Avec une vitesse initiale de 870 mètres par seconde et une puissance d'environ trois mille cinq cents joules, la balle se plante dans le crâne cagoulé du terroriste avec un sifflement sec. 

Le mec s'écroule comme un présentoir en carton dans une fête foraine. Ce n'est pas plus difficile que de crever un ballon avec une carabine à plomb dans un stand de tir. 

On m'a donné des tas de médailles parce que je visais bien.

C'est le premier type que je descends depuis que je suis en planque sur le toit.

 20H engoncé dans le duvet réglementaire de l'armée. 

Deux enfants sont déjà morts. De froid, de déshydratation, de coups qu'on leur a portés.

Je crois que je n'aurais définitivement pas de gosses...

On m'a laissé dormir trois heures après 22h de garde chassée sur le toit. 

Un grand luxe. Je ne crois pas avoir rêvé. Le jour se lève.

Éclat terne du soleil timide sur les briques tâchées. Flaques de verglas.

Et alors que je monte les marches pour reprendre ma faction sur le toit...

Et alors que je pose les pieds sur le toit recouvert de gravier et de tôles de plomb et qu'un pigeon s'envole quand j'ouvre la porte...

Et alors que j'inspire une goulée d'air si glacé que j'ai l'impression de bouffer des aiguilles...

Le temps se fige.

L'école explose.

Le rez-de-chaussée a été complètement soufflé par la déflagration.

Il y avait des pains de Semtex collés sur des mètres et des mètres le long des murs. 

Les mêmes types d'explosifs de facture industrielle que ceux utilisés pour démolir la mairie et qui ont fauché la moitié des jambes de mon ancien pote Dima.

Ils se sont fait exploser en plein milieu des négociations. 

Je suis resté des dizaines d'heures d'affilée en planque sur un putain de toit pour que ces enfoirés se fassent sauter sans prévenir...

Quand je descends, la rue est pleine de cendres qui dégringolent, supplantant la neige. 

Mon capitaine, mon supérieur inébranlable, court vers moi en pleurs.