4e partie

             𝓛e silence n'a jamais pesé aussi lourd, et n'a jamais duré aussi longtemps. Ça fait peut-être une poignée de minutes, ou plus d'une heure ; Louis ne saurait le dire avec précision. Il semble durer depuis une éternité, ce silence.

Et puis il y a cette tension dans le véhicule. Elle est partout, elle épaissit l'atmosphère et contracte leurs corps. Celui d'Harry est tendu au possible depuis qu'ils ont quitté le dinner un peu précipitamment. Après que les mots aient glissé de la bouche de Louis, le bouclé l'avait fixé pendant un long moment avant de prendre son manteau, de jeter un billet sur la table, et de claquer la porte. Il aurait sans doute repris la route sans Louis si celui-ci ne l'avait pas rattrapé sur le parking. Maintenant ils en étaient là, à fixer la route d'un air vide tandis que les mêmes mots tournaient en boucle dans leurs esprits.

"Je te déteste, Harry."

Il resserra ses mains sur le volant et cligna rapidement des yeux pour chasser ses idées noires et se concentrer sur la route. S'il était tout seul, il se serait sans doute envoyé dans le décor. Il ne voulait pas mourir, il avait peur, mais peut-être que ça aurait poussé Louis à se soucier un peu de lui. En voyant Harry dans un lit d'hôpital, peut-être qu'il regretterait. Peut-être qu'il admettrait ses erreurs, qu'il jurerait de tout arranger. Dommage qu'il faille surement en être là pour que Louis prenne conscience du mensonge honteux dans lequel il les a entraîné.

Sur le siège passager, Louis ressent une pointe de culpabilité. Il ne sait pas pourquoi il a dit ça, pourquoi il a prononcé ces mots. Il ne le pense même pas. Ou bien ? Peut-être qu'il avait réellement fini par détester Harry. Ses sentiments formaient un océan vague et incertain dans lequel il se noyait un peu plus à mesure que les heures passaient. Il se mordit nerveusement la lèvre en pensant au divorce, puis à sa connerie la plus récente.

"Je te déteste, Harry."

Bordel. Il a encore merdé. Ça commence à faire bien trop de fois maintenant.

Il jette un regard en biais à Harry, ses yeux tombant sur sa mâchoire contractée et l'expression sérieuse qui renferme son visage, puis sur l'heure qu'affiche le tableau de bord. Et merde. Sa culpabilité le pousse à dire quelque chose, n'importe quoi. Il ne peut pas supporter cette tension plus longtemps, ni tous les mots qui sont bloqués dans sa trachée. A deux heures de la signature des papiers, il a envie de tout lâcher.

Harry, il commence d'une voix un peu fragile, surement dû au fait qu'il n'avait rien dit depuis un long moment, p-pour ce que je t'ai dit avant, dans le café, je... je suis vraiment dé-

Ça va Louis, il le coupe un peu brutalement. J'ai compris. Tu as dit ce que tu avais à dire.

Non, c'est pas-

Tu voulais ta vengeance, n'est-ce pas ? Et bien tu l'as eu. Le sujet est clos.

Louis déteste cette situation, il déteste la manière dont Harry s'était renfermé. Rien n'allait, tout était en train de couler.

Je ne voulais pas me venger.

Alors pourquoi t'as dit ça ? il demanda sincèrement, la peine se lisant dans l'intonation qu'il avait prise.

Je- je ne sais pas, d'accord ? Merde Harry, je suis complètement perdu. Il y a cinq mois on s'embrassait encore avant de dormir, on faisait l'amour et on vivait comme un parfait couple marié, et maintenant on est là, dans cette voiture, sur le point de divorcer.

Il se bat contre les émotions qui le rendent faible à cet instant, et contre les larmes qui menacent de couler et de faire trembler sa voix. Harry garde les yeux rivés sur la route déserte, ses mains se resserrant sur le volant au point de blanchir jointures.

Il y a tellement de rancœurs e-et tu ne peux pas imaginer faire sept heures de route avec moi sans que ce genre de connerie arrive, le mécheux poursuit. Tu ne peux pas attendre de moi que je reste assis tranquillement, que j'accepte cette situation sans broncher. A-après tout ce qu'il s'est passé, tu ne peux pas attendre de moi que je t'aime encore...

Ses mots mettent quelques secondes à parvenir au cerveau d'Harry et, lorsqu'ils le font, la voiture vient soudainement piler sur la route. Louis pousse un cri de surprise alors qu'il sent son corps tomber en avant, heureusement retenu par la ceinture de sécurité. La panique continue de se déferler en lui et il relève les yeux, uniquement pour constater que la voiture est immobile au beau milieu de la route. Puis son attention tombe sur Harry, dont la poitrine se baisse et soulève dans un rythme frénétique.

Harry ! il s'exclame, essoufflé. C'est quoi ton putain de problème ?!

Tu ne m'aimes plus ?

Ses yeux verts sont encore posés sur la route, comme si regarder Louis était quelque chose qu'il s'interdisait. Le mécheux envoie un rapide regard dans le rétroviseur pour vérifier qu'aucune voiture ne vient derrière eux, et la panique vient couper sa respiration qui se fait de plus en plus irrégulière.

Harry, il répète, tu ne peux pas t'arrêter en plein milieu. Redémarre.

Il ne le regarde toujours pas, et ne réagit pas immédiatement. L'angoisse qui fait vibrer la voix de son mari fait aussi écho à sa propre panique, lorsqu'il a réalisé ce que Louis venait de dire. La même panique qui rend chaque respiration laborieuse. Il redémarre finalement le véhicule sous le soupire rassuré de Louis, mais uniquement pour se garer sur le bas-côté de la route quelques mètres plus loin. Sans prévenir, il éteint le moteur et sort du véhicule en claquant la portière, puis s'éloigne avant d'étendre celle du côté passager.

Harry qu'est-ce que tu fais ? Louis crie en essayant de le rattraper. Remonte dans la voiture !

La route est en plein milieu d'une sorte de forêt humide, typique du sud-est des États-Unis. Harry marche le long de la route, ignorant totalement son mari qui court pratiquement derrière lui pour le rattraper.

Remonte dans la voiture, il l'entend à nouveau crier.

Harry se retourne brutalement, tombant nez à nez avec Louis qui émet un bref mouvement de recul.

Pas tant que tu n'auras pas retiré ce que tu viens de dire.

Je retire, voilà, t'es content ? Maintenant retournons dans cette putain de voiture, on est au beau milieu de nulle part !

Ils se fixent un instant, leurs cœurs frappant violemment leurs poitrines dans un mélange d'adrénaline et d'affolement. Harry n'esquissa pas le moindre geste, comme si les mots de Louis ne l'atteignaient pas du moment qu'ils n'étaient pas ceux qui l'intéressaient.

Sois sincère, la voix d'Harry tomba dans un murmure, au moins une fois dans ta vie.

Louis ne sut quoi répondre, ni quelle attitude avoir face au désespoir qu'il lisait dans les yeux du bouclé. Ça ne lui allait pas, le désespoir. Ce n'est pas quelque chose qu'il voulait voir dans le vert de ses prunelles, et surtout pas maintenant.

Dis-le, que tu ne m'aimes plus. Répète-le en me regardant dans les yeux.

— Je ne t'aime plus.

— Tu m'aimes, Louis.

— Je ne t'aimes plus.

— Tu le penses vraiment alors ?

— Oui.

C'est un enchainement de mensonges qui tombent de sa bouche, et avec un naturel presque inquiétant. Il maintient le regard d'Harry, sans faiblir, mais intérieurement il se sent défaillir lentement, comme si tout atteignait les limites qu'il s'était fixé. Tout commençait à être trop, et il se sentait perdre doucement le contrôle.

Harry avance d'un pas, sans le lâcher des yeux. Lentement, sa main vient se poser sur la joue de son mari, qui se fige en sentant sa caresse. Et merde, il pourrait s'écrouler tellement ça fait du bien. Il pourrait tout lâcher, ouvrir les vannes, tomber à ses pieds, se laisser aller, ne plus rien retenir. Un souffle délicat passe la barrière de ses lèvres et il ne bouge toujours pas, fermant presque les yeux sous la douceur des gestes d'Harry. Ses doigts frôlent sa joue, puis vienne faire le contour de sa mâchoire, pour finalement passer sur ses lèvres entrouvertes. Ses bagues en métal roulent sur sa peau, traçant derrière elles une flopée de frissons. Depuis quand n'a-t-il pas ressenti cela, cette façon dont Harry le rend dingue ? Ce serait tellement simple de se laisser aller...

Je ne te crois pas, le bouclé murmure, son souffle effleurant ses lèvres.

Si Harry n'avait rien dit, peut-être que Louis se serait laissé faire, lorsqu'il s'est penché vers lui pour capturer ses lèvres. Mais il posa immédiatement une main sur son torse, exerçant une faible pression pour le repousser. Il se demandait bien où il avait trouvé la force de faire ça, alors que les lèvres d'Harry étaient tout ce qu'il y avait de plus désirable. Il aurait tué pour les sentir à nouveau sur les siennes, juste une dernière fois. Mais il avait pris la bonne décision, et le regard que lui lançait Harry ne le ferait pas changer d'avis.

On va divorcer, Louis lâche bêtement, qu'est-ce que ça peut bien te faire, que je t'aime ou pas ? Qu'est-ce que ça change ?

ÇA CHANGE TOUT, il s'exclame en reculant, tirant ses cheveux sous l'énervement. Parce que moi je t'aime. Je t'aime à en crever. Et je sais que tu m'aimes aussi mais que tu mens pour te protéger, comme d'habitude. Tu fais toujours tout pour te protéger, sans jamais penser à moi. La preuve : tu me sors ces mots qui me brise le cœur, sans penser au fait qu'ils me donnent envie de crever. Tu me fais crever, Louis.

Il ne comprend pas pourquoi il lui fait ça, pourquoi il lui dit tous ces mots alors qu'ils s'apprêtent à divorcer. N'est-ce déjà pas assez douloureux ? Faut-il vraiment prononcer toutes ces paroles auxquels ils repenseront ce soir, lorsqu'ils seront chacun dans un lit, seul ? Est-il nécessaire d'ajouter plus de peine, et de créer des futurs regrets ? Tout sera déjà bien assez difficile, pourquoi Harry tient tant à faire surgir tous ces sentiments ? Louis veut juste s'habituer à être seul, à ne plus rien ressentir et à ce que personne ne ressente rien pour lui non plus.

C'EST DU PASSÉ MAINTENANT, Louis élève la voix pour la première fois, ÇA NE COMPTE PLUS, PUISQU'ON VA DIVORCER !

MAIS ARRÊTE AVEC CE FOUTU DIVORCE ! Oublie-le cinq minutes, ce putain de divorce. Pense simplement à moi, et pour une fois dans ta vie bordel bat toi pour nous. Met ta fierté de côté. Rend-toi vulnérable. Laisse-moi t'atteindre. Dis-le, que tu m'aimes.

Cette fois, c'est l'espoir qui illumine ses prunelles. C'est beau à contempler, et quelque peu dévastateur également.

Mais Louis ne dit rien. Les mots sont là, sur sa langue, mais rien ne sort. Harry attend et le fixe avec cette lueur dans le regard, comme si lui seul avait la capacité de changer les choses. Alors, lorsqu'il comprend finalement que Louis ne dira rien, tout retombe. L'espoir, la crainte, la lumière. Il ne reste rien d'autre que les traits d'Harry qui se ferme, et la colère qui assombri le vert de ses yeux. Le bouclé recule un peu, secouant la tête d'un air déçu alors qu'un petit rire brisé vient tomber d'entre ses lèvres.

Tu sais quoi ? Ne dis rien. En te voyant ce matin, je me suis demandé pourquoi je voulais divorcer. Parce que tu étais juste tellement beau, et tellement magnétique. Tu l'as toujours été. Mais maintenant je sais très bien pourquoi j'ai pris cette décision. Je divorce parce t'es l'homme le plus lâche que j'ai connu, et c'est à ça que je penserais au moment où je signerais ces foutus papiers.

Louis encaisse sans dire un mot, son souffle tellement fort que chaque respiration frappe ses tympans. C'est bon, c'est ok. Il mérite tout ça. Harry attend quelques secondes, comme s'il s'attendait à ce que le mécheux réponde quelque chose. Il a toujours aimé avoir le dernier mot, peu importe le sujet des disputes. Mais à cet instant il semble juste trop épuisé pour tenter la moindre défense. Il accepte son sort, comme le lâche qu'il est.

Tu n'as rien à dire maintenant ? Pourtant t'avais l'air de beaucoup m'en vouloir ce matin. Tu avais beaucoup de reproches à me faire. Apparemment tu me détestes. Ces mots là aussi, tu ne les pensais pas. Tu dis énormément de choses que tu ne penses pas. Peut-être que tu ne les pensais pas, tous tes "je t'aime". Et tu ne pensais définitivement pas toutes tes promesses. C'est ça la différence entre toi et moi. Moi, je pense chaque mot que je prononce, et je le pensais, lorsque j'ai dit que je te détestais.

Ça fait mal, c'est un coup de plus qui lui assène. Mais Louis ne dit rien. Il ne bouge même pas, se tenant là au bord de la route face à Harry qui crache tout son venin. Ses joues à lui sont rougies par la colère, et ses veines ressortent le long de son cou. C'est à cet endroit que Louis posait ses lèvres pour le calmer, avant. Quand Louis remettait une discussion sérieuse au lendemain, qu'il oubliait de faire les courses ou qu'il rentrait bourré d'une soirée avec des amis, c'était à cet endroit qu'il l'embrassait pour faire retomber sa colère. Mais l'ampleur de celle-ci n'avait rien de comparable avec ce qu'il avait déjà vu. Harry est hors de lui, et le venin de ses mots vient directement du poison qui semble couler dans ses veines.

A cet instant, tout ce qu'il veut, c'est pousser Louis à bout.

Je te déteste tellement. C'est une chance que je ne sois pas encore tombé dans l'indifférence et le mépris. Si je te déteste, c'est que tu provoques encore quelque chose en moi. Un jour toute cette haine se transformera en indifférence mais pour l'instant je te déteste, Louis Tomlinson. Je te déteste pour tout ce que tu m'as fait vivre.

Quelque chose dans le regard qu'il lui lance est encore plus douloureux que les mots qu'il lui crache. Il n'y a plus une once d'amour, comme si tout était éteint. Mais Louis peut supporter ça, il sait qu'il le mérite. Il est certain que sa mémoire a enregistré chaque parole et que tout tournera en boucle pendant des années, et il reverra encore longtemps l'expression qui brise les traits sculptés d'Harry. Il en a pour des siècles de souffrance.

Tu n'as toujours rien à dire ? Toujours rien qui te ferait parler ?

Louis ne dit rien, le regardant simplement. Il se sentait tellement stupide et vulnérable.

Parlons de Nick alors.

Harry, non.

Il n'oserait quand même pas aller jusque là ? La simple image de Nick et Harry ensemble enrageait Louis. Il n'avait même pas le droit d'être jaloux ou possessif, étant donné qu'il n'avait jamais eu le courage de montrer à Nick que son collègue était un homme marié, mais il ne se sentait pas capable d'écouter ce qu'Harry s'apprêtait à raconter. Il revoyait encore la trace violette sur son cou, et sentait parfois le goût qu'avait laissé cette trahison dans sa bouche.

Je ne l'ai pas immédiatement repoussé, dit-il simplement. Je l'ai laissé faire. Je l'ai laissé m'embrasser la nuque et je l'ai laissé gémir sur ma peau. Et tu sais quoi ? J'ai adoré ça.

Louis ferme les yeux et sent son souffle se couper dans ses poumons. Son cœur bat tellement vite, tellement fort contre sa cage thoracique. Il voudrait que ses battements résonnent encore plus dans ses oreilles, qu'ils l'empêchent d'entendre le moindre mot qui sort de la bouche d'Harry. Il ne veut plus l'écouter, il ne veut pas imaginer tout ça.

Tu ne dis rien.

Et en effet, Louis ne dit rien. Il n'a rien à dire. Il veut simplement que tout s'arrête ; ça, cette conversation, son cœur, ce qu'il ressent. Il veut disparaître. Alors il ferme les yeux un peu plus fort, espérant que ce geste naïf l'emmènera loin d'ici.

Nick était prêt à tout me donner. Il n'aurait pas peur de me prendre la main, de me présenter à ses proches. Il pouvait m'offrir tout ce que je rêvais que tu m'offres. Sur le moment... je n'ai plus pensé à toi. Je n'ai pensé qu'à lui, et au plaisir que je ressentais. A ce bonheur. C'était comme si... tu n'existais plus.

C'est ce qu'il aimerait. Il veut ne plus exister. Il ferme plus fort les yeux, au point de faire danser des points de couleurs derrière ses paupières. Louis pourrait s'éloigner, mettre les mains sur ses oreilles comme un enfant ou même hurler tout ce qui est bloqué dans sa gorge depuis des mois pour ne plus rien entendre, mais quelque chose le pousse à rester planter là, immobile. Surement la voix de sa culpabilité, qui le persuade d'écouter tous ces mots blessants qu'il mérite entièrement.

Après cette nuit-là, lorsque je suis parti, j'ai voulu ressentir ça à nouveau.

Harry...

Je voulais qu'il m'offre tout ça, ce bonheur.

Non. Ne dis pas ça, stop. Ne dis pas ce que tu t'apprêtes à dire, non.

Il savait ce qui arrivait, il entendait déjà les mots exacts qu'Harry allait employer. Mais il ne pouvait pas, il n'y survivrait pas.

— J'ai-

NON !

J'ai couché avec lui.

Lorsqu'il rouvre les yeux, c'est uniquement pour laisse s'échapper les larmes qu'il retenait tout ce temps. Il fixe ces deux billes vertes, celles dont il est désespérément tombé amoureux, et laisse les sanglots couper sa respiration. Il n'arrive même plus à respirer, et bientôt c'est sa vue qui le lâche à cause de toutes ses larmes qui inondent ses joues. Puis ce sont ses jambes, mais il ne s'en rend compte qu'en sentant ses genoux cogner contre le béton de la route. Il n'entend rien d'autre que ses sanglots étouffés, et la dernière phrase qu'Harry a prononcé. Chacun de ses sens le pousse un peu plus à l'agonie.

La scène est pathétique ; Louis à genoux, le visage brisé par ce qu'il vient d'entendre, face à son mari qui ne dit plus rien. Il n'a plus rien à dire et, même si c'était le cas, rien n'arriverait à faire souffrir Louis encore plus. Il venait de le tuer à coup de ces quelques mots, n'importe quelle autre parole n'aurait fait que rebondir sur cet homme déjà mort. Alors Harry ne fait rien et reste interdit devant ce visage qui se tord de souffrance.

T'as pas fait ça, Louis murmure en se prenant la tête entre ses mains, t'as pas pu faire ça. Non non non non, pas toi, pas mon Harry.

Le bouclé le regarde se briser à ses pieds, presque surprise par cette réaction. Pourtant c'est lui qui l'a provoqué. Il avait voulu l'affaiblir, le pousser au bord du gouffre jusqu'à ce qu'il se laisse finalement atteindre. Maintenant que Louis est totalement à sa merci, qu'il n'y a plus un bouclier de fierté et de reproches entre eux, les choses ont peut-être une chance de changer.

Ça ne devrait pas énormément te bouleverser, Harry poursuit avec une ombre d'hésitation dans la voix, puisque tu ne m'aimes plus.

MAIS BIEN SÛR QUE JE T'AIME !

Levant la tête rapidement, il laisse Harry admirer les larmes qui perlent sur ses joues rougies. Il se montre vulnérable pour la première fois depuis qu'ils ont entamé ce voyage, il laisse le bouclé contempler à quel point il est faible, à quel point il est déchiré, et à quel point il tient à lui.

C'est ce que tu voulais entendre, hein ? il reprend dans un sanglot. Tu voulais me l'entendre dire, et bien voilà. Je t'aime à en crever, je t'aime plus que je n'ai jamais aimé, et je n'aimerais plus jamais quelqu'un comme je t'ai aimé- comme je t'AIME toi, il se corrige. Je t'aime comme un fou bordel. Je t'aime tellement. Parfois je me dis que j'aurais dû te le dire plus souvent, et que peut-être ça aurait changé quelque chose, qu'on en serait pas là aujourd'hui. Alors voilà, tu vas signer les papiers en te répétant à quel point tu me détestes, et moi je les signerais en sachant que je t'aime. Tu es l'homme de ma vie, Harry.

La manière dont ses yeux bleus le regardent, tout en laissant cette dernière phrase glisser de sa bouche, fait battre le cœur d'Harry beaucoup plus fort. Il bat rapidement des paupières en sentant ses propres larmes s'accumuler devant ses yeux, comme la pluie dans les rigoles lors d'une averse.

Alors pourquoi ? il s'exclame en retour, sa voix se cassant par endroit. Pourquoi tu m'as caché pendant des années, et forcé à vivre dans le mensonge ?

Je sais. Je sais mon cœur, j'ai merdé putain. J'ai tellement merdé. Tu as raison je suis un lâche et j'avais peur que le regard des autres changes, et qu'il me fasse changer moi aussi. J'avais peur de nous exposer au monde, que tu deviennes la victime de moqueries ou d'attitudes déplacées. Je ne voulais pas qu'on te fasse du mal, ou qu'on nous fasse du mal. Et j'avais peur aussi. Mais j'ai merdé et je le sais. T'es pas quelqu'un qu'on doit cacher, tu mérites tellement mieux. Tu mérites d'être admiré, aimé aux yeux de tout le monde, et embrassé dans la rue. Tu mérites que je me batte pour toi, que je te tienne la main au milieu de la foule, que je hurle à ce foutu monde entier que tu es mien, et que je suis tien. Tu ne mérites pas toutes ces années que je t'ai fait subir, je le sais. Et c'est pour ça que...

Il s'arrête, pas certain de vouloir dévoiler la suite.

Que quoi ?

Harry le fixe dans l'attente d'une réponse, ne pouvant se concentrer sur rien d'autre que le regard intense qu'il lui lance.

C'est pour ça qu'à la seconde où tu es parti, ce soir-là, j'ai tout avoué à ma mère. Sur nous deux.

Le silence tombe comme un voile sur eux, et se fait ressentir comme le calme qui règne après qu'une bataille se soit achevée. Harry en a tellement rêvé, de ce moment. Il l'a attendu pendant des années et voilà qu'il se produit enfin, deux heures avant que Louis et lui ne divorcent officiellement. Il s'était imaginé ce qu'il pourrait dire si ce moment arrivait, quelle réaction il aurait, et la manière dont il sauterait sur Louis pour l'embrasser. Pourtant il dut se battre intérieurement pour trouver quoi répondre, et il resta immobile fixé au sol comme si cela l'empêcherait de s'écrouler.

Tu lui as dis ?

Toute ma famille est au courant.

Qu'est-ce... qu'est-ce que ta mère a dit ?

Elle était déçue. Elle a beaucoup pleuré.

Louis raconte avec légèreté, comme s'il s'agissait d'un lointain souvenir que rien ne peut plus modifier.

Mais ce n'est pas parce que je suis gay, il poursuit, ni parce que je t'aime. C'est simplement le fait d'avoir gardé le silence pendant aussi longtemps. Je lui ai caché l'homme de ma vie, elle était déçue que je n'ai jamais osé lui dire la vérité alors qu'elle a toujours fait en sort que je me sente soutenu.

Il ferme rapidement les yeux et prend une profonde inspiration. Lorsqu'il croise à nouveau le regard attentif d'Harry, il sent que quelque chose à changer. La tension a quitté leurs corps, les nœuds se sont démêlés, les boucliers sont écartés, et il ne reste maintenant plus que leurs sentiments, leurs âmes vulnérables, et cet amour sauvage qui les unis. Il n'y a plus rien pour les séparer.

Toutes ces années gâchées, Louis lâche dans un murmure. Je suis désolé mon amour. Tellement désolé.

Harry fait quelques pas vers lui, les larmes s'emmêlant dans ses cils. Il tombe à genoux, lui aussi, juste en face de l'homme qu'il aime. Il ne réfléchit pas avant de l'attirer dans ses bras. Et c'est comme retrouver son souffle, comme rallumer la lumière après des mois de noirceur. Louis pleure plus fort, sans un bruit, et agrippe le bas du t-shirt d'Harry dans ses poings. Lui vient glisser une main dans ses cheveux, le serrant plus fort contre son torse. Leurs cœurs battent de plus en plus vite l'un contre l'autre, et leurs larmes silencieuses glissent sur leurs peaux. Louis prend une profonde inspiration en nichant sa tête au creux de son cou, sentant cette douce odeur de vanille qui n'était resté que sur les draps après qu'Harry soit parti. Il le sert plus fort. Plus fort plus fort, toujours plus fort, comme dans l'optique stupide de ne faire plus qu'un après avoir été séparé pendant si longtemps. Ils s'enlacent encore plus fort et encore plus longtemps sur le bord de cette route, sous le ciel qui devient menaçant. Ils en ont besoin, de ce moment. C'est le leur.

Retournons dans la voiture, d'accord ?

Louis hoche doucement la tête, le bout de son nez caressant sa peau. Lorsqu'ils se détachent et se relèvent, Louis remarque à quel point son corps a froid. Le vent a commencé à souffler et les nuages au-dessus de leurs têtes de disent rien qui vaille. Ils se dépêchent de rejoindre la voiture et s'installent tous deux dans un soupire. Puis rien. Harry a les mains sur le volant, contemplant la route déserte sans pour autant allumer le moteur. Louis lui jette un rapide regard en biais, sans comprendre. Puis leurs regards se croisent.

Dans le vert il y a ce doute, ce brin d'hésitation qui danse avec une lueur d'espoir.

Dans le bleu il y a le mot "pardonne-moi" qui flotte dans une mare de sentiments puissants.

Dans cet échange silencieux il n'y a qu'un "je t'aime", qui évince tout le reste.

Harry sort son portable et appuie sur quelques touches avant de le porter à son oreille, son regard se portant à nouveau sur la route et les nuages menaçants.

Bonjour, c'est Monsieur Tomlinson... oui...oui, Styles, comme vous voulez. On a eu un problème sur la route, la voiture est fichue... non, il n'y a aucun autre moyen que nous soyons là à temps.

Le vert, maintenant débarrassé de toute hésitation, se pose avec douceur sur Louis.

Je crains qu'il ne faille déplacer le rendez-vous à demain, nous ne pourrons pas signer les papiers ce soir.

Et le bleu brille de soulagement. 


🗡🌹


hi pretty people. voilà l'avant dernier chapitre de cet nouvelle, je ne le trouve pas particulièrement dingue et même un peu mal écris et cliché sur les bords, sorry en ce moment je ne suis pas trop inspirée. le prochain chapitre vous fera souffler (enfin).

harry top ou louis top ?

big love, Xx.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top