3e partie


𝒞a fait bientôt trois heures qu'ils sont dans cette putain de voiture.

Le temps passe à la fois vite et lentement ; lentement, parce qu'il y a encore quatre heures de route qui les sépare de la Nouvelle-Orléans, et quatre heures c'est beaucoup trop pour deux personnes qui se détestent. Quatre heures c'est long, lorsqu'on les passe à se jeter des regards assassins ou à ignorer la présence de l'autre. Mais c'est tellement court à la fois, car quatre heures c'est tout ce qui leur reste. Et quatre heures ça passe vite, lorsque c'est la dernière chose qui vous sépare de la fin.

La radio diffuse un morceau des Beatles, on entend un mot sur deux à cause des grésillements mais ce n'est pas comme s'ils voulaient écouter les paroles avec attention non plus. C'est juste là pour combler le silence pesant. D'ailleurs tout est pesant, dans cette voiture. L'atmosphère, les regards qu'ils se lancent en biais, et tous les mots coincés dans leurs gorges qu'ils aimeraient s'entendre prononcer. C'est pesant, et Louis est à deux doigts de craquer.

Il jette un coup d'œil à l'heure sur son portable et peut s'entendre paniquer ; il leur reste seulement quatre heures.

Prends la prochaine sortie, il s'exclame, presque surpris d'entendre sa voix briser le silence.

Quoi ? Pourquoi ?

C'est une aire d'autoroute. J'ai faim.

En vérité, il a l'estomac noué. La simple image d'un café lui donne mal au ventre. Il ne veut rien manger, rien boire, il ne veut rien du tout depuis quelques semaines maintenant. La seule chose qu'il pourrait vouloir - hormis le fait de rester marier à Harry - c'est d'une clope. Une bonne clope dans un bon paquet bien cher, le genre qui détruit bien la santé. Mais il ne voudrait pas montrer à Harry qu'il la veut, de cette clope. Encore moins qu'il en a besoin. S'il prétend avoir faim, c'est uniquement pour leur donner un peu plus de temps.

On sera pris dans les bouchons à treize heures si on s'arrête maintenant. On va perdre trop de temps.

C'est vrai que tu es très pressé, j'avais oublié.

Harry lui lance un regard en biais, imaginant le juron qu'il voudrait lui lancer à la tronche.

J'ai faim, il répète, s'autorisant même à le croire pour être plus crédible.

Arrête d'être aussi dramatique.

Et toi arrête de faire comme si tu ne mourrais pas d'envie de divorcer. T'as tellement hâte qu'on doit en plus se laisser mourir de faim.

Encore et toujours ce foutu divorce. Harry en a marre, de ce mot. Divorce. Il l'a déjà bien trop entendu en seulement trois heures et dans des conversations aussi courtes. C'est bien la seule chose que Louis a trouvé pour en vouloir à Harry, le seul reproche qu'il puisse lui faire. Il ne pourrait pas l'attaquer sur sa confiance qu'il lui avait donnée, sur sa loyauté sans limites, et sur tout ce qu'il avait sacrifié en échange d'un peu d'amour. Harry n'avait fait qu'une seule erreur ; celle d'être celui qui leur rendrait leurs libertés.

Je m'inquiète juste pour toi mon amour, il explique d'un air faussement innocent et incroyablement exagéré. C'est vrai, y'a plus de trois personnes sur une aire d'autoroute, ça ne te gêne pas ? Les gens pourraient penser qu'on est ensemble.

Heureusement qu'on ne l'est plus, dans ce cas.


Oui, heureusement.


Harry se contente de sourire tristement avant d'allumer son clignotant pour prendre la prochaine sortie. Il n'a jamais su résister à Louis. S'il veut manger, il le laissera manger. Et s'il veut cacher leur relation pendant huit ans, il le laissera faire.

Louis ne dit rien. Il s'étonne de ne pas ressentir une certaine satisfaction en voyant qu'Harry a cédé à sa demande. Peut-être parce que ça ne changera rien à la situation. Au final, ils vont quand même signer ces foutus papiers. Ils ne régleront pas leurs conflits en quatre heures, ni dans cette voiture, ni dans le dinner miteux devant lequel Harry vient de se garer. La fin restera la même.

Ils descendent de la voiture sans échanger un seul mot et marchent l'un à côté de l'autre jusqu'au dinner. C'est dingue comme rien n'a changé, à quel point leurs habitudes restent ancrées en eux. Harry est à gauche, Louis à droite, leurs pas sont synchronisés. Puis Harry ouvre la porte, attendant que Louis entre le premier et effleurant le bas de son dos dans la démarche. Ce geste, ce simple effleurement, ils ne le remarquent même pas. C'est un automatisme qu'un divorce n'effacera jamais.

Ils partent s'installer à une table devant la fenêtre qui donne une vue glamour sur le parking et l'autoroute. Louis se glisse sur la banquette ultra inconfortable et attrape immédiatement la carte qu'il place de façon à ne pas voir Harry, qui s'assoit juste en face de lui. Rien que l'image des plats lui donne la nausée, il ne se voit pas manger quoi que ce soit. Il ne peut s'empêcher de lancer quelques coups d'œil par-dessus la carte, étudiant l'air indécis d'Harry. Ses traits fins sont murés dans une expression sérieuse et concentrée, comme s'il s'apprêtait à prendre une décision importante.

Peut-être que derrière cet air incertain, il se demande simplement : « est-ce qu'il m'aime encore ? »

Louis baisse les yeux sur sa carte.

Tu prends quoi ?

Est-ce que ça t'intéresse vraiment ou t'essayes de faire la conversation ? Louis répond sans lever les yeux.

Ça m'intéresse vraiment. Tu m'as fait chier pour qu'on s'arrête, j'espère que ce n'est pas pour un simple croque-monsieur.

Le mécheux camoufle un sourire alors que ses yeux parcourent les plats proposés.

Je vais prendre des pancakes avec du sirop d'érable. Et avec du coulis de chocolat. Et un supplément chantilly. Ouais, je veux beaucoup de chantilly.

Il ferme la carte, l'air de rien, et vient croiser le regard d'Harry. Il y a une lueur indescriptible dedans, un petit truc qui fait tout briller et pour lequel Louis serait prêt à tout pardonner. Dommage qu'il faille être deux, pour pardonner.

Quoi ? il demande en voyant le début d'un sourire au coin de ses lèvres.

Il est midi et tu prends des pancakes. Un véritable enfant.

Il n'y a pas d'heure pour des pancakes, tu devrais le savoir.

Et cette simple phrase suffit à étouffer le sourire d'Harry avant même qu'il ne s'affiche pleinement sur ses lèvres.


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Lou', lèves-toi. Il est treize heures.

Il ne bouge pas.

En même temps, la détermination d'Harry n'est pas des plus crédibles, ni des plus convaincantes. Dire « lève-toi » en étant soi-même à moitié endormi et encore emmêlé dans les draps est quelque chose de plutôt culotté. Alors Louis ne bouge pas.

Non, il répond d'une voix complètement cassée. Toi, lève-toi.

Il sent le lit bouger, la couverture lui échapper légèrement, puis la chaleur d'un corps qui se colle contre le sien. Il n'a pas la force de sourire mais, s'il l'avait, son sourire aurait de quoi éradiquer tous les malheurs du monde. Le souffle d'Harry caresse sa nuque alors qu'il passe ses mains autour de son corps complètement nu.

Il faut qu'on se lève, il chuchote à son oreille avec sa voix du matin, celle pour qui Louis combattrait jusqu'à la mort.

On n'est pas obligé.

C'est vrai ça, rien ne les y oblige. Ils sont dans leurs chambres, chez eux, rien que tous les deux, et c'est dimanche. Ils peuvent passer la journée à s'embrasser dans ce lit, tout comme ils ont passé la nuit à faire l'amour. Harry vient placer quelques baisers humides sur sa nuque, remontant jusqu'à derrière son oreille. Ce n'est clairement pas ce qui décidera Louis à sortir du lit. Il se colle un peu plus contre le torse d'Harry, lui demandant silencieusement de continuer.

Oui, mais j'ai faim, il ajoute.

Louis met un peu de temps à comprendre les mots qui sortent de sa bouche, son esprit est un peu pris par cette bouche, justement. Cette bouche qui se dépose sur sa peau, et ces mains chaudes qui caressent sa taille.

Je pensais que cette nuit t'aurait rassasié, il répond juste avant que ses yeux ne roulent vers l'arrière lorsque Harry vient grogner au creux de son oreille en pressant un peu plus sa taille.

Au contraire, elle m'a affamé.

Louis rigole niaisement, parce que c'est toujours l'effet que son mari lui fait. Il se retourne pour lui faire face, ouvrant ses yeux pour les poser sur son délicieux visage. C'est dingue comme il est beau, ça le surprendra toujours. Parfois il passe de longues minutes à simplement l'observer, comme un spectateur devant une œuvre d'art. Harry est une œuvre d'art, ses traits sont si fins qu'ils semblent avoir été dessiné de la main d'un sculpteur, et ses yeux sont d'un vert qu'aucune peinture ne peut égaler. Louis se demande comment il a réussi à l'avoir pour lui tout seul. Il le doit surement à la chance, car ce n'est pas comme s'il le méritait.

Embrasse-moi, Harry demande dans un souffle.

Pas question, t'as ton haleine du matin.

N'importe quoi, je sens toujours bon. Embrasse-moi, répète-t-il en se collant un peu plus à lui.

Sinon quoi ?

Sinon je te lèche.

C'est quoi cette menace à la con ?

Sans prévenir, Harry donne un grand coup de langue sur son visage avant d'éclater de rire sous les plaintes de Louis.

Harry ! T'es dégueulasse. Et tu regardes beaucoup trop de comédies romantiques, ce genre de truc c'est fait pour Love Actually, ou je ne sais pas quel autre film tu regardes en boucle.

Harry rit encore plus, mais finit par se calmer lorsque Louis attrape sa nuque pour coller leurs lèvres ensemble. C'est toujours doux, au début. Ça commence par une petite caresse, un petit gémissement. Il suffit de cinq minutes pour que tout se mette à brûler, que les baisers deviennent des morsures et les caresses des griffures.

J'ai faim, Harry répète encore entre deux baisers.

Tu veux que je te fasse des pancakes ?

Il est presque quatorze heures, il souffle alors Louis vient déposer de petits baisers le long de sa mâchoire.

Y'a pas d'heure pour manger des pancakes.

Louis se recule légèrement pour observer son mari, dégageant quelques boucles vers l'arrière pour mieux voir son visage. Putain, il est dingue de ce type.

On pourrait manger ici, et rester au lit toute la journée. Regarder un de ces films où les gens se lèchent le visage comme si c'était mignon.

Ses lèvres s'étirèrent dans un sourire, jusqu'à creuser cette fossette qui avait bien décidé Louis à l'épouser.

Tu mettras un peu de cannelle dans la pâte à pancake ? le bouclé demanda d'une voix aussi pure et douce que du coton.

Bien sûr love, comme tu me l'as appris.

Je suppose qu'il n'y a pas d'heure pour des pancakes, dans ce cas.


⟳⟳⟳


La serveuse qui arriva au bout de leur table mit fin aux souvenirs qui tournaient dans leurs têtes, et peut-être que c'était mieux comme ça. Le moindre objet, le moindre mot, la moindre chanson leur rappelaient à quel point ils avaient été heureux, tous les deux. Il y avait des moments compliqués, et pas mal de tensions vers la fin, mais bordel ce qu'ils avaient été heureux. Et bordel ce qu'ils s'étaient aimé.

La serveuse repart avec leurs commandes, instaurant sans le savoir un nouveau silence entre eux. Ce n'est pas extrêmement pesant comme ça l'était dans la voiture, c'est plutôt intimidant car ils sont face à face et ne peuvent que détourner le regard. Et aucun des deux ne veut être le premier à détourner le regard.

Par pitié, Louis s'exclame après quelques minutes passées sous le regard curieux du bouclé, non.

Quoi ?

Je connais ce regard. Tu vas me demander ce que je deviens.

N'importe quoi, il se défend. Je te regardais juste.

Toi et ta foutue curiosité. T'en crèves d'envie.

Tu te le demandes aussi, ce que je deviens. Tu crèves d'envie de savoir.

Absolument pas.

Toi et ta foutue fierté.

Louis mentirait s'il disait qu'il n'aimait pas ça, cette façon qu'à Harry de l'embêter. Même après tout ce temps, il y a toujours ce petit côté joueur en eux, ce brin de séduction qui s'accorde à un peu de sarcasme et beaucoup d'attirance. C'est comme s'ils avaient 18 ans à nouveau, et que le moindre regard suffisait à faire voler ces foutus papillons dans leurs estomacs. Sauf qu'ils sont censés se séparer, pas tomber amoureux une deuxième fois. Et puis merde, à quoi ils jouent ? Ils divorcent dans quatre heures et Harry est là, en train de le regarder avec cette insolence et cette intensité qui devrait être interdite.

Et sinon, il commence, tu deviens quoi ?

Bordel Harry.

Il ne peut empêcher le rire qui sort d'entre ses lèvres, encore moins lorsque celui d'Harry vient éclater dans la pièce. C'est peut-être la pression qui redescend, ajouté au fait que c'est dur de détester Harry Tomlinson pendant chaque minute de chaque journée.

Enfin, Harry Styles.

Tu veux vraiment que je réponde à ta question ? demande Louis.

Ma foutue curiosité le veut, ouais.

Eh bien, en quatre mois j'ai eu le temps de rencontrer un autre futur divorcé qui, comme moi, en veut énormément à son futur ex-mari. Il a beaucoup d'argent et fait des biens meilleurs pancakes. A toi.

En voyant la lueur dans son regard, Louis craint qu'il n'ait pas saisi son sarcasme - enfin, le peu qu'il y en avait dans sa phrase - mais apparemment c'est tout autre chose.

Moi, je n'ai fait que penser à toi.

Il lâche ça naturellement, d'un ton calme et maitrisé, sans un seul tremblement dans sa voix et sans l'once d'une larmichette qui aurait pu le rendre plus facile à détester. Il a dit ça comme si c'était la chose à dire sur le moment, comme si c'était la pensée la plus honnête qu'il pouvait prononcer à voix haute.

Ils s'étudient en silence, comme avant, sans trop savoir quoi penser. Harry se dit qu'il est en train de faire une belle connerie, de laisser filer l'amour de sa vie. Louis se dit qu'il a merdé sévèrement, trop sévèrement. Ils se disent qu'au final, tout est fichu, tout a été gâché, et n'imaginent même pas tout le malheur qu'il leur reste encore à vivre. Ils se contemplent comme on contemple un échec. Comme on contemple le bonheur qu'on est en train de laisser filer.

Les plats arrivent et Harry en profite pour enfin baisser les yeux car, même s'il est celui qui a décidé de mettre fin à leur relation, il n'a pas assez de courage pour regarder droit dans les yeux celui qu'il n'aura plus jamais le droit de toucher. Ni d'embrasser. C'est à peine s'il osera prononcer son nom après aujourd'hui.

Louis ne jette même pas un regard à ses pancakes. Il fixe Harry, l'écho de ses derniers mots résonnant encore entre ses pensées. « Moi, je n'ai fait que penser à toi ». De quel droit ? De quel droit il lui dit ça maintenant, à quatre heures de la fin. Il sent son cœur battre plus fort sans lâcher Harry des yeux, qui ne s'occupe que du ketchup qu'il arrose sur ses frites huileuses. C'est exactement l'image qu'il a en tête depuis quatre mois ; Louis qui ne peut détacher son esprit de lui, d'eux, et lui qui continue de vivre sa vie sans lui, comme si rien ne l'avait bousculé. Lui qui envoie ce putain de formulaire pour divorcer, qui engage des avocats et qui planifie tout du début jusqu'à la fin sans la moindre complication.

Il entend maintenant tous les je t'aime, les promesses qu'il lui a faites entre deux baisers, et il a envie d'hurler. Il veut crier pour attirer son attention, envoyer valser ses putains de frites et balancer tout ce qu'il y a sur cette table. Il veut qu'Harry le regarde droit dans les yeux et qu'il comprenne à quel point il le fait souffrir, et il veut qu'il souffre, lui aussi. C'est égoïste, c'est toxique, c'est tout ce qu'ils sont devenus l'un sans l'autre. Louis revoit toutes ces scènes qui se mélangent, les disputes et le verre brisé sur le sol de la cuisine, les regards vitreux lorsqu'ils faisaient l'amour et que leurs bouches murmuraient des « pardonne-moi », « je suis tellement désolé ». Il pense à l'amour immense qu'ils partagent toujours, à ces sentiments surpuissants qui sont maintenant destructeurs. Ils en ont trop fait, ils se sont trop aimés.

Alors pourquoi Harry ne semble pas ressentir le quart de ce qui détruit Louis depuis des semaines ?

Il a décidé de divorcer sans répondre à aucun appel, aucun message. Il n'a même pas essayé d'arranger les choses, d'écouter les excuses et autres paroles que Louis récitait en boucle dans son esprit en fixant le plafond de leur chambre. Il est juste parti pour revenir avec un formulaire de divorce sous le bras, sans difficulté. C'est comme s'il avait arrêté de se battre, qu'il avait accepté la défaite, et Louis ne comprend pas. Leur mariage ne méritait-il pas qu'ils se battent un peu plus longtemps ?

Tu ne manges pas ? Harry remarque en lançant un rapide regard sur ses pancakes intacts qui commencent à ramollir. Je croyais que tu avais faim.

Je croyais que tu m'aimais.

Harry relève immédiatement le regard vers lui, sentant ses muscles se figer devant les larmes qui perlent au coin de ses yeux. Il aurait tout donné pour ne jamais revoir ce regard. Il pensait qu'il n'aurait à l'affronter qu'une seule fois dans sa vie, et que ce serait à jamais ce soir-là.


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Harry rentrait plus tôt, ce soir-là. On pouvait bien le traiter d'impatient ou d'empressé, il s'en fichait pas mal. Ses pas foulaient rapidement le béton des rues de Jackson, sa démarche hâtive guidée par l'espoir.

Louis avait promis de parler à sa mère, aujourd'hui. A propos de lui, et d'eux.

Il avait passé sa journée à faire des rondes dans l'open space, recevant quelques regards confus et devenant la victime des blagues de Nick. Mille questions tournaient dans sa tête, accompagnées de mille scénarios. Il sentait au fond que tout se passerait bien. Jay' était une femme adorable, et une mère formidable. Elle aimait ses enfants quoi qu'ils puissent faire et elle continuerait à les aimer même si cela venait à ne plus être réciproque. Et puis, elle avait voté Bernie Sanders aux dernières élections et mangeait bio, cela prouvait qu'elle était une assez bonne personne, non ?

Ouais, y'a pas de raisons que ça se soit mal passé.

Il accéléra encore en voyant son immeuble, à la limite de courir. Il appuya violemment sur le bouton pour appeler l'ascenseur - d'ailleurs il appuya plus de fois que nécessaire - mais se résolut à prendre les escaliers. Une fine couche de sueur commençait à naître sur le haut de son front. Bordel, il fallait vraiment qu'il se calme. Ce n'était qu'un coming-out, après tout. Putain, c'était un coming-out. Sur cette pensée, il gravit les marches deux par deux, se retenant franchement de les monter quatre par quatre (à quoi bon avoir d'aussi grandes jambes si ce n'est pour ce genre d'occasions).

Devant la porte de leur appartement, il prit le temps de calmer sa respiration et d'essuyer son visage avec la manche de son costume. Sans le vouloir, il entendit la voix de Jay' de l'autre côté de la porte. Ok, elle était encore là. Il ne pouvait pas rentrer dans cet état, on aurait clairement dit qu'il venait de faire tout Jackson au pas de course. Ce qui était un peu le cas, à vrai dire. Il se décida finalement à prendre une profonde inspiration, et introduisit les clefs dans la serrure.

La conversation qu'entretenaient Jay' et Louis - et qui semblait plus ou moins animée depuis le couloir - s'éteignit à la seconde où leurs regards se posèrent sur Harry. Jay' fondit dans une expression joyeuse et se leva du canapé pour embrasser les joues du bouclé, exactement comme si elle embrassait un fils. Harry eut des papillons dans le ventre. Ça s'était bien passé, alors ?

Harry, comment vas-tu mon beau ? On t'attendait !

Le concerné jeta un rapide regard à Louis, qui se levait à son tour. Son expression n'était pas aussi lisible et déchiffrable qu'Harry l'aurait souhaité. C'était même plutôt froid, pour être honnête.

Ah oui ? il demanda en reposant son attention sur Jay' qui lui adressait un grand sourire. M'attendre pour quoi ?

Louis m'a annoncé une grande nouvelle.

Le sourire d'Harry s'étira.

Je pense savoir de quoi il s'agit.

Vraiment ? Louis t'a déjà parlé de sa promotion à la banque ? Je croyais être la première au courant.

Le sourire d'Harry s'effaça.

U-une promotion ?

Il envoya un regard confus à Louis, à la limite du désespoir, mais celui-ci ne fit rien de plus que de se mettre à côté de sa mère et de garder le dos droit, comme si cette situation n'avait rien d'anormal.

Oui, son patron lui a donné une promotion. Il aura son propre bureau, et une augmentation !

Oh. Oh, il répéta, clignant des yeux comme pour effacer sa surprise et sa confusion, c'est... c'est génial ! Je n'étais pas au courant.

Il tenta d'ébaucher un sourire, juste un simple petit sourire qui ne dévoilerait même pas ses dents, mais sa tentative échoua en un pincement de lèvres. Il posa ses yeux sur Louis, le priant du regard de faire un quelconque signe, un quelconque geste rassurant. Son cœur loupa un battement à l'idée qu'il n'avait surement pas encore parlé à sa mère. Du moins, pas de ça. Il ne s'entendit même plus respirer lorsqu'il réalisa que, peut-être, cette histoire de promotion n'était qu'une excuse qu'il avait trouvée à la dernière minute, sous le coup de la panique.

Non, quand même pas.

Tu restes diner, Jay' ? il demanda d'une voix plus ou moins fragile.

Bien sûr, il faut qu'on fête ça ! Ce n'est pas tous les jours que notre Louis a une promotion. D'ailleurs je pensais que ça n'arriverait jamais, vu son parcours à l'université...

Il réussit à sourire, cette fois. Il se retint aussi de dire que les notes catastrophiques de Louis étaient dues au fait qu'il préférait lui faire l'amour plutôt que de réviser ses examens. C'est une anecdote qu'il se fera un plaisir de raconter devant tout le monde, pour leurs dix ans de mariage. L'espoir faisait à nouveau battre son cœur de manière régulière. Peut-être que Louis attendait Harry pour parler à sa mère. Peut-être qu'en plein milieu du diner, il allait prendre sa main et avouer avec un sourire qu'il est dingue d'Harry depuis huit ans.

Ouais, c'est surement ce qu'il prévoyait de faire.

Mais le diner passa, et rien d'autre ne se passa. Harry avait été plutôt silencieux, bien que suspendu aux lèvres de Louis, dans l'attente de cette fameuse réplique qui changerait tout. Il ne l'entendit jamais, car jamais Louis ne la prononça. Il avait parlé de sa promotion, de ce collègue stupide qui léchait les bottes à son boss, du temps un peu humide qu'il faisait en ce moment, du crétin de facteur qui se trompait souvent de boîte aux lettres, et de l'importance qu'avait la protection des abeilles, après qu'un documentaire sur le sujet ait éveillé sa conscience.

Mais rien, absolument rien, sur Harry. Sur eux.

Il y avait cru jusqu'au dernier instant, jusqu'au moment où Jay' referma la porte d'entrée derrière elle. Si Louis s'attendait à voir Harry aussi perdu et blessé, il n'en montra rien. Il lui tournait d'ailleurs le dos et s'occupait de la vaisselle comme si rien ne clochait. Harry le fixa longtemps. Du moins, il lui sembla que les minutes étaient extrêmement longues. Il ne réalisait pas tout à fait ce qu'il venait de se passer, ou alors il était simplement sous le choc. Toute la journée il avait attendu ce moment fatidique que Louis lui avait promis et, maintenant, c'est comme s'il avait été le seul à l'imaginer. Comme s'il l'avait inventé.

Il monta les marches du duplex d'un pas lent, comme si le moindre pas le fatiguait un peu plus. Il se sentait... épuisé. Et la fatigue n'avait rien à voir avec son travail, ou le fait qu'il se soit levé à six heures ce matin, ni parce qu'il avait passé sa journée à faire des calculs et programmer des algorithmes devant un écran. C'était la situation qui l'épuisait ; la même situation depuis huit ans. C'était ce combat qu'il n'avait plus envie de mener.

Harry parti s'asseoir au pied du lit, se sentant soudain si impuissant et égaré. Il semblait loin de tout, ne comprenait plus rien. Il n'arrivait même plus à concevoir un avenir, à en imaginer un, et il ne le désirait même pas. Tout semblait condamné et il ne savait plus quoi faire, quoi dire. Il était exténué. Déconnecté. Brisé.

Ses jambes le portèrent avec difficulté jusqu'à l'armoire qu'il ouvrit pour sortir une valise. Sa valise. Les gestes se firent naturellement, dans un calme presque décalé et paradoxal par rapport à ce qu'il s'apprêtait à faire.

Harry... qu'est-ce que tu fais ?

Sa voix résonna derrière lui mais il ne se retourna pas. Les vêtements continuaient de tomber dans la valise grande ouverte sur le sol, avec un certain soin qu'Harry tenait à avoir. Il aimait lorsque tout était ordonné et, à défaut de sa vie qui ne l'était plus depuis trop longtemps, sa valise le serait.

Je pars, Louis.

Ce fut dur de les prononcer, ces mots-là, et encore plus dur de les entendre à haute voix. Surtout pour Louis, qui avait toujours imaginé ce moment avec crainte. Sa plus grande peur se déroulait devant ses yeux ; Harry partait.

Il quelques pas chancelants vers lui, incapable de croire à ce qui était en train de se passer. Ses yeux brillaient de frayeur, bien qu'Harry ne les regardait pas.

Attends, quoi ? il demanda dans un souffle.

Je ne peux plus.

Tu... tu romps avec moi ?

Ses mots baignaient dans la panique et tout chez lui, de l'expression sur son visage jusqu'au ton qu'il venait d'employer, montrait qu'il n'avait aucune idée de comment gérer cette situation. Il se tenait à quelques mètres de lui, le souffle coupé.

Je pars, lui répondit-il simplement, n'ayant peut-être pas la force d'utiliser les mêmes mots que Louis.

Harry, regarde-moi s'il te plaît tu... tu ne peux pas faire ça.

Le désespoir dans sa voix n'encouragea même pas Harry à entreprendre un geste. Il continua de plier des t-shirts et des chemises qui s'entassait en une petite pile sur le lit, et qu'il venait ranger soigneusement dans sa valise. Il ne se retourna pas, ne répondit même pas, ne laissant même pas une chance à Louis. Et bien tant pis, il la prendrait lui-même, sa chance. Il s'avança encore, détestant la manière dont il lui tournait le dos comme s'il ne permettait aucune discussion.

Bordel Harry, regarde-moi ! il ordonna en arrachant une chemise de ses mains, et enfin il leva ses yeux vers le sien. Ne me fait pas ça, ne me laisse pas.

La dernière partie de sa phrase était sortie comme une supplication, car c'était exactement de quoi il s'agissait. Harry respirait fort, ça se voyait à sa poitrine qui montait et descendait presque frénétiquement. Il tentait de ne pas exploser, ou simplement de ne pas fondre en larmes. Mais cela arrivera quand même, parce que quitter Louis était surement la chose la plus dure à faire, au point de n'avoir jamais osé l'imaginer jusqu'à maintenant.

J'ai essayé, il répondit, la voix tremblante, je te jure que j'ai essayé. Mais je ne peux pas continuer à être ton petit secret que tu planques aux yeux de tout le monde. Je ne peux plus être celui que tu regardes uniquement lorsqu'il n'y a personne autour.

Louis crut mourir en entendant ses mots. Non non non. Non. Il ne le quittait pas, Harry ne pouvait pas le quitter.

Mais on l'a fait pendant tout ce temps e-et tu étais bien. On était bien. Tout allait bien Har-

Et ça y est ; Harry explosait. Il y avait des millions de mots coincés dans sa gorge, et il ferait en sorte que Louis les entende tous. Aujourd'hui, il ne se tairait pas.

Ça l'était parce que j'avais l'espoir que tu parlerais à ta mère ! il s'exclama en se retournant brutalement vers lui, la détresse brisant la douceur de son visage, et le calme de son intonation. Tu me l'avais promis, bordel ! Et comme un con j'ai attendu ça pendant tellement d'années, je me suis même marié en ayant cette foutue promesse en tête. Je tenais car j'y croyais, et j'y croyais parce que tu me l'avais promis, nom de Dieu ! Je me suis attaché à ça pendant des années, et ce soir plus que n'importe quand auparavant. Mais t'es qu'un putain de menteur, tu le sais ça ? Et puis merde, arrête de cacher ta lâcheté derrière des excuses. « on était bien », il répète ses mots, « c'est mieux pour notre couple » ? T'es qu'un lâche, Louis. Et un menteur. Un putain de menteur.

Il ne supportait pas de regarder Louis droit dans les yeux plus longtemps, alors il reprit la chemise des mains de Louis et la plia avant de la jeter un peu violemment dans la valise.

Je sais ce que je t'ai promis, Louis relança les hostilités, et je sais que je t'en demande beaucoup, mais toi aussi tu m'en demandes trop, Harry ! Tu sais à quel point j'ai eu du mal à accepter ma sexualité, et mon père-

Et ton père t'as élevé dans un environnement complètement homophobe et toxique avant de se barrer en laissant ta mère seule avec tes sœurs et toi, il le coupa en lui jetant un regard. Je sais tout ça Louis, et je n'ai jamais craché dessus. Mais tu ne semblais pas te poser de questions lorsque je te chevauchais dans les toilettes du lycée. Ta sexualité n'était pas difficile à questionner, à ce moment-là. Ni quand-

J'ai compris, Harry ! Je comprends, il répéta plus doucement. Mais, merde, tu ne vois pas que c'est un sacré sacrifice que tu me demandes de faire ?

Harry cligna des yeux en le regardant, pas certain de pouvoir retenir toutes les injures qu'il rêvait de lui balancer.

Un sacrifice ? Et tu y perdrais quoi, dis-moi ?

Le silence frappa l'atmosphère.

Regarde-moi dans les yeux et dis-moi que Jay' ne te soutiendra jamais, que tes sœurs te tourneront le dos, que ça deviendra l'enfer au travail et que tes amis riront de toi, que tu te feras tabasser dans toutes les rues de Jackson et que tu ne pourras même plus faire un pas en ville sans te faire insulter de sale pédale. Dis-moi que c'est ce que tu crois qui arrivera, si tu arrêtes de nous cacher.

Louis ne dit rien, et ça fit bien plus mal que s'il avait murmuré quoi que ce soit. Ce dont il avait peur, ce n'est pas de ce que les autres en penseraient, mais de ce qu'il en penserait lui-même. Il avait peur d'avouer sa différence, car cela la rendrait belle et bien réelle. Harry s'en fichait, car il ne se considérait pas comme quelqu'un de différent. Il ne l'était pas, et Louis non plus. Qui avait-il de différent entre leur amour et celui que partageaient un homme et une femme ? Rien, si ce n'est qu'ils s'aimaient surement moins qu'Harry et Louis.

Et quand bien même c'était réellement un sacrifice, il ajouta, je ne le mériterais pas ? Tu ne m'aimes pas assez pour le faire, ce sacrifice ?

C'est n'importe quoi. Tu dis n'importe quoi. Referme cette valise.

Harry ne fit pas un geste.

Ce que je vois, maintenant, c'est un homme qui a honte d'être ce qu'il est, et honte d'être avec qui il est.

Louis sentit ses yeux le piquer légèrement et il n'y avait aucun doute qu'il finirait par fondre en larmes dans quelques minutes. Il sentait Harry lui glisser des mains, et il voyait que tout, absolument tout, était de sa faute.

Et j'en ai marre d'être ta honte, Louis, il continua, le ton de sa voix montrant qu'il était épuisé, et ses yeux montrant qu'il souffrait. Tu me gardes à l'abri des regards parce que tu as trop honte de moi pour nous afficher au grand jour. Tu n'es pas fier de moi, de nous, pas fier de me présenter à tes parents, ou simplement de me tenir la main dans la rue. Tu as tellement honte que tu n'arrives pas à m'aimer.

Harry parti vers l'armoire et attrapa un tas de vêtements sous le regard effaré de Louis. Il ne savait pas quoi faire, quoi dire, lui non plus. Il se sentait impuissant devant cette la destruction de leur couple qui se déroulait là devant ses yeux. Mais il voulait croire qu'il avait une chance d'arranger les choses.

Bien sûr que je t'aime, il commença faiblement. Putain. Harry. Je t'aime comme un fou. Je t'aime tellement. Ne me fait pas ça je t'en supplie, je t'aime, il s'exclama en intensifiant un peu plus chaque répétition. JE T'AIME ! Ça ne te suffit pas ?

Non, ça ne suffit plus.

Louis était à deux doigts de tomber à terre. Il était prêt à tomber à genoux devant Harry, mains jointes contre son cœur, il était prêt à le supplier, à prier pour qu'il ne parte pas, qu'il arrête de faire sa valise. Il essuya rageusement les larmes qui coulaient sur ses joues avec la manche de son sweatshirt et fixa Harry, qui continuait de plier ses vêtements. Pourquoi il ne pleurait pas, lui ? Peut-être parce qu'il avait déjà trop pleuré, dans cette relation, et que maintenant il n'avait plus rien. Plus aucune larme, plus aucun espoir, plus aucune volonté, plus aucun sentiment.

J'ai respecté ton choix pendant des années, Harry continua, étonnamment. On s'est marié devant cinq personnes bordel. Cinq personnes ! J'ai... j'ai besoin d'être libre, maintenant. Et je ne peux pas l'être avec toi, alors je pars.

Cette fois, il n'essuya même pas ses larmes, elles coulaient sans fin. Il ne se sentait pas pathétique, il ne se sentait même pas assez désespéré. Harry était en train de le quitter, il pouvait faire bien plus pitoyable que ça.

Harry, il prononça avec toute la peine du monde dans ses poumons et toute la souffrance dans son cœur, je ne... je ne peux pas vivre sans toi.

Il ancra ses yeux verts dans ses prunelles bleues, comme la toute première fois où ils s'étaient regardés. Mais aujourd'hui le bleu est noyé par les larmes, et le vert aussi, en plus d'être incroyablement vide.

J'aurais aimé que tu dises cela devant ta mère, ce soir.

Louis allait mourir. Si ses mots pouvaient autant l'atteindre, son absence allait être insupportable. Il en crèverait.

Harry ne prit pas le temps de plier les derniers vêtements, il les balança dans la valise et commença à tirer les fermetures. Louis l'observait sans un mot, ne pouvant se résoudre au fait que ses yeux se posaient peut-être sur lui pour la dernière fois. Il regarda les boucles qui tombaient élégamment sur son front, les traits fins qui soulignaient son profil, sa mâchoire parfaitement sculptée, cette... cette trace, au creux de son cou.

Harry, c'est quoi ce truc, sur ton cou ?

Le concerné s'immobilisa pendant quelques secondes, n'osant pas tourner son regard vers Louis.

Rien.

Harry, c'est un suçon ?

Il se dépêcha de fermer la valise mais une des fermetures restait bloquée et il souffla un juron. Il fallait qu'il parte.

Ce n'est pas moi qui te l'aie fait, Louis continua, poursuivant son raisonnement à voix haute pour arriver à une conclusion que son inconscient connaissait déjà. Je ne t'en fais jamais.

Ouais, sinon les gens pourraient se poser des questions, on est au courant de ta psychose, Louis.

Il resta planté là comme un imbécile, les joues toujours trempées de larmes, ébahi par les mots qui venaient d'être dit. Harry ne niait pas, il ne niait rien du tout. Il réussit finalement à fermer sa valise et ne perdit pas une seconde de plus avant de l'empoigner et de se diriger vers la porte, ne souhaitant rien d'autre que de partir d'ici au plus vite. Mais Louis ne le laisserait pas.

Tu te fous de ma gueule, il s'exclama en se précipitant devant lui, les yeux écarquillés et assombris par la colère. C'est quoi ce bordel, pourquoi t'as un suçon dans le cou, tu te tapes quelqu'un d'autre ?

Harry aurait pu être blessé que Louis pense ça de lui. Sérieusement ? Se taper quelqu'un d'autre ? Harry n'était pas un lâche - pas comme lui, en tout cas - et certainement pas le genre à vouloir plus d'une personne à la fois. Même si cette personne lui crevait le cœur chaque jour un peu plus.

C'est Nick, il lâcha simplement. Je l'ai repoussé immédiatement, je te le jure.

Ah oui ? Louis demanda avec ironie, accompagné d'un petit rire nerveux. Immédiatement ? Tellement immédiatement qu'il a eu le temps de faire une putain de trace sur ton cou. Tu l'as repoussé immédiatement aussi lorsqu'il s'est mis à genoux pour te sucer ?

Harry serra plus fort l'anse de la valise dans sa main, luttant pour ne pas faire tomber les larmes qui floutaient sa vue. Elles inondaient toujours le regard de Louis mais sa colère avait créé une sorte de voile qui le rendait bien plus fort qu'Harry, à cet instant.

T'as pas le droit de dire ça, il s'exclama d'une voix cassée.

Et pourquoi ?

Parce que tu m'as menti Louis, et parce que tout est de ta faute. Tu as tout gâché.

Ça n'expliquait rien, bien évidemment, mais Harry ne ressentait pas le besoin de justifier quoi que ce soit. Il n'aurait jamais trompé Louis. Merde, c'était même impensable qu'il le fasse. Mais quand le ton de la conversation qu'il entretenait avec Nick avait soudainement changé, il n'avait rien fait. Il avait attendu d'être plaqué contre le mur et que son collègue pose ses lèvres sur sa peau. Là, uniquement, il l'avait repoussé. Il ne sait pas vraiment ce qu'il lui a pris, sur le moment, il n'est même pas attiré par Nick. Il n'est attiré par personne d'autre que Louis. Mais il y avait quelque chose que Nick aurait pu lui offrir et que son propre mari n'avait jusqu'alors jamais voulu lui donner ; la liberté d'être soi-même.

Ne le prend pas personnellement, il poursuivit. Nick ne l'aurait surement pas fait s'il savait que j'avais un petit-copain. Encore moins s'il savait que j'avais un mari. Mais il ne le savait pas, parce que rien ne suppose que je t'appartiens.

Louis ne dit rien, abattu par ses mots.

Et peut-être qu'au final, je n'ai plus envie de t'appartenir.

Il n'y avait aucun moyen qu'il survivre à ça ; à cette conversation, à son absence.

C'est pour ça que tu veux partir ? Louis demanda doucement. Tu me quittes pour lui ?

Une larme chuta rapidement sur la joue d'Harry.

Je te quitte parce que je te déteste, Louis.

C'est les derniers mots qu'il prononça avant de sortir de la chambre, sa valise à la main.

Ce n'était pas rien, comme mots. Ils faisaient plus mal que n'importe quels autres, et Louis se demanda comment il arriverait à ne plus les entendre dans son esprit.


⟳⟳⟳


Quatre mois plus tard, Louis les entend encore. « Je te déteste, Louis ». Ce soir ils ont tous les deux compris que l'amour qu'ils partageaient venait de franchir la ligne. Cette fameuse ligne extrêmement fine qui sépare la haine de l'amour. Louis souffre encore de ces mots qu'Harry lui a balancés, et il revoit le regard vide qu'il avait lorsqu'ils sont sortis de sa bouche. Quelque chose s'est brisé, ce soir-là. Louis s'est définitivement brisé.

Je te déteste, Harry. 



hiiii pretty people

c'est ce qu'on appelle un long ass chapitre, 6700 mots les p'tits potes, j'espère que vous avez aimé. Il ne reste plus que deux chapitres et ce sera la fin de cette nouvelle :(

ici on apprend enfin ce qu'il s'est passé "ce soir-là". on peut dire que Louis le méritait un peu, et vous avez pensé quoi de nick et harry hehe ? j'aime foutre la merde

d'ailleurs petite question : pensez-vous que ça finira en happy end, ou en sad end ? ou un happy end qui fait pleurer comme un sad end ?

j'ai toujours pas update spleen ni centuries, je suis un peu focus sur divorce papers mais bon je vais essayer d'update Centuries parce que c'est du bon Larry aussi. 

love love love

Xx.

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