22. Safe Zone


Blanche avait suivi Nicky, loin de la chaleur du feu et même avec la cape, elle grimaça sous le mordant du froid de l'hiver. D'ailleurs, quelques flocons de neige tournaient encore dans le ciel. Les épais nuages l'empêchaient de voir les soleils, si bien qu'elle avait l'impression que la nuit n'allait pas tarder à tomber. À moins qu'elle n'ait dormi bien plus longtemps qu'elle ne le pensait. Mais elle n'eut pas le temps d'y réfléchir davantage, car... Nicky avait disparu.

Elle regardait les alentours sans savoir où il était passé, pourtant tout était dégagé ici et le vent s'en donnait à cœur joie. Puis, Blanche la vit. Une énorme bâtisse en pierre et métal au sommet d'une falaise qui plongeait à pic dans l'océan. À côté, la hutte de Rauõr ressemblait à une cabane de jardin.

- Par ici, lui lança le brun, devant un immense portail, ouvert.

À sa hauteur, elle remarqua que tout le tour était cerclé par d'immenses grillages avec du fil barbelé, bordés d'un chemin menant à...

- Bienvenue chez nous, lui dit-il en gravissant la falaise. Enfin, officiellement, c'est chez Argy, mais bon.

Grimaçante, par une odeur iodée et un vent humide qui lui frappa de plein fouet, elle regarda les lieux. C'était vide, menaçant, le bâtiment était encore plus grand qu'il n'y paraissait. Sur deux étages avec un toit terrasse. Il s'arrêta devant une porte qui semblait être fondue avec le mur. Elle n'aurait jamais su que c'en était une puisqu'il n'y avait même pas de poignée. Juste un digicode.

- Le code, c'est un, deux, trois, quatre, lui montra Nicky.

Elle fut surprise, non pas à cause de la stupidité du code, mais par le système. Il y avait de l'électricité en Outremonde ?! Quand la porte s'ouvrit, elle dût bien se rendre à l'évidence.

Le jeune homme la laissa passer en premier. Elle entra d'un pas mesuré, et devant elle se trouvait une entrée quasiment vide. Puis Nicky actionna un interrupteur et une lumière jaunâtre envahit la pièce. Blanche en resta bouche-bée.

Il referma la porte et une douce chaleur l'envahit. Il y avait même du chauffage ! Voilà, qu'elle faisait un rêve éveillé...

Au sol, il y avait un bassin rempli d'eau, fait avec d'immenses écailles blanches, nacrée, irisées, un mélange de violet, de vert, de bleu, semblables à des diamants mélangés avec des perles, donnant une forme de fleur vide de tout artifice superflu. L'eau transparente rajoutait un côté mystérieux et magique à la pièce.

- Ouais, ça fait toujours cet effet, rigola le jeune homme en voyant sa tête.

- Ce sont des écailles de... ?

Elle se reprit à temps. Son instinct lui disait que c'étaient des écailles de dragon, mais elle n'était pas censée le savoir. Elle fut à la fois impressionnée et dégoûtée. On avait dû retirer les écailles à la bête... Et pas d'une façon gentillette.

- Des écailles de dragon fossilisées ou plutôt de drakionne. Apparemment, celle-ci avait la possibilité de se transformer en humaine. Évite d'y toucher, non seulement elles n'ont rien perdu de leur superbe, mais en plus elles sont toujours aussi tranchantes. Elles appartiennent à Aaron. Un cadeau de la drakionne en question qui avait une couleur des plus rares, une diamantaire. Morte depuis des lustres à ce qu'on m'a dit. Une seule de ses écailles au marché noir coûte hyper cher, pourtant il les a toutes gardées. Selon la légende, seuls ceux qui ont des écailles de cette couleur sont de sang royal et peuvent prétendre au trône avec effet immédiat. Bref, fais-y gaffe, notre chef y tient plus que tout.

Émerveillée, elle toucha les écailles absolument magnifiques et douces. Elles n'avaient rien perdu de leur beauté. Puis autre chose attira son attention sur le mur. Juste au-dessus d'un radiateur en fonte, richement décoré et sur pied qui plus est, était gravé dans la pierre, un plan. Elle repéra des salles, les unes plus grandes que les autres, sans qu'il y ait le moindre sens.

Nicky ne la laissa pas s'attarder dessus. Il passa une seconde porte ouverte qui menait à un long couloir dont d'après ce qu'elle voyait desservait tout le bas.

- À droite, dit-il en lui indiquant une porte fermée, c'est le bureau d'Aaron. Il y a une carte de L'Outremonde faite sur mesure avec les principales villes qu'ils ont découvertes et où se situent les principaux curseurs rouges. Personne ne peut y entrer sans Aaron, il garde la clé partout avec lui.

Puis il la conduisit tout au bout du bâtiment où le couloir formait un L.

À côté, un escalier en béton brut montait, conduisant au second étage. Partout où il allait, il faisait attention à refermer toutes les lumières après lui, ainsi que les portes. L'électricité devant vraiment couter bonbon ici.

Il monta et Blanche le suivit.

- Là, c'est la partie nuit. La première chambre, c'est celle de Derek, la seconde en face est vide, Saph y dort de temps en temps, la suivante, c'est celle d'Argy et au bout, celle d'Aaron. Au milieu, c'est la nôtre, à Glen et à moi. La dernière à côté d'Aaron est libre, tu peux donc l'utiliser.

Il l'emmena jusqu'à la chambre, qui s'avéra bien plus spacieuse qu'elle ne l'aurait cru, bien que vide et tristounette. Cependant, il y avait une couchette propre avec un sommier, un matelas et un bureau, une table de chevet ainsi qu'une petite lampe en cuivre. Pas d'armoire, rien pour ranger, et toujours le même radiateur en fonte, qui dégageait une douce chaleur.

Elle déposa sa longue cape sur le dossier de la chaise de bureau avant de poursuivre sa visite. La joueuse se sentait bien au chaud. Nicky la conduisit au dernier escalier près du premier.

- Ça monte sur le toit-terrasse qui est toujours gelé. On y va de temps en temps pour admirer la vue ou pour tirer à vue. Si tu vois ce que je veux dire, lui sourit-il, puis voyant qu'elle ne comprenait pas, il rajouta : ou pas.

Blanche cacha son éclat de rire dans une fausse toux. Elle commençait à l'apprécier et cela lui faisait du bien de savoir qu'elle se faisait un nouvel ami. Puis, ils redescendirent.

Il ouvrit alors une porte qui donnait sur un large vestiaire. Des casiers en métal, rouillés par la plupart, mais relativement propres et bien entretenus. À côté, il y avait tout un mur avec des douches ouvertes. Blanche n'en compta pas moins de six. De l'autre, une demi-douzaine de lavabos également, sans compter un nombre équivalent de cabines de toilettes. Et au centre, une immense baignoire ! Sur pied, majestueuse, elle dénotait. Curieuse, elle tourna le robinet et celui-ci fonctionnait sans problème. Il y avait même de l'eau chaude ! Elle regarda Nicky émerveillée.

- C'est le plus beau jour de ta vie, pas vrai ? Ironisa-t-il. Y a même du papier toilette et du savon, continua-t-il en lui montrant les installations. Brosse à dent et dentifrice...

- Mais comment ?

- Aaron, lui répondit-il en haussant les épaules. Sauf pour le dentifrice, c'est Argy qui le fabrique.

- Aaron utilise son don pour son confort ? Murmura-t-elle, à la fois déçue et ravie.

- Notre confort. Faut bien qu'il s'entraîne, répliqua Nicky. Et puis si ça peut améliorer nos conditions de vie et survivre plus longtemps... Tu fais quelle taille ?

Blanche le lui indiqua et il disparut. Elle en profita pour ouvrir l'eau de la première douche à sa portée. Il suffisait de pousser un bouton. Le bruit de la plomberie fut infernale, mais au bout de quelques secondes, l'eau devint chaude, pas trop mais juste assez. Elle soupira de bien-être en passant ses mains en dessous.

- Je te pose tes vêtements là, dit Nicky en posant une montagne de linge sur un banc en fer pas loin. Dans la trousse, je t'ai mis une brosse à cheveux neuve, une brosse à dent et du dentifrice solide. Il te suffit de frotter la brosse dessus avec un peu d'eau. Ensuite, tu n'as qu'à te choisir un lavabo inoccupé. Si tu veux nettoyer tes fringues, tu les mets dans le bac là et je te montrerais la blanchisserie après.

Il lui indiqua alors un immense bac condamnant quelques casiers.
Cette pièce devait faire au moins soixante mètres carrés. Et le bâtiment en lui-même... Bref, il y avait tellement de choses à voir.

- Quand tu as fini, referme la porte pour garder la chaleur, dit-il en imitant une voix que Blanche ne connaissait pas encore, et tu me trouveras dans la pièce d'en face, en train de nous concocter un vrai p'tit dej.

Blanche lui souri en repensant au lait de chèvre de Rauõr. Il le lui rendit puis il fit demi-tour avant de refermer la porte derrière lui.

Elle attendit quelques secondes, faisant bien attention d'écouter les pas qui s'éloignaient. Elle n'aimait pas trop l'idée des douches communes, mais...

Oh et puis merde, elle se déshabilla alors rapidement et prit le temps de tout mettre dans l'immense bac avant de se faufiler sous la douche. Elle ignorait combien de temps, elle y était restée, mais cela lui parut encore trop court. Le savon sentait la lavande et elle l'utilisa même en shampooing. Ses cheveux la remercièrent alors qu'ils n'avaient pas été libérés de leur fil de fer depuis un moment. Sous la douche, le démêlage fut plus facile avec la brosse en bois.

L'eau qui tombait dans la bonde était horriblement noire. Blanche en fut mortifiée. Après la douche, elle s'essuyât avec la serviette éponge qui était étonnamment douce. Un luxe qu'elle croyait devoir s'en passer dans ce monde. La jeune femme fut bien heureuse que cela ne soit pas le cas.

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