|| Prologue ||

/|\ IL S'AGIT DU TOME 3! LA LECTURE DU TOME 1 ET DU TOME 2 EST NÉCESSAIRE POUR COMPRENDRE CETTE HISTOIRE /|\

The Winter aid - the wisp sings

Le soleil encore brûlant en cette fin d'été berçait les habitants de Nyxis de sa douce chaleur. Les rues pavées qui serpentaient un peu partout dans le royaume se trouvaient noires de monde. Comme chaque année à cette période-ci, les nouveaux diplômés de l'académie paradaient, ivre de joie sous les acclamations des villageois. Des lanternes et des guirlandes décoraient joliment les maisons pour l'occasion, sans oublier les nombreux confettis éparpillés dans les airs par la douce brise. Les cris de joie et la musique se mêlaient ensemble, portant le son de la fête même aux endroits les plus acculés du royaume.

Cette atmosphère pourtant euphorique semblait par moment fausse, gâchée par quelques notes jouées de travers. Même derrière les sourires que tous partageaient, une grande part d'eux restait encore marqué par la guerre qui s'était donné quelques mois auparavant. Bien qu'il ne reste plus aucune trace physique de cet horrible épisode, leurs cœurs et esprits ne s'en étaient pas défait. Qu'ils aient perdu un ami, un parent ou un frère, le résultat était le même : ils eurent à traverser une longue période de deuil, durant laquelle ils purent enterrer les braves soldats tombés au combat. Le cimetière avait été considérablement agrandi pour accueillir les malheureux nouveaux arrivants. Adieux déchirants, sentiment de culpabilité et tristesse étaient au rendez-vous durant cette sombre période pour les endeuillés. Puis l'été et les beaux jours vinrent essuyer leurs larmes, comme un renouveau. La vie reprit peu à peu son train-train habituel, laissant les jours s'écouler mois.

Certains avaient réussi à oublier, d'autre se forçaient encore à le faire. Le chemin vers la guérison était long et seul le temps pouvait agir comme pansement sur ces blessures internes.

Sur l'une des balustrades surplombant le royaume en fête, la famille royale ainsi que quelques hauts gradés contemplaient les combattants fraîchement diplômés avec fierté. Droite comme un i, les mains croisés devant elle et joliment apprêtée pour l'occasion, la princesse Aria Price sourit devant ce spectacle. Son sourire se fana instantanément quand elle se tourna pour faire un commentaire auprès de sa meilleure amie et qu'elle constata amèrement que cette dernière était absente. Au lieu de partir à sa recherche comme l'ancienne Aria l'aurait fait, elle resta plantée au même endroit comme le voulait son rôle de noble. La guerre avait aussi eu un impact sur la jeune brune auparavant têtue et énergique. La princesse avait muri, prenant désormais son devoir royal avec beaucoup sérieux et application pour le plus grand bonheur de ses géniteurs. Les sauts d'humeurs et décisions prises sur un coup de tête avaient disparu, tout comme les réflexions à bute plaintifs à longueur de journée. Mais avait-elle réellement changé, ou alors faisait-elle cela uniquement dans le but de se montrer forte envers les événements récents ?

Quand le soleil commençait à décliner, la parade prit fin pour laisser place à un grand festin. Les tables furent dressées à même les rues et recouvertes de succulents mets aux effluves divers. Aria jouait distraitement avec les aliments de son assiette tout en écoutant d'une oreille absente mais polie les anecdotes d'un riche marchant du royaume. Son regard glissa pour la énième fois sur la chaise vide à ses côtés et elle ressentit à nouveau ce pincement au cœur. Ses yeux firent ensuite le tour de la table et elle remarqua qu'Olivia n'était pas la seule dont la chaise était vide ce soir...

A quelques mètres, Esteban tenait une discussion animée dont il était le centre de l'attention, mais aucune trace de son coéquipier aux cheveux gris. D'après son regard vif et ses yeux pétillants, Aria devina qu'il parlait de son intervention pendant la guerre. Tiago et lui s'étaient comportés en héros en protégeant l'héritière de Nyxis coûte que coûte, quelques mois auparavant. La bravoure exemplaire dont ils avaient fait preuve malgré leur si jeune âge avait fait exploser leur côté de popularité. Cela leur valu de nombreux mérites et plusieurs décorations, sans compter leur montée en grade, l'un des plus prestigieux  : membre de l'élite du royaume de Nyxis, le même que celui de la prophétesse May. Ce privilège permit donc au duo de se trouver ce soir à cette table d'honneur, à conter ses exploits aux intéressés. Le regard chocolat du garçon se posa là ou devrait se trouver son meilleur ami. Son sourire se figea quand il constata l'absence de Tiago.

Aria et Esteban se sentaient terriblement seuls malgré tous les gens qui les entouraient.

***

Au même moment, dans une partie calme et très peu éclairée du royaume, un portail métallique grinça lorsque Tiago Evans le referma derrière lui. Ses chaussures crissant sous le chemin de gravier fut le seul son à briser la tranquillité de ce lieu désert alors qu'il marchait entre les pierres tombales du cimetière. Les mains enfouies dans ses poches et la tête baissé, il ne regardait pas où il marchait, ses pas connaissant parfaitement le chemin. Depuis un certain temps, il avait pris pour habitude de venir s'isoler ici quand ses pensées commençaient à s'embrouiller. Il pouvait rester des heures ici, à se demander ce qu'il avait raté pour en arriver là, avec la solitude pour seule compagnie. Or ce soir-là, son souhait ne fut pas exaucé.

Une silhouette féminine se découpait dans son champ de vision, assise au pied d'une pierre noire qu'il ne connaissait que trop bien pour avoir passé de nombreuses heures devant. Il n'eut pas de peine à reconnaître la jeune femme présente, même de dos. Le vent soulevait ses longs cheveux alors qu'elle resserrait son châle autour de ses épaules frêle. Les derniers rayons de lumière éclataient doucement les fleurs qu'elle venait de déposer à l'hommage du défunt. Tiago se sentit agacé que cette personne vienne prendre sa place. Il n'était pas d'humeur à se confronter quiconque. Une partie de lui voulait s'en aller avant de se faire remarquer, mais l'autre lui hurlait de ne pas céder. Finalement ses pensées désordonnées eurent raison de lui et avant même qu'il ne s'en rende compte, une remarque désobligeante traversa ses lèvres.

« -N'arrêteras-tu donc jamais de jouer les hypocrites juste dans l'espoir d'effacer les remords qui te rongent ? »

La demoiselle sursauta vivement au son grave et réprobateur de la voix de Tiago. Ses yeux d'une clarté remarquable croisèrent brièvement le regard dur qui la sondait avant de se reposer sur les fleurs fraîchement apportées qu'elle prit soin d'arranger un peu mieux. Elle ignora sa remarque et se contenta de répondre comme si de rien n'était, refusant de répondre à sa pique.

« -J'avais un peu de temps libre ce soir, murmura-t-elle enfin le regard perdu dans les vagues. Et j'ai eu envie d'apporter des fleurs. J'ignorais que tu serais...

-Au bout d'un moment, il faut savoir passer à autre chose. »

Anastasia déglutit difficilement devant le double sens de cette phrase. Même si elle avait été graciée grâce au sacrifice qu'Hayden avait fait durant la guerre pour le royaume, l'hostilité de Tiago à son égard n'avait pas diminué. Il lui en voulait encore, profondément. Les rares fois où ils s'étaient croisés, l'archer réussissait en quelques mots à rouvrir les douloureuses blessures de son cœur. Il disait avoir tourné la page, et elle ne pouvait le blâmer.

Ses deux mains jointes sur ses genoux, la noiraude prit une grande inspiration avant de se relever à la hauteur du garçon. Elle tourna la tête vers lui et, sans ciller une seule seconde, répondit d'une voix tout aussi faussement conciliante.

« -Tu es bien là aussi alors que tu n'as jamais considéré Hayden comme un ami. Alors dis-moi, qui est le plus hypocrite des deux ? »

Tiago ne s'attendait pas à ce que la jeune femme retourne ses propres arguments contre lui. Aussi, il ne sût quoi répondre, étonné qu'elle lui tienne tête. Ils restèrent un moment planté là, silencieux, comme pour voir lequel des deux abandonnerait en premier et quitterait l'endroit pour laisser la place à l'autre. Le soleil avait presque complètement disparu et l'air commençait à se refroidir.

« -Calendula, symbole de la tristesse, douleur et chagrin. »

Anastasia fronça les sourcils et se tourna vers le jeune homme. Venait-il tout juste de lui adresser la parole, à elle ? Quand Ana croisa le regard braqué sur sa personne, elle réalisa qu'elle n'avait bel et bien pas rêvé. Sa respiration se coupa alors qu'elle baissa les yeux vers les fleurs orangées qu'elle avait amené sur la tombe afin de cacher son visage rougi. Le fait qu'il en dise la signification n'avait rien d'anodin. Il s'agissait d'un de leurs points communs qu'ils s'étaient trouvés lors de leurs nombreuses heures passées dans l'énorme serre au pôle Nord. Le ton neutre que Tiago avait employé montrait clairement qu'il avait eu la même réflexion qu'elle. Cette réplique, prononcée l'air de rien, donnait l'impression qu'il s'agissait d'une banalité sans intérêt, placée au bol dans une conversation. Et Tiago savait parfaitement que la botanique passionnait Anastasia. D'une façon habile, l'archer venait d'associer la demoiselle à quelque chose d'ordinaire, dont il pourrait facilement se passer.

« -Ne devrais-tu pas être en train de te pavaner aux côtés de ton coéquipier ? Demanda Ana avec ironie. Après tout, tu nous as tous sauvés !

-Et toi ne devrais-tu pas te trouver derrière les barreaux ? Répliqua Tiago du tac-au-tac. Après tout, tu nous as tous trahis ! »

Cette phrase fut la goutte d'eau qui dit déborder le vase, un vase rempli de souffrance et de colère qui se brisa d'un coup, mettant Anastasia dans une colère noire. Quelques secondes plus tard, Tiago porta sa main à sa joue endolorie afin de soulager les picotements dans celle-ci. Elle venait de le gifler avec une force et haine qu'il ne lui connaissait pas. Ses lèvres tremblaient sous la colère alors qu'une larme de rage quitta ses yeux bleus. A l'époque, il se serait lui-même détesté d'être la cause de ses larmes. Aujourd'hui, il en ressentait presque une satisfaction coupable. Cette femme méritait de souffrir pour tous les mensonges qu'elle lui avait dit.

« -Et dire qu'un jour j'ai pu avoir des sentiments pour toi, siffla-t-elle avec regret. Tu me dégoûtes, Tiago. »

Anastasia bouscula violemment le garçon qui ne réagit même pas, bien trop surpris que celle qui se contentait de l'éviter depuis des mois levé la main sur lui. Il se contenta d'écouter les pas rapides s'éloigner, puis le bruit du portail qui grinça d'une façon dérangeante. Le silence retomba, aussi sombre que la nuit qui l'enveloppait. Quand le froid eut totalement anesthésié les tiraillements de son visage, une marque rougeâtre avait pris place peu à peu. L'archer poussa un long soupir et finit par quitter à son tour le cimetière, les pensées encore plus emmêlées qu'avant.

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Bonjour à tous. Me revoilà après de longs mois d'absence pour ce tome 3 qui commence tout en douceur.

J'espère que ce prologue vous aura mis l'eau à la bouche. N'hésitez pas à voter si c'est le cas et à laisser un petit commentaire :)

Que pensez-vous des personnages ? Et des descriptions ?

Comment voyez-vous la suite des événements ?

A bientôt