36. La Tour Du Nord
( Je dédis ce chapitre à K1te_Moon qui attend toujours mes chapitres avec impatience, et je l'en remercie )
Après avoir lu deux carnets de plus, elle n'arrivait plus à voir très clair. Malgré le fait qu'elle aurait aimé en apprendre davantage, elle savait qu'il était temps de rentrer.
Ce qu'elle y avait lu... Blanche n'en revenait tout simplement pas. Elle comprenait alors mieux Kiyan. Désormais, elle savait ce qu'il avait fait et pourquoi il ne ferait jamais le premier pas. Malgré tout, elle continuait de l'aimer. Apprendre que la personne qu'on adorait était un beau salopard n'enlevais rien à cet amour.
À présent, elle savait même pourquoi elle possédait une forge et cela expliquait aussi, les alliances d'Aaron et de Kiyan qui n'étaient pas ordinaires...
Blanche savait également ce qu'elle était. Qui elle était et pourquoi elle était si importante. Pourtant, la rousse ignorait toujours qui était son père et qui l'avait renversé. Comme si elle s'était abstenue de l'écrire pour qu'elle puisse le découvrir d'elle-même.
La jeune femme posa le dernier carnet qu'elle avait consulté sur son lit et descendit, prête à affronter le monde entier à la recherche de son familier.
Elle trouva alors Phénix au bord de la piscine extérieure, complètement nu, faisant bronzette sur un transat.
- Bordel ! S'écria la jeune femme, surprise et embarrassée, essayant de regarder tout sauf le démon qui éclata de rire.
Deux secondes plus tard, il était de nouveau présentable.
- Va falloir t'y faire, les démons, surtout ceux affiliés à Lilith, sont tous sauf pudiques.
La jeune femme grogna alors qu'elle se remettait difficilement.
- Ça y'est, t'as fini de lire ? On peut rentrer ? La questionna Phénix.
Elle regarda alors son familier de plus près. Son aura s'imposa à elle, d'un rouge tendre, tirant sur un bleu foncé presque nuit, sans passer par du violet. Elle était magnifique, alors qu'il avait revêtu son costume trois pièces blanc sans la veste et sans la chemise.
Ses cheveux volant dans la douce brise, elle leva les yeux au ciel. L'astre solaire n'avait pas bougé depuis son arrivée.
- Il ne fait jamais nuit ici, la renseigna le démon avant de lui prendre la main et de la tirer vers la sortie.
- Tu les as lus, toi ? Demanda soudain la jeune femme, une idée derrière la tête.
- Jamais. Non merci. Je suis déjà mort, j'ai fini aux enfers et pourtant, je vis ma meilleure vie. Si j'avais su que j'allais crever, j'aurais tenté de changer les choses et j'aurais tout perdu. Connaître l'avenir, très peu pour moi.
- Dans ce cas, comment sais-tu pour ma... mémoire ?
À défaut de trouver un meilleur terme à dire sans qu'elle soit foudroyée par Odin en personne. Après tout, elle n'avait pas le droit de parler de sa capacité à se souvenir à personne.
- Oh, eh bien, tu m'as fait venir ici et puis tu m'as alors tout raconté. Qui j'étais et qui je serais pour toi. Tu ne l'as pas lu, ça ?
Blanche secoua la tête. Non, mais il avait vu la taille de sa bibliothèque ou quoi ? Il lui faudrait des années pour tout lire !
- Ici, le temps est suspendu. Même les dieux ne peuvent rien y faire. Pas vu, pas pris. Donc, tu peux me dire que tu te souviens de qui tu es sur Epsilon, même en Outremonde. Tu y as amené Saphir ici et Alacazar. Donc, tu peux t'appuyer sur eux deux également.
Blanche s'arrêta et attendit. Rien. Phénix lui sourit, goguenard, avant de reprendre leur marche. La fratrie, qui avait compris qu'ils étaient sur le départ, vinrent leur dire au revoir.
Puis, ils touchèrent la fenêtre et ils réapparurent dans le bureau de Kiyan.
Le coeur battant, elle retourna dans son lit, apaisée. Son téléphone indiqua à peine quatre heures du matin.
Demain, elle serait de retour au dortoir, loin de Kiyan... En attendant, elle était bien trop excitée pour rejoindre les bras de Morphée.
Eva tronçonnait encore du bois et Phénix, de nouveau en chat, vint ronronner à son oreille, se roulant en boule sur sa poitrine.
Elle entendit alors nettement un grincement et sans faire de geste brusque, elle se tourna vers la porte. Dans l'entre-bâillement de celle-ci, elle y vit le propriétaire des lieux, debout sans un bruit. Leur regard se croisa. Il resta là un bon moment. Blanche n'osant pas faire le moindre geste et avant qu'elle ne se décide à bouger, elle le vis regagner sa chambre à reculons. Comme une ombre.
De la nuit, elle ne s'endormit. Réveiller comme jamais, les yeux grands ouverts, mille possibilités s'ouvraient à elle.
Le réveil finit par sonner, la délivrant de ses fantasmes. Elle sauta du lit direction la douche. Une bonne douche froide. Habillée, préparée, maquillée, Eva lui jeta un mauvais regard alors que Blanche s'asseyait sur le lit, attendant sa colocataire qui venait tout juste de se forcer à se lever.
- T'es tombée du lit ou quoi ? Ronchonna la brune alors qu'elle gagnait à son tour la salle de bain.
- T'imagines même pas de combien d'étages je viens de tomber, murmura Blanche alors que la porte s'était déjà refermée, derrière son amie.
Blanche profita du silence pour se connecter sur le DarkWeb avec les identifiants de Sean. Des recherches s'imposaient.
Eva finit par sortir de la douche, pomponner plus que d'habitude et elle portait... Une robe ! Blanche s'y reprit à deux fois pour se lever du lit, bouche-bée. Évanescence portait une robe !
- Tu descends pas ? Lui demanda son amie.
- Bien sûr que si ! Je ne manquerais la réaction de ton père, pour rien au monde, répliqua Blanche, en la reluquant.
Eva eut la décence de rougir. Blanche, quant à elle, c'était passé le premier jean blanc délavé qu'elle avait pu trouver dans la penderie, un pull à fine maille dans le même ton, les manches légèrement trop grandes. Elle avait complété son look avec des chaussettes de danseuse gris perle qui montaient au-dessus des genoux, les bottines d'Eva et un perfecto argenté effet givré. Blanche avait cherché son écharpe, mais apparemment tous les vêtements qu'elle avait portés le jour de son accident avaient disparu de l'hôpital. Elle s'était donc rabattue sur une ancienne écharpe en mohair d'un blanc éclatant.
Si Eva avait choisit une robe noire en dentelle avec des chaussures à grosses plateformes bien épaisses, elle avait complété le tout avec un imperméable en laine noire et une écharpe en soie crème pour adoucir le tout.
Eva, la première, téléphone et sac en main, descendit devant un Kiyan qui les attendait de pied ferme.
- Vous êtes en retard.
- C'est ma faute, s'excusa Blanche. J'ai eu du mal à fermer l'œil de la nuit et en voyant la tenue d'Eva, j'ai failli avoir une crise cardiaque.
Alors celle-ci grimaça avant de lui envoyer un coup de coude bien mérité dans les côtes. Sauf que c'était à peine si elle l'avait senti, le « aaiehheuu » qui s'ensuivit, qui fut purement habituel. Blanche n'avait plus mal, elle ne sentait quasiment plus la douleur.
Kiyan leva un sourcil en jetant un coup d'œil à leurs tenues. Il secoua la tête et se mit en route sans un mot vers l'entrée. Le quarantenaire portait une veste bleu nuit en laine ouverte sur un pantalon en velours du même ton, une chemise en soie bleu roi et au-dessus un pull en cachemire bleu-gris. Ses chaussures grises, elles aussi, s'accordaient parfaitement avec un chapeau panama et ses gants de laine de la même teinte.
Décidément, il était superbe. Il leur donna à chacune un sac de papier kraft où Blanche eut le plaisir de trouver un croissant tout chaud fait maison, avant de s'avancer sur le parking où la voiture les attendait.
- Merci, s'extasia la jeune femme.
Comme à l'accoutumée, elles montèrent toutes les deux derrières. Cela venait de l'époque où elles se chamaillaient pour avoir le privilège de monter devant. Kiyan impartial trancha sans appel, puisque c'était comme ça, elles resteraient toutes deux cantonnées à l'arrière.
Blanche qui n'avait pas mis de rouge à lèvres, au contraire de sa meilleure amie qui s'était laissé emporter par un rouge pétant, mangea non pas un, mais deux croissants. Eva ne voulant pas ruiner ses efforts. Le trajet se passa bien, comme d'habitude. Kiyan conduisait en silence tandis qu'Eva monopolisait la parole. Ils furent vite arrivés.
- Blanche, tu montes devant, annonça Kiyan à peine garé.
Les deux jeunes femmes s'échangèrent un regard. Eva haussa les épaules, lui indiquant qu'elle était aussi perdue qu'elle.
- Pourquoi ? Je veux dire, on a cour, non ? Hésita Blanche.
- Eva, à cour, toi et moi, on a un truc à régler avant.
Le cœur de la rousse battit alors à tout rompre. Allait-il enfin dévoiler tous ses secrets ?
- Mais papa, lança Eva, c'est toi qu'on a la première heure !
- Je serais absent aujourd'hui.
- Mais, mais, bégaya la brune, ça nous fera deux heures de perm ! J'aurais pu rester à la maison !
- Parfait, contra-t-il, froid. Tu auras le temps de faire tes devoirs et de mettre de l'ordre dans ta seconde chambre. Maintenant, file, on est déjà assez en retard, comme ça.
Elles sortirent de la voiture et tandis qu'elle s'essayait à l'avant, Blanche vit une Eva dépitée gagner le portail de leur résidence secondaire. Elle lui envoya un vague signe de la main qu'elle lui renvoyait avant de fermer la porte et de boucler sa ceinture.
- On va où ?
- Répondre à quelques questions.
Elle dut se contenter de ça, puisque son ton suggérait qu'elle n'aurait pas d'autres explications. Son aura pourtant brillait toujours de cette douce lueur ambrée. Rien ne semblait présager sa mauvaise humeur.
Phénix, qui avait attendu patiemment, surgit à ce moment-là pour se blottir sur ses genoux sous sa forme de chat. Elle se mit alors à le caresser tout en regardant la route. Sa compétence « aura » monta de niveau encore une fois, alors que son démon, appréciant son attention, ronronnait et lui donnait chaud.
De temps en temps, elle jeta des coups d'œil à Kiyan, qui semblait perdu dans ses pensées, ne prêtant pas une seconde à sa personne. Bizarrement, cela ne la rendit ni triste, ni morose, pour une fois. Même si c'était encore une occasion perdue, elle le comprenait pour la première fois de sa vie.
Finalement, ils s'arrêtèrent devant un bâtiment qu'elle avait déjà vu un nombre incalculable de fois à la télé, mais dont elle n'avait pas encore l'occasion d'y mettre les pieds.
Apparemment, ce serait pour aujourd'hui. La Tour du Nord, siège social de la Greyson Corporation, monument à la fois artistique et historique, classée au patrimoine d'Epsilon comme toutes les autres Tours, et dont elle savait désormais être également en quelque sorte « la ville » vampirique du coin.
Dirigé par nul autre que le Roi et non le PDG Sebastian Greyson, contrairement à ce que la population humaine croyait savoir.
Blanche comprenait mieux la mauvaise humeur de Kiyan. Elle allait avoir droit à la correction que Sebastian réservait à son meilleur ami en avant-première.
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