Chapitre XII
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Paige wells.
En rentrant à la maison, j'entends des voix résonner en provenance du salon. Je m'approche à pas feutrés en ne voulant pas déranger quand j'entends mon nom dans la conversation. Soudainement je me raidis en regardant par la porte entre ouverte, je vois ma grand-mère qui fait les cents pas dans le salon avec le téléphone fixe à l'oreille. De là où je suis, je peux parfaitement voir son front plissé, ses soucils froncés et la lueur inquiète dans ses yeux.
"Comment vais-je faire? Si je ne peux pas payer cette dette, ils saisiront la maison... Je dois loger Paige, je dois la nourrir. Et si je ne peux pas répondre à ses besoins alors ils me l'enlèveront elle aussi car on dira que je ne suis pas une tutrice digne. Alors ils pourront m'enlever ma maison, mes bijoux, mon argent. Mais m'enlever Paige, c'est hors de question."
Je plaque une main sur ma bouche en me collant au mur pour ne pas qu'elle me voit. Si elle savait que j'ai surpris sa conversation au téléphone, elle se sentirait d'autant plus mal.
"Ce ne sont que des enfoirés! Sous prétexte que je suis une femme âgée ils se donnent le droit de me faire payer des sommes exorbitantes depuis plusieurs mois jusqu'à ce que je n'arrive plus à suivre pour avoir la maison en m'envoyer au home! Mais je suis en parfaite santé! Et j'ai une petite fille! Je ne peux plus suivre Gemma, je n'ai plus les moyens... Il va falloir que je trouve une solution ou je perdrai tout et ils auront eu ce qu'ils voulaient."
Elle termine ses mots d'une voix lasse, presque suppliante. Je l'entends continuer sa conversation avec son amie en parlant d'un potentiel travail à la bibliothèque pour elle mais ce ne sera toujours pas suffisant question finances. Je me rue dans le couloir en claquant la porte d'entrée pour faire mine que je viens seulement de rentrer maintenant et que je n'ai pas entendu une bribre de sa discussion.
"Grand-mère! Je suis rentrée." dis-je en essayant de masquer les tremblements de ma voix.
Je rentre dans le salon pour lui faire la bise alors qu'elle me lance un grand sourire. Derrière ce sourir forcé, je sais pertinemment qu'il se cache des larmes abondantes qui ne tarderont pas à sortir. En voyant cette expression sur son visage, je manque de m'écrouler en la prenant dans mes bras. Alors pour ne pas à lui faire dire quoi que ce soit, je l'embrasse rapidement avant de prétexter avoir beaucoup de travail à faire pour le lendemain et me diriger vers ma chambre. En partie, ce mensonge est la pure vérité, ce qui n'est pas forcément logique, je vous l'accorde mais autre chose me trote dans la tête. Si bien qu'il m'est impossible de me concentrer sur mon travaille; pas la peine de défaire mon sac ce soir. Mon premier réflexe est de prendre mon ordinateur portable qui attend bien sagement sur mon petit bureau et de l'ouvrir sur mes genoux en me posant sur mon lit. J'ignore l'appel du sachet de M&M's sur ma table de nuit qui est d'habitude mon meilleur compagnon alors que je m'installe sur mon lit avec mon portabl. Mex doigts sont bloqué à quelques centimètres au dessus du clavier alors que le curseur clignote dans la barre de recherche Google. Il faut d'abord que je sache ce que je veux réellement. Après un bref instant de réflexion, j'entre cette phrase avant de démarrer la recherche internet;
Cafés de New-York.
Des dizaines de propositions s'ouvrent à moi en quelques secondes. New-York est bondé de cafés tous les dix mètres, je n'ai pas de mal à en faire une liste chargée des plus proches de chez moi. Après avoir noté les différentes lignes de métro qui me mèneraient à chacun d'eux, je plie ma petite liste en refermant le portable avec un long soupir. Bien, ne perdont pas de temps. Je retourne dans le salon en regardant ma montre, il va bientôt être 17h30. Ce que je vais faire ne lui plaira certainement pas, elle a peut-être besoin de ma présence aujourd'hui à sa table pour lui remonter le moral et telle la mauvais petite fille que je suis, je m'apprête à lui fausser compagnie.
"Mamie Jody?"
Je la retrouve assise dans son fauteuil, les yeux rivés sur l'écran. Je tourne la tête pour fixer un cadre à ma gaucher et éviter de croiser ses yeux rougis; ça me ferait bien trop de mal et je culpabiliserais encore plus de la laisser seule ce soir.
"Je ne peux pas prendre le repas avec toi aujourd'hui, Cassidy a besoin de mon aide avec le cours de Physique... Je dois me rendre chez elle."
"Tu vas manger quelque chose là-bas?"
Je hoche la tête avant de me rendre compte qu'elle ne me regarde pas.
"Oui, oui sa mère va nous préparer la souper."
"Alors révisez bien."
Je ferme un instant les yeux à l'entente de sa voix faible. Je ferais tout pour l'aider, c'est certain. J'ai besoin d'elle, de cette maison... Elle est ma seule famille. Ce n'est peut-être qu'un coup de tête et le salaire que je gagnerai ne sera évidemment pas des masses mais au moins si elle prend ce travaille à la bibliothèque nous pourrons rassembler cet argent et vaincre les imbéciles qui essayent de placer la seule personne que j'ai dans un home alors qu'elle va plus que bien.
Je sors en regardant une dernière fois ma liste sur le papier et descends les marches en me rendant à pied à la station de métro la plus proche. Ce soir le soleil ne brille déjà plus alors que l'air est humide et froid, un temps tout sauf agréable. Je n'ai pas peur de dévoiler mes cheveux si longs à présent car il me couvrent du froid en retombant agréablement sur mes joues, réchauffant mon visage irrité par cette atmosphère.
Les nombreuses voies de métro se mélangent les unes avec les autres sur cette immense pancarte multicolore, trouvant la mienne je m'engouffre dans les couloirs venteux avec une certaine boule d'angoisse au ventre. Je n'ai encore jamais pris le métro New-yorkais avant et c'est peu dire que tous les wagons sont pleins à craquer. Le train arrive dans un boucan infernal en faisant crisser son armature contre les rails métalliques et faisant entrer en même temps dans un grand fracas une bourrasque de vent qui me décoiffe littéralement. J'essaye malgré tout de me glisser entre les gens, tous blasés, tirant une tête de six pieds de long. Je m'accroche à une barre de métal colorée dans un coin légèrement éloigné pour garder un minimum d'espace vital autour de moi. Les gens lèvent les bras et sont en sueur voir en nage, faisant régner dans les compartiments une odeur nauséabonde de transpiration et de déodorant aux multiples senteurs chimiques. Je grimace en leur tournant le dos pour regarder par la fenêtre; un grand vide. Tout ce que je perçois est un grand mur noir qui défile devant moi. C'est seulement à l'arrêt que je comprends pourquoi personne ne se tenait là où je suis en ce moment; au coup de frein, je me sens propulsée sur le côté en venant m'étaler sur un homme en costume cravate qui je se prive pas de ronchonner bruyamment. Bien... Après deux stations je suis arrivée à destination. Ce trajet de l'horreur sera le prix à payer tous les jours si je me vois être embauchée dans un des cafés de ce quartier mais bon, si ça en vaut la peine... Pourquoi pas?
Je soupire en me tardant de sortir de cette station bondée sans manquer de me faire marcher sur les pieds par la même occasion par une dizaine d'hommes et de femmes plus pressés les uns que les autres. Et puis je cherche un instant avant d'entrer dans le premier bâtiment qui ne m'a pas l'air trop louche...
Et je cherche encore.
Un et puis deux cafés qui ne veulent pas de moi.
On enchaîne avec un troisième, jamais deux sans trois! Je commence à désespérer de trouver un café qui voudra me recruter aujourd'hui. N'importe quel job! Je veux bien récurer les toilettes si il le faut.
Le café suivant porte le nom de "Creg's Coffee Club" d'où les trois C écrits en rouge sur les vitres. J'entre en regardant autour de moi, l'ambiance est plutôt sympathique, tout est dans les tons chauds, rouge, bruns, orange... J'aime beaucoup ce que dégage cet endroit. Alors je me poste devant le comptoir et attend que la jeune fille termine de prendre sa commande avant de la questionner.
"Bonjour, que puis-je faire pour vous?" dit-elle d'une voix absolument adorable.
Elle est petite avec de longs cheveux chocolats et une peau matte. Ses yeux son bruns, profonds, banales mais magnifiquement maquillés avec ses longs cils noirs et son fin trait d'eye-liner.
"Bonjour, j'aimerais voir le patron de l'établissement, si c'est possible bien entendu."
Elle me dévisage avant de hocher la tête, ce geste me fait rougir de honte, je me sens vraiment idiote sur le coup. Elle revient un instant plus tard avec un sourire aux lèvres suivie par jeune homme brun qui croise les bras. En me voyant, il sourit son tour et me tend sa main en me signant de m'approcher derrière le comptoir pour que je ne gêne pas les clients potentielles qui viendraient prendre commande.
"Salut! Je m'appel David... Et non, pas Creg,." dit-il en riant. "Je suis le fils de Creg et je tiens ce joli petit endroit. Qu'est-ce qui me vaut ta venue?"
Je le regarde un instant sans trop savoir quoi dire, c'est un garçon qui a l'air fortement à l'aise avec tous le monde et qui y va de but en blanc sans se prendre la tête. D'un certain côté, ça m'angoisse plus que ça ne me rassure.
"Et bien, je m'appelle Paige Wells. Je suis a la recherche du moindre travail dans un café et je..."
"Pour quelle raison cherches-tu du travail?"
Je cligne des yeux en le fixant alors qu'il vient à peine de me couper la parole pour me poser la seule question à laquelle je n'ai pas envie de répondre. Mais mon silence s'éternise et je risque seulement de faire mauvaise impression.
"C'est pour me faire un peu d'argent. Ma grand-mère avec qui je vis a des problèmes question finance en ce moment et j'aimerais lui donner un coup de main."
En décidant de choisir là vérité plutôt qu'un vulgaire mensonge improvisé, j'espère avoir retenu son attention. Mes yeux dérivent vers la serveuse qui se mordille les lèvres en perdant toute once de sourire de son visage. Je fronce légèrement les sourcils en la regardant avant de reporter mon attention sur le brun en face de moi.
"Bien. Tu es engagée."
"Quoi?" dis-je en m'étranglant en même temps que la jeune fille.
"Et bien? Il y a un problème?"
Je secoue négativement la tête en essayant de m'estimer heureuse.
"C'est allé un peu vite, je m'imaginais devoir avoir un entretien avec vous ou quelque chose de semblable..."
"Et moi je pensais que nous n'avions plus de place." dit sèchement la brune en fusillant le jeune homme du regard.
Un frisson me parcours l'échine tandis que l'expression de mon visage vire au cramoisi sans que ne puisse y faire quoi que ce soit.
"C'est vrai, mais cette petite semble avoir du potentiel."
Cette petite? Ce type doit avoir au maximum trois, voir quatre ans de plus que moi... Ne nous attardons pas là dessus, je hoche la tête en évitant de regarder la brune en face. La main de David se pose sur mon épaule alors que tout sourire, il m'annonce;
"Bienvenue chez C.C.C Paige! Tu commences ce week-end à partir dix-sept heures jusqu'à vingt-trois heures. Nous verrons la suite plus tard."
Et sur ces mots, il tourne les talons en jettant un oeil mauvais à la brune. Je prends un instant pour l'observer et vois alors que son badge énonce le nom de Grace. Et bien, il semblerait que je suis de trop aux yeux de cette fameuse Grace. Alors que je viens d'arriver, elle ne me porte déjà pas dans son coeur. En me sentant devenir plus légère, je sens ma bouche devenir pâteuse.
"S'il vous plait, je vous prendrais un café latte avant de partir."
Grace lève les yeux vers moi sous sa casquette noir imprimé du logo du café et me regarde tristement. Je fronce les soucils alors que tas de questions affluent dans mon esprit. Que ce passe-t-il avec cette fille? A-t-elle réellement peur que je lui prenne sa place? Elle me sert ce dont j'ai besoin et je la salue par pure politesse avant de sortir du café. C'était vraiment trop facile, bien trop facile. Malgré tout il est déjà vingt heure passé la demie, je me décide à rentrer chez moi et pourtant l'idée de reprendre le métro ne m'enchante pas. Je me laisse aller sur un banc devant le café en soupirant, cette soirée est désastreuse à mes yeux. Pourtant ne devrais-je pas être heureuse d'avoir trouver quelque chose aussi facilement? Ça doit-être justement parce que j'ai atteind mon but avec beaucoup trop de facilité que je suis quelque peu déçue. Je fais partie de genre de personnes qui aime avoir tout donné pour être récompensée. Je veux avoir accompli quelque chose, avoir fait des efforts pour l'obtenir. Quelque chose que je me vois recevoir gratuitement et sans travail derrière à mes yeux ne vaut rien.
Je serre mon menteau contre moi dans la tentative de me réchauffer quand mon téléphone vibre dans ma poche. Peter. Je décroche sans plus attendre.
"Allô? Peter?"
"Paige, salut. Je ne te dérange pas?"
"Non, ne t'inquiète pas. Qu'est-ce qu'il se passe?"
"Avec Flash on allait aller au Midnight Restaurant. Je me demandais si tu voulais venir avec nous."
Je reste un instant pensive sans répondre en pensant à ma grand-mère qui est seule chez moi, à mon estomac vide et... À Peter.
"Oui, bien sûr. Mais, Peter?"
"Oui?"
Je serre mes doigts sur le cellulaire en baissant les yeux. La raison pour laquelle je suis ici me revient à l'esprit; ma grand-mère et l'argent qu'elle doit rendre si nous ne voulons pas être séparées. Une larme s'échappe de mes yeux contre mon gré et s'en va rouler le long de ma joue alors que je fixe le bout de mes chaussures. Faible, je me sens faible. Je suis terrorisée à l'idée qu'on me l'enlève elle aussi. D'une voix tremblante je dis;
"Tu peux venir me chercher s'il te plait?"
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