Nid de guêpes


Adrien rentra chez lui et jeta ses affaires de cours sur son lit, en même temps que lui-même. La tête dans le coussin, il agrippa les couvertures avec force. Adrien n'arrivait plus à contenir sa colère et sa frustration. Savoir que Chloé Bourgeois avait kidnappé son amie mais qu'il n'avait aucun preuve pour l'accuser, et cet air narquois sur le visage de la fille du maire l'avait rendu fou. Il avait l'impression d'être seul face au monde entier. Chloé était populaire et très médiatisée,  la moindre action à son encontre allait inévitablement lui attirer des ennuis. Et il n'avait plus son alter ego pour agir à sa place. Pourtant Chloé était la seule personne à savoir où se trouvait Marinette, mais aussi, et c'était bien cela le plus terrible, la seule personne à pouvoir l'aider à la retrouver.

 Adrien s'assit sur le rebord de son lit. Il fallait qu'il réfléchisse. Le retour de Chloé bourgeois à Paris devait être une opportunité pour retrouver Marinette, il devait absolument retrouver son calme et réfléchir à une stratégie. Toute attaque directe n'aurait qu'un effet négatif, il devait être plus malin qu'elle. 

- Mari ...murmura t-il, le visage enfoncé dans l'oreiller. 

- Oui Adrien ? répondit  la douce voix de Marinette quelques secondes plus tard.

- Il faut que je te retrouve, absolument ...

- Je sais Adrien. dit-elle d'un ton qui se voulut rassurant. 

- Dis-moi ou tu es.

- Tu sais bien que si je le savais ...

- Un signe, un indice, une odeur, un son, dis-moi tout ce que tu ressens.

Un léger silence s'installa, Marinette était dans ses pensées et Adrien lui laissa le temps d'analyser son environnement une fois de plus. Elle se concentra. Elle pris une profonde inspiration et ferma les yeux pour analyser toutes les particules que lui permettait son odorat. Elle tendit ensuite son oreille au maximum et se concentra sur tous les sons, même infimes, qui pouvaient être perçus par son tympan. 

Malheureusement, elle ne tira rien de plus de cette énième analyse. 

- L'odeur de cire d'abeille, le son étouffé d'un rire féminin, le bruit lointain de la voix du Papillon par moment ... Je t'ai déjà dit tout ça.

- Tu ne comprend pas Mari ... Je suis entrain de devenir fou ... répondit Adrien en relevant brusquement la tête du coussin. 

- Adrien, je ... si tu veux que j'arrête de te parler ...

Au fond d'elle, Marinette espérait qu'Adrien ne lui demande pas de stopper leurs échanges psychiques car c'était bien la seule chose qui la maintenait encore en vie, jour après jour, chaque minute passée dans cette prison. La solitude, elle ne pourrait y faire face. Elle n'aurait pu s'y résoudre. Mais si Adrien lui avait demandé, évidemment elle se serait exécutée, car rien n'était plus important à aux yeux de Marinette, et ce depuis plus de 6 ans, que le bonheur de Adrien Agreste. 

- Non ! Surtout pas Mari ! Ce que je veux dire c'est que si on m'enferme en hôpital psychiatrique, j'aurais encore moins de chance de te retrouver ... 



Adrien n'eut pas le temps d'entendre la réponse de Marinette que Nathalie frappa à sa porte.


- Adrien ? Votre père veut vous parler. Dit-elle à travers l'entrebâillement. 



Adrien savait pourquoi son père avait subitement envie de lui adresser la parole. Il se traina péniblement jusqu'à son bureau. Son père l'attendait, les mains croisées derrière le dos et le regard sévère.

- Ca suffit les bêtises Adrien, qu'est ce que c'est que ce torchon ? 

hurla t-il, les traits tendus et la mâchoire crispée de rage. Il lui tendit un magazine de presse à scandale, avec sa photo en couverture. En énorme police de caractère était écrit « Adrien Agreste. La descente aux enfers ». Adrien n'eut pas envie de le lire, le titre lui suffisait amplement pour savoir de quoi il s'agissait. La photo n'était pas très avantageuse non plus. On voyait Adrien en gros plan, le visage creusé, les cernes apparentes, regarder dans le vide.

- Est-ce que tu te drogues ? Comment veux-tu que les maisons de haute couture ait envie d'une égérie pareille ? Tu veux détruire l'honneur de notre famille ? Pitoyable ! Et voila que tu parles tout seul maintenant ? Je t'avais pourtant prévenu que je ne voulais pas que tu aies de relations amoureuses. Voila ce que tu es devenu ? Tu me déçois beaucoup Adrien. 



Gabriel Agreste s'approcha de son fils et releva son menton vers lui. Il l'observa, les yeux vers le bas, sa bouche grimaçant légèrement trahissait son dégout.

- Le teint terne, les yeux cernés, les cheveux hirsutes, la barbe mal taillée. Si tu voulais ressembler à un clochard c'est réussi, bravo !

- Marinette est vivante, père, je ... 



Avant qu'il ne put terminer sa phrase, Adrien ressentit une violente douleur à la joue. Son père venait de le gifler. Et pas une petite pichenette. Une vraie gifle qui siffla dans l'air comme une sanction. Comme une flèche qui avait atteint sa cible.

- Je te prie d'arrêter immédiatement de prononcer le nom de cette fille ici ! Elle est morte Adrien. Fais-toi une raison et ressaisis-toi ! J'attend mieux de toi ! 

s'exclama Gabriel. 

 On pouvait aisément lire l'agacement du patriarche de la famille Agreste dans sa gestuelle et dans les expressions qui paraissaient sur son visage. Lui d'ordinaire si inexpressif, son énervement à l'égard de son fils était tel qu'il avait bien du mal à le contenir. Entendre le nom de cette fille de boulanger raisonner dans sa maison lui avait fait perdre son sang-froid. Même dans le ton de sa voix, habituellement monocorde, on pouvait sentir son impatience. Cette fille avait complètement changé son fils, et surtout, elle avait changé l'emprise qu'il avait sur son fils. Gabriel songea qu'une fois de plus, c'était le laxisme dont il avait fait preuve à l'égard des fréquentations d'Adrien qui l'avait conduit au fond du gouffre. Son devoir en tant que père, était de prendre les décisions qui s'imposaient pour le bien de son fils.  Ce fils, planté là devant lui, l'air désespéré et hagard, qu'il ne reconnaissait plus et qui avait visiblement perdu l'esprit. 

Adrien n'osa dire un mot devant l'autoritarisme dont faisait preuve son père par moment. Contrôler sa vie, c'est tout ce dont Gabriel Agreste était capable envers son fils. Adrien Agreste avait beau avoir 20 ans, face à la colère de son père, il était encore un enfant. Tiraillé entre le respect qu'il avait pour lui, et l'envie de défendre la fille dont il était amoureux.

Observant son fils, Gabriel reprit, le ton de sa voix avait toujours du mal à reprendre un timbre normal.  

- Le directeur de l'université m'a appelé il y a 2h. Le Maire de Paris m'a appelé aussi. Voila que tu deviens violent en plus ? Tu as agressé la fille du maire ! C'est très grave, Adrien ! Elle porte plainte contre toi. Tu portes désormais sur toi le déshonneur de toute notre famille, de notre marque. J'ai honte de toi Adrien. Tu me déçois énormément. continua Gabriel.

 

Adrien ne répondit pas. Il garda sa paume sur sa joue endolorie, le regard rivé sur le sol.


- J'ai appelé le Dr Mariotti. Il t'as réservé une place à l'institut Bellevue. Nathalie va t'aider à préparer tes affaires car tu pars demain matin. conclu Gabriel Agreste qui avait retrouvé son absence d'émotions. 

- Non ! Je ne suis pas ... 

Fou. 

Adrien aurait voulut le crier à son père, qu'il n'était pas entrain de perdre la raison. Mais en était-il persuadé ? Et si la voix dans sa tête n'était qu'une illusion ? Parce qu'il était trop triste d'admettre que Marinette était ... NON ! Il ne pouvait pas s'y résoudre ! Marinette était vivante ... elle devait l'être ! Il n'avait pas le choix que d'y croire, sinon sa vie n'avait plus aucun sens ... 



Il était une fois de plus, seul contre tous. Le seul à y croire, le seul à espérer qu'elle revienne, le seul à lutter contre l'idée qu'elle était morte. Pourquoi cette idée lui était-elle insupportable ? Parce que les dernières bribes de raisons qui lui restaient, tenaient uniquement à cette idée qu'elle était encore en vie. Le priver de cet espoir, c'était comme le priver d'oxygène et le laisser mourir à petits feux. 

Parfois les gens se réfugient dans la folie parce que la vérité peut les tuer.

Voyant les larmes de son fils et le désarroi total dans lequel il se trouvait, son père s'avanca pour poser ses mains sur ses épaules. Il se pencha vers lui et colla sa joue à la sienne. 

- Tout ce que je fais c'est pour ton bien, Adrien. chuchota son père à son oreille.

- Oui, père. dit Adrien d'une voix sans timbre, comme assommé par cette décision. 

Et soudain, comme un éclair, une information olfactive parvint à son cerveau, et se relia avec une information capitale entre ses neurones. L'éclair de lucidité fut saisissant, si bien que tout son corps se figea. Les yeux d'Adrien s'écarquillèrent, il en oublia de respirer. En quelques secondes l'information passa dans son cerveau et les dernières pièces d'un immense puzzle s'assemblèrent. 

« Ca sent la cire d'abeille ».


*A suivre* 

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