71. Conséquences Désastreuses


Blanche passa les deux jours qui suivirent à éviter Aaron. Elle avait profité d'un prétexte odieux. Si bien qu'elle en aurait rougi si ça ne l'épargnait pas de rougir pour autre chose.

En effet, Glen qui s'inquiétait pour Nicky était de mauvaise humeur, Derek tournait comme un lion en cage dans la caserne dont aucun repli à cause de la tempête ne le lui donnait. Argy, inquiet pour son meilleur ami, avait le moral dans les chaussettes.

Donc, quand sa maman adorée, c'était invitée à rester dans sa chambre, il en avait profité.

Blanche s'avait qu'elle n'arriverait pas à éviter continuellement son mari. Or, c'était son envie même qui la poussait à ne pas s'attarder en sa présence. Elle n'allait pas tarder à lui céder. Il avait déjà son cœur, même s'il l'ignorait, et n'allait pas tarder à avoir le reste.

Heureusement, au troisième jour, la pluie remplaça la neige et Saphir s'invita à la caserne, allégeant quelque peu l'atmosphère. Puis la tempête prit fin et le patron décida qu'il était temps de mettre le nez dehors, de voir ce qu'il était advenu du village.

Aaron était surtout frustré et en colère. Il était inquiet. Avait-il tout fait foirer en voulant précipiter les choses avec Neige ? De plus, il avait failli la perdre une nouvelle fois... Si Vecz avait réussi son coup...

Grâce à la pluie, la vaste plaine en contrebas n'était plus qu'un immense tas de boue où on aurait posé les fondations d'une ville en bois. Après ces trois jours enfermés, le déjeuner expédié, tout le monde s'était joint à la sortie. Même Derek.

À peine arrivé près de l'eau, tout le monde remarqua la mine déconfite des habitants. Certains étaient néanmoins contents de les voir. Après tout, ils faisaient partie du décor habituel pour les villageois. Mieux encore, ils avaient aidé à repousser les orcs et Argy était de loin le médecin le plus compétent du coin. Le gamin fut tout de suite sollicité par plusieurs brûlures dû au gel. Il se lança alors aux petits soins, où un attroupement ne tarda pas à se former tout autour.

- D, Glen, je vous le laisse, ordonna Aaron.

Les deux hommes opinèrent sans un mot avant de le rejoindre. Le guerrier avait la mine sombre, bien décidé à en découdre. Aaron, avec son extraordinaire ouïe, avait déjà glané les informations qui lui manquaient. Saphir lui jeta un coup d'œil inquiet avant de le suivre, lui et la jeune femme, d'un pas puissant.

Le patron de ce groupe hétéroclite ne passa pas par quatre chemins et pénétra directement dans la grande maison du Chef. Blanche échangea un regard plein d'incertitudes avec Saphir avant d'entrer à son tour.

À l'intérieur, la tristesse était le maître mot. La femme blonde qui avait été si hautaine pleurait à chaudes larmes en enlaçant deux des petits garçons. Blanche comprit rapidement ce qu'il était advenu du troisième.

Sur la table, quatre corps lui faisaient face dont l'enfant. Déglutissante, elle se colla à Aaron, qui fusillait Vecz du regard.

- Allons-nous-en, murmura la rousse en lui tirant doucement la manche.

Malheureusement, cela eut le don d'amener l'attention sur elle.

- C'est ta faute ! Ta faute ! Hurla la femme du Chef, recroquevillée de douleur à même le sol.

Blanche ouvrit la bouche, mais ses excuses restèrent coincées dans sa gorge devant l'apparition d'un homme à la beauté étrange et très reconnaissable, portant une armure faite entièrement d'or et reflétant à lui seul la pièce entière. Les flammes du feu prirent vie une seconde fois.

- Un enfant pour un enfant, un payement juste que j'ai exigé, ainsi que le Père de Toutes Choses en personne, récita Fenrir, comme s'il s'ennuyait ferme en regardant l'assemblée.

Son regard s'appuya sur Blanche, qui ouvrit grand les yeux. Il avait une autre allure avec l'armure et ses cheveux nattés à la coupe viking. Plus impressionnant, plus puissant, plus... Fenrir. Comme s'il s'avait à quoi Blanche pensait, il lui offrit un sourire malicieux teinté de cruauté.

Un silence si épais s'installa qu'un ange passa avant que Vecz n'utilise tout son courage, ne se lève et n'aboie :

- Par Odin ! Soyez plus clair !

Fenrir leva un sourcil. Il n'avait pas été limpide ? Très bien, il allait remettre les points sur les i.

- J'ai ordonné une seule chose et unique chose ! Hurla-t-il en projetant son pouvoir.

Tous s'inclinèrent, sauf les deux joueurs et le familier de Glen. Pas de peur ou de respect. Le pouvoir de Fenrir les surplomba et les écrasa de tout son poids.

- Ma protection en échange de la vôtre en toute circonstance des membres qui demeurent en haut de la montagne ! Hurla-t-il.

Rauõr se leva, interrompant alors l'animosité ambiante des vikings envers les joueurs.

- Nos dieux sont justes et j'accepte leur châtiment.

- Justes ?! Hurla sa belle-mère dont les larmes coulaient abondamment. Pourquoi a-t-il fallu que ce soit mon fils ?! S'écria-t-elle en tenant les deux qui restaient.

- Parce que c'est ton erreur, expliqua doucement, mais d'une voix ferme, Fenrir.

Il s'approcha de la jeune viking qui recula en rampant. La peur teinta ses yeux et Fenrir s'arrêta de marcher.

- C'est toi qui as comploté avec ton mari et son second fils ! Hurla-t-il alors. C'est toi qui en as eu l'idée ! Par ta jalousie maladive, tu as bien failli tuer la seule personne qui ne fallait pas ! Une enfant !

Fenrir désigna Blanche du doigt et tout le monde se tourna vers la joueuse alors qu'Aaron avait agrippé et serré fermement sa main, tandis que Saphir fronçait les sourcils, peinant à suivre. Tout ça parce que cette blondasse était jalouse ?! La blonde en question s'était ratatinée dans son coin.

- Une enfant ? Elle ? S'écria Vecz en crachant au sol devant le Dieu, qui peina à garder son calme.

Saphir poussa un grognement envers l'irrespect du viking avant d'hurler comme un véritable drakion. Fenrir leva la main et l'homme aux cheveux bleus s'arrêta.

- C'est toi que j'aurais dû tuer si Odin n'avait pas estimé que tu aurais un rôle à jouer. Je te déconseille de mettre mes nerfs à l'épreuve. Cette jeune femme n'a que seize hivers. Dans son monde, elle est considérée comme une enfant tant qu'elle n'en a pas dix-huit.

D'un simple mouvement du poignet, sans crier gare, il claqua des doigts.

- Jamais tu n'auras d'enfants, prédit-il. Toi qui as failli mettre en péril ce monde, tous ses habitants et une destinée bien plus grande que dans tes rêves les plus fous.

Vecz pâlit, puis Fenrir s'approcha de Blanche, sous les yeux de tous, il lui caressa la joue.

- Ne t'en veux pas. L'enfant est chez Odin, il lui sert de serviteur.

La jeune femme sourit alors. Elle savait que le Dieu prendrait soin du jeune garçon et lui épargnait la dure vie de viking.

- Remercie, Grand-Père, pour moi.

Fenrir s'inclina et tendit sa main. Elle lui donna celle qui restait. Le terme affectueux qu'elle avait employé n'avait échappé à personne. Le dieu posa doucement ses lèvres dessus sans l'embrasser, juste une douce caresse avant de se volatiliser.

- Saphir, je te confie ma femme, ordonna Aaron d'une voix claire avant d'embrasser tendrement les doigts de Blanche encore dans sa main et de les lâcher.

Le guerrier s'avança alors d'une démarche de prédateur jusqu'à rentrer dans l'espace vital de Vecz.

- Tu as envoyé ton couteau vers la tête de ma femme ? Demanda-t-il, sur un ton venimeux, même s'il connaissait pertinemment la réponse.

Du coup, inutile d'attendre celle-ci, puisque Vecz devint ainsi un bon sac de frappe sous les yeux horrifiés de l'assemblée. Ce dernier essaya bien de répliquer, mais Aaron lui était bien supérieur et de loin.

Il n'avait aucune chance. Blanche observa à la fois dégoûtée et ravie, Aaron se déchaînant. Jamais elle n'avait vu l'homme perdre à ce point son sang-froid. Jamais elle n'avait vu Kiyan lever la main sur qui que ce soit...

Personne n'avait été assez fou pour s'en prendre à lui.

Un coup à la tempe, efficace et brutal, le mit au tapis. Aaron, loin de s'arrêter, le releva à moitié par son haut et de l'autre enchaîna des droites sur le visage. Les yeux, le nez, la bouche...

Le craquement des os n'était rien en comparaison aux bruits de ventouse dû au sang...

Quand il en eut assez, il le laissa sur le sol, quasiment pour mort. Personne n'avait essayé de bouger pour l'aider, même pas son frère aîné.

- Il survivra, grogna le guerrier avant de s'arrêter. Ce ne sera pas le cas du prochain qui essaye ne serait-ce que de toucher un seul de ses cheveux...

La menace fit son effet. Personne n'eut alors plus rien à redire et laissèrent partir les deux joueurs ainsi que le familier drakonique.

Plus loin, lorsqu'ils allaient bientôt rattraper le reste de la bande, Aaron s'arrêta, les mains ensanglantées, et se tourna vers sa femme :

- J'ai pas rêvé, Fenrir a bien dit que tu n'avais que seize ans ?

Sous les yeux ébahis de son mari, Saphir et elle éclatèrent alors de rire, émus jusqu'aux larmes, ils eurent du mal à s'en défaire alors qu'Aaron grognait dans son coin.

- Je ne te savais pas aussi jeune...

Il eut ensuite la décence de paraître gêné. C'est ainsi que les trois autres les trouvèrent, tandis que sa quête choisit ce moment-là pour lui rappeler qu'il était déjà temps de partir.

- Argy, est-ce que tu peux aller voir Vecz dans la grande maison ? Il aurait besoin de soins.

Le jeune homme regarda son père, très intéressé.

- D'accord, mais tu m'accompagnes et tu m'expliques pourquoi tu as l'air si coupable.

Aaron grogna avant d'y consentir.

Un baiser sur la joue d'Aaron, un sur le front de son fils et la voilà repartie vers la caserne avec son familier et Saphir, fidèle au poste. Avec en prime, une fenêtre bleue juste à moins d'un mètre de son visage.

Les garçons avaient des choses à faire au village. Mais pour elle, il était inutile de retenter le diable puisqu'elle était si proche du but.

Blanche discuta avec Saphir de son plan pour le Gala. Celui-ci sourit lorsqu'il apprit ce qu'elle avait fait, avant de balancer négativement sa tête.

- Dans ce cas, faut que je rentre. Ton grand-père doit être dans tous ses états à l'heure qu'il est.

Il raccompagna la jeune femme jusqu'à la porte de la caserne avant de disparaître.

Instinctivement, elle prit la direction de la chambre de Kiyan sans même s'en rendre compte. Elle retira ses chaussures, puis s'allongea dans leur lit avant de récupérer son nouveau sort. Imposé, le sort, ce qui la fit soupirer.

Passation du pouvoir divin : Temps.

Elle inspira et expira, respirant l'odeur apaisante de Kiyan avant de s'évaporer alors en un million de pixels, avec la promesse qu'elle allait bientôt subir une nouvelle aventure, qu'elle le veuille ou non.

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