00| prologue
1960.
Les yeux ébahis des spectateurs. Leurs cris de surprise et acclamations impressionnées. Leurs applaudissements ravis. C'était le quotidien de la mutante depuis quelques années maintenant. Dès son arrivée sur le sol américain, elle avait décidé de repartir à zéro et avait mis de côté la peur et la souffrance dont elle avait pu être témoin-- souvent par sa propre faute.
Voilà presque trois ans qu'elle suivait cette troupe de cirque ambulant à travers les États-Unis. Elle avait longtemps erré sur la côte ouest avant de tomber sur elleux. Et en échange d'un bon numéro chaque soir, iels avaient accepté de la loger et de la nourrir. Elle se demandait chaque soir en se couchant comment elle était toujours en vie, et recommençait sa journée le lendemain matin. Malgré ça, elle restait. Car elle n'avait nulle part d'autre où aller. Il n'y avait aucun autre endroit sur cette Terre où elle ne se sentirait pas menacée.
Ce soir-là, le spectacle s'était déroulé comme d'habitude. Sans accrocs, ni imprévus. Ash avait su gérer son numéro du début à la fin, et s'était délectée des regards effrayés du public. Ce n'était pas tous les jours que l'on voyait une femme prendre feu et en ressortir intacte...
Une soirée comme les autres, en somme. Aussi, elle ne s'était pas attendue à recevoir de la visite un peu plus tard. Lorsqu'on toqua sur la porte de sa roulotte, la brune n'avait pas tiqué, s'attendant à voir l'un•e de ses collègues. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle posa son regard couleur charbon sur le visage de celui qui serait plus tard son sauveur.
— Bonsoir, Mademoiselle, salua-t-il avec douceur. Je me nomme Charles Xavier, et voici ma sœur, Raven.
Cette dernière lui offrit un sourire avenant, replaçant une mèche de ses cheveux blonds derrière son oreille. Ash n'eut aucune réaction, son caractère farouche prenant le dessus.
— Nous tenions à vous dire à quel point votre numéro nous a impressionné, reprit le futur professeur X. Si vous n'étiez pas mutante, j'aurais eu du mal à croire ça possible...
La brune fronça les sourcils, sur la défensive.
— Qu'est-ce que vous venez de dire ? siffla-t-elle entre ses dents, reculant d'un pas.
— Ne vous en faites pas, nous ne vous voulons aucun mal, assura immédiatement Charles.
— Nous sommes comme vous, ajouta Raven.
Elle ne put s'empêcher de le prouver en prenant l'exacte apparence de son dit frère. Bouche-bée, Ash ne sut répondre. Elle n'avait jamais rencontré d'autres mutant•es, et se demandait si tout ceci n'était pas qu'un piège.
— Ce n'en est pas un, répondit immédiatement la voix de Charles dans sa tête. Je peux vous aider, Ash.
Étrangement, cette intrusion dans son esprit eut le don de l'apaiser le temps d'une seconde. Puis elle fut brutalement ramenée à la réalité.
— Hey ! s'écria le body-builder du cirque, les observant avec méfiance du haut de ses deux mètres.
— Partez, ordonna la brune dans sa tête, espérant que Charles l'entendrait.
— Qu'est-ce que vous voulez ? reprit son collègue en s'approchant d'un air menaçant.
— Toi, qu'est-ce que tu veux, Brutus ? répliqua Raven en lui faisant face, ayant repris son apparence. Tu vois pas qu'on discute ?!
Ash sentit son sang se glacer dans ses veines-- un comble pour sa condition. Sans réfléchir, elle sortit de sa roulotte pour se placer entre la jeune femme et la montagne de muscles qui s'apprêtait à ne faire qu'une bouchée de son insolence.
— Tout va bien, iels allaient partir, assura la brune.
Elle se tourna vers Charles et serra la mâchoire, l'implorant silencieusement. Ce dernier retint un soupir et esquissa un rictus.
— Effectivement, fit-il alors. Alors, à bientôt... j'espère.
Sans un mot de plus, il prit Raven par le bras et s'éloigna en ignorant l'agitation de celle-ci. L'homme s'approcha de Ash et croisa les bras sur sa poitrine, irrité.
— Iels te voulaient quoi ? demanda-t-il.
La mutante se tourna une dernière fois vers elleux, les observant s'éloigner dans la nuit.
— Simplement me féliciter pour ce soir, mentit-elle sans ciller. Je vais aller me coucher.
Sur ces mots, elle alla s'enfermer dans sa roulotte.
Depuis ce soir-là, il ne se passa pas un jour sans qu'elle ne repense à cette rencontre.
⋇⋆✦⋆⋇
Ash recroisa la route de Charles Xavier deux ans plus tard. Mais avant, elle passa une longue période à errer en solitaire. Le cirque avait fait faillite, et elle s'était de nouveau retrouvée à devoir de débrouiller seule. Cette fois seulement, la chance sembla lui sourire.
Alors qu'elle se soûlait au comptoir d'un bar miteux, Ash entendit au loin s'élever la conversation de deux hommes qui semblaient s'intéresser à ce qui pouvait bien se trouver sous ses vêtements. Cherchant du soutien auprès du barman, qu'elle connaissait bien, la dragonne crispa la main sur son verre, qu'elle vida d'une traite. Ce dernier l'ignora royalement, et débarrassa son verre vide. Les yeux animés d'une flamme brûlante, Ash planta ses griffes dans le comptoir. Ses sens ralentis par la consommation excessive d'alcool, elle ne sentit pas les deux hommes s'approcher et s'installer à ses côtés. Le barman leur lança un regard en coin, mais reprit ses occupations sans s'en soucier, ce qui eut le don de faire monter la colère de la mutante, enserrant sa poitrine dans un étau de haine. Aussi, à peine eurent-ils le temps de poser la main sur elle qu'elle les attrapa à la gorge et les repoussa violemment. Malheureusement, elle fut incapable d'agir plus longtemps, recevant un projectile venimeux de la part des longs crocs du barman, plus couramment appelé Snake par les habitués. Le regard de Ash croisa brièvement ses yeux jaunes tandis qu'elle s'effondrait au sol, paralysée. Encore consciente, elle les observa traîner son corps dans la cour arrière. Elle savait que c'était la fin. À vrai dire, elle n'en avait que faire. Il y avait bien longtemps qu'elle avait baissé les bras, noyant chacune de ses soirées dans l'alcool avant d'être abusée par le propriétaire du bar, en échange du gîte et du couvert. Mais celui-ci la craignait bien plus qu'il ne la désirait, et attendait le bon moment pour se débarrasser d'elle. Ash avait rapidement compris que c'était maintenant.
Mais elle ne s'était jamais autant trompée. Car ce soir, l'espoir revenait dans sa vie sous l'apparence d'un autre mutant bien décidé à ne pas laisser faire les criminels.
— Trois contre moi ? C'est ce que j'appelle un combat équitable...
Aussitôt, les agresseurs attaquèrent à l'aide de leur don. Les clients du bar ne surent jamais ce qui s'était passé dans cette cour, mais le mutant traversa la salle dans l'autre sens en portant Ash dans ses bras.
Lorsque celle-ci se réveilla le lendemain, complètement déboussolée, elle mit un moment avant de se souvenir des événements de la veille. L'odeur agréable de l'homme qui l'avait sauvée embaumait la pièce, la forçant à rester. Elle se leva, enroulée dans un drap, et alluma la lumière. Elle se trouvait dans une chambre d'hôtel qu'elle ne connaissait pas, et elle était complètement seule. Et complètement nue.
Soudain, la porte de la salle de bains s'ouvrit sur le corps athlétique du mutant de la veille. L'esprit encore embrumé, Ash eut un sursaut et tendit ses muscles. L'homme sembla tout aussi surpris.
— Oh, tu t'es finalement réveillée ? lança-t-il, resserrant le nœud de sa serviette autour de sa taille. Est-ce que tout va bien ?
— T'es qui, toi ? gronda Ash, sur la défensive.
L'homme esquissa un sourire narquois.
— J'estime que j'ai le droit de connaître ton nom d'abord, après tout ce que j'ai fait pour toi. Au fait, tes vêtements sont au pressing. Tu t'es vomie dessus sur le chemin du retour. Pour une mutante, tu as un système immunitaire plutôt faible.
— C'est Snake. C'est... C'était. C'était mon mec.
— Ah, vraiment ?
— C'est compliqué... Peu importe. J'ai été droguée, se défendit Ash.
— Je sais. Je les observais depuis le début de la soirée.
La mutante fronça les sourcils avec méfiance. Pourtant, quelque chose dans le comportement de cet homme la forçait à le croire. Celui-ci se dirigea vers l'armoire de la chambre et en sortit quelques pièces de vêtements, qu'il lui tendit. Ash fit un aller-retour entre ses mains et son visage.
— Pourquoi est-ce tu n'as pas agi plus tôt, alors ?
— Parce que je n'étais sûr de rien avant qu'ils n'agissent. Mais tu es saine et sauve, c'est tout ce qui compte. Non ?
Il fourra les vêtements dans ses bras. La brune ne le quittait plus du regard.
— Ash, lança-t-elle soudainement.
— Je te demande pardon ?
— C'est mon prénom. Du moins, c'est comme ça qu'on m'appelle. Ash.
L'homme la considéra un instant, avant de sourire.
— Erik. Erik Lehnsherr. Enchanté, Ash.
Il lui adressa un clin d'œil et disparut à nouveau dans la salle de bains. La brune en profita pour se vêtir de ce qu'il lui avait donné. Une simple chemise blanche, et un large pantalon gris, ainsi que sa ceinture, qu'il n'avait visiblement pas laissée au pressing. Elle remonta les ourlets du pantalon, et lissa la chemise, attendant qu'Erik ne revienne. Celui-ci, une fois prêt, ouvrit tous les volets de la chambre et se tourna à nouveau vers Ash, qui continuait de l'observer.
— Tu as des questions, peut-être ?
— Pourquoi est-ce tu m'as sauvée ?
— Je n'allais pas laisser une adelphe mutante se faire agresser sous mes yeux.
— Comment sais-tu que je suis mutante ? s'enquit-elle en plissant les yeux.
— Ce bar est uniquement fréquenté par des mutant•es, répondit Erik en haussant les épaules. Cela coulait de source. De plus...
Il s'avança lentement vers elle, le regard verrouillé au sien.
— Il y a ces flammes dans tes yeux. Je n'ai jamais rien vu de tel. C'est magnifique, s'extasia-t-il tandis que Ash se sentait fondre comme neige au soleil.
Il glissa un doigt sur sa mâchoire, apparemment recouverte d'un hématome si la brune devait en croire la légère douleur qu'elle ressentit.
— Je n'ai jamais aimé ce type, reprit-il. Il n'a eu que ce qu'il méritait.
— Qu'est-ce que tu lui as fait ? le questionna Ash avec curiosité.
Un rictus plana sur les lèvres fines d'Erik, et la brune crut y percevoir une pointe de sadisme. Sans s'en rendre compte, elle se mit à sourire aussi.
— Merci, dit-elle alors, curieusement apaisée.
Le mutant se pencha vers elle. Elle ne cilla pas, malgré le frisson qui parcourut sa colonne vertébrale.
— Il était temps.
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𝘼 𝙗𝙧𝙤𝙠𝙚𝙣 𝙝𝙚𝙖𝙧𝙩 𝙞𝙨 𝙖𝙡𝙡 𝙩𝙝𝙖𝙩'𝙨 𝙡𝙚𝙛𝙩
𝙄'𝙢 𝙨𝙩𝙞𝙡𝙡 𝙛𝙞𝙭𝙞𝙣𝙜 𝙖𝙡𝙡 𝙩𝙝𝙚 𝙘𝙧𝙖𝙘𝙠𝙨
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