Chapitre 54

|| Chapitre 54 ||

Le visage crispé par la douleur, provoquée par la pression de ses poignets entre les mains d'Hayden, Olivia le regarda comme si elle le voyait pour la première fois de sa vie. Son cœur battait à tout rompre, d'une part à cause de leur corps bien trop rapprochés, d'autre part à cause des termes qu'il avait employés.

« Pourquoi devrais-je m'excuser d'être un monstre? Personne ne s'est excusé de m'en avoir fait devenir un, Olivia »

Alors qu'il prononçait ses mots, elle avait l'impression de plonger dans son âme torturée. Ses lèvres tremblaient d'émotion alors que lui, seule la colère à son égard transparaissait de ses traits. Sa beauté froide prenait tout son sens à cet instant.

« -Je...je ne voulais pas dire ça, souffla Olivia la voix tremblante. Il n'est pas trop tard pour changer.

-Les gens ne changent jamais, dévoila cruellement le maître du feu en pressant un peu plus ses poignets contre le sol. Ne l'as tu pas remarqué en me côtoyant? Je suis et je resterais cette personne animée que par la soif de Vengeance, prête à tout sacrifier pour cela.

-Tu peux encore tout arrêter, murmura-t-elle de sa voix étrangement calme. Tu n'es pas celui que tu viens de me décrire, Hayden.

-Alors qui suis-je d'après toi? Cracha-t-il violemment. Ne t'ai-je pas encore assez repoussée? Veux-tu que je te fasse mal? »

Lors de sa dernière phrase, il avait encore accentué la force exercée par ses mains, arrachant une grimace de douleur à son amie. Sauf qu'elle ne se laissa pas impressionner. Elle voyait clair dans son jeu : il cherchait à l'effrayer pour qu'elle adhère à ses propos.

« -Si tu étais vraiment prêt à tout pour ta vengeance, tu ne serais pas ici. »

Elle le vit secouer la tête, un sourire sarcastique sur les lèvres. Ses cheveux suivirent souplement le mouvement d'une façon hypnotique.

« -J'avais une dette de vie envers toi, je l'ai comblée. Je suis un homme de parole. Fin de l'histoire.

-Je n'y crois pas une seconde. »

Liv ravala sa salive. Son audace la surprenait. Néanmoins, elle continua sur sa lancée, laissant ses émotions parler à sa place.

« -S'il te plaît, l'implora-t-elle d'une voix douce. Reste avec nous, ne rejoins pas ton père. Laisse ta haine partir pour enfin guérir.

-je n'ai pas le choix. Je dois suivre la voie que j'ai tracée, même si mon chemin est celui du carnage.

-On a toujours le choix. Laisse-moi t'aider. Je suis prête à tout pour soigner les tournants de ton cœur. Il suffit juste que tu me laisses une chance. Tu as assez souffert comme ça. Tu ne crois pas? Il est temps que cela cesse.

-Tu es la dernière personne qui pourrait m'aider, Olivia. Tu me rends faible, avoua-t-il en détournant la tête pour reprendre contenance tout en fermant ses yeux. »

Le regard azur de la belle blonde commença à se brouiller à cause de quelques goutes d'eau salées. Cet aveu prononcé à mi-voix valait tout l'or du monde. Par ses mots sous-entendus, il venait de lui déclarer ses sentiments. Liv aurait tellement aimé se plonger dans ses yeux, désormais clos, quand il prononça cette phrase. Elle voulait sentir sur elle leur intensité dévastatrice. La garde du corps sentit la pression exercée sur ses poignets se réduire et elle en profita pour libérer l'une de ses mains. Sa paume douce et froide vint rencontrer la joue tiède du gardien pour le forcer à la regarder. Ce contact lui provoqua de multiples picotements dans les doigts mais elle ne se retira pas.

« -Hayden, susurra-t-elle doucement. Regarde-moi. »

Olivia observa la beauté de son visage, si proche d'elle. Ses cheveux noirs et lisses qui la touchaient presque dont elle rêvait faire courir ses doigts, son magnifique tatouage noir qu'il n'avait abordé qu'avec elle, ou encore son nez finement sculpté. Tout chez lui l'attirait, jusqu'à son parfum qui la rendait folle. Du bout des doigts, elle retraça la ligne de sa mâchoire jusqu'à son menton. Ses yeux se posèrent sur ses douces lèvres dont elle rêvait depuis leur premier baiser, dans la salle de bain, avant de remonter vers ses prunelles sombres qui venaient de s'ouvrir.

« -Reste. Dis-moi que tu n'vas pas partir. Ta place est à mes côtés, j'ai besoin de toi. Hayden, je t'ai... »

S'en fut trop pour le garçon. Il fallait qu'elle se taise. Il ne pouvait pas accepter cet amour qu'il ne serait jamais capable de lui rendre. Alors même s'il savait que son prochain geste n'apporterait rien de bon, il fondit sur elle et posa ses lèvres sur les siennes. Liv y répondit sans hésiter, enroulant ses doigts autour de ses cheveux. Les mots n'avaient plus leur place désormais. Seuls les gestes comptaient. La danse endiablée entre leurs deux langues alluma un brasier dans leurs corps, faute d'avoir jamais été aussi proche de se réunir. La température monta encore d'un cran quand il passa ses mains derrière le dos de sa coéquipière pour la rapprocher de lui.

Hayden le savait, ils s'aventuraient sur un terrain glissant. S'ils ne se séparaient pas maintenant, il ne pourrait plus répondre de ses actes. Dans un dernier geste de lucidité, Hayden rompit la liaison de leurs lèvres sans s'éloigner pour autant. Il consulta d'un regard la blonde. Était-ce vraiment ce qu'elle voulait? Essoufflée, le cœur battant à mille à l'heure et les lèvres entre ouvertes, la demoiselle comprit le message. Elle posa donc ses mains sur le cou du jeune homme et défit le premier bouton, toujours sans prononcer une syllabe. Le signal était clair. Hayden enlaça l'une de leurs mains qu'il plaqua au-dessus de leur tête. Il fondit sur sa gorge, y laissant de longues traînées violacées.

Un seul mot fut prononcé durant leur échange charnel. Un mot lourd de sens, chuchoté au creux de l'oreille de la dame, entre deux baisers brûlants. Une simple parole qui signifiait bien plus qu'elle ne le prétendait.

« -Idiote. »

A cet instant, des perles salées apprirent sur ses longs cils alors qu'elle réalisa enfin: ce n'était qu'une sorte d'au revoir. Une manière de clore ce chapitre de leur vie. Une façon digne de montrer que leurs chemins seraient désormais séparés. Alors elle laissa sa tristesse créer des sillons sur ses joues, silencieusement. Partagée entre le plaisir et la peine, elle s'abandonna totalement aux caresses sur sa peau, non sans ressentir le vide que ses doigts laissaient à leur départ.

Quand ils rejoignent les bras de Morphée, leur mains jointes restèrent enlacées dans leurs sommeil, ultime souvenir des souvenirs qu'ils venaient de créer.

***

Dans l'un des nombreux salons du dirigeable maire, confortablement assis dans un fauteuil de velours noir, Auxor tapa rageusement la main sur l'accoudoir. Cela faisait bientôt trois heures qu'Anastasia l'avait rejoint, sans la présence d'Hayden. Depuis, il observait par la large fenêtre le spectacle qui se donnait sur la banquise tout en sirotant un verre d'alcool fort. Seulement, l'ennui commençait à pointer son nez et l'envie de se joindre à ce message le démangeait. D'après les rapports d'Anastasia, Olivia était là. Cette misérable petite maître de l'eau qui lui avait échappé par le passé n'était qu'a porté de main. La perspective de lui rendre une petite visite de courtoisie étira ses lèvres. Après tout, pourquoi ne pourrait-il pas s'octroyer quelques instants sur ce champ de bataille en attendant la venue de son fils?

« -Apporte-moi ma cape, je vais aller faire un tour.

-Tout de suite, maître, murmura un de ces sbires avant de s'éclipser.

-Veux-tu m'accompagner, Anastasia? Proposa le Lord en se tournant vers la jeune femme. »

Cette dernière fronça les sourcils, surprise. Elle ne s'attendait pas à ce que le maître du feu décide de sortir du dirigeable, et encore moins qu'il lui propose de la suivre. Néanmoins, elle accepta.

« -Où allons-nous? S'enquit-elle en suivant le roi de Noctaria.

-Juste saluer l'enfant de ma défunte amie, ironisa Auxor avec un sourire carnassier. »

Ana se raidit. Un rapide coup d'œil sur l'horloge confirma ses craintes. Les somnifères qu'elle avait administré à Tiago ne faisaient plus effet depuis plus d'une heure. Et si leurs chemins venaient à se croiser à nouveau? La noiraude secoua la tête, agacée par ses pensées qui ne cessait de tourner autour du gris. Quand les paupières de son amant s'étaient fermées à cause de la fatigue, un trait avait été tiré sur leur passé.

***

La tête complètement vide, Hayden marchait d'un pas lent vers les nombreux dirigeables. Son esprit tourmenté ne permettait pas une seule idée cohérente de se construire. Tout de bousculant dans sa tête. S'il fermait trop longtemps les yeux, des flashs lui revenaient en mémoire. Alors il se forçait machinalement à avancer, sans trop réfléchir.

Quand il s'était réveillé, en bonne compagnie dans sa cellule de glace, son tatouage noir avait laissé place à la ribambelle rouge habituelle. Il ne pouvait faire perdre plus de temps à son père, il devait sortir. Sauf que solliciter l'aide d'Olivia ne lui en ferait que perdre davantage. Elle tenterait encore de l'empêcher de suivre le Lord. Ou pire, Auxor lui-meme risquait de l'envoyer six pieds sous terre.

«-Ton heure n'est pas encore venue, alors pour une fois, ne joue pas les héroïnes. »

Alors sans une once de remords, il utilisa sa maîtrise contre la paroi que sa coéquipière, encore profondément endormie, lui avait indiquée.

Une voix l'appelant sortit le ténébreux de ses pensées. Il releva vivement la tête et rencontra les pupilles bleus ciels et si innocentes d'Anastasia, au loin. Un homme se tenait près d'elle, une aura froide et puissante l'enveloppant. Il n'y avait aucun doute sur l'identité de ce cette personne. Le gardien, une expression neutre sur le visage, avança à sa rencontre.

C'était sans compter le petit groupe qui venait de le héler, une trentaine de mètres derrière lui.

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Hey! J'espère que ce chapitre vous a plu! Que pensez-vous de cette partie?

Un mot à dire sur Hayden? Et sur Olivia?

Que pensez-vous qu'Hayden va faire? Olivia va-t-elle le convaincre?

Sur ceux, je vous laisse!

A samedi ❤️

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