Règle numéro cinq : tout le monde ment tout le temps.

En voyant le nom de William apparaître sur mon écran de téléphone à côté de l'encart « nouveau message », mon sang n'avait fait qu'un tour. Que voulait-il ? Qu'est-ce qu'il allait bien pouvoir me dire ? J'étais censée dormir, alors qu'est-ce que je devais faire ? Le lire et attendre de lui répondre le lendemain ? Lui répondre tout de suite ? Ne rien faire du tout ?
Mes sentiments étaient partagés entre la joie d'avoir reçu un message de mon amour et la peur d'être déçue en découvrant ce qu'il disait, surtout s'il s'avérait que ce ne sont pas les mots que j'avais espérés...
Je pris une profonde inspiration. J'étais en train de me torturer l'esprit pour rien. Je mis donc mon téléphone en mode avion sans lire le message, le plaçai à côté de mon oreiller et fermai les yeux.

Quarante minutes plus tard, je tournai dans tous les sens, incapable de m'endormir. Salut l'insomnie, ça faisait longtemps qu'on ne s'était pas côtoyées toi et moi. Il fallait que je lise le SMS de William. C'était forcément la curiosité qui m'empêchait de dormir. Je pris donc mon courage à deux mains, mon téléphone d'une seule, et, après une profonde inspiration, ouvris le message pour le lire :
« Tu me manques. »
J'eus le souffle coupé.
Je te manque ? Je te manque ?? Alors, c'est comme ça que ça fonctionne ? Maintenant que tu n'as plus ta pouffiasse, tu reviens vers moi ? C'est que tu ne devais pas tellement tenir à elle dans le fond...
Qu'est-ce que je réponds ? Est-ce que je réponds maintenant ? À nouveau mon esprit et mes émotions s'emballèrent et partirent dans tous les sens. J'eus du mal à les maîtriser, mais finis par arriver à la conclusion que je devais vraiment dormir. Si je manquais tant que ça à William, il pouvait bien attendre encore un peu. Après tout, cela renforcerait peut-être le manque...
Je me tournai donc dans la direction opposée à celle de mon téléphone, fermai à nouveau mes yeux et espérai m'endormir très vite.

Je ne sais pas exactement combien de temps j'avais mis à m'endormir, mais quand mon réveil sonna, le lendemain matin, j'avais l'impression de n'avoir dormi qu'une heure.
Pourtant, je crois bien que j'avais rêvé. Un rêve magnifique dans lequel William et moi étions ensemble, heureux comme au premier jour. C'était tellement apaisant. J'espérais que ce soit un rêve prémonitoire, ou du moins le genre de rêve qui nous donne des indications quant à notre avenir.
Je m'étirai et allai ouvrir mes volets quand je me souvins : le message ! Est-ce que je l'avais rêvé lui aussi ?
J'attrapai mon téléphone, désactivai le monde avion et consultai mes SMS.
Non, je ne l'avais pas inventé. Il était bel et bien là. Le fameux « tu me manques » de William. Je souris et mon cœur se remplit de joie. Bien entendu, j'aurais aimé lui répondre qu'il me manquait aussi, l'envahir d'amour et lui montrer à quel point je l'aimais pour que nous soyons enfin réunis, mais cette méthode était loin d'être efficace et d'avoir fait ses preuves. J'envoyai donc un simple « Pardon ? », froid et concis. Il le verrait sûrement plus tard, étant donné qu'il avait dû travailler de nuit, il devait dormir à l'heure actuelle.
Je laissai donc mon téléphone dans un coin, consultai en vitesse celui de Daisy –aucune nouvelle de qui que ce soit-, et descendis à la cuisine me préparer mon petit-déjeuner.
Cette fois-ci, j'avais envie d'un repas royal, très consistant et très sucré.
J'optais donc pour des crêpes que je garnis généreusement de cassonade et de morceaux de mangues et pêches coupées, le tout accompagné, comme toujours, du café à la noisette.
Je pris mon petit-déjeuner dans mon salon, tout en regardant la télévision, zappant d'une chaine à l'autre sans vraiment m'intéresser à un programme précis, quand mon esprit fut traversé par une envie aussi soudaine qu'étrange : il fallait que je lise les messages que William et Daisy s'étaient envoyés.
Je ne sais pas exactement pourquoi cela m'était venu à l'idée, ni même pourquoi je sentais que je devais le faire maintenant, mais je devais le faire, voilà tout.
J'allai donc dans ma chambre chercher son téléphone, redescendis au salon afin de, tout de même, finir mes crêpes et mon café, et ouvris la messagerie.
Comme je l'espérais, elle avait conservé une bonne partie des messages qu'ils s'étaient échangés sur un laps de temps assez important. Ainsi, le premier remontait à début juillet. Il était de Daisy, et disait :
« Coucou William, tu veux aller boire un verre aujourd'hui ? »
Un petit cœur accompagnait la phrase de ce SMS. Elle avait déjà pris ses aises à ce que je vois...
William avait répondu :
« Je sais pas trop, pourquoi pas. Mais j'ai peur que Cass' me fasse la gueule un peu... »
« Roh, elle va pas nous souler celle-là ! » avait envoyé Daisy.
Je hais vraiment cette fille. Je la hais.
Je laissai passer quelques messages anodins, des échanges qui n'avaient pas grand intérêt, quand mon regard –et mon cœur, par la même occasion-, s'arrêtèrent.
Un message de William disait :
« Je ne sais plus trop si je dois me marier avec elle... »
Avec elle ? Est-ce que ça voulait dire qu'il ne voulait pas se marier avec moi, ou simplement qu'il ne voulait pas se marier tout court ?
Je consultai la réponse de Daisy :
« Tu sais, moi je crois que si tu le sens pas tu ferais mieux de ne rien faire... »
Quel conseil très judicieux, abrutie ! Annuler un mariage qui avait été planifié un an à l'avance, alors que c'était William lui-même qui en avait fait la demande... Dans le genre conseils de merde, elle se posait là cette connasse !
Enfin, c'était quand même ce qu'il s'était passé, au final...
Cette pensée m'arracha un pincement au cœur. J'avais toujours soupçonné Daisy d'y être pour quelque chose, maintenant, j'allai peut-être enfin obtenir les preuves que je souhaitais.
Je continuai ma lecture :
« Mouais... J'ai des doutes en ce moment... On arrête pas de se prendre la tête elle et moi. Je sais pas quoi faire, je me sens perdu... »
Quoi ?
Je relus le message, perplexe.
On ne se prenait pas la tête lui et moi, on était juste un peu... Distants l'un envers l'autre, c'est tout. Je pensais que c'était à cause de l'angoisse du mariage... William lui-même m'avait dit que c'était à cause du mariage d'ailleurs.
J'observai la réponse de Daisy :
« Bon écoute je crois tout simplement que ça veut dire ce que ça veut dire : t'es pas fait pour cette fille, et elle n'est pas faite pour toi. Réfléchis, vous ne vous correspondez tellement pas ! Déjà, elle est trop vieille pour toi, ensuite tu te sens pas bien avec elle... Franchement je voudrais rien dire, mais tu serais tellement mieux avec moi par exemple. Regarde : on a plein de points communs, on délire bien, et depuis qu'on s'est rencontrés y a une espèce d'alchimie entre nous, tu peux pas le nier. Donc réfléchis bien et prends la bonne décision, mais à mon avis vaut mieux que tu la quittes maintenant, plutôt que d'attendre le mariage et d'être coincé, t'auras moins d'emmerdes... »
Daisy, sale pétasse...
Ma respiration s'était accélérée au fur et à mesure de la lecture de ce message. Dans ma tête, j'avais tué Daisy une deuxième fois. Je l'avais poignardée, étouffée, étranglée, balancée dans de l'acide et brûlée vive. Tout ça en même temps. Elle méritait vraiment ce qui lui était arrivé.
William avait répondu un simple : « Je ne sais pas... »
Merde William, qu'est-ce qu'elle t'avait fait ?
À nouveau des SMS anodins qui ne méritaient pas mon attention, puis William avait envoyé, sans doute quelques jours après qu'ils aient eu leur fameuse conversation :
« C'est bon. Je l'ai quittée. »
Alors ça y est, on y était ? C'était ce fameux jour...
« Oh oui je le savais ! Le 7 ça m'a toujours porté chance de toute façon. » avait répondu l'affreuse Daisy.
Je fronçai les sourcils.
Une minute. Le sept ?
Je consultai la date exacte du message de William : le 7 juillet, à 21h59.
Mais... Lui et moi, on avait rompu dix jours plus tard...
Je me souvenais de ce jour comme si c'était hier.
À vrai dire, il avait eu lieu moins d'un mois auparavant, ce qui expliquait peut-être pourquoi il était à ce point clair dans ma tête.
Je me remémorais chaque détail, chaque sensation, chaque mot...
J'étais chez William, dans son petit appartement des quartiers ouest de la ville. Nous avions passé la journée à nous balader dans le centre commercial, comme nous avions l'habitude de le faire régulièrement, et étions rentrés vers 21 heures. Le soleil commençait à se coucher, une douce lumière orangée envahissait le salon. William était parti prendre sa douche, et moi, en attendant, je m'étais installée sur le balcon pour profiter des derniers rayons du jour.
Soudain, j'avais entendu le téléphone de Will vibrer. Il était posé sur la table basse, je m'étais donc levée pour le prendre, et avais constaté un appel entrant provenant d'un numéro privé. J'avais hélé William, surprise qu'il n'ait pas pris son téléphone avec lui dans la salle de bain, et, devant l'absence de réponse de sa part, j'avais décroché.
À l'autre bout du fil, une voix féminine avait prononcé : « Allô... ? C'est Daisy... »
Daisy ?
Je connaissais l'existence de Daisy, William m'en avait parlé quelques fois. Je ne l'aimais pas trop d'ailleurs. Pourquoi donc appelait-elle mon homme à cette heure-ci, et en numéro privé qui plus est ?
Devant l'effet de surprise, je n'avais pas réagi tout de suite, et Daisy avait enchaîné avec un : « Allô ? Mon cœur ? »
Mon âme s'était alors brisée en mille morceaux.
Comment est-ce qu'elle l'avait appelé ?
J'étais tellement en état de choc que je ne pouvais plus bouger. Le téléphone m'avait glissé des mains, et s'était écroulé sur la moquette beige qui recouvrait le sol du salon.
William était alors arrivé, torse nu, une simple serviette blanche nouée autour de la taille, ses cheveux mouillés plaqués en arrière.
Il m'avait regardée sans que je ne fasse attention à lui et avait vu mon expression faciale. Ses yeux s'étaient ensuite posés sur le téléphone, qu'il avait ramassé et éteint, mettant fin à l'appel.
- Cassie ? Qu'est-ce qu'il se passe ? C'était qui ?, m'avait-il demandé en se rapprochant légèrement de moi.
- Daisy., avais-je répondu dans un souffle, comme si prononcer ce nom avait arraché toutes les forces de mon corps.
Il avait eu un mouvement de recul, s'était braqué, et, d'un ton sévère, m'avait dit :
- Depuis quand est-ce que tu te permets de répondre à mon téléphone ?
- C'était un appel masqué, j'ai cru que c'était important...
Important comme ton boulot, ou ton université, ou encore ta mère ou même l'hôpital ou je ne sais quoi... Pas important comme une autre fille !
J'avais ajouté, le cœur au bord des lèvres :
- Qu'est-ce qu'il y a entre elle et toi ?
- Mais rien !, avait-il protesté en fronçant les sourcils
- Alors pourquoi est-ce qu'elle t'appelle mon cœur ?, avais-je rétorqué en le regardant droit dans les yeux.
Il s'était reculé, avait croisé ses bras contre sa poitrine et avait lancé :
- C'est des surnoms débiles qu'on se donne, c'est juste une amie, c'est tout...
Ses yeux cherchaient à se poser n'importe où, sauf dans les miens. Il fixait le sol avec insistance, comme s'il voulait s'enfoncer dedans.
- T'as couché avec elle ?
Ma voix s'était brisée alors que j'avais posé cette question. Je n'étais pas sûre de la réponse que je souhaitais entendre, mais William m'avait dit, avec la plus grande assurance qui soit :
- Non ! Je n'en ai rien à faire de cette fille !
- Tu l'aimes ?
Encore une fois, ma voix s'était brisée. Je sentais les larmes me monter aux yeux, et j'avais observé Will : il avait froncé les sourcils, s'était pincé les lèvres, avait cherché quelque chose du regard comme s'il réfléchissait, et, finalement, au bout de quelques secondes qui m'avaient semblé durer des heures, il avait répondu sur un ton peu assuré :
- N... Non...
- T'as hésité...
- Écoute..., avait-il commencé en essayant de se rapprocher de moi.
Mon corps avait reculé par réflexe et je lui avais intimé de ne pas me toucher. C'était à mon tour de fixer le sol désormais, je ne voulais pas qu'il voie mes yeux se remplir de larmes. Il avait poursuivi d'une voix douce :
- Cassie, c'est compliqué... Je sais que je t'aime... Vraiment... Mais je suis perdu, je ne sais pas quoi faire, je crois que j'ai besoin de temps pour réfléchir.
- Réfléchir à quoi ?, m'étais-je exclamée en relevant ma tête vers lui.
Ma vue s'était brouillée, j'avais senti des larmes chaudes couler le long de mes joues. Je ne pouvais plus les retenir.
William n'avait rien répondu. J'ai cru l'entendre chuchoter un « qu'est-ce que tu veux que je te dise... », mais je n'étais vraiment pas sûre.
Au bout de quelques minutes de silence qui étaient devenues oppressantes, j'avais finalement avancé pour rejoindre l'entrée. William m'avait laissée passer sans mot dire et sans que je ne lui adresse un regard.
J'avais attrapé mes clefs de voiture qui se trouvaient sur le buffet et avais pris mon sac qui était accroché au portemanteaux.
J'avais entendu William s'approcher dans mon dos, mais ne m'étais pas retournée.
- Tu t'en vas ?, avait-il risqué.
J'avais posé ma main sur la poignée de la porte et m'étais stoppée net lorsque William avait prononcé cette phrase. Puis, toujours sans me retourner, j'avais ouvert la porte, et avant de partir, j'avais dit :
- Je te laisse réfléchir.
Deux jours plus tard, la veille de ce qui devait être la date de notre mariage, j'étais revenue récupérer les affaires que j'avais emmagasinées chez lui depuis quatre ans. Nous ne nous étions pas adressé un seul mot.

Alors comme ça, il était avec elle depuis le 7 Juillet ?
Quelle imposture.
Quand je pense que le 18 il me disait encore qu'il m'aimait...
Mais alors, Daisy ne devait pas compter tant que ça à ses yeux, puisque, d'une certaine manière, il l'avait également trompée avec moi.
Une nouvelle question me tortura l'esprit : m'a-t-il trompée avec elle ou l'a-t-il trompée avec moi ?
On s'en fiche, elle est morte !, s'indigna une voix dans ma tête.
Cette voix avait parfaitement raison. Je m'en fiche.
Je ne pris donc pas la peine de lire les autres SMS et balançai le téléphone de Daisy dans un coin.
Le passé n'était pas important, seul le présent comptait.
J'observai l'horloge du salon : huit heures quarante. Il était temps que j'aille me préparer.

Vingt minutes plus tard, j'étais lavée, coiffée, maquillée, et je portais un jean brut avec une chemise blanc cassé que j'avais accessoirisée avec un sautoir doré.
Je montai dans ma voiture et démarrai. J'allais arriver au travail avec dix bonnes minutes d'avance, si ce n'est plus, mais ça serait l'occasion de prendre un café avec mes collègues.
Quinze minutes de trajet plus tard et j'étais garée sur le parking réservé aux employés.
Je travaillais comme vendeuse dans une grande enseigne de prêt-à-porter, un boulot sur lequel je m'étais rabattue après avoir été recalée de ma dernière année d'école de stylisme. Au final, j'avais payé très cher une école soi-disant prestigieuse pour me retrouver sans aucune qualification ni aucun diplôme. Alors que pourtant, je le savais, j'avais du talent.
Je m'étais donc lancée comme styliste en free-lance, et, en attendant le succès, j'avais ce boulot alimentaire si peu épanouissant.
Je passais mon temps à plier des vêtements mal conçus et mal coupés, à tenter de conseiller des personnes qui ne connaissaient rien à la mode, et à encaisser des gens tout aussi peu aimables les uns que les autres...
Je claquai ma portière en me disant qu'il fallait vraiment que je pose mes semaines de vacances et marchai vers le bâtiment.
J'entrai par la réserve, à l'aide de mon badge professionnel, et rejoignis la petite cuisine dans laquelle une partie de mes collègues – un magasinier, une vendeuse et ma responsable - s'étaient réunis pour boire un café.
Ils m'accueillirent avec un grand sourire et je leur fis la bise à tour de rôle. Je les aimais bien, malgré tout, même si ce travail ne me satisfaisait vraiment pas, au moins les voir eux me donnait un peu de baume au cœur.
Roger, le magasinier, me tendit une tasse de café qu'il venait de servir.
- Il n'est pas à la noisette, mais je sais que t'es accro à la caféine !, plaisanta-t-il.
Je ris en le remerciant et en attrapant la tasse.
Roger était vraiment mon préféré d'entre tous. Dommage que je le voie seulement quand je devais aller dans la réserve...
Je m'assis et, par réflexe, sortis mon téléphone de ma poche afin de consulter mes SMS.
William avait répondu.
Cachant mon air surpris, je lus le message avec le plus de discrétion possible :
« Je crois que j'ai fait une erreur en te quittant, je suis désolé. On doit en parler stp... »
Bien. Très bien.
Je rangeai mon téléphone dans ma poche et finis mon café en réfléchissant à ce que j'allais lui répondre.
Pour l'instant, il était l'heure de travailler.

Profitant de quelques instants d'accalmie pendant lesquels les clients se faisaient rares, j'avais répondu à William que j'étais d'accord pour lui parler, sans m'attarder plus que ça sur le sujet ni même montrer la moindre émotion dans mon message, alors que mes sentiments, eux, étaient véritablement en train de s'emballer.
Il m'avait proposé que l'on se voie le soir même, chez lui, ou encore dans notre restaurant favori.
Je m'apprêtai à lui répondre quand j'entendis une voix appeler dans mon dos. Je sursautai en me retournant.
- Merde, Amy tu m'as flanqué la trouille !, protestai-je en dévisageant ma collègue.
- T'inquiète, je n'ai rien vu., répondit celle-ci avec un petit sourire. C'est ton amoureux ?
Elle se pencha vers moi pour essayer de voir le portable que je cachais dans mon dos. Évidemment, les téléphones étaient interdits sur notre lieu de travail, et particulièrement quand on était en plein dans l'exercice de nos fonctions, mais je savais qu'Amy n'en avait rien à faire que j'enfreigne les clauses de mon contrat. C'était d'ailleurs la première à consulter son téléphone dès que notre responsable avait le dos tourné.
Pour répondre à sa question, je hochai simplement la tête.
Le plus ironique dans toute cette histoire, c'était que la plupart des gens pensaient que William et moi étions encore ensemble.
En fait, il y avait seulement deux personnes, excepté Will et moi-même, qui étaient au courant de la rupture : Léa et Malorie.
J'avais fait croire à tous les autres que le mariage avait été reporté, prétextant que William devait se rendre sur Paris pour chercher du travail, que nous étions débordés par rapport à toute l'organisation qu'exigeait un mariage et que, en conséquence, rien n'était prêt.
Mon mensonge avait été très crédible, surtout compte tenu du fait que j'avais perdu mes parents moins d'un an auparavant, la plupart des gens y avaient vu une excuse crédible pour reporter un mariage. Certains autres avaient pensé que j'étais enceinte, et que je ne voulais pas déformer ma robe de mariée ou paraître grosse sur les photos.
Quoi qu'il en soit, mes collègues, mes amis, et une bonne partie de ma famille croyaient que William et moi filions encore le parfait amour.
Dans le fond, si j'avais menti, c'est surtout parce que j'avais honte.
Honte d'annuler un mariage à moins de deux jours du jour J, honte que les invités soient déçus ou me prennent en pitié comme l'avait fait ma sœur, par exemple.
Je refusais que l'on me prenne en pitié.
Amy s'est reculée, le sourire aux lèvres, et m'a dit d'un ton enjoué :
- Je voulais juste te prévenir que tu peux aller prendre ta pause, si tu veux. Je te relaie à la caisse.
Parfait.
- Ça marche, je vais aller fumer une cigarette., répondis-je avec un air lointain.
Je m'éloignai pour rejoindre la réserve, passai par mon vestiaire en vitesse afin de récupérer mon paquet de clopes et mon briquet, et sortis dans la petite cour de l'arrière-boutique, là où étaient entreposées les poubelles et où tous les employés venaient fumer leur cigarette à l'abri des regards indiscrets des passants ou d'éventuels clients.
Je jetai un œil autour de moi : par bonheur, j'étais seule. J'allais pouvoir fumer tranquillement et répondre à William par la même occasion.
Je m'assis sur une vieille caisse qui avait été posée là à cet effet, claquai la bille de menthol de ma cigarette et l'allumai.
Après avoir recraché ma première bouffée, je sortis mon téléphone de ma poche et écrivis à l'attention de Will :
« Ce soir c'est mort, j'ai déjà quelque chose de prévu. Ce week-end éventuellement si tu veux. »
J'envoyai, rangeai mon téléphone et terminai tranquillement ma cigarette en profitant du soleil qui commençait vraiment à taper fort.
Je crois que j'avais bien fait de laisser William patienter jusqu'à ce week-end. Au moins, il aurait hâte de me voir et ne penserait plus qu'à ça pendant les deux prochains jours. Et moi, j'avais encore mes preuves à faire disparaître.

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