Chapitre XXXXV
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NDA: Je m'excuse d'avance pour la suite des événements.
Paige Wells.
"Tu as accompli ta mission?"
Je hoche la tête bien qu'il ne puisse me voir étant donné qu'il se trouve dos à moi. Pourtant je ne peux me résoudre à parler, les mots restant coincés dans ma gorge sans que je puisse y faire quoi que ce soit. N'ayant pas de réponse, je le vois se retourner vers moi et me fixer à travers ses lunettes avec insistance. J'essaye de perdre mon regard dans ses bandages sales et fais en sorte que mes yeux aient l'air vides, dénués de vie; ce qui n'est pas difficile à vrai dire. Je cligne des paupières, le corps pentelant. Il faut qu'il soit persuadé que je suis toujours sous son contrôle. Je suis terrifiée à l'idée qu'il puisse ressentir d'une quelconque façon ma délivrance par rapport à son emprise.
"Oui. Il est mort." dis-je finalement d'un ton monocorde.
Il hoche la tête alors que ses lèvres s'étirent en un sourire avant de se détourner et avancer vers le bord du bâtiment. Là tout de suite, je pourrais si facilement le pousser dans le vide... Mais il est Fearless. Et je suis Paige Wells. Qui sait de quoi il est capable? De n'importe quelle manière, aussi inexpliquée soit-elle, il pourrait survivre à une chute et ce même depuis le sommet de la tour la plus haute de tout New-York. J'avale difficilement ma salive en le voyant croiser ses mains dans son dos. Apparement cette ordure a décidé de se mettre sur son trente et un pour l'occasion ayant remplacé son piteux vêtements violet par un costard de la même couleur aux nuances sombres et aux reflets satinés. Je reste là sans pouvoir faire un seul geste, faisant dériver mon regard vers le ciel qui se teint lentement d'une couleur orangée, le soleil commence à descendre de plus en plus.
Le temps. Je n'aurais jamais cru qu'un jour il deviendrait mon pire ennemi.
Et que suis-je censée faire? Improviser, comme d'habitude. Mais comment improvise-t-on le sauvetage de la Terre entière? Les sujets de Fealess sont postés à toutes les entrées de Oscorp ainsi que dans les bouches d'égout où je les ai croisés en leur priant de me livrer à lui. À présent nous sommes seuls mais certains d'entre eux sont certainement bien installés dans un bureau non loin. Je sais que cet homme aime la solitude, il aime agir seul, détruire seul sans personne pour le contrer dans ses projets. Il est le maître jusqu'au bout et rien ni personne n'influencera ses décisions aussi meurtrières soient-elles.
À présent ça se joue entre lui et moi.
Il me sort de ma rêverie de son rire cristallin comme tout à fait effrayant. Je le vois, debout sur le bord de l'immeuble et prêt à basculer dans le vide à tout moment; il écarte les bras comme pour embraser la ville tout entière d'un seul geste.
"Viens là Paige..."
Un frisson violent me traverse tout entière. Paige. Il m'a appelé Paige. Malgré que mon sang se soit glacé instantanément, j'essaie de ne rien laisser paraitre et m'approche du bord sans pour autant monter dessus à ses côtés.
"Regarde en bas. Regarde les, ces minables Hommes. Peut-être croient-ils qu'avec leurs vulgaires sirènes rouges et bleues il me feront peur."
Un nouveau rire déchire le silence qui reigne à cette hauteur. L'air frais me gifle la peau. En temps normal peut-être aurais-je apprécier cette sensation de fraîcheur et de puissance que l'on peut ressentir du haut de cette tour mais pourtant, chaque brise sur mon corps me fait penser à une fine feuille de papier qui couperait ma peau au ralenti en me laissant une égratignure. Je ferme les yeux sans plus vouloir voir la ville. La vue est pourtant magnifique mais je ne peux me résoudre à regarder la beauté que je risque de détruire d'un instant à l'autre si je faillis à mon devoir.
"Tu savais qu'ils allaient venir, n'est-ce pas?"
Je hoche la tête en ouvrant à nouveau les yeux, fixant le toit d'un immeuble face à nous.
"Nous le savions aussi. Tu sais donc que quiconque essayera d'entrer sera tué sur le champ?"
Je hoche à nouveau la tête en croisant les mains dans mon dos, serrant mes doigts les uns contre les autres avec ferveur.
"Désolé si certains de tes petits amis de la justice y passeront ce soir. Ce sera... Comment dire... Inévitable?"
Je ne dis rien et essaie de contenir ce sentiment si intense qui me parcours; je rêve de lui bondir dessus mais il ne doit absolument pas en être ainsi. C'est un test, tout simplement.
"Il est sage de ta part d'être revenue à nous. Peut-être n'assimileras-tu pas mes paroles dans cet état mais je tiens tout de même à te dire qu'il était nécessaire de procéder à une mise sous contrôle de ton esprit. Nous ne pouvions pas nous permettre un quelconque retournement de situation tout est si..."
Il pousse un soupire alors que je tourne machinalement la tête vers lui pour le détailler avec attention. Son sourire est si large, ses yeux sont certainement en train de briller sous sa monture noire. C'est comme si il n'avait jamais été aussi heureux de sa vie. Apparement c'est ce sentiment de contrôle qui le rend heureux de la sorte. Si il n'a jamais connu l'amour alors rien d'autre mis à part le pouvoir ne peut le mettre en joie, c'est ainsi que je le perçois.
"Tout est si parfait."
"Sous contrôle." je lache pour confirmer ses paroles.
Et peut-être que ce fait est bien la pire chose qui puisse m'arriver. L'organisation parfaite de ses projets risque de me faire royalement foirer mon coup. Malgré tout je garde cet avantage; il ne sait pas que je ne suis plus dans cette transe infernale ni que Peter est en réalité toujours en vie. Peut-être que ce n'est qu'un mince avance que nous avons sur lui mais ça peut faire toute la différence. Ou pas, à moi de croiser les doigts et d'agir dans les temps. Mais comment? Je ne sais pas comment m'y prendre ni quand. Si seulement Peter pouvait être à mes côtés... Si seulement Jeffrey pouvait être là lui aussi, Cassidy, Flash... Ma grand-mère. La Nedra qui était mon amie. Si seulement elle avait ouvert les yeux peut-être serait-elle en train de se battre à mes côtés. Mais elle aussi est morte. Elle aussi je l'ai tuée.
"Exactement."
Il relève la manche de son costume et regarde une grosse montre dorée sur son poignet en souriant avant de descendre du bord pour faire un petit tour sur le béton qui compose le toit. Il se dirige à grandes enjambées calmes et posées vers le centre de l'espace avant d'ouvrir un petit boîtier posé sur cette grosse et haute machine qui est accrochée à la grande parabole qui monte encore haut dans le ciel. Je lui jette un regard en biais en me retrouvant éblouie par le soleil couchant; une immense parabole blanche à laquelle on peut accéder en grimpant par les barres métalliques compliquées et entremêlées jusqu'au sommet. Des tas de caisses métalliques entourent son pied, une panoplie de boutons colorés, de leviers et de câbles se trouvent à l'intérieur du boitier. En approchant tout en gardant mes distances, je le vois toucher à un écran avant de tirer un levier; un compte à rebours. Je ne vois pas les chiffres, il ferme déjà le boitier avec un air satisfait avant de poser ses deux mains à plat dessus.
"Tu sais pourquoi on m'appelle Fearless?"
Je ne réponds pas et fixe le pied de la parabole alors qu'il prend une grande inspiration.
"C'est assez ironique qu'on m'appelle le sans peur étant donné que je suis moi-même composé de la peur d'autrui. Peut-être qu'au fond mon surnom a tout son sens. Malgré tout je maudirais à jamais les scientifiques qui ont fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Cette bénédiction qui m'est accordée..."
Il lève le menton et se tourne vers moi avant d'ôter ses lunettes. Ses yeux sont brillants, lucides, et leurs iris presque blanches tant leur couleur bleue est vive et claire. Je reste un instant bouche bée face à cette beauté, ses longs cils noirs bordant leur forme en amande m'hypnotisent. Mais je tressaille rapidement quand le visage d'un homme m'apparait, portant un masque en papier sur la bouche et des lunettes verdâtres, délavées. Il se penche vers moi et un hurlement retentit à mes oreilles. Une voix me paralyse.
"Envoyez les ondes ultrasonores." dit-elle.
Je vois le masque flou de l'homme alors qu'un long bruit strident crisse à mes oreilles.
"Envoyez les images."
Et ma vision change, devenant encore plus trouble; des corps partout, du sang... Des tas d'insectes grouillent sur le sol. Un coup de feu retentit, je vois une silhouette brûler au loin, un rugissement, le chao. Tout cela n'a aucun sens.
Je me réveille brusquement en tombant au sol, la main sur la poitrine en respirant avec difficulté. Fearless repose ses lunettes noires sur le bout de son nez.
"On m'a fait voir des choses, subire des expériences si intenses et horribles dans ce laboratoire... Aucun homme n'a jamais tenu bon. La partie de notre cerveau qui gère la peur, le stresse et les angoisses n'a jamais été aussi profondément étudiée que sur moi-même. Ils ont cru me retrouver mort avec le premier coup d'envoi comme les autres prisonniers qui ont participés à l'étude. J'aurais préféré subir le même sort qu'eux mais mon système nerveux a tenu miraculeusement bon. Alors ils ont toujours poussé plus loin, me faisant subir cette torture mentale jusqu'à ce que je développe ces capacités étranges."
Il avance sur quelques pas alors que je me relève, les jambes tremblantes. C'est donc ça, ce pouvoir de démolir un homme par son regard.
"Et une mutation génétique de plus causée par la science. Qui aurait pu prédire un tel événement?"
"Tu es en colère contre le monde entier car ils t'ont transformé en monstre? Même si je n'ai pas vécu une situation aussi extrême que la tienne, je pourrais en dire autant. Tu étais un criminel qui méritait l'isolement dans une prison de haute sécurité alors que par la suite tu es devenu cette mutation. J'étais une banale adolescente qui n'avait rien demandé quand j'ai subi la mienne. De qui de nous deux la colère est elle le mieux justifiée?"
Je ne peux plus me taire, ressentant bien trop d'émotions à la fois. Tant pis pour ma couverture, il faut que j'agisse.
"Comment..." commence-t-il en se tournant brusquement vers moi.
"Pourquoi t'as-t-on enfermé? Pourquoi es-tu un criminel, Fearless?"
Je m'approche de lui, sentant la colère me submerger à nouveau.
Ma grand-mère.
"Tu ne veux pas le savoir." dit-il entre ses dents en se rendant compte de la supercherie.
"Oh, tu sais, si tu étais là-bas pour avoir ôté des vies, peut-être que moi aussi je mérite d'y aller."
J'avance encore plus.
"Tu n'es pas différent de nous. Nous avons tous vécu des atrocités avant d'atterrir à tes côtés. Mais au fond, nous sommes tous des mutations. Nous sommes tous des âmes meurtries et brisées pourtant nous n'avons pas tous souhaité la suppression de l'humanité par pur égoïsme comme toi tu le fais."
Je secoue la tête en sentant mes muscles s'enflamer, prête à bondir à tout moment.
"Tes raisons sont purement personnelles, il n'y aucune volonté d'aider les tiens dans toute cette mise en scène. Tu veux juste te venger, te venger de la science, te venger des raisons pour lesquelles tu as été poussé à commettre des crimes... Car c'est toujours plus facile de reporter la faute sur quelqu'un d'autre."
Au fond, c'est ce que j'ai toujours fais. J'ai renié mes responsabilités et mes actes jusqu'à aujourd'hui en mettant tout sur le compte de Peter, Spider-Man, Raven, Nedra, Fearless... Tout, sauf moi. Je me sentais si innocente et si peu concernée que ça a bien failli me tuer plus d'une fois. Aujourd'hui je dois assumer. Mes sentiments, j'aurais très bien pu les contrôler. Ce sont mes impulsions immatures qui m'ont conduites jusque là.
Je dégaine mes griffes prête à frapper alors qu'il reste encore sous le choque. Si ses soupçons sur mon état hors de son contrôle étaient encore troubles, à présent il n'y a plus aucun doute.
C'est quand je vois une silhouette rouge me barrer la vue que je reprends vaguement espoir.
"Il faut croire que tes plans n'étaient pas si infaillibles que ça au final."
"Besoin d'aide Raven?" dit Peter en s'appuyant nonchalamment contre le pied de la parabole.
"Oh, je t'en prie, appelle moi Paige."
"Pas de soucis princesse."
Je souris avec férocité en dégainant mes griffes alors que pour la première fois de ma vie, je sens que Fearless est instable et hésitant. Les toiles de Peter ne perdent pas de temps avant de venir s'accrocher à chaque parcelle du corps de l'ennemi en le faisant violemment tournoyer.
"Et non petit enfoiré, on ne tue pas Spider-Man aussi facilement." dit Peter en grognant avec une pointe de sarcasme dans la voix tout en usant de toutes ses force pour propulser l'homme contre le béton.
Il ne répond rien, peut-être encore trop boulversé par ce retournement de situation. Il git au sol, emmêlé dans les toiles visqueuses conçues par mon ami qui le propulse à nouveau au sol avec violence.
"Peter! Ou est Cassidy?" dis-je en ayant brusquement une image de la belle en tête, prise de panique.
Il se tourne vers moi sans lâcher sa prise sur Fearless et ôte son masque. Je vois sa mine atterrée alors qu'il secoue négativement la tête.
"Je ne l'ai pas trouvée mais... Une patrouille est à sa recherche."
Je pousse un soupire en ravalant mes sanglots et hoche la tête avant de me concentrer à nouveau sur cette ordure de Fearless.
"Comment on se débarrasse de ce taré?"
Je me mords la lèvre en réfléchissant; nous devons garder le contrôle que nous possédons sur la situation actuellement et faire au plus vite.
Mais un craquement retentit. Brusquement, les toiles se mettent à fondre en goûtant sur le sol avant de s'évaporer dans l'atmosphère. Peter recule d'un pas en voyant ainsi son arme se désagréger. Je réagis au quart de tour en lui sautant dessus, le maintenant au sol avant de me retrouver à mon tour propulsée quelques mètres plus loin.
"C'est ça que vous cherchez?" dit-il dans un rire en laissant toute trace de faiblesse disparaître dans son attitude.
Il tend la main droit devant lui quand alors une fracas de verre brisé retentît. Les vitres du bureau se trouvant au dernier étage volent en éclats alors qu'un table surélevée en sort à toute vitesse. J'aurais juré entendre sortir de là un gémissement. La réalité me frappe avec brutalité.
"CASSIDY!" je hurle en la voyant ainsi plaquée contre cette espèce de table.
Le rire de Fearless retentit, je me précipite vers la rousse en sentant un bras s'enrouler autour de mon corps. Peter me tient fermement.
"Non. Attend." me dit-il avec douceur en resserrant sur moi son étreinte tandis que je me débats, les yeux pleins de larmes en gémissant avec impuissance.
Son état apparent me fait perdre toute l'adrénaline que j'avais jusque là accumulée. Son menton est relevé vers le haut et son crâne plaqué contre la planche. Son teint est plus pâle que d'habitude, presque maladif. Sess cheveux ont brusquement perdu de leur éclat étant devenu fades, ses vêtements semblent sales et ses muscles totalement relâchés, fatigués. Pourtant sa mâchoire est visiblement contractée comme si elle se battait contre une force invisible. Et c'est sans parler de ces bracelets métalliques qui lui entourent le cou, les poignets, la tailles, les jambes et les chevilles.
"Tentez quoi que ce soit et je la tue." annonce Fearless en perdant toute trace de cette infime faiblesse qu'il arborait tout à l'heure.
Je sers les dents tout en fixant la rousse, elle baisse le menton et son regard croise le miens, du moins, c'est ce qu'il me semble. Ses yeux sont vides et injectés de sang, les cercles creux et violets sous ses yeux confirment plus que tout son état misérable. Les larmes coulent d'elles-mêmes sur mes joues, peu abondantes et silencieuse alors que ne fait plus part d'aucune résistance à Peter en me laissant tomber au sol. Le brun me garde debout de son étreinte sans me lâcher une seule seconde. Avec ce regard qu'elle m'accorde, je ne sais même pas si elle me reconnait. Après tout je suis transformée mais Cassidy... Je suis certaine que dans n'importe quel état elle me reconnaitrait.
"Lâche là!" dis-je faiblement, mes paroles accompagnées d'un sifflement.
C'est à ce moment que je me rends compte à quel point je suis faible et insignifiante. Et j'ai cru que j'allais pouvoir réparer mes erreurs toute seule? Vraiment?
"Garde la tête haute. Ne fais rien." me chuchote Peter en saisissant discrètement ma main, son visage dans mes cheveux.
Je ferme les yeux avec fermeté et réprime un sanglot alors qu'il me lâche avec douceur. Je tombe à genoux en serrant les poings alors que Peter reste debout. Je le regarde avec la vue brouillée, il s'avance vers Fearless en levant les deux mains.
"Je suppose que c'est terminé?" dit-il avec amertume.
Fearless rit et s'avance vers mon amie à qui il caresse la chevelure.
"Vous qui êtes si faible quand alors on s'en prend à vos proches..."
Son rire s'accentue alors qu'il observe Peter se rendre avec une lueur de satisfaction dans son regard.
"Oui Peter, c'est terminé."
Il regarde à nouveau sa montre et hoche la tête avant d'ajuster ses lunettes.
Peter lève les yeux au ciel.
"Génial, tu connais mon prénom. Tu dois être très fier."
Un rictus s'imprime sur son visage et c'est sous cet angle que je remarque l'hématome bleu qui orne sa joue.
"Tu sais pourquoi on est faible quand il s'agit de nos proche? Parce que même si on à ce point commun, tu sais, la mutation... On garde notre part d'humanité qui va avec nos sentiments. C'est ce qui nous différencie de toi. T'as déjà aimé quelqu'un Fearless?"
Le concerné incline la tête sur le côté en ricanant.
"C'est ce qui fait ma force. L'amour est une faiblesse. Elle engendre la pitié, la pitié tue. La preuve, ta pitié pour votre amie vient de vous condamner."
Fearless lève une main mais avant qu'il ai pu faire quoi que ce soit, Peter vise son poignet de ses toiles. En deux mouvements agiles, il bondit sur l'homme à qui il envoie un coupe de pied agile, un coup de tête et un plaquage contre le pied de la parabole.
"C'est la connerie de tes paroles qui va te condamner, espèce de taré."
Le poing de Peter vole dans son visage avec brutalité mais Fearless ne se laisse pas faire aussi facilement. Après avoir répliqué de la même façon, une seconde bagarre s'enclenche entre les deux. J'en profite, tremblant malgré moi, pour aller essayer de délivrer Cassidy. En arrivant à ses côtés, elle tourne son visage vers moi et murmure des paroles incompréhensibles. Je passe ma main sur sa joue avec toujours ces satanés larmes qui coulent sur mes joues.
"C'est moi, Paige. Je suis tellement désolée..." dis-je dans un murmure.
Elle ferme les yeux en soupirant alors que je sens sa main agripper le tissus de mon sweat-shirt tant bien que mal. Je sers les dents sans quitter son visage, toujours aussi pure et douce bien que meurtrie des yeux.
"Je vais te sortir de là." dis-je en me ressaisissant.
Je sors mes griffes et m'attaque aux visses des bracelets en geignant, désespérée.
"Paige..."
Je ne m'interromps pas en continuant de forcer sur ces maudits verrous.
"Paige..." répète-t-elle dans un souffle.
Je lui lance un regard en biais.
"Ça va aller, j'y suis presque..." dis-je très peu certaine de mes paroles.
"Non... Paige, je t'aime." dit-elle d'un voix rauque et brisée.
"Moi aussi Cass, je t'aime. Je t'aime plus que tout. Ça va aller, on va retrouver Flash et l'école. On va retourner jouer au bowling. On va aller prendre un café. Tout sera redevenu comme..."
"PAIGE!"
Je me retourne brusquement et mon coeur s'arrête tout bonnement de battre. J'ai simplement le temps de voir Peter faire un vol plané, lancé une toile et... Rater sa cible.
"PETER!" je hurle en étant complètement départagée entre mes deux amis, ne sachant quoi faire.
Mais il est trop tard. Dans un cri déchirant, Peter vol par dessus le bord et disparait. Je m'écroule contre Cassidy, tétanisée, ne sachant plus faire un seul geste de plus.
Qu'est-ce qu'il se passe?
Je titube, je tousse, ma tête me fait souffrir à un tel point que je ne sais plus si je vis réellement dans la réalité ou dans un rêve. Soudain, mon corps se retrouve projecté quelques mètres plus loin contre les vitres des bureaux. Je sens les bouts de verre de la vitre entailler ma peau de part et d'autre sans pour autant ressentir la douleur. Je ne sais tout simplement pas ce qu'il m'arrive. Fearless me surplombe et crit quelque chose, sa bouche déformée par une expression de rage. Il crache ses mots avec violence, donnant un coup de pied à mon faible corps endoloris. Mais il ne compte pas me tuer, non, bien pire. Je m'en rends compte quand les hurlement de Cassidy résonnent dans l'atmosphère, plus déchirants, plus profonds, plus aiguë et horrible que n'importe quels hurlements que j'ai pu entendre dans le passé. Je vois Fearless avec ses lunettes en main, il a le nez à quelques centimètres de celui de mon ami, ses mains entourant ses poignets et le visage de mon amie rouge pivoine et suant. Elle crit encore et encore.
Ma maison en flammes. Le corps de ma grand-mère dans cette benne à ordure. Celui de Nedra, certainement calciné dans le salon. Ce gardien mort dans l'entrepôt. Cet agent décédé des mains de Fearless. Toutes ces futurs victimes, innocentes. Ces femmes, ces hommes, ces enfants...
Peter.
Ce n'est pas possible, ça ne peut-être la réalité. Mon esprit semble disjoncter commme si seulement maintenant je prenais conscience de tous ces événements accumulés, de mon identité, de l'horreur dans laquelle je vis. Et cet homme qui cause tant de troubles... Je sers les poings et craque ma nuque. Il faut que j'en finisse avec ça, maintenant. Je suis faible, très faible. Alors tout en conscience de ce fait, je vais tout faire pour ne plus être ce que je suis.
Je bondis sur Fearless avec une incontrôlable rage. C'est une onde de chaleur qui me traverse comme je n'en avais jamais connu avant. Quelque chose de si fort, si puissant que c'est comme si elle me rongeait de l'intérieur jusqu'à ma totale combustion. Je me sens invincible et je ne m'arrêterai pas jusqu'à ce que je sois arrivée à mes fins. Je saisis la gorge de cet horrible personnage et le plaque au sol, me mettant à califourchon sur lui et manipulant son crâne pour faire en sorte qu'il se cogne et re-cogne contre le sol. Je continue, encore et encore, avec une violence incroyable. Je sens qu'il essaye de me saisir de ses mains alors dégaine mes griffes et les plantes à coups secs dans la paume de ses immondes mains gantées. Elles les transpercent alors qu'il pousse un cri étranglé et qu'un marre de sang se répand autour de nous. Je profite d'avoir dégainé mes griffes pour arracher ses bandages. Ils se décollent de son visage comme si ils étaient collés à sa peau. Je les arrache et les jette autour de moi, n'entendant même plus ses cris à en faire trembler n'importe qui. Alors je m'arrête un instant quand son visage est enfin à découvert. Sa peau. Sa peau est totalement fichue en l'air, calcinées, déformée, à vif, rougeâtre et laissant des cratères dégoûtants un peu partout. Je comprends alors qu'il est complètement défiguré et me prends à me demander quand est-ce qu'on a pu lui infliger ça. Seuls ses yeux et son sourire restent mystérieusement intactes. Je sens alors son regard froid me transpercer, mais non, je ne me laisserais pas faire cette fois. Hors de question de devoir à nouveau me laisser contrôler et déstabiliser par ces visions d'horreur. Sans hésiter, je plante mes deux griffes des indexs dans ses orbites. Du sang m'éclabousse le visage alors que j'enfonce plus profondément avec fureur. Il hurle à la mort en se cambrant, le dos rond, se contorsionnant et se retrouvant secoué de spasmes incontrôlables. Mais je reste stoïque. Cette vision ne me fait plus rien. Je pousse à mon tour un hurlement de rage, aussi déchirant que les siens mais d'une autre façon, quelque chose de plus puissant qui signe l'évacuation de mes sentiments. Après ce cri, je me sens déjà libérée d'un poids.
"Tu l'auras voulu." souffle-t-il d'une voix étranglée et presque intelligible.
Dans un mouvement lent et douloureux, il appuie sur sa montre apparement tactile. Du sang s'écoule encore de ses mains quand il retire son gant, la vue n'est pas belle. J'essaie de lui arracher son gadget mais il est trop tard. Un énième cri retentît avant de brusquement se couper net. Fearless lache un faible ricannement alors que je balbutie. Cassidy. Qu'a-t-il fait?!
Je regarde son visage déformé dégoulinant de sang et de caillots se mettant à sécher, et puis mes mains écorchées et saignantes, de son sang. Il rit, ce rire, je ne le supporte plus.
"Enfoiré." dis-je avec tout le dégoût et la rancoeur que j'ai pu accumuler à son égard.
Et c'est là que je lève mon poing et mes griffes acérées avant de les diriger vers sa gorge. Et je tranche, d'un coup sec au niveau de l'artère. Un jet de sang me gicle au visage, chaud et bien trop foncé pour être humain. Je me recule en laissant là son corps inerte encore légèrement secoué de spasmes et geignant avant de complètement s'arrêter. Je me lève, un peu tremblante mais bien moins que ce à quoi je m'attendais et observe Fearless. Ou plutôt son cadavre.
"Tu te sens mieux?"
Je me retourne avec le coeur battant à cent a l'heure avant de me jeter dans les bras de Peter qui se trouve à un mètre de moi.
"Peter mais tu..."
"Tu sous-estime Spider-Man? Vraiment?"
"Jamais de la vie!" dis-je en le serrant contre moi comme si ma vie en dépendait.
"Il nous reste exactement trois minutes avant qu'il soit dix-neuf heures, sans vouloir te mettre la pression. Le compte à rebours est toujours en route."
Et merde. Le compte à rebours.
Nous nous attardons sur le boitier où Fearless travaillait il y a peu alors que j'essuie mon visage souillé. Nous nous lançons un regard complètement désespéré.
"Bon..."
"Essaye tout!"
Il hoche la tête, nous n'avons pas d'autre issue. Alors il appuie sur tous les boutons, enclenche toutes les manettes jusqu'à ce qu'un bip sonore se fasse.
"Ah..." je souffle rassurée.
"Bordel de merde..." dit-il en serrant les dents.
En effet, j'ai eu tord de me réjouir trop vite. Le compte à rebours n'a fait qu'avancer. Soixante secondes avant la transmission des ondes partout dans New-York.
Je panique et frappe violemment sur le cadran. Dans un élan de désespoir, Peter enlace ma taille d'un bras et de l'autre, arrache tous les câbles avec une force que je ne lui connaissais pas.
Quatre secondes, trois secondes, deux secondes...
L'écran se brouille et s'éteint.
Je regarde Peter avec les yeux écarquillés et la bouche entre ouverte alors que celui-ci fixe l'écran sans trop y croire. Un nouveau bip sonore retentit et un message en rouge s'affiche sur l'écran.
Action annulée, autodestruction dans trente secondes.
Je prends une grande inspiration que je coupe et sens mon coeur s'emballer. Peter pousse un cri et me saisit par la taille pour m'emmener loin d'ici.
"CASSIDY!" dis-je en voyant là son corps inerte.
Peter accourt près d'elle et prend son poul, son expression vore au cramoisie.
Vingt secondes.
Il secoue la tête et fait rouler la planche où elle git vers le bord.
"Désolé." souffle-t-il.
Je le regarde faire avec de grands yeux alors qu'il pousse la planche dans le vide. Je plaque ma main contre ma bouche en la voyant rétrécir en approchant du sol où sont dressés des bâches totalement inutiles.
"VITE!" crit le brun en me serrant contre lui.
Je m'accroche à sa nuque et me sens perdre le contact avec le sol en fermant les yeux. Il nous guide alors que je sens une onde de chaleur souffler dans mon dos et un grincement assourdissant. Le haut de la tour Oscorp a à nouveau rendu l'âme.
⁂
Quand j'ouvre à nouveaux les yeux, je sens contre ma joue un support chaud et chaleureux. C'est Peter, il est assis au milieu de la route interdite d'accès au pied de la tour d'Oscorp. Autour de nous, l'agitation est bien là, les sons me reviennent lentement et tintent durement à mes oreilles. La main de Peter est perdue dans ma chevelure, je le regarde un instant avant de me relever. La première chose que je vois est le corps de Cassidy, toujours étendu sur sa planche alors que plusieurs policiers essayent de lui oter ses bracelets métalliques. Mon coeur s'emballe, je me dégage de l'étreinte de Peter et me relève en titubant. J'avance vers eux et me laisse tomber auprès d'eux. Ils lui retirent le dernier bracelet et soulèvent son corps. Je les arrête brusquement en les priant de la reposer. Ils s'échangent un regard avant de la poser sur une bache à mes côtés. Je me penche sur elle, complètement dépitée, le coeur en miettes. Je respire difficilement alors que mes mains se perdent sur son visage, dans ses cheveux, sur son cou. Je prends à deux mains son beau visage, il semble presque avoir repris des couleurs, elle semble si paisible comme ça, si libérée... Un peu comme si elle dormait. Je me mordille les lèvres et secoue un instant son corps inerte comme si j'avais l'espoir qu'elle se réveille. Mais je sais que non, nul ne la fera revenir. Certainement pas mes secousses désespérées. Je ferme les yeux en agrippant le col de son t-shirt et enfuis ma tête dans son cou avant d'éclater en sanglot, prise de secousses incontrôlables. Cassidy... Ma meilleure amie. Je repense à tous ces instant que nous avons passés ensemble, que nous avons perdus aussi à nous disputer pour de stupides raisons. Je ferme violemment les yeux en sentant s'échapper de grosses larmes qui s'écrasent sur les vêtements de Cassidy. Elle était une des seules personnes que j'aimais réellement sur cette fichue planète.
Il faut croire que j'ai tout perdu.
Je pousse un cri tirant plus sur la plainte désespérée et sers si fort son vêtement que je le froisse. Je me sens alors si faible que je sens ma transformation disparaitre et ma peau redevenir normale. Mes sens revenir à ceux d'un humain banales. Mais mes émotions se décuplent. À présent je n'ai plus aucune raison d'être là.
Un des policier me regarde du coin de l'oeil avec une once de pitié. Je n'hésite pas à me relever d'un bond pour lui sauter dessus et lui asséner un coup de poing. Pourquoi? Pour son arme.
Il pousse un cri et essaye de riposter pour récupérer ce qui lui appartient mais je le menace du canon tout comme je menace les autres qui sont à présent tous tournés vers moi.
Ma mâchoire tremble, mes membres aussi. Mes yeux sont si rouges, si bouffis, si pleins de larmes et moi si désespérée... Je pointe le canon vers ma tempe en les fixant un par un tout en effleurant la gachette. L'atmosphère s'alourdit. Peut-être que New-York est sauvé mais moi, je suis complètement détruite et rien ne pourra me réparer. J'ai bien trop de sang sur les mains pour supporter cette vie plus longtemps.
On me murmure de ne pas bouger, tout le monde s'est tu, comme si toute la ville faisait silence rien que pour moi.
Je ferme les yeux en sanglotant, un cercle s'est formé autour de mon petit être empreint de désespoir.
"Paige, tout va bien." susurre une voix que je connais.
J'ouvre les yeux et vois sa chevelure rousse et soyeuse, ses lèvres rosées et ses yeux verts pétillants. Elle est pleine de vie et d'amour à revendre.
Et puis ce sont ses cheveux bleus électriques qui attirent mon attention. Son sourire bienveillant et son inépuisable joie de vivre. Toutes les deux elles me sourients avec tristesse.
"Ce n'est pas ta faute." disent-elles a l'unisson.
Je sanglote de plus belle en sentant la douleur mentale devenir physique, comme si un coup de poing venait me percuter le ventre. Mais ce n'est que moi et mon instable esprit.
"Ce n'est pas ta faute." répète une voix masculine avec douceur.
Je vois le visage de Peter se dessiner en laissant s'effacer ceux de Cassidy et de ma grand-mère. Contraireme à elles, il est bien réel. Il me tend la main avec inquiétude, son regard larmoyant.
"Je ne veux pas te perdre toi aussi." dit-il dans un murmure.
Je presse le canon glacé de mon arme un peu plus contre mon crâne en le regardant fixement.
Et puis je lâche prise dessus, elle tombe au sol dans un tintement métallique et je fonce dans ses bras en le faisant tomber à la renverse. Il m'attrape et me sert contre lui comme jamais au par avant, m'enlaçant avec un amour indescriptible, ses mains agrippant mes cheveuxs alors que je laisse mes sanglots les plus puissant et désespérés s'écouler dans le creux de son épaule. Je ne peux m'empêcher de donner des petits coups dans son torse en geignant, il se laisse faire sans un mot.
Et enfin je me calme, serrant entre mes doigts le tissus de son costume et reniflant avec frénésie.
Si un jour je m'en remets alors ce sera ce jour là que j'aurais compris pourquoi j'ai lâché cette arme. Non, pas que j'aurais compris, car je comprends. Mais que j'aurais admis.
Fearless manquait d'une seule chose que moi je possédais. Je coulais sous cette chose chaque jours sans pourtant m'en appercevoir.
L'amour.
J'étais entourée d'amour tous les jours par ces quelques personnes qui me sont chères et moi, je n'ai rien vu. Au lieu d'ouvrir les yeux et de leur dire à quel point je les aime, j'ai attendu qu'ils tombent un par un pour finalement me rendre compte de ce fait.
J'ai toujours été aimée par les plus belles personnes que cette terre aie connue. Fearless sera mort sans jamais avoir un jour rencontré une personne lui aurait porté cet amour que je n'ai cessé de recevoir tout au long de ma vie.
Les lèvres des Peter effleurent les miennes et enfin mes sanglots cessent.
***
Hey!
Et oui... C'était le dernier chapitre. L'épilogue suit rapidement, elle est en cours d'écriture.
Bon et bien... J'ai le coeur en miettes, clairement. Ce chapitre est très long, c'est vrai, mais ça souligne la fin de cette fiction!
Ça m'a fait tellement mal de l'écrire c'est fou!
Qu'en avez-vous pensé?
Merci pour votre patience. ❤️
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