Chapitre 8 : Le plus fidèle des alliés
Nous avons mit deux longues heures pour enfin atterrir sur ma terre natale : Aprent. L'hélicoptère se pose sur le toit du château ce qui n'est pas si étonnant que ça au vu des trois pistes d'atterrissages qui son marqué dessus. Une allée de servantes et serviteurs nous attendent en faisant la révérence, c'est même beaucoup trop impressionnant pour une simple fille de mon acabit. Mais bon, après tout je suis la future reine de ce pays donc je suppose que c'est normal. Léo ouvre la portière de notre hélicoptère et fait a son tour une courbette.
- Bon retour chez vous Basil, Louisa.
- Merci Léo.remercie-t-il en descendant du véhicule aérien.
- Vous êtes attendu sur la terrasse publique, je vous y rejoins dans quelques minutes.
- Bien.
Je descend à mon tour et Léo me la ce se regard de « toi aussi tu dois y aller ». Mon sang ne fait qu'un tour et je m'empresse de suivre Basil vers le lieu attendu. Je ne peux m'empêcher de regarder derrière moi pour savoir où est Anatole. Le deuxième hélicoptère est également au sol, et nos regards se croisent lorsqu'il pose un pied à terre. Son sourire chaleureux me réchauffe le coeur. Bêtement je lui souris en retour avant de fermer la marche de Basil. N'est-ce pas ironique d'être la femme du futur roi mais d'être amoureuse de son majordome ? Je me croirai dans l'un de ces romans à l'eau de rose où il y a un amour interdit entre une riche et son majordome. C'est exactement ma situation.
Sur le chemin, des domestiques nous arrêtent pour nous emmener changer de vêtements. Il est évident que nous n'allons pas nous montrer dans des vêtements sales et déchirés. Ainsi la servante n'hésite pas à me couper le souffle dans un corset et à me faire enfiler une robe avec beaucoup de jupons, ce qui n'est pas du tout mon style. On a beau vivre dans un système monarchique, nous sommes dans une époque moderne où la femme n'a pas à porter une robe qui lui faire ressembler à un bonbon géant en dentelle. Surtout que la servante semble adorer me tartiner le visage avec du maquillage. Heureusement que ma coiffure est plus soft, composée de tresses et de broches pour amener mes cheveux en arrière sans pour autant les attacher. Je rejoins Basil à la sortie de l'essayage et lui est beaucoup plus à l'aise que moi. Normal, il a juste un costume royal avec des épaulettes dorées à porter, sinon il n'a rien de réellement encombrant.
- Tu es habillée comme ma grand-mère. me fait-il remarquer en se moquant de moi.
Je serre les poings et lui réponds comme je peux.
- C'est donc ton fantasme de te marier à ta grand-mère ?
Il fronce les sourcils et ne répond pas. Soit c'est qu'il ne trouve pas l'utilité d'y répondre, soit c'est par ce que j'ai gagné ! Peut être n'a-t-il aucune répartie.
Nous arrivons enfin à une immense double porte après avoir traversé tout le palais. Celle-ci est constitué de vitraux aussi beaux que ceux d'une église, sauf que ceux-là ne possèdent pas de caractères religieux mais royaux. Le cadre de la porte ainsi de ses poignées sont clairement en or. Vaut mieux éviter de les rayer d'une quelconque manière. De l'autre côté on peut aisément entendre les sifflements et bavardages d'une foule, et je devine que cette foule n'est autre que les habitants de la ville qui est en aval du château.
- Je pense que nous allons devoir faire un discours pour notre retour. suppose Basil la main au menton, pensif.
- Tout à fait. Depuis que vous fréquentez Louisa, vous êtes très appréciés du peuple. Et savoir votre retour après une disparition de quelques jours les soulagent grandement. explique Léo qui nous a rejoint accompagné de son frère jumeaux.
- Je vois, je vais de ce pas leur faire un discours.
Basil s'avance vers la porte mais Léo l'empêcha d'appuyer sur la poignée de la porte.
- Basil, pour ce discours vous devez être accompagné de votre femme. Ainsi le peuple ne se doutera pas que vous êtes tous deux amnésiques. Il faut que vous ayez l'air d'un véritable couple fou amoureux.
Je rougis en entendant cela et je regarde Basil qui se tourne vers moi perplexe. Cette idée n'a pas l'air de lui plaire. C'est le genre d'individus à faire ce qu'il lui chante donc devoir faire quelque chose contre son gré, je pense qu'il y a de quoi le mettre de mauvaise humeur... Il soupire longuement, m'attrape par la hanche et ouvre en grand la porte de la terrasse.
J'ai devant moi une vue panoramique sur l'intégralité du peuple d'Aprent. Tous nous acclament, nous applaudissent, nous adorent. Cette terrasse nombre de fois où je l'ai vue d'en bas, et là, c'est bel et bien moi qui y suis posé, au côté du premier prince. C'en est inimaginable. J'ai beaucoup de mal à le croire.
Basil et moi sentons les regards de Léo et Anatole derrière nous. Ils nous mettent vraiment la pression pour que nous jouons le plus parfaitement possible le couple de jeunes mariés amoureux. Plus facile à dire qu'à faire, surtout si ni l'un ni l'autre n'a de sentiments. Je ne sais pas trop quoi faire à part sourire et saluer la foule. Basil qui a depuis le début sa main posé sur ma hanche me rapproche de lui à tel point que je suis lui littéralement collée à lui, mon épaule contre son buste.
- Chers habitants d'Aprent, Louisa et moi avons le plaisir de revenir parmi vous. Nous avions été échoués sur une île déserte sans personne pour nous aider. Mais nous avons survécu et surtout nous sommes de retour parmi vous. Ce fut la première épreuve que nous passions avec Louisa en tant que jeunes mariés et ça ne sera surement pas la dernière. L'important dans tout cela est qu'elle reste la femme que j'aime et que nous resterons ensemble. Merci de nous soutenir cher peuple d'Aprent.
La population d'Aprent nous applaudit de plus belle et nous hurle leur voeux de bonheur. Je ne pensais vraiment pas qu'ils nous apprécieraient à ce point.
- Un bisou ! scande une voix au milieu de la foule.
J'écarquille les yeux et mon coeur manque de faire un battement. Un quoi ? J'ai dû mal entendre. Comme si les habitants avaient lu dans mes pensées, ils se mettent tous à crier à l'unisson « Un Bisou ! Un Bisou ! ». Avec Basil nous nous regardons confus à cause de la situation et envoyons des signaux de détresse à nos majordomes avec des regards perplexes. Ils haussent les épaules et articulent « Em-Bras-Sez-Vous ». Je rougis et regarde de nouveau Basil. Je ne peux pas faire ça ! Il est hors de question que je l'embrasse, surtout devant Anatole. Je ne peux pas faire ça ! Mon coeur se serre à cette idée. Le seul avec qui je veux être c'est An', pas Basil.
- On a pas le choix. me chuchote Basil en posant sa main sur ma joue.
De quoi ?! Pas le choix de quoi ? Il compte vraiment m'embrasser ? Alors qu'il ne m'aime pas ?
Son visage s'approche lentement du mien, je me perds dans ce profond océan qui s'apprête à m'engloutir. Je ressens son souffle caresser mes lèvres. Mon dieu que sa bouche donne envie de l'embrasser. Un homme aussi parfait que lui qui fréquente une fille comme moi...
Mais à quoi suis-je en train de penser ? Ce n'est pas moi qui pense ça. Mes pensées ne sont dédiées qu'à Anatole, alors pourquoi ? Ce serai mon ancienne moi qui ferait surface. Dans un moment aussi crucial je m'en passerai bien. Mon esprit est confus, comme si au fond de moi je menais un combat contre moi-même. Je n'aime pas du tout ces sentiments de contradiction.
- Ça ne sera pas long. susurre doucement Basil avant de déposer un doux baiser sur ma bouche figée.
Ses lèvres sont incroyablement douces, et pourtant il ne les meut même pas. C'est un baiser chaste comme à l'autel d'une église. Sa main sur ma hanche, l'autre sur ma joue, je me retrouve emprisonnée dans ses bras. Je sens sa chaleur à travers mes vêtements. Pendant ce bref instant j'ai l'impression de fondre à une vitesse fulgurante. L'envie de s'échapper s'évapore aussi vite que ma température corporelle qui augmente. Je me sens bien contre lui.
La foule nous acclame tellement heureuse et excitée de nous voir exposer au grand jour notre « amour ». Léo et Anatole approuve notre action comme si c'était tout à fait normal pour eux de nous voir ainsi. Aux yeux du monde entier il est évident que nous nous aimons à la folie, que nous nous embrassons tous les jours, que nous nous enlaçons tous les soirs, que nous nous désirons toutes les nuits. Et pourtant... ce n'est pas le cas, même si ça a pu être le cas par le passé.
Mes yeux se ferment pour apprécier cet agréable baiser, cependant au même moment, il s'éloigne de moi sans afficher une quelconque expression montrant qu'il avait autant apprécié que moi. Je détourne le regard embarrassée et salue le peuple une dernière fois avant de retourner à l'intérieur avec Basil.
De retour vers nos majordome, je ne peux m'empêcher d'éprouver un sentiment de mal être en regardant Anatole. Il est heureux de me voir me rapprocher du mon « mari », cependant ce n'est pas ce que moi je veux. J'ai besoin de respirer, j'étouffe ici, je me sens mal, je pourrai même tourner de l'oeil.
Sans crier gare je m'éloigne d'eux en courant à la recherche d'une sortie.
- Louisa ? m'interpelle sans bouger Basil.
Mes pas me séparent d'eux et n'hésitent pas à me perdre au fin fond de ce palais gigantesque. La lumière qui traversent ces immenses fenêtres m'aveuglent. Mes talons hauts en plus de faire énormément de bruit m'empêchent de fuir aussi vite que je le souhaite. Je me sens honteuse, j'ai le coeur serrée, j'ai des papillons dans le ventre. Ces milliers de sensations sont désagréables. La gorge qui se noue à l'idée de dire ce que je pense ou je ressens à propos d'Anatole à quiconque me le demande. Les pensées embrouillées et remplie de ses paroles bienveillantes. Je veux être avec Anatole... Je l'aime... Et être la femme d'un autre est insupportable.
- Louisa !
Je me mets même à entendre sa voix derrière moi tant je veux le voir. Mais attendez, ce n'est pas une hallucination.
Je me retourne réalisant que ce n'est pas mon imagination qui me joue des tours. Anatole se tient là, devant moi, aussi essoufflé que moi mais toujours aussi digne qu'à son habitude. Il ne courbe même pas le dos sur le coup de la fatigue.
- A-Anatole, que fais-tu là ? beguayé-je surprise de le voir à ma poursuite.
- Quelque chose ne va pas Louisa ? Vous avez l'air paniquée.
Je serre les lèvres. Est-ce que je peux vraiment lui avouer ce que je ressens. Est-ce que j'ai le droit de ressentir ces sentiments ?
- Non... Ça ne va pas trop...
- Qu'y a-t-il ?
Mes doigts se crispent sur le satin de ma robe... Son regard montre à quel point il m'est dévoué, qu'importe ce que je ferai ou dirai. Ses mains sont toujours tendues vers moi pour m'aider ou me ramener sur le droit chemin. Sa voix me rassure à chaque fois que j'ai peur. Pourrait-il me rassurer à cet instant précis ?
- Je ne sais pas si je peux te le dire...
- Pourquoi donc ? Est-ce à propos de son altesse ?
Pitié je n'ai pas envie d'entendre parler de Basil, surtout venant d'Anatole...
- S'il y a un quelconque problème vous devriez lui en parler directement.
Arrête Anatole...
- Même si vous n'avez plus les souvenirs de l'un l'autre, il reste votre mari.
ARRÊTE !
Sans le laisser parler plus, mes mains agrippent son costume parfait et mes lèvres se plaquent contre les siennes. Ses lèvres sont si chaudes, si douces, légèrement gercées mais qu'importe, ce sont celles d'An'. C'est tout ce qui m'importe. Ses yeux s'écarquillent de stupeur et très rapidement il m'attrape les épaules et m'éloigne de lui, mettant fin à ce baiser qui efface le précédent du prince.
- Que... Louisa ?
Mon visage est rouge, mon sang circule tellement vite dans mes tempes que j'entends mon coeur battre dans ma tête. Je suis passée à l'acte. Il me fait maintenant assumer ce que je viens de faire.
- Je t'aime Anatole ! hurlé-je sans me préoccuper de quiconque peut nous entendre.
- De ... Louisa... bafouille-t-il sans savoir où regarder.
- Je ne veux pas être la femme de Basil, je veux être à tes côtés !
Il plaque sa main contre ma bouche, réduisant fortement la distance entre nous.
- Chut ! Vous parlez trop fort.
Il prend alors ma main et m'emmène dans la pièce la plus proche. Celle-ci n'était autre qu'un simple salon pour prendre le thé. Enfin, « simple » n'est qu'un euphémisme. Il est bien évidement spacieux et luxueux. Tout ce que l'on peut attendre d'une pièce de cet acabit. Nous nous installons dans l'un des long canapé capitonné qui entoure une aristocratique table en verre. Il n'hésita pas une seconde à lâcher ma main, ce qui me provoque un mince pincement au coeur. Il n'a clairement pas envie de la garder...
- Louisa, je suis flatté par vos sentiments, mais je me dois de les rejeter.
Mon coeur se serre douloureusement et je ne peux m'empêcher de courber le dos comme si un mal me rongeait. J'ai l'impression qu'il vient de prendre une rose pour me la planter dans la poitrine avant de me blesser d'autant plus avec les milliers d'épines de la tige. Ma gorge se noue, s'assèche. Je ne sais même pas si je suis capable de lui parler avec une voix correcte. Chaque respiration me brule, et chaque expiration me compresse.
- Mais pourquoi ? C'est parce que tu ne m'aimes pas ?
Il dépose un doigt sur ma bouche pour m'inciter à me taire afin de le laisser terminer. Il a donc d'autres choses amer à m'avouer ? J'arrive à peine à voir son visage tant mes larmes commencent à me brouiller la vue.
- Effectivement, je ne ressens pas la même chose que vous. Mais je sais aussi qu'au fond, bien que vous n'en ayez pas conscience, vous êtes fortement attachée à son altesse. Même si vous le niez. il sourit amèrement comme s'il se rappelait de quelque chose de désagréable. Vous l'avez oublié, mais vous vous êtes déjà confessée à moi autrefois. C'était peu de temps après que son altesse s'intéresse à vous et vous sollicite d'autant plus qu'avant. Vous étiez déjà destinés l'un à l'autre à cette époque. À présent vous êtes sa femme. C'est lui que vous aimez, pas moi.
- Comment peux-tu te permettre de dire qui j'aime ou non ?!
- Car je suis, après Basil, celui qui est le plus proche de vous. Qui vous connait presque mieux que personne.
Mes larmes se dessinent sur mes joues sans pouvoir s'arrêter. Je suis à la fois triste et énervée. Je n'arrive pas à m'empêcher de lui hurler dessus.
- Quand bien même ! Ce sont mes sentiments ! Tu n'as pas à décider pour moi !
- En effet, mais je sais ce qui est le mieux pour vous.
- Et alors ! Si je t'aime maintenant pourquoi devrai-je aimer Basil ?!
- Car en réalité vous m'admirez, vous ne m'aimez pas.
Ces derniers mots me figent. De l'admiration ? Ce n'est pas possible que ça soit ça...
- Que veux-tu dire par là ?
- Exactement ce que j'ai dit. Vous ressentez pour moi une très forte admiration et non de l'amour.
Je n'y avais jamais songé à ça. Ce n'est pas possible que ça soit cela. Mes sentiments quand je l'ai retrouvé sur l'île. Ceux qui me rongeaient quand j'étais avec Basil sur le balcon. Ceux qui m'ont poussé à le fuir. Ça ne peut pas être de l'admiration !
- Ce n'est pas possible. Ce n'est pas du tout ce que je ressens !
- C'est vous-même qui me l'aviez dit. J'en ai la certitude.
Mon visage palis et je me méduse en l'écoutant parler de mon ancienne moi. C'est donc moi-même qui me suis rendu compte de ça. Après m'être déclarée une première fois à Anatole, je lui aurait moi-même dit que c'était de l'admiration et non de l'amour. J'ai du mal à y croire. Et pourtant, ce n'est pas impossible me connaissant. Je sais que je suis capable de revenir sur mes mots. Et aussi, je sais qu'An' n'irait pas me mentir sur ce genre de sujet.
Je tombe des nus. Encore confuse entre ce que je ressentais il y a a peine quelques minutes et ce que je ressens en cet instant présent, je ne sais plus où me mettre. Un long silence s'installe pendant que je réalise la situation. Je n'arrive pas à admettre que ce n'est que de l'admiration, et pourtant en y réfléchissant bien, tout pousse à croire que c'est le cas...
- Louisa. J'ai conscience que c'est difficile à entendre et à intégrer. Je ne pensais pas avoir à vous repousser de la sorte en étant aussi abrupte. Je m'en excuse.
- Ne t'excuse pas An'. C'est ma faute.
Sa main vient me caresse le sommet de la tête à l'instar d'un grand frère bienveillant.
- Je ne sais pas si un jour vous retrouverez votre mémoire. Je l'espère. Ainsi vous pourrez vivre heureuse avec son altesse royale.
- Et si je ne m'en souviens pas...?
- Avez-vous oublié aussi ? Je suis votre majordome, je serai toujours à vos côtés. Donc je serai toujours là pour vous aider à vous en rappeler.
Il me sourit et me tend un mouchoir en tissu pour que je sèche mes larmes. Il est mon plus fidèle allié.
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