Partie Unique

Je l'ai toujours regardé. En même temps comment ne pouvait-on pas le regarder ? Sa simple présence illuminait une pièce entière et il y avait tellement de personnes tout autour de lui qu'on le remarquait aussitôt. Il était gentil, incroyablement gentil. Le simple fait de saluer quelqu'un ou de sourire faisait de lui une personne formidable. Et il était beau, incroyablement beau. Les filles étaient toutes folles de lui et lui rendaient toutes sortes d'hommages pour le remercier d'être leur source de bonheur.

Je l'ai toujours envié. Je ne saurais dire si j'étais jaloux ou si je me sentais juste misérable à côté de lui. Je n'étais ni beau ni gentil, je restais toujours seul à l'école et mes amitiés ici se limitaient à ma famille. J'en avais des amis, mais aussitôt après que chacun aie choisi son parcours ils sont tous partis de leur côté sans se soucier de mes sentiments. Je me suis alors renfermé sur moi et ai décidé de ne plus faire véritablement confiance à personne. Je restais silencieux et je ne portais que des vêtements sombres pour inciter les gens à rester loin de moi, ça vallait mieux pour eux et pour moi-même. Le seul ami qui était resté et à qui je devais une confiance aveugle habitait loin mais la distance n'était pas un problème car au moins je n'étais pas totalement seul. Si ce n'était pas pour cet ami je ne vivrais pas en ce moment...

Ma petite vie se déroulait ainsi de cette manière jusqu'à ce que je me retrouve dans la même classe que le soleil de l'école. Celui que j'enviais de loin était désormais plus proche que jamais et je ne sais comment j'ai fini par devenir son ami. Un jour il est venu vers moi alors que je mangeais seul à la cantine et les seuls mots qu'il a eu a prononcer étaient "Je peux m'asseoir ?", pour que je tombe à ses pieds comme tous les autres.

Parfois je me haîssais moi-même pour l'avoir laissé ouvrir la porte de mon coeur que j'avais moi même verrouillé, je me haîssais de lui avoir donné la possibilité de me côtoyer. Je ne lui ressemblais pas, je n'était rien, je n'étais personne à qui on pouvait s'attacher. Je me demande toujours pourquoi est-ce qu'il m'a choisi moi, était-ce par pitié ? Par curiosité ?
Je ne sais pas mais c'est moi qu'il a choisi pour être la personne la plus proche de lui. Ça paraîtrait bizarre et ça l'est. Je n'osais même pas imaginer la réaction des gens qui nous voyaient passer dans les couloirs. Que devaient-il penser en me voyant moi, paumé et stupide, avec leur soleil ?

Le soleil s'était déplacé au-dessus de moi pour que ses rayons bienfaisants puissent me faire briller moi aussi. Je souriais beaucoup plus, j'essayais de porter un peu de couleurs de temps en temps et j'essayais d'engager la conversation avec d'autres personnes malgré ma timidité maladive. Je changeais et je recevais des compliments de mon ami habitant à distance, il était triste de ne pas me voir évoluer et grandir mais était fier de mes efforts pour être heureux.

"Heureux"... Jamais je n'aurais cru parler de moi avec cet adjectif un jour. C'était si dur à imaginer mais finalement peut être que moi aussi je pouvais briller ? C'était ce que je pensais, en fait je me trompais totalement. Le soleil a toujours été gentil avec moi, mais plus le temps avançait plus je me disais que je ne méritais pas autant d'attention et de gentillesse. J'ai recommencé à me renfermer sur moi-même et tous les sourires que j'ai faits depuis lors étaient faux, mais évidemment ça personne ne le remarquait. Je me sentais de plus en plus seul, je pleurais toutes les nuits et cachais ma tristesse derrière toujours plus de sourires. Mes mauvaises pensées d'antan étaient revenues hanter mon esprit et je ne dormais plus. Si je dormais, ce serait pour ne plus jamais me réveiller.

J'ai commencé à détester le soleil. Il est retourné avec tous ses amis et m'a laissé dans l'ombre. En même temps une nouvelle année avait commencé, nous n'étions plus ensemble. Il ne venait que rarement me voir, trop occupé avec les personnes de sa nouvelle classe. Mais je ne pouvais plus revenir en arrière, j'étais désormais prisonnier de ses rayons chauds et délicats. J'étais redevenu le garçon faible qui ne portait que du noir. Le soleil est finalement revenu vers moi, nous avons enchaîné les sorties dans le but de nous rapprocher à nouveau mais même si lui semblait s'amuser, moi je ne trouvais aucun plaisir. C'était comme si quelque chose entre nous s'était brisé et il ne semblait toujours pas remarquer la tristesse qui me rongeait le coeur.

J'ai commencé à avoir des attentes. Lorsqu'il me demandait si j'allais bien et que j'hochais la tête en souriant, j'espérais tant qu'il me prenne dans ses bras et me dise que je mentais mais qu'il sera toujours là pour moi. Or cela n'est jamais arrivé...
Lorsqu'il était avec ses amis qui étaient devenus les miens, j'espérais qu'il arrête de rire avec eux et qu'il remarque que j'étais mal à l'aise et que je voulais rester au moins quelques minutes rien qu'avec lui.
Cela n'est jamais arrivé non plus...

Nous avons commencé à nous disputer. Le soleil me reprochait d'être trop distant, voir froid, et que tout le monde s'inquiétait pour moi mais que j'avais l'air de ne pas m'en soucier. Mais il se trompait, pas un moment il n'avait remarqué que ses rayons n'étaient plus rivés sur moi et que la température de mon corps chutait. Je n'ai rien pu lui répondre ce jour là et chacun est parti de son côté. Le soir même je me suis enfermé dans ma chambre. J'ai ignoré les plaintes de mes parents et je suis resté en boule sur mon lit toute la soirée, à me lamenter sur mon sort et à pleurer. Je me suis griffé et mordu jusqu'au sang, jamais je ne m'étais senti aussi mal.

Les jours qui avaient suivi la dispute étaient durs. Lorsque l'on se croisait dans les couloirs, lui toujours accompagné de ses amis, il me regardait à peine tandis que moi je baissais simplement le regard. J'avais alors compris qu'il m'avait abandonné et que je ne comptais pas tant que ça pour lui, il l'avait fait exactement comme tous les autres. En fin de compte ils étaient tous les mêmes...
Je pensais qu'il était différent.

Finalement après une semaine je ne sais trop pourquoi je suis allé m'excuser. Ce n'était clairement pas de ma faute mais je l'ai tout de même fait, je sentais que je devais le faire même si je n'y étais pour rien. Il m'a immédiatement pardonné et les choses sont redevenues comme avant.

Ou presque.

On était redevenus proches et il me consacrait bien plus de temps qu'auparavant, mais désormais je restais sur mes gardes.
J'étais heureux d'avoir retrouvé mon amitié avec le soleil, mais mes mauvaises pensées ne me quittaient pas elles. Il ne remarquait toujours pas que j'allais mal, que je ne mangeais presque plus rien à midi et que j'avais sans cesse des bandages autour de mes bras. Il ne remarquait rien de tout ça.

Une autre année a commencé, j'étais à nouveau dans sa classe. Mais ce détail ne me faisait rien, je ne m'en souciais pas étrangement. J'ai alors essayé de remettre en place mes pensées, étais-je sans sentiments ? Ces doutes se sont confirmés après d'autres disputes avec le soleil. De petites querelles pourtant ridicules qui se résolvaient rapidement semblaient l'affecter et moi je ne ressentais rien, pas même une once de tristesse. Dans ma tête c'est comme si mon amitié avec lui n'avait jamais existé et pourrait très bien disparaître sans que ça ne me blesse. Je me suis posé de nombreuses questions suite à cela, que s'est-il passé entre cette année et l'année dernière pour que je parvienne à ce résultat ?

J'ai à nouveau chuté. Mes notes ont baissé de manière catastrophique, mes parents qui étaient pourtant si gentils au départ ont commencé à me monter la tête. Ils ne me donnaient plus aucune liberté, me privaient de toutes sortes de choses et me disputaient chaque jour. Mes disputes avec le soleil ont continué encore plusieurs mois, plus le temps passait plus j'étais au bout du gouffre. Je m'y accrochais encore désespérément malgré l'envie de tout lâcher et de me laisser tomber dans le vide.

Ce jour-là, j'ai pris une importante décision. C'était un vendredi de printemps, moi et le soleil étions en bons termes pour une fois et encore une fois une dispute avait éclaté. Il me reprochait de ne jamais être là pour lui et nos amis. Je me suis mis en colère, encore une fois il ne se souciait pas de mes sentiments. Je lui ai calmement dit "ce ne sont pas mes amis Taehyung, ce sont les tiens", et j'ai tourné les talons.

Je l'ai laissé réfléchir et je suis parti. J'ai quitté l'établissement alors que les cours allaient recommencer et j'ai suivi le chemin de la maison les mains dans les poches. J'étais à présent habitué à sécher, l'école ne m'intéressait plus, ma famille ne m'intéressait plus, le soleil qui m'a réchauffé si longtemps ne m'intéressait plus non plus. Ma vie tout court ne m'intéressait plus.

Je suis d'abord passé chez le soleil, j'y ai déposé une lettre lui expliquant tout mes ressentis depuis que je le connaissais, toutes mes pensées sombres, toute la peine que j'ai pu ressentir, tout ce que j'ai enduré pendant deux ans et ce que je comptais faire maintenant. J'espère qu'il comprendra, je suis sûr qu'il comprendra.

Je suis ensuite passé chez moi, ignorant les cris de rage et les menaces de mes parents qui me traitaient de fou ou de malade mental, et je suis parti sac à dos sur les épaules et valises dans les mains. Je partais, j'allais rejoindre le seul véritable ami qui ne m'avait jamais jugé et qui a toujours été là malgré la distance, celui qui ne m'avait jamais critiqué ou repoussé, celui qui respectait toujours chacune de mes décisions.
J'ai pris le train, je suis monté sans hésitation jetant un dernier regard derrière moi. Adieu mon ancienne vie, adieu maman, adieu papa, adieu Taehyung... Je suis allé m'asseoir et j'ai fermé les yeux, quand je les ouvrirai à nouveau, je serai enfin heureux.

Deux mois sont passés. J'avais changé, je ne portais plus de noir et je souriais toujours. Je n'étais plus timide, je n'avais plus peur, je reprenais goût à la vie. Personne n'a recherché à me contacter tout ce temps, pas même le soleil, je me demande s'il a lu ma lettre... A-t-il eu peur ? Pleure-t-il en pensant à moi ?

Je sifflotai joyeusement en pédalant sur mon vélo le long des rues de ma nouvelle ville. Il faisait beau et je me sentais bien, j'avais fait le meilleur choix qui était de reconstruire ma vie. J'arrivai rapidement à la demeure que je partageais avec mon ami, mon seul vrai ami. Quelle ne fut ma surprise de voir le facteur en face de celle-ci, apparemment il avait du courrier pour moi.

Je pris la simple lettre qu'il me tendit et la fit tourner entre mes mains, intrigué. Il y avait juste mon nom et l'adresse, de qui cela pouvait-il bien être ? Je l'ouvris doucement, le papier à l'intérieur était terriblement froissé et les quelques mots qu'il contenait étaient écrits en doré, couleur du soleil. Des larmes s'écoulèrent sur mes joues à force de relire ces quatre mots pourtant si simples mais si puissants et j'esquissai un sourire.

"Continue de rêver Yoongi."

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J'espère que cet OS vous a plu !

Quels sont vos ressentis ? :3

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