25. Une Après-Midi Paisible
Elle se réveilla en sursaut et dans son élan, elle se redressa, les yeux écarquillés.
- Enfin ! Clama doucement la seule voix qu'elle avait pile envie d'entendre.
Elle se retourna pour observer Kiyan, complètement rhabiller, encore en train de corriger ses copies, sur le transat d'à côté. Soucieux, il posa ce qu'il était en train de faire et la regarda soulager. Son aura choisit ce moment-là pour se manifester et c'est absolument émerveillé, émue qu'elle regarda cette panoplie de couleurs sublime qui l'illuminait de toutes parts.
L'ocre et l'or dominaient, le tout rehaussé au bout par du rose poudrée sur un fond chocolat, cerclé d'une ligne nette de la même teinte. C'était si beau qu'elle en resta bouche-bée.
- Blanche ? Tout va bien ?
L'inquiétude persista dans sa voix et avant de comprendre, elle se jeta dans ses bras. Par Babylone, ce qu'il lui avait manqué ! Parcourue de frissons, qui n'avaient rien à voir avec le froid, il remit le plaid sur elle. Celui-ci était chaud, il l'avait donc déjà couverte avec pendant qu'elle dormait.
Ayant retrouvé ses esprits, elle s'éloigna, mais il eut vite fait de la rattraper et de la replacer tout contre lui.
- Encore cinq minutes, exigea-t-il, fermement.
Sans un mot, sans un geste, la jeune femme en profita jusqu'à ce qu'il relâche son étreinte. Elle regagna son transat, s'entourant du plaid. Elle jeta un coup d'œil aux alentours, le soleil d'Epsilon avait presque terminé sa descente dans le ciel, offrant un joli spectacle qui faisait écho à l'aura de Kiyan.
- Combien de temps, cette fois ? Lui demanda-t-il.
- Une semaine, lui répondit-elle. Mais je ne suis plus seule. On m'a un peu plus expliqué le principe et ils m'ont accueilli chez eux. À dire vrai, c'était plutôt tranquille, lui rappelant l'accueil de Nicky, la caserne immense et la chaleur apaisante de son démon.
- Tant mieux.
Blanche le vit alors serrer le poing et la mâchoire, le regard rivé sur la piscine.
Que lui arrivait-il ? Bien qu'intriguée, un changement de sujet s'imposait.
- Alors, professeur, comment je m'en sors, niveau étude ? Lui demanda la jeune femme, curieuse, en jetant un coup d'œil aux copies dont il avait repris manifestement la correction.
Toute fureur envolée, il lui sourit en coin.
- Je suis heureux de voir que cela ne perturbe en rien ta prose, dit-il en jetant un coup d'œil à la pile qu'il avait bien entamée, suivant son regard. Si seulement tous les autres en faisaient autant...
Elle se rappela alors sa promesse de la conduire voir son grand-père.
- Mince alors ! Il est quelle heure ?
Il jeta un coup d'œil à son téléphone.
- Dix-huit heures. Pourquoi ?
- Vous croyez que Winter serait encore disponible ?
Kiyan lui jeta alors un étrange regard qu'elle ne sut décrire.
- Tu veux toujours y aller ?
Blanche hocha vigoureusement la tête. Monsieur Ardachir soupira, passa la main dans ses cheveux puis acquiesça.
- Habille-toi. On y va dans quinze minutes.
Elle se leva d'un bond, repoussant le plaid qu'elle laissa reposer sur le transat et s'élança vers la baie vitrée.
- Oh Blanche ?
- Oui ? Demanda la jeune en se retournant.
- Frappe avant d'entrer.
D'abord, elle ne comprit pas où il voulait en venir, mais quand elle le fit, elle devint rouge comme une écrevisse avant d'éclater de rire. Contrairement à ce qu'elle aurait cru, les yeux de Kiyan pétillèrent d'amusement, son aura parcouru de filaments rouges.
- Ça ne vous dérange pas ? S'étonna la jeune femme.
- Non, pas vraiment, continua Kiyan. Moins que je ne l'aurais cru, c'est sûr. On n'a qu'une vie après tout. Toi et moi, nous le savons que trop bien. Surtout, ne lui dis pas que je sais...
- Okay.
Blanche n'en chercha pas à savoir plus. Quinze minutes, c'était beaucoup trop court pour se préparer. Elle referma la porte derrière elle et s'élança au premier étage. Comme le lui avait recommandé le propriétaire des lieux, elle frappa.
- Oui ? Demanda Eva essoufflée.
- C'est moi, j'ai besoin de vêtements, on part dans dix minutes avec ton père voir Winter, clama la jeune femme pour lui faire comprendre l'urgence de la situation.
- Quoi ?! S'exclamèrent deux voix bien distinctes.
- Une seconde, répliqua Eva.
Blanche entendit alors un sacré remue-ménage, mélangé à plusieurs grognements de Sean. Puis sa meilleure amie ouvrit enfin la porte. Débraillée, mais habillée de son peignoir rose.
- Tu peux prendre ce que tu as besoin et te changer dans la chambre de papa, steu-plaît ? Lui demanda Eva.
- Trois heures. Ça fait déjà trois heures que je vous ai laissé, toujours pas lassé ? Ronchonna Blanche.
Puis son cerveau se déconnecta une seconde. Elle écarquilla les yeux face à la beauté cyan et luxuriante de son aura mélangée à du turquoise telle une mer tropicale. Elle aussi avait des filaments d'un joli rouge vif.
Aura-Niveau2
Puis ses yeux s'agrandirent encore plus. Comment ça se changer dans la chambre de son père ?!
- Non. T'inquiète, tu comprendras un jour, railla Eva.
- Euh, planta Blanche, en jetant un coup d'œil à Sean qui pelotait dans le lit de sa meilleure amie, c'était caché sous la couverture. D'accord. Mais je te préviens. Tu as intérêt à changer les draps, je te rappelle que je dors dans ce lit, moi aussi, rajouta la jeune femme, cachant son embarras face aux paroles de son amie.
Gênée, la brune pouffa, mais lui promit tout de même de les changer pour ce soir.
Blanche entra dans la pièce en fronçant du nez et fila droit vers l'armoire prendre des sous-vêtements foncés, un pantalon en cuir moulant, une paire de bottines noires appartenant à la brune, puisque les siennes étaient restées en Outremonde. Les bottines d'Eva, qui complexaient par sa petite taille, avaient un talon aiguille un peu trop grand pour Blanche, mais elle n'avait rien d'autre sous la main. Elle ferait avec. Un pull asymétrique noir, une écharpe grise et une veste en feutre bordeaux complétèrent sa tenue.
Elle se retourna pour quitter la pièce quand son regard se posa sur Sean qui avait eu apparemment un coup de chaud sous la couette. Mais ce n'est pas son torse nu qui arrêta la jeune femme, mais son aura qui était presque identique à celle d'Eva. Émeraude, sur un fond bleu nuit, il avait pourtant au centre une pointe de noir. Aucun filament à l'horizon.
Elle avait hâte de comprendre ce que voulaient dire toutes ses couleurs et surtout ses filaments...
- Il va pas remonter, dit ? Lui demanda-t-il.
- Je ne pense pas, il est déjà changé, lui répondit Blanche, en haussant les épaules.
Eva souffla soulagée. La rousse sortit de la chambre, gagnant celle d'en face et une seconde avant qu'Eva ne ferme sa porte, elle lança à la cantonade :
- Protégez-vous bien ! Et n'oublie pas d'aérer !
Deux rires lui répondirent alors qu'elle refermait derrière elle. La voilà dans la chambre de Kiyan. Celle-ci embaumait son parfum. Blanche rentrait rarement dans la chambre paternelle dans les tons chauds, ocre, elle lui faisait penser au désert. Les poteries, les amphores, les tapis orientaux, les voilages blanc cassé étaient nombreux... La nuit, la lumière projetée sur les murs à la lueur des bougies ou des lampes à huile devait être sublime...
Chassant des pensées osées, elle se déshabilla rapidement et se vêtit tout aussi vite. Dans sa hâte de sortir de la chambre d'Eva, elle avait oublié d'attraper sa trousse à maquillage. Bah, songea-t-elle, en regardant son reflet dans la glace, elle se trouvait assez jolie, avec sa finesse des traits et sa ligne. Le sport lui avait fait du bien. Mais l'immortalité lui allait encore mieux, Blanche remarqua un net changement. Sa peau était plus douce, plus ferme, ses yeux plus brillants et son teint plus lumineux...
Sur la table de chevet, il y avait une photo d'Eva et elle, enfant, souriant à l'objectif qu'elle connaissait par cœur. Sur la commode, près du miroir, il y avait un autre cadre avec le cliché, en noir et blanc d'un autre enfant. Intriguée, elle s'approcha. Le portrait ne lui disait rien.
- Blanche !
L'appel, venu d'en bas, la rappela à elle. Elle jeta un dernier coup d'œil à son reflet. Par contre, ses cheveux secs, séchés certainement par Kiyan, car il fallait bien plus que quelques heures pour que sa crinière soit aussi parfaite, avait besoin d'une bonne coiffure. Cependant, elle les laissa tels quels, ravie de cette petite attention à son égard. Long, détaché, vaporeux avec ses longues ondulations d'après piscine. Attachés pendant une semaine en une natte bien serrée, ils avaient bien mérité de respirer.
C'est en regagnant le salon qu'elle se rendit compte qu'elle avait accordé, sans faire gaffe, ses vêtements avec ceux de Kiyan. Pantalon noir de costard, chemise grise, écharpe orientale aux tons bordeaux, veste en noir qui se fondait avec ses boucles qu'il avait, lui aussi, laissées à l'air libre ; il l'attendait sur le seuil, en grimaçant.
- Ses chaussures m'ont l'air vertigineuses... Renifla-t-il.
- Vous aussi, vous aimeriez porter des jolies chaussures légères après avoir supporté des bottes aussi lourdes pendant une semaine ! S'exclama-t-elle en râlant pour la forme, surtout qu'elle aimait beaucoup ses rangers.
Il sourit et la laissa passer son caprice, ce qui était le but. Puis, il eut un deuxième sourire plus grand que le précédent. Blanche se pinça les lèvres. Elle savait qu'il savait qu'elle savait pour son manège, mais qu'il ne relèverait pas. Elle sourit à son tour, pour le remercier, et sortit côté garage.
Elle monta dans la voiture côté passager alors qu'il ouvrait la grande porte. Les filaments rouges disparurent pendant sa manœuvre mais réapparurent à la seconde où il posa les yeux sur elle. Il entra dans la voiture côté conducteur et démarra.
La route se fit dans un silence confortable.
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