★ Chapitre 60 ★

Le reste de la journée est plus concentré sur mes pensées que sur mes cours. Je n'arrive pas à écouter attentivement les professeurs, trop préoccupée par ma conversation avec Shawn. Même si j'avais eu des doutes quand à son passé, je n'aurai jamais imaginé une telle atrocité.

Un frisson me parcourt alors l'échine et je reviens à la réalité. Ma professeure d'histoire continue de nous parler de l'investissement des États-Unis durant la seconde guerre mondiale. Je connais cette partie de l'Histoire par cœur. Papa adorait me la raconter lorsque j'étais enfant. Instantanément les larmes perlent dans mes yeux et je soupire de soulagement lorsque la sonnerie signifiant la fin de ma journée retentit. Je me précipite hors du cours pour me rendre aux toilettes. Je dois rejoindre Sarah au coin fumeur dans cinq minutes et je veux être un minimum présentable.

Je passe alors maladroitement un mouchoir sous mes yeux pour essuyer le mascara qui a coulé mais je n'y arrive pas. Mes mains tremblent et mes pleurs ne veulent pas s'arrêter.

Soudain, la porte s'ouvre sur ma professeure d'histoire. Celle que je viens juste de quitter. Elle entre paniquée en voyant mon état. J'avais complètement oublié que ces toilettes étaient réservées aux élèves mais aussi aux professeurs.

- Elsa ? Mais qu'est ce qui t'arrive ? Tu vas bien ?

Elle sort des mouchoirs de son sac et me les tend. Je les prends et la remercie. Elle s'accoude alors sur le rebord des lavabos, à quelques centimètres de moi.

« Il faut que je calme ces pleurs avant qu'elle ne me pose trop de questions ».

- Excusez-moi, je dois partir, je lui dis en m'emparant de mon sac pour m'en aller.

Mais elle me retient par le bras à la manière de Shawn et me dit d'une voix qui se veut rassurante :

- N'essaie pas de me duper Elsa. Ça fait plusieurs semaines que tu n'es pas bien. Et je ne suis pas la seule à l'avoir remarqué. Si tu ne veux pas me dire ce qui se passe, c'est ton choix mais je ne te laisserai pas dans cet état.

Son ton est sec et dur et, comme à mon habitude, quand je suis mal, j'ai besoin de défier les autres. Alors je lui lance, le regard remplit de dédain :

- C'est une menace ?

- Non, une promesse.

Et elle tourne les talons, oubliant pour qu'elle raison elle était venue aux toilettes, repartant sans un mot de plus, me laissant là, complètement désorientée. Les professeurs peuvent faire toutes sortes de choses lorsqu'ils apprennent qu'un enfant n'est pas bien. J'appréhende la suite des événements.

Je tourne lentement la tête vers le miroir des toilettes, un goût amer dans la bouche. Je respire profondément plusieurs fois et sors des toilettes la tête haute. Je ravale mes larmes et ma tristesse pour enfiler ce fameux masque que j'ai l'habitude de porter tous les jours.

Mon portable sonne en affichant la petite tête de Sarah. J'ignore son appel car j'arrive justement à notre point de rendez-vous du lundi après midi.

- Elsa ! Alors cette reprise ?

Je souris de toutes mes dents en lui répondant :

- Ca peut aller. Les profs deviennent de plus en plus chiant tu ne trouves pas ?

Elle répond à l'affirmatif et nous restons une bonne heure au coin fumeur à nous raconter nos vies (enfin surtout elle). Je fume deux cigarettes et je quitte le lycée et Sarah pour me rendre à nouveau au Coin. J'y reste seule pendant un peu plus d'une demi-heure et me décide finalement à rentrer chez moi. Heureusement, Shawn n'est pas venu. Je n'aurai pas supporté de le revoir.

Arrivée dans la rue qui mène à chez moi, je croise les doigts pour ne pas rencontrer Cameron et, la chance est avec moi, je ne le vois pas.

J'ouvre précipitamment le portail menant à notre maison mais celui-ci s'ouvre aussi de l'autre côté et je me retrouve nez à nez avec Laura, une cigarette dans le coin de la bouche.

- Oh, Elsa...

Elle me lance un regard désolé mais je la contourne d'un geste vif et m'en vais, ignorant ses appels incessants. J'entre précipitamment dans la maison et monte directement dans ma chambre. Je ne prends pas la peine de manger quelque chose et fais les quelques devoirs qu'il me reste. Personne ne vient me déranger à part Maddie qui me demande ce que je souhaiterai pour le dîner. Je lui réponds gentiment et elle repart aussi rapidement qu'elle est venue. Elle est au courant pour la disparition de mon père mais n'a pas posé de question ni changé son train de vie habituel. Heureusement.

Mes devoirs fini, je descends pour le dîner. Julian, Laura et ma mère arrivent les uns après les autres mais j'ai déjà entamé le repas pour repartir le plus vite possible. Malheureusement, je suis obligée d'entendre les conversations alentours :

- Alors ? Où en sont vos stages en entreprise ? demande ma mère au couple.

- Pour moi tout va bien maman, d'ailleurs pour Julian aussi. Nous devrons repartir dans un peu plus de trois mois.

Ma mère baisse légèrement la tête.

- Vous repartirez au Canada ?

- Oui, ce pays nous tient à cœur. Je suis désolée.

- T'es désolée pour tout à ce que je vois, je lance à ma sœur en débarrassant mon assiette.

Maddie prend la fuite et je tourne le dos à ma sœur lorsqu'elle me répond :

- Mais qu'est ce que tu racontes ?

- Oh non ! Ne joue pas à la Sainte Nitouche avec moi, Laura. Allez raconter ma vie personnelle à maman en sachant comment elle allait réagir ce n'est pas un manque de respect peut être ? C'est même pire ! Tu as trahi le peu de confiance que je venais de t'accorder ! T'as tout cassé encore une fois Laura. Encore et encore... Tu brises tout de toutes façons !

- Quand est-ce que j'ai raconté ta vie personnelle à maman ? Parce que la dernière fois que j'ai parlé de tes quatre cents coups c'était il y a un an et demi !

Je tourne alors la tête vers ma mère, n'en revenant pas.

- Ce qu'elle dit est vrai ? je demande.

- Oui, ca fait des mois et des mois que je le sais. Mais tu m'as complètement fait sortir de mes gonds la dernière fois et... J'ai tellement peur pour toi, Elsa. J'ai peur qu'un jour je te retrouve complètement bourrée, ou même défoncée. Ou alors qu'il t'arrive quelque chose.

- Je connais mes limites maman. Arrête de vouloir faire la mère qui s'inquiète pour ses enfants alors que ce n'est pas du tout le cas. Si tu te préoccupais un minimum de moi tu verrais que la disparition de papa me touche à un point inimaginable !

Sur ce, je quitte la pièce presque en courant et m'en vais dans ma chambre. Je m'effondre alors sur mon lit en pleurant, inconsolable.

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