Chapitre 89 #Bonus Harry ⊙

« On s'estime mais les doutes s'estompent » -Nekfeu.

[Pdv : Harry]

Harry- Des dizaines de feuilles, des vingtaines de dessins, mais toujours le même. Leur visages, leur regards. Elles.
Y en avait partout, des morceaux de papiers à perte de vues, tous étalés sur le sol de ma chambre. J'griffonais sale, j'avais la haine.
Elles me manquaient c'était sûr, et j'avais juste besoin de revoir leur visages, leur peine, je voulais imprimer ça dans mon sale crâne. Je m'en voulais à mort, j'avais peur et j'avais raison.
Le fusain que j'avais utilisé m'avait noircit les doigts ainsi que la plupart de mes feuilles. C'était leur visages que je dessinais, c'était ma profonde tristesse que je refoulais, que j'étalais sur des morceaux de papiers. C'était automatique, presque réalisé sans la moindre réflexion. Je faisais ça sans réfléchir, souvent poussé par des centaines de pulsions en même temps.

Harry- J'étais un ado de quatorze ans renfermé, un peu geek sur les bords, mais surtout dans son monde. J'avais besoin de rien et surtout de personne. J'étais solitaire, mais intelligent. Je n'avais pas vraiment d'amis donc, et ce que je détestais le plus c'était le genre de personne qui m'entouraient à l'école. Tous obnubilés par un groupe populaire, tous à leurs ordres comme de minables toutous, j'avais l'impression que le monde autour de moi n'était qu'inconscient. Ils idolâtraient des personnes sans réelle raison, juste parce-qu'ils avaient réussis à se faire un « nom ».
Et ce genre de personne c'était exactement le genre de mon frère, Sacha. Il en avait de partout à ses pieds, accrochées à ses épaules, collées à ses baskets en permanence, pas une minutes pour lui. Vous savez de quoi je parle, pas vrai ? Les filles. De vraies groupies totalement niaises et sans grand intérêt. On était donc pas vraiment du même monde, on le savait tous les deux, et on se détestait pour ça. On se faisait honte mutuellement au final. Quand j'y pense je me demande si je détestais vraiment ce qu'il était ou ce que l'école lui donnait comme image. Lui était bon, c'est les autres qui le rendaient mauvais. Bref.

Harry- J'disais donc que je dessinais sans cesse leurs visage pour me rappeler à quel point c'était douloureux de les avoir perdues. Toute la ville avait été mise au courant très rapidement et ce que ça m'agaçait de recevoir du soutien de gens qui jusque là ne ressentait que du mépris pour ma personne. Je sais pas ce que ça leur rapportait au final. Du bien-être peut-être. Peut-être bien qu'ils avaient meilleure conscience après ça.

Harry- M'enfin, j'imagine que se donner bonne conscience est plus facile que de vraiment partager la douleur. De toutes façons ça ne se partage pas, pas vrai ? Personne n'avait autant mal que moi à cette époque, parce-que je me sentais coupable de leur disparition.

?- Pourquoi donc cette culpabilité Monsieur Styles ?

Harry- Parce-que tout est de ma faute.

?- Comment ça ?

Harry- Je les avais amenés dans un fast-food pour me faire pardonner de quelques petits trucs sans grande importance, des broutilles, puis ça me faisait plaisir au fond. Crystal, la plus vieille de mes deux sœurs, n'était pas vraiment pour mais elle nous a suivit avec Sarah, parce-qu'elle n'avait pas eu vraiment le choix. La cadette quant à elle, était vraiment excitée d'y aller et il ne m'en fallait pas plus pour être heureux moi aussi.
J'avais l'impression de faire un bon geste, je me sentais meilleur, ça profitait à mon bien-être, j'étais un bon grand frère, le meilleur même. Du moins c'est ce que je pensais, je pensais être heureux après ça, vraiment.

Harry- J'étais tout de même fatigué car la nuit précédente avait été courte, mais j'avais tenu à les amener, pour me faire pardonner de quelques trucs. Je l'ai déjà dit ça, non ? Bref.

Harry- Si j'avais su, j'aurais plus dormi la veille, et sinon je ne les aurais pas amenées à ce fast-food. Tant pis, je me serais fait pardonné une autre fois. C'était la pire chose que j'aurais pu faire, les amener ce jour-là, et je l'ai fait, parce-que je pensais que ce serait un moyen de me faire pardonner vraiment. Foutaises.

Harry- Pendant que toutes les deux s'amusaient dans le parc de jeu installé exprès dans le fast-food, j'avais passé mon temps à manger et boire comme un gros, histoire de me donner de l'énergie afin de ne pas m'assoupir. Mais tout ce que je voulais éviter, arriva. J'ai finis par m'endormir le nez dans mon BigMac, comme un abruti.

?- Et ?

Harry- Et quand je me suis réveillé j'avais la haine de voir que toute la salade s'était collée à ma joue et qu'en plus de ça plus personne n'était dans cette aire de jeu depuis des lustres. Absolument personne en fait, pas même mes sœurs. Elles avaient disparues. J'ai commencé à paniquer à ce moment précis. Et c'est aussi à ce moment là que ma vie s'est arrêtée pour de bon.

Harry- J'ai questionné tous les employés, absolument tous. Pas un n'a su comment, pourquoi, où et avec qui elles étaient parties. Je les avais laissé, et c'est tout ce que je ne voulais pas faire au départ. Je les ai abandonnés bordel.

?- Écoutez, ce n'est pas de votre faute Harry, vous n'y pouviez rien au fond.

Harry- Bien sûr que si je pouvais y faire quelque chose ! Criais-je en tapant du poing sur la table, ce qui fit sursauter celle qui se tenait face à moi.

Harry- Bien sûr que si, chuchotais-je en me calmant.

Harry- Bien sûr que si, répétais-je une nouvelle fois comme me persuader de mon mal être actuel.

Harry- Les années suivantes, je n'ai pas arrêté de les dessiner, comme si je voulais garder trace de leurs moindres traits. Je voulais les connaître par cœur et ne jamais les oublier, parce-qu'au fond c'est de ma faute si elles ont disparues. Comment j'ai pu les laisser ? Comment, putain.
Tous les jours je repense à ce fameux midi, ça me ronge de jour en jour, et je n'ai jamais remis les pieds dans cette aire de jeu, ni dans ce fast-food. J'aurais peur de les perdre à nouveau.

?- Comment ça ?

Harry- J'ai peur qu'en entrant là-bas à nouveau, je les perde là dedans, dans mon cerveau. J'ai peur qu'elles s'évaporent de ma mémoire, j'ai peur de les effacer.
Et j'avais beau détester mon frère c'est le seul qui m'a aidé. Étonnement quand il a su ce qu'il s'était passé, il ne m'a pas plus enfoncé que je ne l'étais. Faut dire que ça aurait été difficile vu le niveau auquel je me trouvais à ce moment. J'étais vidé, je ne voulais plus jamais être heureux, plus jamais. Et il n'a pas été agressif comme toutes les fois où il me parlait, il m'avait aidé.

Harry- Il passait tous les jours dans ma chambre, faire un petit coucou, histoire de dire que personne ne m'oublie contrairement à ce que je pourrais penser. Je n'ai jamais répondu. A aucun de ses bonjours. J'étais vraiment con, non ?
En tant que frères jumeaux, c'est dur de se sentir aussi loin l'un de l'autre alors qu'on a été collés pendant de longues années ensembles. L'adolescence nous a séparé en quelques sortes.

Harry- Plus tard, j'ai jamais vraiment ressenti le besoin d'estimer ses dires et ses actions, comme il avait pu le faire avec moi. Son boulot m'était plus ou moins inconnu et j'avais décidé de me plonger dans les études, comme je l'ai toujours fait, depuis petit. Le journalisme, c'était presque une vocation. Je voulais savoir la vérité, j'avais besoin d'enquêter, de découvrir, et de ne plus jamais dormir. De ne plus jamais oublier ou laisser les autres, je voulais bien faire, pour une fois.

Harry- Quand mon frère a disparu à son tour, quelques années plus tard encore, j'avais l'impression que la vie m'en voulait. Puis, j'ai décidé d'enquêter. Pour de bon.
J'avais fini mes études, et je m'étais longtemps penché sur l'histoire de ces disparitions de jeunes filles. Je pensais à mes sœurs sans arrêt, parce-que y a que ça qui arrivait à me motiver, il fallait que je persiste jusque au bout. Même si mon frère venait de me quitter lui aussi.

Harry- Quand quelques mois plus tard, j'ai appris que c'était une affaire de gang, et que souvent le nom de « Ruiz » ressortait, je voulais en savoir plus, c'était viscéral. Alors j'ai compris ce que faisait mon frère à l'époque: il enquêtait. Comme moi. Il était rentré dans ce service spécial pour m'aider, pour ne plus que je m'en veuille. Il voulait savoir ce qu'étaient devenues mes sœurs. Et il était mort pour ça. Le puzzle s'assemblait pièce par pièce. Y avait plus qu'à. C'était mon tour.

Harry- J'ai trouvé des informations sur mes sœurs, et puis elle, sa fille...

?- Sa fille ? Me coupa la dame.

Harry- Oui, elle, sa fille. Carrie.

Cette vieille psychologue secouait la tête aussi vite qu'elle put, comme si c'était évident. Elle décrocha un sourire pour m'encourager à continuer mais je n'en avais ni la force, ni l'envie. Ce genre de thérapie c'est vraiment minable. J'aurais pas dû écouter Anderson, de toutes façons elle dit toujours des conneries.
Et moi je veux pas qu'on sourisse lorsque je raconte mon histoire, je veux pas avoir l'impression de parler seul et qu'en plus de ça on trouve mon horrible vie intéressante.

Harry- Et puis vous connaissez la suite. Drogue, tabac, trafic, parce-que personne ne croyait un mot de mon histoire. J'ai finis dans la rue comme une pauvre sous-merde et je n'ai réussi à m'en sortir que par moi-même. Parce-que c'était la vérité, j'étais seul, sans ressources, sans famille. J'avais absolument rien, il ne me restait que le nom de mon frère à porter. Je m'étais adapté à sa vie au final.

Harry- Rien n'est heureux dans tout cela, et l'utilité de tout ça ne m'interpelle pas. On arrête.

?- Comment ça, on arrête ?

Harry- Quoi, comment ça ? Y a pas de doutes à la chose, tout le monde est brisé, mais personne ne le dit parce-qu'en vérité personne partage vraiment ce qu'il ressent. On est seuls je l'ai déjà dit, et personne ne survit dans l'épreuve de la vie s'il est seul. Absolument personne... Sauf peut-être elle...

Harry- Mais vous savez quoi ? Le plus important dans tout ça c'est que je ne doute plus d'une chose : il est temps pour nous de se retrouver et de partager, comme on l'a toujours fait. On doit se réunir, encore et encore, jusque cela se termine.

?- Mais pour votre frère, et vos sœurs, comment vous avez survécu à tout cela ?

Harry- On ne survit pas éternellement. J'ai juste vécu, non sans mal, et si c'est tout ce que vous voulez savoir, il est temps pour moi de m'en aller, survivre pour de bon cette fois-ci.

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Yo tout le monde c'est Queenie ! (oui c'est ma nouvelle entrée ça claque, merci Blind!)

Voilà, court chapitres, je pense que le prochain réunira plusieurs points de vues, en attendant dites ce que vous pensez de ce qu'ont dit May et Harry, pourquoi ils parlent à une femme peut être vous avez une idée, et moi je vous retrouve pour Blind juste après et voilàààà

Bisous mes hlelous ! Xx Chloé

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