Au fond du gouffre
Adrien avait du mal à contenir sa joie, et son excitation. Entendre à nouveau la voix de sa Lady allait faire exploser son coeur de joie. Après des mois à se morfondre, à trembler d'inquiétude, il était rassuré de la savoir en vie. Mais cela ne l'apaisait pas pour autant, car elle était toujours en danger. Il était tellement impatient de la serrer à nouveau dans ses bras, de sentir son coeur battre contre le sien, pour s'assurer qu'il ne l'avait pas perdu pour toujours. Il sortit soudainement de la torpeur anesthésiante dans laquelle il s'était plongé des mois durant, pour s'animer d'une irrépressible frénésie. Il l'aimait. Il l'aimait tellement. Elle était la personne la plus précieuse sur cette terre, et il donnera sa vie pour la retrouver et la sauver. Il sentait qu'il était prêt à tout pour la sauver, même à tuer Le Papillon s'il le fallait.
- Oh Adrien, si tu savais comme je suis contente de te parler ! Depuis combien de temps je suis ici ? J'ai perdu la notion du temps, il n'y a matin, ni soir ici. Ni levé, ni couché de soleil. Je ne peux me fier à rien à part à mon impression que le temps ne passe pas, donc je suppose que ça fait une éternité que je suis là ...
- Ca fait exactement 4 mois et 13 jours, Mari ... une éternité pour moi aussi. Je t'ai cherché pendant des jours et des nuits, je ne sais pas où tu es, je t'en prie aide-moi à te trouver que je vienne te sortir de là !
- Je ne sais absolument pas où je suis. Je suis dans le noir, au fond d'une cellule qui sent la cire d'abeille,j'entends des fois la voix du Papillon au loin. Des fois j'entends le rire idiot de Chloé. Je ne peux pas bouger, je crois que Chloé m'a injecté une sorte de venin qui paralyse les muscles.
- Mari ... je suis tellement désolé pour ce qu'il t'arrive. Je vais tout faire pour te retrouver, ne t'inquiète pas ! Je savais au fond de moi que tu étais en vie ! Personne ne voulait le croire, mais je le sentais ! J'ai même fouillé la Seine, Mari ! J'étais désespéré de ne pas te retrouver !
- Adrien, rien de tout ça n'est de ta faute, c'est la mienne. Je me suis fait avoir bêtement par Chloé. Je suis contente qu'il ne t'ai pas enlevé toi aussi ... Mais je vais bien, ne t'en fais pas pour moi.
- Ils ont Plagg aussi ... sans lui, je suis tellement inutile ...
- Ils ont Tikki aussi, j'espère qu'elle va bien ...
- Adrien ? Tout vas bien ? A qui parlez-vous ? demanda Nathalie à travers la porte de sa chambre.
Adrien paniqua. Elle l'avait entendu parler à voix haute alors qu'il était seul dans sa chambre. Elle allait définitivement le prendre pour un fou. Il se jeta dans le lit, et rabattu la couette sur lui. N'entendant aucune réponse, Nathalie entrouvrit la porte pour s'assurer que tout allait bien. Lorsqu'elle le vit « dormir », elle se dit qu'il avait du parler dans son sommeil et referma la porte. Adrien se mit à parler à voix basse, et se rendit compte que peu importe le volume de sa voix, Marinette l'entendait parfaitement.
- Il faut que je fasse attention, j'étais tellement enthousiaste à l'idée de t'entendre que j'ai réveillé toute la maison. Ils vont me faire interner.
- Oui, personne ne te croira si tu leur dit que je suis dans ta tête.
- Ah ca c'est sûre, déjà qu'il trouve mon comportement inquiétant, je ne vais pas en rajouter.
- Pourquoi cela ?
- J'étais fou d'inquiétude ! Je t'ai cherché partout, dans tout Paris. J'ai échoué, je suis vraiment le plus mauvais coéquipier ...
- Arrête Adrien, le Papillon est très fort pour se dissimuler. Depuis que nous l'affrontons, nous ne l'avons jamais trouvé non plus. Je suis en vie, ne t'inquiète pas pour moi.
- Comment je vais faire pour te retrouver, si tu ne peux pas me donner d'indices ?
- Ne panique pas Adrien, nous allons bien trouvé une solution, je vais bien entendre quelque chose qui te permettra de me situer.
Marinette parla à Adrien toute la nuit, sans interruption. Tellement heureuse de trouver une oreille attentive, elle se sentait moins seule, elle pouvait exprimer sa peine mais faisait attention de ne pas inquiéter Adrien. Elle le sentait déjà assez fragilisé par sa disparition et mort d'inquiétude, elle ne voulait pas l'effrayer.
Elle ne pouvait pas lui dire qu'elle était enfermée dans un cocon. Non, elle ne pouvait pas, car il serait mort d'inquiétude.
Les jours passaient et l'été touchait à sa fin. Marinette convint Adrien de retourner suivre les cours à l'université en attendant de trouver un indice qui lui permettrait de la retrouver. Elle échangeait avec lui à longueur de journée, par peur de perdre le contact. Nino était heureux que son ami ait repris sa vie en main, mais son soulagement fut de courte durée. Adrien était complètement métamorphoser. Ses camarades se demandèrent comment il était passé d'un état proche de la dépression, à un optimiste à tout épreuve.
Mais Adrien ne pouvait rien dire, pas même à Nino.
- Hey vieux, t'es bizarre en ce moment, t'es sure que tout vas bien ? s'inquiéta Nino.
- Oui, ne t'en fais pas pour moi Nino, tout vas bien.
- Je suis désolé de te le dire mais ... tu parles tout seul depuis quelques jours, tu souris tout le temps, tu regardes dans le vague, des fois tu rigoles dans ton coin... c'est vraiment flippant.
Adrien se sentit rougir de honte. Nino avait remarqué. Malgré son apparente insouciance, Nino remarquait tout. Il ne pouvait rien dire à son ami.
- Ah bon ? Je n'ai pas fait attention ... Non mais tu sais je répète pour un film que je prépare tu sais ... je répète mon texte dans ma tête ... mentit Adrien.
L'explication bancale de son ami ne convint pas Nino qui lui jeta un regard empli d'inquiétudes et de pitié.
- Tu sais, ça fait longtemps maintenant, tu dois te faire une raison et ... commença Nino en prenant une voix la plus douce possible. Il savait très bien que le sujet était difficile à aborder avec son ami.
- De quoi tu parles ? dit nonchalamment Adrien.
Nino hésita un instant.
- Mari ... murmura t-il avec précaution.
- Elle est vivante ! s'exclama Adrien en bondissant de sa chaise qui se renversa derrière lui.
Le réfectoire se fit silencieux. Tous observaient la crise de nerf d'Adrien Agreste.
- Adrien ... assis-toi s'il te plait, tout le monde te fixe ... Calme-toi, c'est pour ton bien que je te dis ça. chuchota son ami.
- Non je ne me calme pas Nino ! Pourquoi je suis le seul à savoir qu'elle est en vie ! Personne n'est foutu de la retrouver ! Elle ne s'est pas volatiliser, elle est là quelque part et elle m'attends ! Elle attends que je vienne la sauver du Papillon ! s'écria t-il.
Nino se leva et pris son ami par le bras, malgré ses réticences, Adrien le suivit à l'extérieur du restaurant scolaire.
- Adrien, je m'inquiète beaucoup pour toi. Tu es a la masse niveau études, tu ne manges plus rien, tu passes ton temps à parler seul dans ton coin ... La presse ... ils ont écrit des articles sur toi, sur ta soi-disante dépression, comme quoi tu devenais fou ...
- Des conneries ! hurla t-il sans parvenir à se retrouver son calme.
- Je sais mais Adrien ... il faut te ressaisir, tu es entrain de foutre ta vie en l'air !
- Ma vie, ma vie, vous n'avez que ce mot là à la bouche ! Et sa vie à elle ! Elle n'a pas de valeur pour vous ?
« Adrien .... »
Adrien se figea. Marinette était entrain de lui parler.
- Je t'en prie, ne t'énerve pas pour ça. Tu sais bien que tu es le seul à m'entendre ! C'est normal qu'il ne comprenne pas, ce n'est pas grave je t'assure.
- Mari ... murmura Adrien du bout des lèvres.
Les larmes lui montèrent aux yeux, son coeur se serra dans sa poitrine. Cela faisait des mois que Nino observait son meilleur ami tomber au fond d'une abysse. Il le voyait jour après jour se ternir, se morfondre. Tantôt animé par une rage acharnée, tantôt par un optimiste déraisonnable, tantôt par une peine infinie. Et cela se voyait sur son physique. Son visage marqué, sa barbe hirsute, ses cheveux en bataille, ses yeux cernés, son teint gris. Adrien faisait penser à un drogué ou à un clochard alcoolique. Son attitude schizophrène inquiétait tout ce qui côtoyait le Adrien d'avant. Et depuis quelques jours s'était ajouté à cela une étrange et soudaine gaieté, un espoir malsain s'était glissé dans son coeur. Et ses interminables monologues ... Cela finirait par le détruire, Nino en était maintenant persuadé.
Nino avait pris Adrien par les épaules, ce dernier posa son front sur l'épaule de son ami et se laissa ses larmes couler silencieusement. Nino lui frotta affectueusement le dos pour tenter de le réconforter.
Adrien s'efforçait pourtant de paraitre normal, continuant ses recherches interminables de son côté, il passait des nuit entière à errer dans Paris à la recherche de Marinette. Lui seul savait qu'elle était en vie, elle ne pouvait compter que sur lui pour la retrouver, il ne pouvait pas l'abandonner.
Et puis, un matin, alors qu'il se rendait à l'université comme chaque jour depuis plusieurs semaines, il la vit ...
Ses cheveux blonds tombaient nonchalamment sur ses épaules, sa silhouette longiligne se mouvait juste devant lui. Cela faisait des mois qu'il ne l'avait pas vu. Tout le monde la croyait à Londres pour les études, mais Adrien connaissait la vérité. Il était d'ailleurs le seul à la connaitre. A savoir quel immonde personnage se cachait derrière ce visage parfait. Sa beauté était aussi flagrante que son sourire était fourbe. Mais Adrien ne voyait plus le visage angélique de son ami d'enfance, il ne voyait plus que le regard malsain d'une dangereuse psychopathe. Il sentit soudainement son estomac se tordre et une boule au fond de sa gorge, il avait du mal à déglutir. Il se sentit envahit par une rage, de plus en plus incontrôlable.
- Chloé ... murmura t-il les mâchoires crispées. Ses poings se serrèrent si forts que ses ongles se plantèrent dans ses paumes. Nino observa son ami changé d'attitude le regard inquiet. Il n'avait jamais vu cette expression de rage sur le visage d'Adrien Agreste. On aurait dit qu'il aurait voulu la tuer. Ce qui se passa ensuite ne rassura pas Nino sur les intentions de son camarade.
Adrien pressa le pas en direction de la jeune femme blonde, les poings serrés. Chloé le vit arriver derrière elle au dernier moment et eut un mouvement de recul. Adrien attrapa sa camarade à la gorge et la bloqua contre le mur. Chloé hoqueta de surprise et dégluti péniblement, les doigts d'Adrien se resserrant lentement autour de son cou. Chloé tenta de retirer cette main puissante de son cou en saisissant le poignet de son agresseur mais la force de ses deux mains réunies ne put rivaliser avec la main gauche d'Adrien.
- Ou est -elle ?? hurla t-il hors de lui.
Chloé observa Adrien, les traits de son visage était déformé par la rage. Elle sentait toute la haine de son ami d'enfance s'abattre sur elle. Etait-ce les doigts d'Adrien bloquant sa trachée ou la peur qu'il l'empêchait de respirer normalement ? Elle n'aurait su le dire elle-même. Elle eut le sentiment qu'il serait capable de la tuer à cet instant et un frisson de terreur lui parcourut la colonne.
- Je ... je ne vois pas de quoi tu parles ... dit-elle péniblement.
- Adrien !! Lâche-la ! lui ordonna Nino.
L'ensemble des étudiants présents dans le hall de l'université se tournèrent pour observer la scène. Certains d'entre eux chuchotèrent « c'est encore Agreste qui pète un cable ». La foule sans visage murmurait mais cela n'était qu'un bruit de fond pour Adrien qui ne cachait pas sa prise.
Nino s'approcha de son ami et attrapa son bras, mais pris d'un élan de rage et malgré son affaiblissement physique de ses dernières semaines, Adrien le repoussa en arrière avec une force surnaturelle et Nino fut projeter en arrière.
- Dis-moi où elle est, où je te jure que je te tue Chloé ! s'emporta Adrien, incapable de desserrer les mâchoires. Chloé perdit son expression de peur et un hideux rictus apparut sur son visage.
- Si tu me tue Agreste, tu ne la retrouvera jamais. chuchota t-elle péniblement.
Soudain, le poing d'Adrien s'abattu avec une force incroyable à quelques centimètres à côté de la pommette droite de la jeune femme qui sursauta de terreur. Le plâtre du mur se fissura à l'endroit ou le poing du jeune homme s'était abattu. Nul doute que si ce poing s'était abattu sur le visage de Chloé Bourgeois, c'est son crâne qui aurait été fissuré.
- Si elle meurt ... tu vas payer Bourgeois ! grogna t-il en serrant plus fort ses doigts autour de son cou frêle. Le visage de sa proie commença à prendre des teintes bleutés par le manque d'oxygène, tandis que les veines du visage d'Adrien donnaient un relief inédit au visage habituellement doux et lisse du jeune homme.
"Ne fais pas ça Adrien ! Tu es plus malin qu'elle ! Ca ne te servira à rien, elle ne dira rien tu le sais bien. Toute la rage du monde ne t'aidera pas, tu dois retrouver ton calme et réfléchir. C'est le seul moyen."
La douce voix de Marinette qui raisonna dans sa tête, apaisa temporairement la rage incandescente du jeune homme.
Adrien s'écarta brusquement d'elle et Chloé tomba au sol en se tenant la gorge. Elle tenta de reprendre son souffle, son visage reprenant peu à peu son teint de porcelaine. Nino s'approcha d'elle et l'aida à se relever. Nino observa Adrien, à la fois terrorisé par ce geste proche de la folie et inquiet par l'attitude imprévisible de son meilleur ami. Adrien les observa en tenant son poing abimé par le coup qu'il venait de donner au mur, avant de faire volte face.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top