Chapitre XXVIII

Paige Wells.

"Je peux pas faire ça... Je pense toujours que passer par derrière serait une meilleure idée." souffle Cassidy sur le pas de la porte.

"Cass, en Europe, tu es une adulte. Il est temps de prendre tes responsabilités." dit solennellement Flash.

"Oui, Flash, mais ici, c'est l'Amérique. Je suis encore un bébé de dix-huit ans."

Je me pince les lèvres en nous voyant ainsi, ne pas oser rentrer. Il est une heure du matin, il n'y a plus qu'une voiture ainsi que celle des parents de mon amie dans l'entrée de garage.

"Il est encore temps de faire demi-tour et de trouver un hotel..." commence-t-elle.

"Hors de question que tu dormes autre part." lance sévèrement une voix masculine.

Nous tournons tous la tête vers la droite, où se tient le père de Cassidy. Il est planté au milieu du petit jardinet, les bras croisés sur sa poitrine, le regard dur et la cravate légèrement dénouée.

"Cassidy Jeanne Harrington, où étiez-vous?"

Je baisse le regard, j'ai presque peur d'un homme qui n'est pas mon propre père et qui ne me fera certainement pas la morale. Ce dont j'ai réellement peur, c'est que la soirée de notre amie soit gâchée alors qu'elle fut merveilleuse jusque là.

"Je..."

Elle nous lance un regard, déglutit difficilement et ravale les larmes qui perlaient à ses yeux. Elle se redresse et là, je la sens prête à affronter la réalité; elle dira la vérité car son éducation et ses valeurs le veulent.

"On était à Luna Park."

Un silence s'installe pour seulement quelques secondes, pourtant elles me paraissent déjà excessivement longues. L'homme aux cheveux grisonnants se pince l'arrête du nez. Il est de ces hommes qu'on voit dans les publicités luxueuses, avec son veston noir, ses chaussures polies, sa mâchoire carrée, ses yeux clairs et ses cheveux poivre et sel. Quand je le vois, la seule chose à laquelle je pense est qu'il est l'opposé de mon père à moi, cet homme trapu et mince qui ne quittait jamais sa blouse de laboratoire tachée. Pourtant il avait l'air plein de vie, un homme qui avait de l'énergie à revendre et qui mettait de l'ambiance partout où il allait. Évidemment, c'était avant l'incident. Mais j'aime garder en mémoire cette image de lui, car il était lui-même à cette époque, complètement lui-même.

"Cassidy..."

"Je sais papa, je t'ai déçu, j'ai déçu maman et peut-être même le reste de la famille. Ils ont dû me trouver impertinente, c'est certain. Mais moi, je m'en fiche de leurs avis, je ne les ai plus vu depuis des années et quand alors il s'agit d'un buffet à volonté, les voilà qui débarquent en masse. Ce dont je ne suis pas fière, c'est peut-être l'image que j'ai donné de toi ce soir... Excuse-moi papa, de ne pas vous ressembler ou encore de ne pas être une fierté pour notre famille."

Je porte une main à mon bras en fixant le bout de mes chaussures, ses paroles viennent du coeur et j'ai simplement envie de la prendre dans mes bras et de la félicité pour cet acte de courage. Nous savons tous à quel point il est plus difficile d'affronter ses proches que de simples inconnus. Et surtout ses parents.

"Cassidy, est-ce que tu t'es amusée ce soir?" demande son père.

L'expression de la jeune fille se radoucit en laissant place à une vague stupeur qu'elle tente de dissimuler.

"O-oui."

"Est-ce que tu as passé un bon anniversaire?"

"Honnêtement... C'était le meilleur que j'ai pu passer dans ma vie."

Il baisse la tête et quand il la relève, il sourit.

"Alors c'est tout ce qui compte."

Cassidy semble complètement déstabilisée, elle n'arrive pas à se résoudre à sourire tant elle n'avait pas prévu ce retournement de situation, tout comme nous d'ailleurs.

"Et je t'interdis de penser une seule seconde que tu n'es pas une fierté pour nous. Tu es la personne la plus précieuse que nous avons l'honneur d'avoir élevé." il s'approche d'elle et pose ses mains sur ses épaules avec une expression bienveillante. "Et si tu veux savoir, ta mère à beaucoup rit. Elle s'y attendait, la fête était bien trop ennuyeuse."

Ainsi, un grand sourir nait sur les lèvres de la rouquine qui semble émerveillée.

"Merci papa."

Et elle l'étreinte alors que l'homme est aussi rayonnant que sa fille, nous sourions tous les trois bien qu'un peu gênée d'être impliqués dans cette réconciliation.

"Allez terminer votre soirée en haut! Filez, maman dort."

***

"Ce n'est pas raisonnable Cassidy!" lance Flash avec un air innocent.

"Parle pour toi! Tu aurais été le premier à sauter dessus si c'était ton anniversaire."

"Peut-être bien..."

Nous sommes assis en cercle dans la chambre de la belle, des coussins sont éparpillés entre les couvertures que nous avons amassées sur le sol à fin que ce soit plus confortable. Aucun d'entre nous ne semble fatigué ni même ne manifeste l'envie de se coucher. Alors j'ai proposé de faire un jeu d'actions, comme on les aime lors des soirées. Flash a dû ajouté des vérités en me lançant un regard pervers qui veut tout dire. Je lui ai tiré la langue et il a pris un air offusqué avant de me lancer un coussin à la figure.

"Tant qu'on en abuse pas, tout va bien se passer." dit-elle en nous servant un fond d'alcool dilué dans un jus de fruit, un petit cocktail express spécial dix-huit ans.

Peter, assoiffé, ne semble pas se rendre compte que l'alcool dans ce verre est fort et qu'il ne faut pas le boire comme de l'eau. Il finit son verre d'une traite avant de devenir rouge povoine et de tousser comme un idiot.

"Je..." il tousse, "pensais pas que c'était à ce point..." et il tousse encore, je me résoud à lui donner quelques tappes dans le dos.

"Et après ça dit que ça tient l'alcool." dit Flash en levant les yeux au ciel.

"La ferme."

"Bien, Flash, action ou vérité?" dis-je en attrapant le téléphone que Cassidy me tend avec l'application du jeu.

"Commençons doucement avec une vérité."

"Quelle est la chose la plus embarrassante que tes parents t'ont fait subir?"

Il réfléchit un instant et lève un doigt en riant.

"C'était quand j'avais treize ans, vous voyez quand un de nos parents doit venir présenter son boulot dans notre classe?" nous aquiesçons. "Et bien, mon père à fait défiler des photos de son projets d'architecture en Afrique, il était parti deux mois et donc il a montré ces photos grâce à un projecteur dans ma classe. À cet âge j'étais le beau-grosse intouchable de la classe avec les meilleurs cartes Pokémon! Et... Dans le diaporama, y a une photo de moi à poil à la plage quand j'étais encore plus petit mais pas trop, avec une tétine en bouche, je tournais seulement la tête vers l'objectif en souriant avec fierté et j'avais un putain de chapeau rouge moche avec des lanières qui entouraient mon visage."

Il boit un coup en se pinçant les lèvres.

"On m'a appelé petite bite jusqu'à mes quinze ans quand j'ai déménagé dans le coin."

J'étouffe un rire derrière mon verre et Flash ne peut s'empêcher de sourire.

"Tu as réussi le défi, à toi de poser une question!" dit Cassidy en s'esclaffant.

Je lui tends le téléphone et Cassidy choisi une action sans perdre de temps. Un sourire illumine le visage du blond quand il lève la tête vers elle.

"Embrasse ton voisin de gauche."

La rouquine semble se figer. Elle regarde le blond qui est effectivement son voisin de gauche en devenant écarlate.

"N'importe quoi, lis la vraie question."

"D'accord: embrasse ton voisin de gauche." répète-t-il en lisant l'écran.

Cass plonge sur Flash pour lire l'écran et ses joues rosissent de plus belle. Apparement c'est bel et bien écrit qu'elle se doit d'embrasser Flash pour réussir son défi.

"Je vois... C'est le genre d'application avec des actions douteuses, je vais en télécharger une autre." grommelle-t-elle sans plus oser regarder le blond.

"Tu n'as pas envie de m'embrasser?" dit-il plus bas.

La situation qui me faisait rire tantôt me fait alors réfléchir, peut-être qu'elle en a envie, mais pas dans ces conditions.

Elle le regarde et leurs yeux se croisent, se lorgnent un long moment sans rien dire, même Flash rougit.

"Hm, hm... Je crois sincèrement que vous en rêvez tous les deux depuis un moment. Mais c'est clair qu'être poussé par un jeu, c'est moins cool."

Peter se lève et me tend la main.

"Viens voir Paige, y a des trucs très intéressants à voir dans la salle de bain."

Je souris et prends sa main avec entrain pour le suivre dans la salle de bain, laissant une Cassidy rouge pivoine et un Flash satisfait dans la chambre alors que Peter leur lance un clin d'oeil lourd de sous-entendus.

Flash Thompson.

Bon, peut-être qu'en effet j'en ai très envie. Peut-être qu'en effet je n'ai pas tourné autour de trois fille à la fois depuis plus d'un mois car... Car Peter m'a fait part de son ressenti sur les sentiments de Cassidy vis-à-vis de moi. Et si il dit vrai, il est possible que mes sentiments pour elle aient changés. Je fixe la porte de la salle de bain reliée à la chambre qui se ferme, j'espère pour lui qu'il fait sa propre affaire dans la salle de bain. Et qu'il va se recevoir une claque de la part de Paige pour m'avoir laissé dans ce pétrin.

Du calme, Flash. Combien de filles tu as déjà emballé? Un bon nombre, pourtant ce n'était pas si compliqué.

Mais combien de filles biens comme Cassidy as-tu déjà essayé de draguer? Très bien, aucune.

Elle baisse les yeux avant de me lancer un coup d'oeil, apparemment elle ne compte pas prendre la parole la première. Quoi que...

"C'est ridicule." dit-elle tout bas, "on se croirait en primaire quand on jouait à ces jeux idiots et qu'on devait embrasser celle ou celui qui nous plaisait. Les autres détournaient les yeux..."

"Mais il y en avait toujours un pour tricher et être certain qu'on le fasse réellement."

"Exactement." réplique-t-elle.

"Tu veux dire que dans l'histoire je suis la personne qui te plait?"

Elle soupire et se prend le visage entre les mains.

"Seulement si je le suis aussi pour toi."

"Je prends ça pour un oui."

Elle lève les yeux vers moi, une nouvelle lueur brille dans son regard.

"Simplement, j'imaginais autre chose..."

"Je sais, autre chose qu'un défi de ton portable."

Elle hoche doucement la tête, elle est si gênée, si timide, si adorable... Je me lève et prend sa main qu'elle saisi alors que je l'emmène à travers sa chambre. J'ouvre la porte vitrée dans laquelle se reflète son radio réveille qui indique qu'il est presque deux heures du matin et arrive sur le balcon. C'est peut-être idiot mais je veux créer une ambiance romantique dans laquelle elle sera à l'aise, dans laquelle elle se sentira bien et en confiance. Je ne veux pas qu'elle se sente oppressée par nos idiots d'amis cachés dans la salle de bain.

"Oublie ton portable et dis toi que j'en ai sincèrement envie depuis un moment."

Un sourire illumine son visage. Son teint est parfait, ses pommettes sont saillantes, ses yeux son légèrement humides et brillants tant elle est émue et de fines fossettes se creusent au coin de ses joues. Ses lèvres pleines m'appellent, je me tarde d'y gouter, de pouvoir analyser les différentes nuances émeraudes de son regard en la tenant au plus près de mon corps. Pourtant une partie de moi me dit que je ne mérite pas un fille pareille. Et une autre me dit que peut-être fera-t-elle de moi un homme meilleur.

Alors, lâchant ses mains, je saisis sa hanche pour l'attirer à moi et me penche vers elle. Ses yeux sont fermés et je murmure:

"Je peux t'embrasser?"

Avec un sourire elle souffle un léger oui. Je ne me fais pas prier et dépose d'abord délicatement mes lèvres contre les siennes pour finalement les emboiter ensemble et me lancer dans un doux baiser somptueux. Certainement le plus beau auquel j'ai jamais eu affaire.

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