La culotte de Sandrine a disparu

« Je trouve plus ma culotte.

— Ah.

— Je trouve plus ma culotte.

— Mmm...

— Je t'ai dit que je trouve plus ma culotte.

— Bah, qu'est-ce que j'y peux, moi ?

— Je te dis ça comme ça. Je dis ça, je dis rien. C'est comme ça : ma culotte a disparu.

— T'en as d'autres, non, des culottes ! T'en as un tiroir rempli.

— Oui, mais ça, c'était ma culotte préférée. Tu sais : celle que toi aussi tu aimes bien.

— Laquelle ?

— La noire. Celle avec des petits nœuds sur les côtés et un petit nœud sur le devant. En dentelle. transparente en dentelle. Un peu résille. Ma culotte noire.

— Ah... Dommage. Je l'aimais bien.

— Bah, oui, je sais que tu l'aimais bien ! C'était ta préférée.

— T'en rachèteras une autre.

— Je sais pas. C'était ma culotte préférée et elle a disparu.

— Oui, bon ! T'as rien d'autre à foutre que me répéter que tu trouves plus ta culotte ? Tu veux pas aller me chercher une bière et des cacahuètes, plutôt ? Rends-toi utile un peu.

— Je crois qu'on me l'a volée.

— De quoi ? Ta culotte ?

— Bah, oui ! De quoi on parle depuis trois heures !

— Trois heures ! T'exagères pas un peu ?

— Bah, non. J'exagère pas ! Je te dis que quelqu'un m'a volé ma culotte, celle que t'aimais bien parce que tu me trouves bonne dedans et que tu adores que je porte quand je me mets à quatre pattes. C'est grave, non ? Quelqu'un est venu dans notre chambre et a volé la culotte.

— Mais de quoi tu parles à la fin ? C'est quoi ces conneries ?

— Bah l'autre jour, quand tes copains sont venus. Elle était à sécher sur le séchoir dans la chambre parce que je l'avais mise à sécher.

— Captain obvious !

— Ça veut dire quoi ?

— Rien. Laisse tomber. C'est une blague.

— Oui, ben je te rappelle que moi je parle pas en anglais. Je comprends pas. Excuse-moi d'être conne, hein !

— Rhoo... mais j'ai jamais dit que t'étais conne.

— Bah pourquoi tu me parles en anglais alors que je parle pas en anglais.

— Laisse tomber.

— C'est tout ce que ça te fait : je te dis qu'un de tes potes est entré dans la chambre et a volé ma culotte à sécher et c'est tout ce que ça te fait ?

— Oh là ! T'es sûre ? Tu l'as pas perdue ? Tu l'as pas rangée ? Elle a pas glissé sous un meuble ?

— Non, j'en suis sûre ! Je l'ai mise à sécher parce que je voulais la mettre après quand ils étaient partis pour faire l'amour avec toi et elle avait disparu. Et je l'ai pas rangée entre temps et toi non plus.

— T'es sûre de toi ?

— Oui. Je crois savoir qui c'est en plus !

— Qui ?! Dis-moi qui c'est !

— C'est Gautier !

— Hein ! Comment tu le sais ?

— Je l'ai vu traîner à côté de la chambre à un moment. Je l'ai croisé dans le couloir et c'était à côté de la chambre.

— Sérieux ? Peut-être qu'il allait aux chiottes. Peut-être qu'il allait fumer dans la cuisine.

— Je suis sûre que c'est lui !

— T'es sûre et certaine ? Parce que ça, c'est grave, hein ! Ça je vais pas laisser passer ! Personne entre dans notre chambre pour cambrioler tes culottes ! 

— C'est Gautier ! En plus je l'ai déjà vu me regarder bizarre. Et il m'a caressé les fesses.

— QUOI ?!

— Bah, oui. Je t'ai dit : je l'aime pas, je l'aime pas. Il a volé ma culotte et il m'a caressé les fesses.

— Bordel ! Je vais lui péter la gueule ! Quand est-ce qu'il t'a touché les fesses ?

— Je sais pas... Plein de fois !

— HEIN ?! Et pourquoi tu m'as jamais dit ? 

— Bah... parce que c'est ton pote. Je voulais pas foutre la merde entre vous.

— Putain ! Mais c'est pas mon pote, ce type ! Il vient chez nous alors qu'il est même pas invité ! C'est les autres qui le ramènent à chaque fois ! Et toi t'as rien dit ? Tu l'as laissé faire ?

— Bah... Qu'est-ce que je pouvais dire. Il faisait semblant que c'était pas exprès. Je suis sûre que c'est lui qui a volé la culotte. C'est obligé. Personne d'autre aurait fait ça.

— Putain ! Il va m'entendre ce sale pervers ! La prochaine fois que je le vois, je lui casse la gueule !

— Maintenant je suis sûre qu'il se touche la bite avec et qu'il sperme dans ma culotte.

— Enfoiré ! Bordel ! Bordel de merde ! 

— Faut plus qu'il vienne !

— Tu m'étonnes qu'il foutra plus les pieds ici ! Alors ça, non ! Plus jamais. Je veux plus le voir !

— Tu devrais peut-être dire à tes autres potes de plus lui parler : c'est un voleur et un fils de pute.

— Ouais ! Ce gros pervers ! Je vais le dire à tous les autres ce qu'il t'a fait ! Ah ! Putain ! Je sais pas ce qui me retient de foncer chez lui pour lui péter la gueule tout de suite.

— Et toi ? T'en penses quoi ? me demanda Sandrine en se tournant vers moi. »


Moi, à vrai dire, je pensais que j'étais en train de vivre un des moments les plus gênants de ma vie.

À la base, j'étais juste venu récupérer une manette de Playstation que Joss avait ramenée de la Fnac. Le logo était mal imprimé et comme il y avait ce défaut, elle ne pouvait pas être vendue en rayon. Du coup il l'avait récupérée pour gratos et il me l'avait proposée à dix balles.

Gros, gros malaise.

Ils me regardaient tous les deux comme s'ils attendaient mon aval pour organiser une expédition punitive chez ce blaireau de Gautier.

À vrai dire je m'en tapais complètement de leurs histoires de culotte et de séchoir. Pour ce que j'en savais, Sandrine se frottait à tous les mecs pour faire sa chaudasse en société. C'était sa manière à elle d'être cool.

Et pour être encore plus cool, elle expliquait à n'importe qui qu'elle cherchait une meuf bonne pour faire un plan à trois avec Joss, parce qu'elle aimait elle aussi les meufs bonnes et qu'elle aimerait bien se taper Scarlett Johansson parce qu'elle était bonne de chez bonne et qu'elle la voulait dans son lit.

Elle avait déjà demandé en vain à toutes les filles du groupe si ça les intéressait de faire un plan à trois. Ou même de coucher avec elle devant Joss assis à côté si elles étaient trop timides pour coucher à trois. Ou bien encore si elles avaient pas des frangines, des copines ou des cousines qui seraient intéressées.

Bien entendu, c'était uniquement pour ramener sa grande gueule et jouer à la fille libérée sexuellement, parce que c'était cool de ne pas avoir honte de ses envies.

Pour mieux faire passer le message, elle attendait toujours qu'il y ait des potes à Joss pour prendre sa douche et sortir dans le couloir à poil ou se changer la porte ouverte. Parce qu'elle n'avait pas honte de son corps. C'est la Nature et c'est cool d'être à l'aise chez soi.

Dans le même ordre d'idée, elle invitait souvent les nouvelles filles du groupe ou les copines de copines à venir choisir avec elle dans sa chambre la parure idéale de sous-vêtements pour boire des cocktails et bouffer des cacahuètes dans le salon. C'était sa façon à elle de faire connaissance en toute décontraction. Sandrine était une meuf cool. 

Mais on ne pouvait pas dire qu'elle était fine.

Jossandrine me regardait donc avec insistance. Je devais leur dire quelque chose pour fuir au plus vite loin de leurs conneries.

« Euh... Ça craint, ouais ! Moi si j'étais vous... je me méfierais de ce type-là. Il a l'air chelou !

— Mais ouais ! Carrément ! Venir, chez moi, voler les culottes de ma copine ! Devant tout le monde !

—  Heureusement que tous les potes de Joss sont pas comme ça. Toi, t'es pas comme ça, me rassura Sandrine.

—  Je vais me chercher une bière ! T'en veux une ? me proposa Joss en se dirigeant vers son frigo américain.

— Non merci, ça ira. En fait, j'allais partir. Il y a un match de catch à la télé dans dix minutes et j'ai pas envie de rater ça.

— Ah ! C'est dommage, s'apitoya Sandrine. En fait on voulait te proposer un truc, Joss et moi. On se disait, comme t'es sympa et qu'on t'aime bien tous les deux : est-ce que ça te dirait un plan à trois avec nous ? Si tu veux je peux te piper. Ou bien Joss si tu préfères. T'en dis quoi ?

—  Ah... Euh... Ouais. Pourquoi pas. On se rappelle, on en reparle ? Merci pour les cacahuètes, hein ! Salut."


En revenant chez moi j'allumai mon ordi pour voir si j'avais assez sur mon livret A pour acheter une télé et un abonnement au câble, histoire de mater du catch tranquille, tout seul dans mon coin.

Je commençais à me dire que tous ces potes avaient des soucis.

Mais j'étais loin de me douter que le plus gros drama de tous les temps allait se jouer le lendemain à la Casa Cubana.



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top