Chapitre 8 - La Déesse des Désirs (2/2)

Terrifiée, je tentai de m'échapper.

Le visage étonné d'Edan me fit face. Je me crispai. Il était trop proche de moi.

Je me rendis compte que tout mon corps tremblait.

— Qui est avec toi ? demanda-t-il et sa voix était terriblement rauque.

Ses yeux inquisiteurs me décortiquaient, rien ne pouvait lui échapper. Ils cherchaient en moi, voulant révéler au grand jour tous mes secrets. C'était le même regard qu'à notre première rencontre. J'eus l'étrange impression que ce n'était plus moi qu'il voyait.

Lucas m'avait dit à ce moment-là qu'il était particulièrement sensible à la magie.

J'étais certaine qu'il avait senti Talia quand elle était réapparue.

En plus de la curiosité, je lus sur son visage une passion, un désir frôlant la folie qui m'ébranlèrent comme jamais. Mon cœur s'emballa. Ma tête me tournait, ivre de l'adrénaline qui parcourait mon corps.

— Personne, couinai-je, d'une petite voix.

Je tentai de m'éloigner une fois de plus. Il refusa de me lâcher. Ses prunelles descendirent sur mes lèvres et il se pencha un peu plus vers moi. Est-ce qu'il allait... ?

« Eloigne-toi ! Il est sous l'influence du Désir ! C'est dangereux ! Il... »

Mon visage se décomposa. Edan ? Il la ressentait ?

Je reculai d'un pas. Je me mordis les lèvres et tentai de retenir mes gémissements de terreur, mes larmes. J'échouai misérablement. L'une d'elle s'échappa et dévala ma joue. Edan détourna ses pierres précieuses de ma bouche pour la suivre.

Aucun de nous ne bougea pendant plusieurs secondes. Les battements de mon cœur semblaient assourdissants. Son souffle chaud sur ma peau me donnait des frissons. Je me sentais en manque d'air, pourtant sa respiration attisa un feu en moi et je ressentis le manque de sa chaleur, le manque de son contact. Je me surpris à me pencher légèrement, cherchant sa prochaine action dans le beau vert de ses iris.

Finalement, il lâcha un soupir tremblant et recula, me relâchant.

Mes jambes cédèrent et je m'effondrai sur moi-même.

« Ne bouge plus. Reste là. »

Même si je l'avais voulu, j'en aurais été bien incapable.

Edan me fixa. Je déglutis et m'éloignai maladroitement, reculant jusqu'au mur du couloir. Il ferma les yeux.

« Ne lui dis rien. Ne lui parle pas de moi. »

Je ne comptais rien dire. La seule chose que je voulais, c'était me rouler en boule et oublier. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Et les autres dieux ? Où étaient-ils ?

Edan s'accroupit soudain devant moi et me dévisagea. Je ne dis rien et patientai, prête à l'éjecter avec mon pied s'il s'approchait. Est-ce qu'il allait se jeter sur moi ? Talia était toujours là, il devait toujours ressentir sa présence. Sa trop grande sensibilité à la magie était dangereuse pour moi. Il allait découvrir pour Talia tôt ou tard. Elle ne souhaitait pas que je lui parle d'elle mais il allait falloir que je sois sacrément convaincante pour expliquer le désir qu'il avait ressenti pour moi. Je n'étais pas certaine que la réponse « mon charme naturel » soit suffisante. De plus, s'il y était sensible maintenant, qui pouvait m'assurer qu'une telle situation ne se reproduirait pas ? La partie la plus féminine de moi-même se demanda si ce serait si terrible. Je me giflai mentalement. Il avait une excuse pour se jeter sur moi, ce n'était pas mon cas.

« Ils sont partis. C'est bon. »

J'étais en train de réfléchir à un mensonge plausible quand elle m'annonça la bonne nouvelle. Je lâchai le souffle que je retenais. Je fermai les yeux un instant, adressant une prière de remerciement à tous les dieux qui existaient exceptée Talia. J'étais tellement soulagée que je me mis à rire. Il devint rapidement incontrôlable. Bientôt, les larmes coulèrent le long de mes joues. Je m'essuyai les yeux, agitée. J'en oubliai Edan un instant jusqu'à qu'il se manifeste de nouveau. Je me figeai quand ses propres doigts s'approchèrent pour essuyer mes joues humides.

— J'aurais dû m'en douter, marmonna-t-il, et ses yeux étaient furieux, haineux.

Se douter de quoi ?

Comme s'il réalisait à peine son geste, il retira sa main. Redevenu impassible, il se releva.

— Viens. Retournons dans la salle.

Il me tendit la main pour m'aider à me mettre debout.

Attends... C'est tout ?

— Tu... ne poses pas de questions ? demandai-je, interloquée.

Car personnellement, j'en avais des milliers.

« Ne lui donne pas des idées, imbécile. »

Il évita mon regard.

— Je ne pense pas que tu puisses me fournir de réponses, finit-il par dire.

« Un être intelligent. Prends exemple. »

Il fallait vraiment que je me débarrasse de cette voix inutile.

Je regardai sa main, puis décidai de me relever toute seule, prenant appui sur le mur. Je ne le quittai pas des yeux. Il baissa sa main.

« Reste près de lui toute la soirée. Son essence masque la mienne. Tu passeras inaperçue. »

C'était donc la raison de l'absence des Sidias.

Je me sentais soudain épuisée. Rester auprès d'Edan ? Alors qu'il pouvait se jeter sur moi à tout instant ? S'il fallait compter sur mon bon sens pour le repousser, autant qu'on prenne une chambre dès maintenant.

Cette soirée était une catastrophe. Je croyais réaliser mon rêve de princesse, vêtue de ma robe époustouflante. À la place, j'avais écopé du retour de la déesse dans ma tête et d'une aura de femme en chaleur masquée uniquement pas la présence de ma némésis qui ne rêvait que de me voir déguerpir.

Je tenais tout de même à lui fournir quelques explications. Je voulais qu'il m'aide.

Que quelqu'un m'aide.

— Je ne comprends rien à cette magie. C'est pour cela que je souhaite retrouver un Tombeau. Peut-être parviendrais-je à y trouver des réponses.

« Ferme-là, idiote. »

— Tu ne devrais pas me dire cela, répondit-il, les sourcils froncés en secouant la tête.

— Mais tu sais quelque chose. Tu ne sembles pas étonné. Tu le ressens n'est-ce pas ?

Je savais que c'était le cas. Je m'avançai d'un pas, le défiant de démentir. Il tourna aussitôt son regard vers moi, conscient du moindre de mes mouvements. Il était saisissant, fiévreux. Empli de désir. Pour moi. Oui, il le ressentait.

Il ne bougea pas, se contentant de me dévorer du regard.

« Si tu ne te tais pas dans les prochaines minutes, je parlerai l'Hitzord. »

Elle bluffait, elle m'avait dit que j'en mourrais.

« J'utiliserai un mot faible, inutile, qui suffira à te faire perdre connaissance. »

Je grimaçai. Je reculai de nouveau, restant à une distance de trois pas.

— Pardon, dis-je en baissant la tête. Allons-y. Je te suis. Et...

Me grattant la tête, soudain gênée, j'ajoutai :

— Est-ce qu'on peut rapidement passer aux toilettes ? Je voudrais remédier à... ceci.

Je désignai mon visage. J'imaginai que les larmes avaient fait couler mon maquillage. Sans doute ressemblais-je à un raton-laveur. Et je voulais surtout un moment, seule, pour parler à Talia.

Il soupira.

— Bien sûr.

Edan partit alors vers le fond du couloir. Je le suivis docilement.

Il semblait avoir compris qu'il valait mieux que je reste près de lui. Comment était-il au courant ?

Il en savait bien plus que moi. Comment était-ce possible ?

Nous marchâmes en silence et, arrivés devant les portes des toilettes des femmes, il s'adossa au mur de l'entrée, me faisant signe d'entrée.

— Hum... Je me dépêche.

J'étais horriblement gênée. Il m'avait vu dans une situation de détresse qui m'horrifiait. En même temps, sans lui, la soirée aurait pu être bien pire. Que serait-il arrivé si les Sidias m'avaient trouvée ?

Une fois à l'intérieur, je portai un regard à mon reflet. J'avais les yeux hagards, la mine défaite. J'aurais pu rencontrer le vieux Claude venu d'entre les morts m'invectiver pour le pillage de sa tombe que j'aurais eu la même tête.

Après m'être assurée que j'étais seule, je rafistolai ma façade avant comme je pus, me passant de l'eau sur le visage. J'arrangeai ma coiffure, mon rouge à lèvres. Et j'en profitai pour piocher quelques réponses.

— Que s'est-il passé ? murmurai-je, énervée.

« Je suis aussi surprise que toi. Je ne m'attendais pas non plus à ce que des Sidias se promènent parmi les hommes. »

— Comment est-ce possible ? Des dieux parmi nous ?

« Non. Pas physiquement. Ils sont comme toi. Comme nous. Ou une version approximative de ce que nous sommes. Des dieux résidant dans des corps de mortels. »

Alors il y en avait d'autres...

— Comment je coupe ton... aura de désir ? Comment se fait-il qu'Edan y soit sensible alors que c'est un humain ?

« Sa magie. Et tu ne peux pas le « couper ». C'est ce que je suis. Ne t'inquiète pas. Plus tu passeras du temps avec lui, plus il s'y habituera et cela s'estompera. Je ferais en sorte que ce soit le plus bas possible. »

Passer du temps avec lui ? Je voulais vraiment disparaître de cette soirée. Me réveiller de ce cauchemar et être en réalité dans mon lit, sous ma couette, bien au chaud et seule. Je me pinçai. J'eus mal. Mince. Je poussai un profond soupir.

— Est-il possible qu'il soit au courant ?

« C'est possible mais il ne te demandera rien et tu ne lui diras rien. Les mots ont du pouvoir quand on parle des Sidias. Contente-toi de faire comme si ce n'était jamais arrivé. S'il est intelligent, il mettra ce qu'il vient de se passer sur le compte d'une magie de l'esprit incontrôlé et passera à autre chose. »

— Alors quel est le plan ?

« Toujours le même. Tu restes avec le Crépuscule Pourpre, jusqu'à ce qu'ils se rendent au Tombeau du Guérisseur. »

— Je parlais de ce soir.

« Reste avec lui. Maintenant qu'il a conscience de mon aura, il projette la sienne plus intensément. Elle masquera la mienne. Si tu t'éloignes, les autres la sentiront de nouveau. »

— Merveilleux.

Vraiment merveilleux.

Quel plaisir de retrouver cette voix divine dans ma tête.







**--- Notes de l'auteur ---**

Le retour explosif de notre déesse préférée 🎉 qu'en avez-vous pensé ?

Pauvre Alana, dire que ce n'est que le début de la soirée...

Des avis ? Idées pour la suite ?

En tout cas de mon côté, je suis ravie de vous annoncer que le tome 1 est bouclée ! Et le tome 2 avance tranquillement !

Merci pour vos lectures, votes, commentaires <3

À très vite !

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