20

Ash avait longtemps parlementé pour convaincre Hank de la laisser venir avec lui lors de sa visite aux laboratoires Worthington. Finalement, avec de la persévérance --et quelques promesses l'obligeant à se pas se mettre en colère-- elle y était parvenue. Ororo lui avait prêté une veste de tailleur bleue nuit, et l'avait épaulée presque toute la soirée pour que, une fois le moment venu, elle fasse entendre ses arguments.

Le lendemain matin, elle s'était discrètement infiltrée dans sa propre chambre pour ne pas réveiller Logan. Ce fut peine perdue, car le mutant possédait des sens aussi affûtés que les siens.

— Je t'ai attendue, hier soir, l'interpella-t-il alors qu'elle s'apprêtait à entrer dans la salle de bains.

La dragonne grimaça, et se tourna vers lui.

— Excuse-moi, répondit-elle avec un rictus navré. Je me suis endormie avec Storm.

— C'est rien, assura-t-il en se redressant.

— Désolée aussi pour le restaurant, reprit-elle en s'avançant vers le lit. Je te promets qu'on ira.

— Oh, je m'en fais pas pour ça, répliqua Logan. Par contre...

— Oui ? s'enquit Ash.

— Je crois que tu as oublié quelque chose.

La mutante fronça les sourcils, une moue railleuse au coin des lèvres.

— Ah bon ? Je ne crois pas, non.

Logan s'esclaffa, narquois, et se leva pour lui faire face.

— Tu ne m'as pas très bien compris, reprit-il fermement en s'approchant. Alors on recommence, d'accord ? Chérie, tu as oublié quelque chose.

Ash se sentit parcourue d'un frisson de la tête aux pieds, tandis qu'il dégageait ses cheveux de jais de son cou pour venir y déposer sa bouche brûlante.

— Et qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle dans un souffle fébrile, les muscles tendus, les mains crispées sur les épaules de son homme.

— J'ai besoin de te le rappeler moi-même ? railla Logan, plongeant ses yeux dans le regard flamboyant de la dragonne.

Cette dernière hocha doucement la tête, incapable de prononcer un mot. Sans prévenir, le mutant captura ses lèvres en un baiser avide, plaçant ses mains de part et d'autre de son visage. Ash répondit en se redressant, amenuisant l'espace entre leurs deux corps.

— Je vais être en retard, souffla-t-elle entre deux baisers, sans pour autant parvenir à se détacher.

— J'en ai rien à foutre, grogna Logan, venant saisir ses hanches pour la soulever du sol.

La brune sentit sa poitrine s'enflammer, et enroula ses jambes autour de la taille de son partenaire. Ce dernier les dirigea vers la salle de bains, et referma la porte derrière eux d'un simple coup de pied.

Effectivement en retard, Ash s'empressa de rejoindre Hank dans le hall, attachant tant bien que mal ses cheveux encore mouillés avec une pince pour paraître plus sérieuse.

— Pardon, j'ai tardé, lança-t-elle, légèrement essoufflée.

— Aucun souci, je comprends pourquoi, répondit Hank en lui offrant un sourire.

— Comment ça ? questionna-t-elle en dissimulant du mieux qu'elle pouvait la chaleur de son visage.

— Tu es ravissante, fit le Fauve en désignant son costume.

Ash soupira de soulagement.

— Oh, merci beaucoup. Tu es très beau aussi, assura-t-elle en replaçant son col.

Iels prirent place dans le taxi. Pour atteindre l'île d'Alcatraz, où étaient installés les laboratoires, iels devaient voler en hélicoptère au-dessus de la baie de San Francisco. Ash profita de la vue qui s'offrait à elle, ignorant sa frustration de ne pas pouvoir déployer ses ailes. Hank, comprenant immédiatement ce qui occupait son esprit, posa une main réconfortante sur son genou. La brune se tourna vers lui et lui offrit un sourire, avant de nouer ses doigts aux siens.

Iels atterrirent bientôt, et on l'aida à descendre. La bourrasque provoquée par les hélices tournantes souleva les cheveux noirs de la mutante, l'aveuglant un court instant. Elle replaça correctement sa pince et s'avança aux côtés de son ami.

— Mr le Ministre, salua la femme qui les accueillait. Bienvenue aux laboratoires Worthington.

— Merci, Dr Rao, répondit Hank en lui serrant la main. L'accès n'est pas évident.

— C'est l'endroit le plus sûr que nous ayons pu trouver. C'est pourquoi nous gardons la source du remède ici.

Le Fauve hocha poliment la tête alors que Ash fronçait les sourcils.

— Excusez-moi, intervint-elle. Que voulez-vous dire lorsque vous parlez de la source de ce... remède ?

La médecin tourna son visage vers elle comme si elle venait de la remarquer.

— Laissez-moi vous présenter le Professeur Ash Lòng, collaboratrice du Professeur Charles Xavier, introduisit le Ministre en posant une main dans le dos de son amie.

Les deux femmes se serrèrent la main, mais la mutante lui fit comprendre d'un regard qu'elle attendait toujours sa réponse.

— La source du remède provient de l'ADN d'un jeune garçon aux capacités... extraordinaires, reprit le Dr Rao tandis qu'iels pénétraient dans le bâtiment.

Elle les guida à travers les différents couloirs aménagés.

— Et vous le gardez enfermé ici ? grinça Ash en jetant un coup d'œil autour d'elle, fronçant le nez pour montrer son dédain.

— Jimmy dispose de tout ce dont il a besoin, répondit la médecin sans se démonter.

— Sauf de sa liberté, et de sa vie normale d'enfant, répliqua la dragonne, faisant au mieux pour restreindre son animosité.

Le Dr Rao la dévisagea un court instant, prête à répondre, mais Hank la devança.

— C'est un mutant, dit-il de son ton diplomate. Comprenez nos inquiétudes.

La femme en blouse blanche se dérida légèrement, sans pour autant perdre de sa raideur.

— Nous sommes en conformité avec votre politique, répondit-elle.

— Combien de temps comptez-vous garder le garçon ici ? questionna le Ministre avant qu'Ash ne puisse ouvrir la bouche.

— Le temps d'établir son génome. Nous pouvons reproduire son ADN, mais pas le générer de nous-mêmes.

— Et son pouvoir ? Son champ d'action ?

— Vous verrez, répondit mystérieusement Rao.

Iels s'arrêtèrent devant une grande porte. La médecin composa un code, et celle-ci coulissa, ouvrant le passage sur une grande pièce éclairée aux néons, et aux murs entièrement blancs. Un lit se situait au centre, près d'une commode. Quelques jouets ornaient le sol, dont un circuit de petites voitures, et devant la télévision, concentré sur un jeu vidéo, un jeune garçon en blouse blanche et au crâne nu était assis en tailleur.

— Jimmy ? interpella la médecin. Il y a quelqu'un que j'aimerais te présenter.

L'enfant se tourna vers eux, et posa de grands yeux bleus sur leurs silhouettes.

— Bonjour, fiston, lança doucement le Fauve.

— Bonjour.

Son regard les détailla, et croisa brièvement celui de Ash, dont l'instinct maternel prit immédiatement le dessus. Le vide de la pièce lui serra le cœur, et noua sa gorge de colère.

— Je m'appelle Hank McCoy, reprit le Ministre en s'avançant, tendant la main.

Aussitôt que celle-ci fut à moins d'un mètre du garçon, la fourrure bleue qui la recouvrait disparut, laissant place à sa peau. Ash observa ce phénomène avec des yeux écarquillés de stupeur.

— Je suis désolé, grimaça l'enfant.

— Ce n'est rien, le rassura Hank, bien que figé de surprise. Tu as un don incroyable.

La brune s'avança à son tour, et sentit son brasier s'éteindre peu à peu. Ses yeux reprirent leur teinte noire d'origine, et la pointe de ses canines se lissa. Elle glissa sa langue sur ses dents, inaccoutumée à cette étrange sensation. Ses griffes se rétractèrent, redevenant de simples ongles. Elle observa ses mains, impressionnée, et serra les poings, crispée. Le jeune garçon la regarda d'un air navré. Elle le déculpabilisa d'un sourire et s'agenouilla en face de lui.

— Je suis ravie de faire ta connaissance, Jimmy. Tu peux m'appeler Ash.

Le gamin hocha la tête, un sourire timide au coin des lèvres, et serra la main qu'elle lui tendait.

— C'est quoi, le but de ton jeu ? demanda l'enseignante en désignant sa manette de console.

Jimmy se fit un plaisir de tout lui expliquer en détails. La brune l'écouta avec attention, ignorant le vide que créait en elle la disparition de sa mutation. Elle était bien plus déstabilisée qu'elle ne l'aurait cru. Ses pouvoirs faisaient partie d'elle, et vivre sans eux paraissait inimaginable. Mais aider ce garçon passait bien avant tout ça.

— Tu sais, mon grand, je travaille dans une école, lui confia-t-elle alors sous le regard suspicieux du Dr Rao qui discutait avec Hank de l'autre côté de la pièce.

— Tu es Professeure ? questionna le gamin.

Ash acquiesça.

— Tu pourrais devenir l'un de mes élèves, si tu le souhaites, ajouta-t-elle. Il suffira de demander à tes parents de venir te scolariser là-bas...

Le gamin baissa la tête.

— Je ne connais pas mes parents, avoua-t-il. J'ai toujours été seul.

La mine de l'enseignante s'assombrit.

— Oh... Je suis désolée, dit-elle en posant une main sur son épaule.

Jimmy lui offrit un sourire.

— C'est quoi, comme école ? lui demanda-t-il finalement, curieux.

Ash se redressa.

— Je suis certaine qu'elle pourrait te plaire, répondit-elle avec un sourire. C'est une école spéciale pour les enfants comme toi. Celleux qui sont particuliers. Là-bas, tous•tes ont des dons qui sortent de l'ordinaire. Et c'est vraiment génial.

Jimmy esquissa un sourire, les yeux dans le vague. Il semblait réfléchir à cet endroit qui paraissait idéal.

— Et toi ? demanda-t-il finalement en relevant son visage vers la brune. C'est quoi ton don ?

L'interpellée sentit ses yeux briller.

— Si je te le dis, tu me promets de le répéter à personne ? s'enquit-elle sur un ton complice, baissant la voix.

Le jeune mutant hocha frénétiquement la tête. Ash se pencha à son oreille.

— Je suis un dragon, murmura-t-elle.

Les yeux du gamin s'écarquillèrent.

— Vraiment ? questionna-t-il sans hausser le ton.

La brune acquiesça.

— Mais chut, reprit-elle en plaçant son index contre ses lèvres. Personne ne doit savoir. Promis ?

Elle tendit son petit doigt. Jimmy y accrocha le sien, un large sourire aux lèvres.

— Promis.

Émue par cet échange, l'enseignante laissa échapper un rire et déposa un tendre baiser sur le front du garçon.

— Quant à moi, je promets de revenir te chercher, mon grand, lui glissa-t-elle discrètement. Tu ne seras plus jamais seul.

Elle se releva et rejoignit son ami, quittant la pièce à sa suite. Cependant, avant que la porte ne se referme, elle adressa un dernier clin d'œil à Jimmy, qui lui offrit un large sourire. Son brasier reprit de la vigueur, et avec sa rage. Elle se tourna vers Rao, le visage sévère, les yeux flamboyants.

— Vous pouvez bien dire ce que vous voulez, Docteur. Ce que vous faites subir à cet enfant est inhumain. Il mérite d'avoir une vie normale, un foyer, des ami•es... Pas d'être enfermé dans une cage comme une expérience de laboratoire.

— Peut-on réellement parler d'une vie normale, lorsqu'il s'agit d'un garçon comme lui ? rétorqua la médecin.

— Il reste un enfant !

— Et il est traité comme tel, assura Rao sans ciller. Il a tout ce dont--

— Ce dont il a besoin, c'est d'être dehors, coupa fermement la dragonne. Et de côtoyer d'autres enfants, mutants ou non.

— Professeure, je ne cherche pas à vous convaincre...

— Tant mieux, parce que vous n'y parviendrez pas.

— ... Jimmy n'est pas malheureux, ici. Il est entouré d'une bonne équipe, qui fait au mieux tous les jours pour qu'il se sente bien. Il est notre priorité numéro un.

— Ce n'est pas l'impression que vous donnez.

Les deux femmes se regardèrent en chien de faïence durant un temps. À côté d'elles, Hank se racla la gorge.

— Merci de nous avoir accueilli•es, Dr Rao, dit-il en posant sa main dans le dos de son amie.

— Avec plaisir, répondit la concernée en levant les yeux vers lui.

Iels se serrèrent la main. La médecin la tendit ensuite à Ash, qui la saisit brièvement.

— Je ne reviendrais pas sur mes arguments, lança-t-elle, le regard dur. Tout ce que vous faites ici n'a pas lieu d'être. Ce "vaccin" est une terrible atteinte à notre identité. Et nous ne nous laisserons pas faire.

— C'est une menace ? questionna Rao, un sourcil levé.

— Je ne menace personne, répondit Ash avec assurance. C'est vous et ces expériences, en revanche, qui menacez notre droit à l'intégrité. Réfléchissez-y.

Sans un mot de plus, la dragonne s'éloigna, suivie de Hank, qui la rattrapa en posant une main crispée sur son épaule.

— Bien joué, Ash, grogna-t-il avec ironie.

— Quoi ? Je ne me suis pas mise en colère. Je suis restée très calme, marmonna-t-elle entre ses dents.

Le Fauve laissa échapper un soupir.

— Évidemment...

impulsivité (n.f.) : Ash Lòng

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