CHAPITRE DEUX

POINT DE VUE DE TAEHYUNG

Je n'aurai jamais cru que Yoon-Gi puisse me voler la vedette sur un plateau de tournage. Yoon-Gi et Do Dah-Na étaient face l'un à l'autre et ils se regardaient. Ils donnaient tous les deux l'impression de voir un fantôme. Durant une éternité, ils restèrent ainsi. Dah-Na tendit la main vers Yoon-Gi et la serra. Ils se présentèrent tout en sachant qui ils étaient. A leurs yeux, je n'existais plus, le monde n'existait plus. Et étrangement, cela ne me dérangeait pas. J'avais même le sentiment d'être un spectateur privilégié de cette rencontre hors du commun. Ils ne se lâchèrent la main qu'au moment où le manager de Dah-Na arriva paniqué, agrippant une lycéenne par le poignet.

- Je refuse de rester une minute de plus avec ça ! dit-il en désignant la lycéenne qui se retenait d'exploser de rire.

- Tu ne connais rien à l'art ! rétorqua la lycéenne dans un langage informel.

- Même la pluie fuit au son de ta voix, souffla-t-il.

Le manager était plutôt jeune, mignon. Il était mon genre.

- Manager Kim, vous avez survécu au 11 juillet 2015, vous pouvez survivre une heure avec ma nièce.

- Ne reparlez plus jamais du 11 juillet 2015 ! dit le Manager Kim en repartant, laissant néanmoins la lycéenne avec nous.

La lycéenne regarda sa tante et Yoon-Gi et hocha la tête, semblant satisfaite. Puis elle se tourna vers moi.

- Je suis Do So-Rah, à ma majorité j'aurai mes parts dans l'entreprise de la famille Do.

Elle me regarda quelques instants puis secoua la tête.

- Laisse tomber, tu es gay, chercher à me marier avec toi ne serviras à rien.

J'écarquillai les yeux. Cette fille... comment avait-elle su ? Même mes parents l'ignoraient. Et elle, en un regard, m'avait percé à jour. So-Rah se tourna vers sa tante :

- Le Manager Kim a oublié de te prévenir que la première scène va être tournée dans quelques minutes, vous devriez y aller, toi et lui (elle me désigna).

Puis elle se tourna vers Yoon-Gi et s'adressa à lui en langage formel, ce qu'elle n'avait pas fait avec moi, ni même avec sa tante.

- Venez, allons-nous assoir là-bas, nous aurons une bonne vue du tournage de là-bas.

Yoon-Gi se laissa entrainer. Dah-Na le regarda partir. Puis elle se tourna vers moi.

- Vous le vivez bien au quotidien ? me demanda-t-elle.

- De quoi parlez-vous ?

- Votre homosexualité au milieu de six autres jeunes hommes connus pour être particulièrement séduisants ?

- Cela n'a jamais posé de problème.

- Vous semblez être quelqu'un de confiance et d'agréable. Bien. Ce soir, venez diner à la maison.

- Dans la maison de la famille Do ? Avec tous les autres Do ?

- Oui, cela leur fera du bien de côtoyer quelqu'un d'extrêmement bien élevé.

Sans savoir pourquoi, l'entendre dire que j'avais une bonne éducation me fit plaisir.

- Min Yoon-Gi est invité ?

- Le laisser derrière ne serait pas correct.

Elle était effectivement une excellente actrice. Pouvoir cacher un trouble pareil n'était pas donné à tout le monde.

- J'accepte votre invitation si vous nous laissez vous invitez à diner en retour.

Elle hocha la tête en souriant. Elle n'avait pas l'air de quelqu'un de vingt-deux ans. Son regard laissait transparaitre une âme bien plus vieille. Avant, je ne croyais pas aux vies antérieures. Après avoir assisté à la rencontre de Do Dah-Na et de Min Yoon-Gi je pouvais affirmer que j'avais tort et que les vies antérieures étaient une certitude.

POINT DE VUE DE DAH-NA

Pendant que je jouais, j'aperçu du coin de l'œil So-Rah discuter avec Min Yoon-Gi Durant le reste du tournage, la curiosité me tenaillait. J'avais l'impression d'être redevenue une jeune fille innocente depuis que l'avais retrouvé. Je n'aimais pas ça : une jeune fille innocente était plus à même d'être blessée sentimentalement qu'une immortelle de cent quatre-vingt-six ans.

Mais je ne pus m'empêcher d'interroger So-Rah au sujet de sa discussion avec Min Yoon-Gi quand nous furent seules dans la voiture. Elle haussa les épaules en répondant :

- Il m'a simplement demandé qui était la plus vieille veuve de notre famille.

- Qu'as-tu répondu ? demandais-je, étonnée du sujet de leur conversation.

- Nous savons toutes les deux qu'il s'agit de toi, mais je lui ai dit que c'était Grand-Mère Do, c'était plus plausible.

- Grand-Mère Do n'est pas veuve, elle n'a jamais été mariée...

- Il n'a pas besoin de le savoir.

Nous arrivâmes bien trop vite devant l'immense maison familiale. J'appréhendais ma confrontation avec cet homme qui ressemblait bien plus à mon mari que ses autres réincarnations. Ils avaient l'air identiques et cela me terrifiait.

On m'ouvrit la porte et je sortis, suivie de So-Rah. Tous les membres de la familles présents ce soir avaient eu connaissance de la situation et de l'arrivée des invités. S'il y en avait un mal coiffé, je le tuais. La majorité des Do vivant dans cette maison avaient moins de vingt-cinq ans et ils étaient tous aussi mal élevés les uns que les autres. Ils avaient été trop gâtés par leurs parents, parents qui étaient, majoritairement, absents de la vie de leurs enfants. Si les parents de So-Rah avaient quitté la maison, les autres parents habitaient officiellement ici mais passaient onze mois sur douze en voyage. Tous les enfants de cette maison étaient cousins, mais même si je paraissais plus jeune que certains, j'étais connue comme étant leur tante.

Je croisai le regard de Min Yoon-Gi et de Taehyung et les invitai à nous suivre d'un sourire. Taehyung semblait impressionné par la maison, si Yoon-Gi l'était aussi, il ne le montrait pas. C'était mieux ainsi. Cela m'aurait fait mal au cœur s'il avait montré de l'admiration envers sa propre maison d'enfance.

Toute la dernière génération Do nous attendait dans le hall et ils souhaitèrent la bienvenue aux invités, en chœur. Je ne pus m'empêcher de secouer la tête. Si seulement ces gamins étaient comme ça en permanence, j'aurai enfin le respect dû à mon âge. Grand-Mère Do était curieusement présente. Elle plissa les yeux et pointa sa canne sur nos invités.

- Je l'ai vu à la télé ! Ils portent du maquillage !

Je sursautai en même temps que Taehyung. Yoon-Gi resta étonnement stoïque.

- Grand-Mère Do, dis-je un peu plus sèchement que notre apparente différence d'âge n'aurai dû me le permettre.

- Yoon-Gi, dit Grand-Mère Do. Tu te dois d'être moins vulgaire !

Cette fois, il ne resta pas de marbre et sembla perdu.

- Je ne te laisserai jamais épouser une Do si tes cheveux ne sont pas noirs !

Mes yeux étaient écarquillés et je senti la colère monter en moi. Comment cette femme osait-elle ? Mais je gardais mon calme et m'approchais d'elle avec un sourire. Je l'attrapais au poignet avec sans doute un peu trop de force car elle se tendit.

- Je sais que tu as encore toute ta tête. A quoi joues-tu?

Seule elle pouvait m'entendre.

- Je vais bientôt mourir et j'ai toujours eu envie de mettre mal à l'aise la déesse que vous êtes, Esme Hill.

Seules très peu de personnes connaissaient mon véritable nom, celui que je portais quand j'étais en Angleterre, celui avec lequel je m'étais mariée.

- Vous êtes ma plus chère amie et vous avez besoin de vous sentir humaine. Alors ressentez le désagrément, la colère et l'amour comme si vous étiez mortelle. Je vous aiderais. Et je vous mettrais dans l'embarras jusqu'à ce que vous puissiez oublier votre malédiction. Vous avez le droit de vous sentir mortelle, il n'y a rien de plus beau que la promesse d'une fin, alors ressentez le, même si ce n'est qu'un instant. Mon plus grand regret est de vous avoir conforté toute ma vie dans votre sentiment d'être à part de notre monde. Vous l'êtes. Mais notre monde veut de vous, soyez en sûre.

Ses mots me touchaient plus que je ne l'aurai cru.

- Grand-Mère Do est fatiguée. So-Rah, ramène la dans sa chambre.

- Elle ment ! cria Grand-Mère Do. Cette ingrate veut me réduire au silence !

Je serrai les dents.

POINT DE VUE DE YOON-GI

Grand-Mère Do... Cette femme me faisait un peu peur. Mais ce qui me faisait réellement peur était d'une nature bien plus inquiétante : j'avais peur que la famille Do s'oppose à ma relation avec Do Dah-Na. Et c'était le fait que je considère avoir une relation avec une femme que je venais de rencontrer était ce qui, en définitive, me terrifiait, car j'avais conscience que des forces qui me dépassaient étaient à l'œuvre. Car j'aimais déjà cette femme à en mourir.

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J'espère que ce chapitre vous a plu
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Bisous

Vivienne



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