle le pouvait.

Lorsque les deux jeunes femmes entrèrent dans la maison, Larra, pas le moins du monde gênée, s'écria:

- Bonjour Élianne!

Ce ne fut pas long avant qu'une douce voix réponde:

- Oh! Larra! Quel plaisir de te voir!

La femme arriva dans l'entrée tandis que sa fille déposait son sac. Elle caressa les cheveux roux de celle-ci en lui disant:

- Salut, ça a bien été ta journée?

- Oui, comme toujours. Il s'est pas passé grand-chose.

Élianne était une belle femme, mais ne ressemblait pas du tout à sa fille. En fait, Raise était le portrait craché de son père. Sa mère, avec ses cheveux blonds ondulés et ses doux yeux noisettes, détonnait dans la famille. Sa fille lui sourit et dit qu'elle comptait aller souper avec Larra puis aller au cinéma. Elle guetta attentivement le visage de sa mère pour voir si quelque chose la dérangeait, si elle allait se sentir seule.

- C'est super! Vous avez pas d'école demain de toute façon. Reviens pas trop tard par contre. Demain on soulignera ta fête.

Raise hocha la tête. Sa mère semblait bien à l'aise de passer la soirée seule, ce qui rassura la jeune femme. Larra poussa un petit cri de joie et Élianne lui sourit. La meilleure amie de sa fille était très charmante avec ses yeux bruns pétillants derrière ses lunettes et son éternel sourire, bien qu'elle soit parfois un peu superficielle et définitivement trop gâtée par son père. Elle prenait soin de Raise, c'était l'important.

Les deux filles quittèrent la maison pour rejoindre la voiture de Larra. Raise semblait avoir de la difficulté à réaliser qu'ils étaient bien le dix-sept mai et que le lendemain, elle aurait seize ans. Ça paraissait comme un gros nombre seize ans, plus pour elle que dix-huit. Elle ne savait pas trop pourquoi, mais ça lui semblait irréel d'être rendue là. Pourtant, il n'y aurait probablement rien de différent. Elle ne graduait même pas du secondaire cette année.

Elle se tourna vers Larra avec un grand sourire. Peu importait que c'était sa fête, elle était simplement heureuse de passer du temps avec sa meilleure amie.

- On va écouter un film de zombies avec un beau gars! s'exclama Larra, arrachant un rire à Raise.

La jeune femme rousse s'arrêta un moment, regardant le sourire resplandissant de sa meilleure amie, et se dit qu'elle avait de la chance dans la vie.

°°°

Lorsqu'elle rentra chez elle, Raise était épuisée. Elle avait eu une grosse journée à l'école et le film de zombie avait fini assez tard. Elle s'écroula sur son lit et souffla:

- Ah! Mon amour! Mon lit...

Elle s'endormit rapidement, savourant le silence.

De longs murs blancs, dénués de décoration. Elle entra dans ce qui ressemblait de façon inquiétante à une cellule. Une certitude s'installa alors en elle. Elle était dans un laboratoire scientifique. Une petite fille était recroquevillée dans un coin de la pièce, sanglotant:

- Je suis un monstre, un monstre, un monstre.

Raise voulut l'aider, mais elle se mit à reculer sans contrôler quoi que ce soit. Sortant de la cellule, le regard toujours braqué vers la petite fille, elle se mis à voir l'ensemble du tableau. Des cadavres étaient étendus un peu partout sur le sol. Ils pouvaient sembler simplement endormis, mais Raise n'avait aucun doute, ils étaient morts.

Une lumière blanche l'aveugla, masquant l'image horrible devant elle et le laboratoire céda la place à une immense étendue extérieure. Des cadavres l'entouraient, des piles et des piles de cadavres. Elle ressentit une grande détresse, mais aussi un intense soulagement. Et une certitude: Ils avaient gagné une bataille, mais pas la guerre.

Raise se réveilla en sursaut, le cœur battant. Il lui semblait pouvoir encore entendre les sanglots de la petite fille et sentir l'odeur putride de la mort. Dans le but de se calmer, elle regarda l'heure et se redressa dans son lit. Deux heures du matin. Elle n'avait dormi qu'environ deux heures.

«Un cauchemar! Bonne fête Raise!» pensa-t-elle amèrement.

°°°

Raise fut réveillée par sa mère l'appelant:

- Raise, viens voir! Il y a une surprise pour toi en bas!

La jeune femme se leva, toujours endormie et descendit sans grand enthousiasme jusqu'à ce qu'elle remarque, dans le salon, un grand homme roux à l'allure de Vicking.

- Papa! s'écria-t-elle en courant vers lui pour le serrer dans ses bras.

Son père travaillait loin et revenait rarement à la maison. Elle était terriblement heureuse qu'il soit là pour son anniversaire.

- Raise! Ma petite chérie! Plus si petite à ce que je vois! Seize ans aujourd'hui! On a seize ans qu'une fois dans une vie, j'allais pas manquer ça!

- Comme chaque anniversaire papa...

- Oh, tu sauras qu'en vieillissant, si on pouvait manquer notre propre anniversaire pour éviter d'avoir un an de plus, on le ferait!

Raise rit. Elle adorait son père avec sa grosse barbe et ses longs cheveux roux. Il repoussa sur son nez ses lunettes qui brisaient son allure de guerrier vicking. Il serra sa fille contre lui et planta ses yeux verts brillants dans ceux de Raise, identiques.

- Et moi, Luke? demanda Élianne. J'ai pas le droit à un câlin?

L'homme attira sa femme contre lui et l'embrassa tendrement. Élianne était française et avait rencontré Luke dans un spectacle de GOROD, ce que Raise trouvait assez cocasse.

- Et si on allait manger ces délicieuses crêpes que ma tendre épouse à si gentiment préparées avec amour? dit Luke.

Et dire que son père était un métalleux! De quoi briser les croyances populaires!

°°°

Le lendemain, après une autre nuit troublée par le même cauchemar, Raise alla retrouver Larra.

- Pourquoi les fins de semaine durent juste deux jours? On est déjà dimanche, c'est nul! En plus on commence en math lundi! Avec ce stupide prof qui explique mal! débitait-elle avec un tel sérieux que ça en paraissait un véritable fléau.

- Le prof est pas stupide et tu comprendrais ses explications si tu écoutais en classe, Larra.

La jeune femme fut surprise du ton sec de son amie et de ses mots assez durs. Ce n'était pas dans les habitudes de Raise de se comporter ainsi, même quand Larra disait des choses complètement puériles et fausses.

- Bon, c'est quoi le problème? T'as rencontré un gars et tu doutes de tes chances?

Raise roula les yeux, soupira et dit:

- Si seulement.... Ça fait deux jours que je fais le même cauchemar... je suis désolé, j'ai été méchante... Je suis juste fatiguée.

- T'inquiètes... Penses-tu que c'est un rêve prémonitoire? Tu es voyante? Tu peux lire mon avenir?

- Larra! C'est pas prémonitoire...

Raise grimaça et reprit:

- Du moins j'espère...

- Il se passait quoi? On mourrait tous tués par des zombies?

Raise soupira, mais un petit sourire étira ses lèvres. Elle était heureuse que Larra ne semble pas avoir été blessée par son attitude un peu sèche. Par contre, son addiction aux zombies devait être traitée. Elle raconta son rêve à la jeune femme qui dit:

- Les rêves sont faits de choses qu'on a vécues et souvent qu'on ose pas confronter... C'est peut-être quelque chose comme ça...

- Ouais... sûrement... souffla Raise.

Mais quelque chose ne fonctionnait pas avec ce rêve. Habituellement, les acteurs dans les rêves étaient des gens que la personne côtoyait. Le cerveau ne pouvait pas inventer de visages. Pourtant, elle était sûre de n'avoir jamais vu cette petite fille auparavant.

°°°

Un frisson parcourut le dos du jeune homme. Il était assis en tailleur à méditer, mais la sensation intense lui fit ouvrir les yeux.

Sa nature de Devin et de Jaugeur lui avait permise de découvrir une grande puissance venant à peine de s'Éveiller. Il sortit de sa chambre et s'élança à la recherche d'un général référentiel. Il atteignit un grand homme à la carrure imposante et lui dit:

- On a un Éveil! Il me faut un Dépisteur!

- Tu es jaugeur, c'est un quoi?

- Un Suprême, monsieur.

Il y eut un moment de silence, marquant la surprise de l'homme et il dit:

- Je vais chercher un Dépisteur.

°°°

Un jeune homme tremblotant s'avança et dit:

- Chef...?

L'interpellé, bien que n'ayant qu'un an de plus que le jeune homme, inspirait le respect et la peur.

- Oui?

- Elle s'est Éveillée! Et elle semble terriblement puissante.

- Bien sûre qu'elle est puissante...

Elle s'était Éveillée, enfin. 

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