💛 CHAPITRE 15 💛

Je dirais que l'on a à peu de choses près, mille pensées à la seconde. C'est comme être assis au bord de la plage et laisser une immense vague venir nous submerger d'un coup sans que l'on ne puisse faire quoique ce soit. C'est se retrouver ballotté de gauche à droite avec intensité, passant d'une idée à une autre, d'une pensée futile à une autre dans un rythme épuisant et le seul moment de calme que l'on connaît, le seul petit répit que la vie a à nous offrir c'est quand nous nous retrouvons sur notre bouée de sauvetage. Notre personne préférée. Notre filet de sécurité. Tout ça, pour moi, définit exactement ce qu'est Jérémy. Je n'ai jamais compris ni pourquoi ni comment il y arrivait, mais Jérémy a toujours été mon oasis du calme. Il comprenait mes silences et il savait quoi faire quand il me voyait partir trop loin. Il savait quoi dire pour me ramener à lui aussi parce que parfois...tout va trop loin.

Par moment, je me demande ce que je ferais sans lui, comment je m'en sortirais, est-ce qu'après toutes ces années, je serais capable d'enfin trouver un instant de paix par moi-même sans forcer avoir besoin de son aide ?

- A quoi tu penses ?

Je sens ses doigts se resserrer autour des miens et remarque que Jérémy avait arrêté la marche afin de me retenir alors que j'étais légèrement plus avancée que lui. Cela devait faire une heure que nous marchions dans le village et au moins vingt bonnes minutes que j'avais complètement décrochée de la balade. Encore une fois, j'étais simplement...partie. Dans mon monde.

- Oh ? A rien en particulier, répondis-je

«Rien» et en même temps «à tout». En fait, je pense actuellement à beaucoup de choses qui vont de ce que nous allons manger à midi à «Qu'est-ce que je ferais après le lycée ?»

C'est vrai. Nous n'avons jamais vraiment parlé de l'après, Jérémy et moi. Jusqu'à présent, nous profitions l'un de l'autre quand nous le pouvions même si ces derniers temps, les événements faisaient que l'on ne pouvait pas réellement se voir, mais on faisait de notre mieux et on faisait surtout beaucoup de compromis l'un envers l'autre. Mais nous n'avons jamais parlé de l'après. Après le lycée. Après le BAC. Après tout ça. Qu'est-ce que l'on fera ? Je sais déjà plus ou moins ses projets, mais cela ne veut pas dire que je sois dans l'ultime confidence et vice-versa. Nous ne discutons pas vraiment de tout ça et c'est bien dommage parce que l'année passe et...Le temps nous est compté.

- Je connais cette tête, ce n'est pas une tête de «Rien en particulier», Leila, me dit-il plus soucieux

- Je t'assure ! Je pensais à mes chaussettes dépareillées, au déjeuner, à mon téléphone qui ne tient plus vraiment la charge et ce genre de trucs stupides...C'est vraiment «rien», insisté-je

Au fond, ce n'est pas lui que je veux convaincre en disant tout cela, c'est moi et je ne sais même pas pourquoi. Jérémy lit en moi comme dans un livre ouvert donc à l'heure actuelle, il doit pertinemment savoir que je lui mens ouvertement, mais là encore, il n'insistera pas pour découvrir ce que je lui cache ou pourquoi je lui cache. Néanmoins, il arbora toute la journée cette mine renfrognée de chiot inquiet et je finirais inévitablement pas craquer parce qu'il sait que c'est ce qui marche sur moi.

- Elles sont classes tes chaussettes ! En tout cas, moi, je les aimes beaucoup !

- Tu dis ça parce que c'est toi qui me les a offert à noël dernier ?

- Pas que pour ça, mais c'est vrai que cette fois-ci...J'ai fais fort.

J'ai passé des jours voir des semaines dans la galère car je n'avais pas la moindre idée du cadeau que je pourrais lui faire et Jérémy s'est dit qu'une paire de chaussettes dépareillées ferait l'affaire. Il avait totalement raison et j'apprécie le fait qu'il n'ait rien contre mes chaussettes Star Wars.

- Pour le prochain noël, tu n'auras qu'à m'offrir une autre série de chaussettes si cela t'amuses, lancé-je dans un grand et franc sourire

Cependant, Jérémy ne suivait pas.

Il y avait quelque chose sur l'avenir duquel on osait pas parler. Ni l'un ni l'autre. Quelque chose qui nous bloquait et qui nous effrayait.

- On verra cela, finit-il par dire dans un plus faible sourire

«On verra». Je n'aime pas cette phrase car elle veut à la fois tout dire et ne rien dire. Je ne sais pas ce que l'on verra ni même quand est-ce qu'on le verra, mais je suis pratiquement certaine que Jérémy aussi a son petit jardin secret et qu'il y a enfouit pas mal de choses. Je ne l'oblige pas et je ne l'obligerais jamais à m'en parler, mais...mais je me questionne c'est tout. N'est-ce pas normal ? Je veux dire, si cela doit se finir, je veux le savoir et je veux le savoir avant tout le monde. Je veux le savoir et m'y préparer. Je veux le savoir et trouver une solution pour y faire face. Je veux le savoir et prendre le temps d'affronter la nouvelle.

- Leila ?

Je veux le savoir pour apprendre à aimer l'idée de le savoir partit. 

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