I. HIGHWAY TO HELL ★

Aaaah. Halloween... Quelle fête merveilleuse ! Vous ne trouvez pas ? Une superbe occasion de se déguiser et devenir qui on veut. Absolument tout ce qu'on veut. Et par la même occasion, mourir de peur. Oh, allez ! Comme tout le monde, vous aimez avoir peur, n'est-ce pas ? Je dirais que c'est humain, après tout. Cette fête est parfaite, sauf que je pense que les déguisements sont un peu superflus en dépit de leur part de mystère et d'amusement. Car après tout, bien des fois, les humains n'ont pas besoin de déguisements pour ressembler à des monstres. Mais de toute façon, avouez : c'est tellement plus amusant que Noël.

C'est fin Octobre – merci, Captain Obvious –, et tous sont très excités de la fête qui s'apprête à être donnée. En général, les élèves qui ont la chance d'être invités vont à celle de Ian. En effet, il a l'habitude d'organier une fête chaque année qui regroupe les populaires, ceux qui « méritent » d'être invités. Mais cette fois, même Ian a décidé de ne pas l'organiser pour profiter de cet évènement.

— « Voyage jusqu'au bout de la terreur », lit à haute voix Riley en tenant un bout de papier dans ses mains.

— C'est quoi ? demande Aylin.

— Apparemment, une fête spéciale Halloween.

— Chez Ian ? questionne à son tour Laurel en jetant un coup d'œil à l'affiche.

Aylin pointe du doigt une phrase inscrite plus bas.

— Ca se passe à bord d'un train, regardez. Les places sont limitées.

— Ils en parlaient déjà il y a quelques jours, répond Riley. La fête aura lieu à l'intérieur du train pendant qu'il avancera quelques heures. Le temps qu'on crève tous, quoi.

Crever ? Hum, bonne idée.

Elles sont assises dans la cour, où plusieurs autres élèves montrent et détaillent des affiches identiques à la leur. Riley regarde ses amies une à une.

— Vous êtes d'accord pour qu'on y aille, hein ?

— Carrément, acquiesce immédiatement Laurel. Ca ne risque pas d'être pire que de distribuer des bonbons avec Liam. Enfin, je veux dire distribuer des bonbons en tentant d'empêcher Liam de tous les manger.

— Parfait ! Et pas question de se défiler, ajoute Riley en pointant Aylin du doigt.

— A vos ordres.

— Si vous voulez, venez chez-moi, propose Laurel. Comme ça, on se prépare toutes ensemble.

— Super, sourit Riley.

Elles avaient l'air content. Et moi, encore plus.

La fête aura lieu dans quelques jours, et les gens dévalisent déjà les magasins de déguisement. Entre costumes traditionnels et d'autres moins, ils ont le choix. Je tourne en rond dans les rayons, détaillant les affreux costumes en froufrous et paillettes qui font honte au concept même de se déguiser pour Halloween, quand les filles font leur apparition dans le magasin. Je suis à l'avance, je savais qu'elles viendraient ici – je possède une ouïe puissante, quand je veux bien entendre certaines choses. Quoi donc ? C'est risqué de m'aventurer ici alors que les filles sont dans les parages ? Mais non, ne dîtes pas n'importe quoi. Il est au contraire très normal que je me retrouve là. Je ne suis qu'une simple personne qui recherche un déguisement, comme tout le monde...

Je me tiens dans un coin, un masque de poupée sur le visage – ça donne un petit air effrayant, j'aime ça. Et, surprise ! Un jeune homme qui n'est autre Finn, accompagné de sa petite sœur d'à peine dix ans, se tourne vers moi. Il me regarde quelques secondes, droit dans les yeux. Et pendant cet instant, je suis convaincu qu'il sait. Mais cette idée saugrenue se dissipe dès que je me rends compte avec irritation que ses yeux se sont déjà posés ailleurs. Sur Aylin, assurément. Et quand celle-ci s'aperçoit de sa présence, ils échangent un vague signe en guise de salutation, puis chacun retourne à son occupation.

Ces deux là s'attirent comme des aimants, ce n'est pas possible.

Ah. Laurel vient de choisir son déguisement. Une robe de princesse rose pâle. Hideux. Niais. Riley opte pour le gothique avec son costume de sorcière. Vu et revu, mais acceptable sur elle. Aylin, repère une tenue d'ange. Que dire ? A part qu'elle a l'air d'un gros sac de farine ambulant. Ah non, elle se change... Mais qu'est-ce que c'est ? Attendez, je vais faire de mon mieux pour vous décrire ce bazar : WTF, ça ne ressemble à rien. Finalement, elle choisit un costume de vampire. Ce choix-là était prévisible, évident même : Aylin a toujours eu une sorte d'obsession morbide pour les vampires.

Ces précisions faites, je ne m'attarderai pas plus sur ce manque cruel d'originalité et d'imagination.

Leurs achats finis, les filles rentrent chez elles. Aylin arrive à la porte de la petite maison où elle habite, de loin la plus modeste de la rue. N'allez pas croire à son mensonge grotesque – comme quoi ses parents sont de grands avocats exerçant leur profession à Philadelphie –, ni qu'elle habite seule alors qu'elle est mineure et que c'est illégal.

Les lumières du rez-de-chaussée sont allumées, et une ombre passe devant la fenêtre au moment où Aylin ouvre la porte d'entrée et s'introduit à l'intérieur.

— Je suis rentrée, Nelly.

Elle dépose son costume sur le canapé et s'en va rejoindre la femme dans la cuisine. Cette dernière prépare le dîner, et s'interrompt un moment pour saluer Aylin.

— Coucou. Alors, comment s'est passée ta journée ?

— Bien.

Nelly hoche la tête. Leurs discussions ne vont pas plus loin la moitié du temps. Aylin aide à mettre la table et elles prennent leur repas dans un silence qui leur est commun à toutes les deux.

Ne me demandez pas qui est Nelly. Il n'y a rien de spécial à dire, de toute façon. Elle est simplement la femme entre deux âges qui travaille dans l'hôpital du coin en tant qu'infirmière et qui s'occupe d'offrir des conditions de vie favorables à Aylin. Elle n'est ni riche, ni pauvre. Il n'y a rien de captivant à découvrir sur elle. Mais elle pourra toujours me servir de pion à l'avenir.

Le lendemain, a.k.a le jour J, Aylin arrive à venir à bout des questions et consignes de Nelly. « Vous ne rentrez pas trop tard, si ? Surtout, restez groupées. Faites attention à vous ! Ne faîtes pas de bêtises toi et tes copines, d'accord ? ».

J'y veillerai, Nelly. Je prendrai soin d'elles.

Ainsi, elle rejoint Riley et elles vont comme convenu chez Laurel vers vingt heures. Cette dernière fait partie d'une famille aisée, comme ses amies – excepté Aylin. Mais contrairement à ce que pourraient penser certains, elles ne sont pas des petites filles pourri gâtées et prétentieuses. Ce sont des filles bien. Naïves, pas très innocentes. Mais ce sont des filles bien si on oublie ces quelques petits détails embarrassants. Mais, oh, qu'est-ce que je disais, déjà ? Ah, oui. Elles sont chez Laurel, et chacune d'elle enfile son costume. Puis, après une séance maquillage qui a duré des plombes, elles se rendent là où tous les genres de monstres qui puissent exister attendaient avec impatience le fameux train fantôme.

Le ciel annonce par ses gros nuages noirs menaçants une averse imminente. L'air est frais, humide. Nos petits monstres grelotent légèrement de froid. Quand le train arrive enfin, les jeunes gens se mettent tous à crier et à taper dans les mains comme des phoques attardés.

Bien. C'est parti...

Les jeunes envahissent déjà l'intérieur. Le compartiment se retrouve bondé en moins de deux. Les vitres ne laissent point paraître le monde extérieur, à cause de la buée qui en recouvrait la surface sous l'effet de l'humidité atmosphérique. Les sièges sont de couleur sombre et sont recouverts de toiles d'araignées, tout comme les coins et certains endroits des petites tables qui se trouvent chacune entre deux sièges se tenant face à face. Des petites citrouilles éclairées sont positionnées un peu partout en bonne et due forme afin de rappeler l'esprit d'Halloween. Une porte est grande ouverte à chacune des extrémités de la longue pièce, offrant un passage aux deux autres compartiments adjacents. Maintenant, je vais arrêter de décrire, parce que je ne suis pas doué pour ça et que je n'en ai plus envie. Vous n'avez qu'à, je ne sais pas, imaginer le décor de vos rêves pour cette fête majestueuse ? En bref, la décoration : tout y est. Les déguisements, ok. La musique... Du vomit musical. Mais ces piètres détails ne comptent pas. Pas du tout. Comparé à ce que j'ai préparé.

Mes yeux aperçoivent actuellement Quinn qui se pavane avec sa bande. Liam cherche de la nourriture en trainant avec des pecnots dans son genre. Riley drague tout se qui bouge. Ouah, on dirait même qu'elle est bourrée. Laurel fait semblant d'écouter le récit apparemment passionnant d'une fille à perruque rouge en jetant des coups d'œil discrets à Ian, qui lui, fait l'intéressant comme à son habitude. Le tout au milieu de jeunes gens insouciants qui font la fête comme bon leur semble. Et Aylin ?

Aylin se retrouve seule. Bou hou. Elle regarde autour d'elle, comme cherchant de l'aide. Mais ce petit moment de solitude arrive à sa fin quand elle distingue quelqu'un. Ce quelqu'un – oui, je fais du suspense – est assis tranquillement à une table, les yeux dans le vague. Aylin s'en rapproche doucement, et profite de son « instant rêverie » pour le surprendre comme il se doit. Elle bondit sur le siège en face et avance son visage brusquement, assez près du sien, pour le faire sursauter. Aylin éclate de rire en retombant sur son siège – Hilarant. Finn – Ca par exemple ! Vous ne vous attendiez pas à ce que ce soit lui, hein ? – croise les bras.

— Oh, la salo... Gentille fille, fait-il en se laissant aller contre le dossier du siège.

Aylin le gratifie d'un sourire sarcastique.

— Qu'est-ce que tu me veux ? lui demande-t-il.

— Pourquoi tu crois que j'ai une idée derrière la tête ? Je viens simplement te voir, savoir comment tu vas.

Finn éclate instantanément de rire.

— Mais oui, bien sûr. Allez, dis-moi un peu ce qu'il y a. Tu as besoin d'une thérapie ? D'un cours de Ninja ? De conseils pour être originale à la prochaine fête d'Halloween ?

— Je suis venue m'excuser.

— Tiens donc. Ca, tu vois, c'est très surprenant. Si surprenant que je ne te crois pas.

— Eh bien, je te demande pardon.

— Pourquoi ?

Aylin lève les yeux au ciel.

— Pour t'avoir accusé d'harcèlement.

— Fort bien. Et qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? Tu as eu des preuves qui remettent en cause ma culpabilité ?

— A vrai dire, non. C'est juste qui tu es trop une mauviette pour faire ça.

— Hum.

— Je plaisante. Je le sais, c'est tout.

Riley sort de nulle part et apporte deux verres de substance gluante et à la couleur étrange.

— Pour vous ! crie-t-elle avec une voix perçante à vous faire saigner les oreilles.

Elle affiche un énorme sourire en direction d'Aylin, puis disparaît tel qu'elle est venue : comme un ouragan.

C'était l'instant Riley la blondinette fêtarde, merci de votre attention.

Aylin et Finn se regardent, baissent les yeux vers leurs verres, puis se regardent de nouveau.

— Tu crois que cette matière gélatineuse est destinée à nous empoisonner ? demande Finn, perplexe.

Aylin hausse les épaules.

— C'est fort possible, mon ami.

Puis elle grimace en pointant un doigt vers la tenue de Finn.

— Tu es sûr que tu es déguisé ? Tu portes tes vêtements de tous les jours.

— Oui. Je savais que les idées de costume seraient toutes similaires. Alors je me suis déguisé... En moi. Admets-le, je suis un génie.

— Tu es si intelligent, ingénieux, parfait ! s'exclame-t-elle d'une voix émerveillée, mais surtout ridicule.

Aylin fronce les sourcils et porte une main à son ventre.

— Oh, mon dieu. J'ai des papillons dans le ventre. Je crois que je commence à avoir des sentiments pour toi.

Finn plisse les yeux.

— Attends... Ah, non. En fait, j'ai juste faim.

Et elle renverse la tête en arrière en riant.

— Pas mal du tout.

— Merci. Ca sort de plus en plus naturellement.

Finn l'observe un moment, puis penche la tête sur le côté.

— Je voudrais bien avoir des enfants avec toi, lance-t-il nonchalamment dès qu'elle porte son verre à ses lèvres et prend une gorgée.

Aylin recrache la chose qu'elle a ingurgitée sur la table. Charmant.

— Non, je rigole. Je ne voudrais pas qu'ils aient ton sale caractère, ajoute-t-il en ignorant le regard noir que lui lance Aylin.

— Bravo. Tu fais des progrès, remarque-t-elle.

— Très bien. On est quitte, dans ce cas.

— Mhmm.

— Que la peur soit avec nous, commence Finn en levant son verre.

— Et que la mort vienne toquer à notre porte ce soir, répond Aylin en faisant de même.

— Amen.

Amen.

Et ils trinquent. C'est assez drôle, ce brusque changement d'avis. D'un seul coup, elle ne soupçonne plus Finn d'être l'auteur des messages. Hum. Est-ce que ce sont ses sentiments cachés mais évidents envers le jeune homme qui la rendent aveugle, ou a-t-elle raison ? Suis-je Finn ? Suis-je le grand méchant qui vous parle à l'instant ? Ou Finn n'est-il qu'un pauvre innocent accusé à tort ?

Démerdez-vous pour avoir la réponse.

En tout cas, vous pouvez sûrs d'une chose : ces deux là ne sont pas insensibles au charme de l'un et de l'autre. Ils ignorent peut-être que les regards dégoulinants d'amûûûûr, d'étoiles, de cœurs et de désir qu'ils s'échangent passent inaperçus. J'ai envie de dire : MDR.

A présent, venons-en au plus important.

La fête bat son plein. Mais la vraie fête commence quand soudain, tous se retrouvent dans l'obscurité la plus totale – Ca commence à devenir intéressant, tiens. Il n'y a plus de musique, plus aucune conversation. Le train freine, jusqu'à son arrêt complet. Un silence inquiétant et pesant s'installe dans l'immobilité étrange et brusque du train qui était pourtant dans une animosité folle il y a moins d'une minute. Les ombres se déplacent prudemment à tâtons pour essayer de régler le problème de lumière, mais ils finissent par se cogner la tête ou le bras et n'arrivent à rien.

Abrutis.

Le train se remet en marche, lentement d'abord. Ensuite il accélère pour arriver à sa cadence normale, et finit à aller à une vitesse effrayante. Quelques hurlements se font entendre. Des chuchotements alertes s'élèvent. Le train ne cesse d'avancer à vive allure. L'état alors d'incompréhension, de perplexité et d'inquiétude des passagers se change du tout au tout et atteint la pure panique. Tous se mettent à crier et à courir dans tous les sens.

Ingénieux. C'est ça qui va vous sauver, bande d'idiots.

Dans l'agitation, un cri strident faisant froid dans le dos émane du compartiment avant. Non, pas du compartiment. Mais de la pièce tout à l'avant du train, celle à laquelle les passagers n'ont normalement pas accès. La tension monte, et d'ailleurs vous pouvez presque entendre mon rire diaboliquement ravi de cette situation. Le silence retombe tandis que ces pauvres jeunes gens s'interrogent sur l'origine du cri et tentent d'en guetter un autre. Mais seul le vent hurlant leur arrive aux oreilles. Seulement, quelques secondes plus tard, une sorte de cris à l'aide étouffés se font entendre depuis cette même pièce. Hum, on dirait ceux d'une fille. Le reflexe général : hoqueter et retenir sa respiration.

TOC TOC TOC.

Quelqu'un frappe brutalement à la porte, les faisant tous sursauter. Les coups se font violents mêlés à des hurlements toujours plus éprouvants. Un long et pénible supplice pour ces pauvres âmes sensibles et fragiles. Ils entendent un dernier cri désespéré, ainsi qu'autre chose. Oui, comme si cette personne victime d'un terrible enfer s'effondrait à terre. Dès lors, il y a un cliquetis. Quelqu'un essaie d'ouvrir cette porte. Quelqu'un approche d'eux...

— Courez tous dans le compartiment arrière ! pleurniche une voix.

Les autres s'exécutent et ferment la porte derrière eux. Résultat : tout le monde est emboîté dans le compartiment n°3. Ils se sentent peut-être en sécurité comme ça. Comme c'est mignon. A l'étroit, oui, mais en sécurité, ils ne le sont pas. Loin de là.

Je les imagine très bien : certains restent blottis les uns contre les autres, d'autres fixent la porte avec de gros yeux, s'attendant à tout moment à voir quelqu'un débarquer avec un couteau ou un flingue. Tout le monde est figé dans l'obscurité et le cliquetis ne cesse de résonner dans le silence sinistre qui règne. Une porte claque brusquement, bruyamment. Des bruits indistincts à l'origine et la nature inconnues s'enchaînent. Encore deux secondes s'écoulent, et la pression retombe.

Les lumières se rallument et éclairent le compartiment. Le vomit musical revient vriller les tympans. Le train reprend sa vitesse normale.

Ils se regardent tous, et éclatent de rire en même temps.

— C'était génial ! crie Ian.

Tu ne crois pas si bien dire, mec.

Ils décident de retourner là où ils étaient afin de reprendre leurs stupides occupations. Ils commencent à se disperser, et une fille dont je ne commenterai en rien ouvre la porte et pénètre dans le compartiment n°2. Pauvre chou, tu ne sais pas ce qui t'attend.

— Hey, regardez ! s'exclame-t-elle.

Oh, oui ! Vas-y ! Dis-nous ce que tu as trouvé.

Elle se précipite en sautillant telle une enfant demeurée vers un gros sac gisant sur le sol.

— C'est peut-être une autre surprise, suggère un garçon derrière elle.

Comment tu as deviné, gamin ?

La fille aux couettes défait le nœud. Elle ouvre le sac, regarde à l'intérieur, et un son mélodieux s'échappe de sa bouche. Oui, c'est exact : la fille enfant est actuellement en train d'hurler de toutes ses forces.

Elle s'écroule par terre en tenant sa tête entre ses mains et commence à pleurer. Les autres, restés autour, la regardent tous en fronçant les sourcils. Cette fille, traumatisée à vie maintenant – dis-moi merci, petite – tend un doigt tremblant vers le sac. Ian s'en approche et se penche dessus. Il a un mouvement de recul brusque, si bien qu'il est tombé lui aussi par terre.

— Ce n'est pas vrai... C'est une blague, hein ?

Les autres se ruent vers le fameux sac, et la plupart crient en chœur. Il y en a même qui vont vomir dans un coin. Il ne fallait pas manger de cochonneries. Mais ça reste sympa à regarder.

Vous voulez que je vous dise ce qu'il y avait là-dedans, pas vrai ? Et si je décidais de m'arrêter ici, histoire de jouer un peu avec vos nerfs ?

Mais non c'était une blague ! Dieu, que je suis drôle. Bon allez...

Paralysés est le bon adjectif pour qualifier l'état des heureux jeunes gens. Dans ce sac énigmatique, il y a... un cadavre. Et oui ! Pardon ? C'était prévisible ? Arrêtez alors de prévoir, nom de dieu !

Ce cadavre porte le nom de Quinn Harvey. Voilà. C'est là que, normalement, vous êtes choqués. Allez, faites au moins semblant ! Très bien, merci. Vous devriez aussi réaliser que les cris étouffés venaient d'elle. La personne frappant rageusement à la porte et demandant désespérément de l'aide, c'était elle. La personne qui s'est écroulée à terre, vaincue, c'était elle. Et le cliquetis de la serrure, alors ? Et les autres bruits étranges ? C'était son assassin. Car oui, ladies and gentlemen, Quinn Harvey se faisait massacrer pendant que tout le monde restait sans agir. Aucun d'eux n'a eu le courage d'aller voir ce qui se passait. Et le meilleur, c'est que l'habile meurtrier est là depuis le début, dissimulé sous un costume grossier comme les autres, et qu'à l'instant, il se trouve encore parmi eux.

Aylin a failli ne pas entendre son téléphone biper dans tout le remue-ménage autour d'elle. Mais déverrouillant son portable bon marché, elle y trouve une bien mauvaise surprise.

Mayday mayday !

La pétasse est morte.

Je t'avais prévenue...

Que le jeu commence... Maintenant !

Doll Face

De l'horreur. Voilà ce que je peux percevoir sur son visage. Et c'est... Exaltant.

Mais qui serait assez machiavélique pour commettre un tel crime en présence de tellement de gens, et assez malin pour qu'aucun d'eux n'ait en même temps pas la moindre idée de ce qui s'est passé ? Voyons... Réfléchissez.

Bingo.

Vous trouvez ça cruel ? Tant pis ! Quinn a sa part de responsabilité dans une affaire assez importante. En fait, c'est tellement énorme que vous ne me croiriez pas si je vous en parlais. Donc, je n'essaierai même pas ! Ah. J'adore être moi.

Alors, comment trouvez-vous mon entrée ? Fracassante, oui, je vous l'accorde.

Un « Doll Face » subtilement inscrit sur la vitre embuée commence tout doucement à disparaître. Pas très originale cette façon de signer un meurtre. Mais j'aime bien cette manière d'imposer mon nom, de signaler mon existence, de montrer ma présence. Rappeler que Doll Face est partout. Le tout en gardant discrétion. Regardez derrière vous, peut-être que j'y suis là, maintenant. Ou bien par la fenêtre, il est possible que je vous espionne. Non, cherchez plutôt dans votre cerveau. Qui sait ? Peut-être que je me suis insinué dans votre tête sans que vous ne le sachiez. Ou alors à tous ces endroits en même temps.

Oh, je vous ai fait peur, les enfants ?

Pardon... Mais avouez-le, vous m'aimez bien quand même. Non ? Sacrebleu, que c'est blessant. Moi qui prends de mon temps pour vous raconter cette jolie petite histoire ? Moi qui vous fais part de mes pensées en toute sincérité ? Il est vrai que je me fais un malin plaisir à vous faire des petites cachotteries, mais vous savez bien que je compte tout vous avouer. La vérité est proche. Relativement. Et puis, il y a d'énormes chances que je sois la seule personne à ne vous dire que la vérité. Progressivement, mais je le fais.

Toutes ces personnes qui vous entourent... Elles mentent toutes. Rassurez-moi, vous le savez, n'est-ce pas ? De manière consciente ou non, vous le savez. Et je me demande quel est le pire : le fait que vous choisissiez de l'ignorer, ou le fait que vous fassiez partie de ces gens-là. Vous me direz que ce n'est pas si grave de mentir sur de petits détails, que des fois il est même nécessaire et préférable de mentir que ce soit par politesse, pas peur de vexer et d'offenser autrui, ou afin d'éviter des ennuis. Mais, mes chéris, petits ou grands, les mensonges restent des mensonges. Alors faites attention, mes petits, car un certain Doll Face pourrait bien avoir l'irrésistible envie de vous donner une petite correction pour toutes les fois ou vous avez menti...

Allez, c'en est assez. Cassez-vous. J'ai beaucoup trop parlé aujourd'hui et je suis épuisé. Peut-être qu'après une bonne dose de repos, je me déciderai à vous en révéler un peu plus ?... Allez, salut !

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