Chapitre 18


>> Wrapped around your finger, 5 seconds of summer.

L'eau coule le long de mon corps, me réconforte. Elle tombe en un fracas sur le carrelage de la douche, et remonte vers moi sous la forme de vapeur . Elle s'accroche sur la porte en verre de la cabine, et s'écoule sous forme d'infimes gouttes.

L'odeur de mon shampooing imprègne la petite pièce, ma peau. Je coupe l'eau. J'enveloppe mon corps d'une serviette en coton et me poste devant le miroir. D'un geste de la main, j'essuie la buée accumulée sur la surface lisse. J'essuie avec soin ma chevelure.

Une fois habillée, je me maquille légèrement et descends avec lenteur les escaliers. J'ai beau ne plus être collée à ma béquille, mes jambes me font encore souffrir par moment.

- Nia ? Tu viens déjeuner ? Me demande ma mère de la cuisine.

- J'arrive ! Je lance.

Je traverse le salon, et vient m'asseoir autour de la table. Pendant que je mange mon bagel au fromage de chèvre, je remarque les regards insistants de mes parents. Je finis par lever la tête de mon assiette et leur adresser un regard interrogateur. Ma mère pose sa fourchette pleine de petits pois, et commence d'une voix posée :

- Ca va le lycée ?

- Oui ... Je réponds méfiante.

- Tu t'es fait des amis ? Me questionne à son tour mon père.

Je pose les yeux sur lui.

- Ouais.

Je ne suis pas stupide, je sais que ces questions cache quelque chose. Je pose mon bagel.

- Bon, déballez !

Ma mère soupire.

- Nous sommes ravis ton père et moi, que le lycée se passe bien, et que tu te sois bien intégrée ...

- Mais ? Je la coupe.

- Le groupe que tu fréquentes, est-t-il ... Sûr ?

Je plisse les yeux.

- Hein ?

- Ce que ta mère essaye de te dire, c'est soit prudente, tu es beaucoup sortie avec eux cette semaine.

- Surtout avec ce Will... Enchaîne ma mère.

Je pose les coudes sur la table et soupire.

- Bon, c'est quoi le soucis ? Je comprends pas, je me fais des amis, je sors, et quoi ?

- Nia, inutile d'élever le ton! On s'assure seulement que tu ne subis pas de mauvaise influence de leur part. Dit calmement mon père.

- Parce que quoi ? Pour une fois depuis des mois je m'amuse ?

- Nia ... On sait que depuis ton accident et ce qui est arrivé à...

- Stop ! Je vais faire un tour ! J'en ai assez entendu !

Je me lève de table, sans oublier d'emporter mon bagel, et sors de chez moi. Malgré les protestations de mes parents. Je monte au volant de la voiture de ma mère et enclenche le moteur.

Je roule dans le quartier, sur les nerfs. Je n'en reviens pas, je vais bien, du moins, mieux, et pour eux, il s'agit d'un signe de détresse de ma part. Et oser me parler de ce que j'ai traversé pendant ces derniers mois ! Ils ne savent rien !

Au bout de quelques minutes, je m'arrête sur un parking. Les mains agrippées au volant, je réfléchis. Je fais quoi maintenant.

La réponse arrive sans effort, et je reprends la route. Celle menant à l'hôpital.

Tout le long du trajet, je me suis demandée si c'était une bonne idée. Retourner là bas. Mais j'ai besoin de voir Will. Je ne sais pourquoi, mais j'en ai besoin. Il représente mon nouveau départ dans la vie, un pilier. Une personne avec qui je me sens bien, et Dieu sait à quel point ça fait longtemps que je ne me suis pas sentie bien avec quelqu'un.

J'ai également besoin de dire au-revoir. Au revoir à l'ancienne moi, que j'ai laissé sur ce lit d'hôpital. Tourner pour de bon la page. Je ne veux plus avoir peur de mon passé, des événements qui m'ont formée, brisée, fait grandir. Alors, les yeux rivés sur la route, je m'y conduis. J'espère que Will y est toujours.

Lorsque je pénètre sur le parking de l'hôpital, mon coeur se serre. Je coupe le moteur, et d'une main tremblante, j'ouvre la portière. Un pied à l'extérieur, je reprends mon souffle, et tente de calmer mon rythme cardiaque.

Mes pieds foulent le béton, et plus je marche, plus je prends de l'assurance. Même quand le grand escalier menant à l'entrée se présente devant moi, je ne cille pas. Je prends une grande inspiration et monte une à une ces satanées marches. Je pousse les portes et l'accueil se présente devant moi. Quand je suis sortie de l'hôpital quelques semaines plus tôt, j'étais tellement dans ma bulle, que je n'avais pas prêté attention à cet endroit. La secrétaire me jauge derrière son bureau. Je m'avance vers elle. Je me retiens de rire en remarquant son air si sérieux, alors qu'elle est ridicule, on ne voit que sa tête dépassée du bureau. Elle plisse les yeux, et pince ses lèvres déjà très fines.

- Vous venez pour qu'elle raison mademoiselle ? Visite d'un proche ?

Prise de court, je confirme. Elle tape quelque chose à son ordinateur, puis relève les yeux vers moi.

- Qui venez vous voir ?

- Euh ... William Stone, je lâche.

Ses doigts défilent sur le clavier, et sachant pertinemment qu'aucun patient de ce nom, figure dans son registre, je décide de filer vers l'escalier menant à l'étage supérieur. J'ai juste le temps d'entendre d'une voix lointaine et éraillée :

- Je ne trouve aucun William Stone dans la liste des patients, mademoiselle, voulez- vous bien m'épeler le nom ? Mademoiselle ? Mademoiselle ?

Je grimpe quatre à quatre les marches de l'escalier, espérant fuir le plus loin possible de cette peau de vache.

Lorsque je suis sûre d'être assez loin, je m'arrête devant le tableau des services. Dans lequel se trouve Will ? Il joue pour les enfants, réfléchis Nia ... Pédiatrie ? Ca se tente. Je m'apprête à appuyer sur le bouton de l'ascenseur, quand mes yeux restent scotchés sur un groupe de mots, "soins intensifs", mon coeur se serre quand je reconnais le service qui m'a remise sur mes jambes. Je rentre alors dans l'ascenseur et appuie sur une touche.

Les portes s'ouvrent quelques secondes plus tard. D'un pas assuré, je m'aventure dans le couloir qui ne m'est pas inconnue. Je ralentis mon allure quand je reconnais la porte de la salle de rééducation. Elle est ouverte, je peux donc regarder sans mal à l'intérieur. Mon coeur manque un battement quand je vois les deux barres parallèles au milieu de la salle, ainsi que les fauteuils roulants alignés contre le mur. Mes jambes tremblent, et des souvenirs envahissent ma mémoire. Je me souviens de la douleur que je ressentais dans mes genoux, et qui remontait jusqu'à ma colonne vertébrale. Mes bras qui me faisaient souffrir, tant ils étaient fatigués de me porter. De mes mains moites qui glissaient sur les barres. Je me souviens de ma détermination, je ne supportais pas le fait de ne pas pouvoir marcher, rien que le fait de ne pouvoir tenir sur mes pieds m'était insupportable, impensable. Je me souviens des mots rassurants, positifs, de mon médecin, de mon infirmière, pourtant je ne les écoutais qu'à moitié.

- Que cherchez vous mademoiselle ? me demande une voix grave.

Je me retourne d'un geste vif vers elle, et tombe nez à nez sur un des kinés du service que je reconnais. Je baisse la tête, et d'un pas rapide quitte le service. Je trouve tout de même assez de courage pour dire :

- Je cherchais mon grand-père, il doit être dans sa chambre. Je vais me débrouiller, merci !

Je déambule dans les escaliers, les couloirs, suivant le plan qui me mène aux services des enfants. Je souris quand je passe devant le petit salon où je m'étais endormie, puis réveillée aux côtés de Will. A cette époque je ne me doutais pas qu'il deviendrait un ami, à vrai dire, il m' insupportait. J'étais jalouse de sa santé.

Je monte un dernier escalier, à bout de souffle, et ressent un sentiment mélangeant la joie et le soulagement quand je crois entendre quelqu'un grattait les cordes d'une guitare. Je me guide dans le service grâce à la mélodie, et finis par trouver ce que je cherchais. Will.

Il est assis sur un tabouret en plastique rouge, sa guitare sur les genoux, jouant un air doux au petit groupe d'enfants se trouvant devant lui. Je souris en regardant un à un les visages des enfants, tous sont sous le charme. Mais mon coeur se serre quand je devine sous certains tee-shirts des électrodes, sur des bras frêles des perfusions, des traits fatigués ... Ma contemplation s'arrête aussitôt quand j'entends une jeune infirmière, assise avec les enfants me demander si j'ai besoin d'un quelconque renseignement. Tous les regards se tournent vers moi, y compris celui de Will. Celui-ci s'illumine quand il croise le mien.

- Nia, qu'est-ce que tu fais ici ?

Son sourire est contagieux, et je m'avance en souriant dans la petite salle.

- Eh bien, je suis venue te donner un petit coup de main, si les enfants sont d'accord bien sûr. Je ne joue pas très bien de la guitare, mais je sais chanter.

Will me regarde, et acquiesce, puis se tourne vers les enfants.

- Alors, vous êtes d'accord, elle reste, Cody tu en dis quoi toi ?

Un petit garçon, au crâne dépourvu de cheveux me fixe avec de grands yeux bleus, un grand sourire aux lèvres.

- Oh oui ! déclare Cody.

Une petite fille se lève et marche vers moi d'un pas mal assuré, et tribuche. Je la rattrape juste à temps. Agrippée à l'un de mes genoux, elle me dévisage, pleine d'admiration dans le regard. Je craque littéralement.

- Tu ressembles à une princesse, me chuchote la petite fille.

Je ris.

- Pas plus que toi, tu t'appelles comment ?

- Clara ! me dit fièrement l'enfant.

- Eh bien Clara, tu veux que je reste un peu avec vous ?

- Oui !

Je la prends dans mes bras et l'emmène jusqu'à l'infirmière. Puis, je me retourne vers Will, je remarque alors qu'il a installé un tabouret bleu électrique à ses côtés. Je m'y installe. Il me lance un regard complice, et lance aux enfants :

- Alors vous voulez que Nia nous chante quelque chose ?

Des dizaines de "oui" aiguës se font entendre, et je souris de plus belle. Je comprends maintenant pourquoi Will aime jouer devant ces enfants, ils sont géniaux. Pleins d'énergie.

- Nia, c'est à toi de jouer, me glisse Will, avec un clin d'oeil.

Je pose mes mains à plat sur mes cuisses, et réfléchis à une chanson douce. Je me mords la lèvre inférieure quand je pense avoir trouvé mon titre. Puis souris.

- J'ai !

Will se penche vers moi, mais je l'envoie balader.

- Non, tu vas devoir suivre ! Je lui réponds, taquine.

Il fait mine de bouder, et des rires retentissent dans la salle.

- Ok ... " Throwing rocks at your window at midnight, you met me in your backyard that night, in the moonlight you look just like, an angel in disguise, my whole life seemed like a postcard ... "

Je commence à chanter le premier couplet, et je remarque que les enfants sont suspendus à mes lèvres. Je suis sur le point d'entamer le refrain, quand Will me surprend avec un enchaînement d'accords qui sonne incroyablement juste, et sa voix.

- " You were mine for a night, I was out of my mind. You were mine for a night, I don't know how to say goodbye..."

Je reste bouche bée, non seulement car il connaît la chanson, mais aussi car il a une voix digne des dieux de l'Olympe. Elle est puissante, douce et légèrement éraillée sur le fond. Je suis en admiration. D'un regard, il me sort de ma bulle, et m'encourage à poursuivre. Nous chantons alors ensemble le reste du refrain :

- " Making all our plans in the Santa Cruz sand that night, I thougt I had you in the palm of my hand that night . Screaming at the top of my langs, till my chest felt tight. I told myself that I'm never gonna be alright... "

Il continue alors  par un solo de guitare, et enchaîne, seul, avec la fin du refrain, sous nos yeux ébahis :

-" You had me, wrapped around your finger.  I'm wrapped around your finger, I'm wrapped around your finger ..."

Lorsqu'il me regarde de nouveau, je réussis à retrouver ma voix, et termine la chanson avec lui. Quand le dernier accord retentit, des applaudissement nous parviennent aux oreilles, et je souris de toutes mes dents. Du coin de l'oeil, j'observe Will. Il est lui-même en train de me regarder, son célèbre sourire en coin sur le visage. Je me décide à le regarder en face, son sourire s'élargit, et j'articule " Tu assures ! Mais sérieux, tu la connais cette chanson ?!". Il s'exclaffe, et après un dernier regard, se reconcentre sur sa guitare.

Nous jouons encore une heure, enchaînant les chansons, chantant de temps en temps acapella pour ma part, quand Will ne connaît pas la chanson que j'ai choisi, mais il se débrouille toujours pour m'accompagner. Sa voix est magique, et je crois que je l'ai beaucoup plus réclamer que les enfants.

                                         ***

Will éteint la lumière de la petite salle, et ferme la porte rose. Quand on se retrouve face à face, il esquisse un sourire.

- Je suis content que tu sois venue, c'était géniale.

- Oui, j'ai adoré, les enfants sont incroyables.

- Alors, t'as eu la réponse à ta question, tu sais pourquoi j'aime cet endroit maintenant ?

Je fronce légèrement les sourcils, surprise.

- Tu t'en souviens ? Je lui demande d'une voix presque inaudible.

Il sourit.

- Et comment, c'était la première fois que tu parlais autant, et tu étais dans mes bras, ça s'oublie pas ça ...

Il termine sa phrase en entamant le couloir, sa guitare sur le dos. Quand à moi, je reste clouée sur place, sonnée par ce qu'il vient de dire. Il stoppe sa course quand il remarque que je ne suis plus à ses côtés. Il se retourne, s'avance vers moi, m'attrape les mains.

- Allez, viens .

                                                       ***

Nous sommes sur le parking, devant ma voiture, je suis en train d'ouvrir la porte, quand Will m'arrête.

- Ce soir il y a une fête chez un gars de l'équipe, Sarah et les autres y seront, tu viens ?

Je le dévisage. La lumière du soleil de fin d'après-midi l'illumine, il est très beau. Je ne peux ignorer la lueur d'espoir que je vois dans ses yeux. Je m'installe au volant, ferme la portière, enclenche le moteur, puis baisse la fenêtre. Son incompréhension me fait rire.

- Quelle heure ? Je demande, un grand sourire aux lèvres.




Voilà pour le chapitre 18, j'espère qu'il n'y a pas trop de fautes, et qu'il vous a plu ! Avis ?
Je tenais aussi à vous remercier d'avoir dépassé les 3k lectures, c'est juste énorme ! Merci pour tout ! ❣









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