Chapitre VIII : Dégradation
La lueur du jour qui traverse la baie vitrée me réveille et je me rend compte qu'Éric n'est plus dans le lit. Ses escapades nocturnes commencent réellement à m'énerver mais il ne faut rien dire à monsieur car il a tout les droits ! Par contre, quand c'est moi qui part la nuit, j'en entend parler directement... Je me lève et regarde par la fenêtre pour découvrir la couche de neige qui a recouvert le balcon et le reste du paysage. C'est magnifique ! Les branches des arbres retiennent une certaine quantité de neige qui les fait se pencher vers le bas, comme si les marronniers qui sont au loin avaient une certaine tristesse face à cette poudre blanche qui glace leurs entrailles. J'aime ce panorama qui est pourtant signe de néant car la vie des arbres est tout simplement enfouit dans leurs racines sous terre. J'ai une préférence pour la saison du printemps qui est une sorte de renouveau pour la faune et la flore. Voir la vie reprendre cours est quelque chose d'apaisant car les couleurs vives reviennent et l'odeur des fleurs et du pollen me relaxent. Je détache mon regard de ce splendide spectacle et je me fais un café tout en me préparant un petit déjeuner dans ma cuisine. Je m'attable et commence à manger dans ce silence de plomb qui est beaucoup trop pesant pour moi. Malgré mon énervement envers Éric, je ressens le besoin de sa présence mais je sens que je ne le reverrai que ce soir... Je pars me doucher pour me préparer pour cette journée spécialement dédiée aux simulations de nos chers novices. L'eau chaude me réchauffe énormément et cette chaleur comble un peu ce vide qu'Éric laisse quand il n'est pas là. Je savonne mes cheveux blonds et me masse un peu la tête afin d'apaiser la tension qui envahit mon corps. Je rince chaque parcelles de ma peau afin d'évacuer la mousse. J'enroule la serviette autour de moi et sors de la salle de bain pour prendre quelques vêtements dans mon armoire qui est dans mon dressing. Au même moment, Éric entre dans l'appartement et il ne m'adresse même pas un regard, ce qui accentue mon agacement. Je claque la porte de la salle de bain pour lui faire comprendre mon mécontentement. Je m'habille rapidement tout en brossant mes cheveux et en appliquant un peu de mascara et d'eye-liner pour rendre un peu plus profond mes yeux noisettes. J'hésite à passer un coup de sèche cheveux car je ne sais pas si j'ai vraiment le temps. J'entre-ouvre la porte et regarde mon réveil qui affiche 7:55, ce qui me laisse donc le temps de me sécher les cheveux. Éric doit être avec son café sur le balcon car la baie vitrée est un peu ouverte. Je suis enfin prête au bout de dix minutes de séchage de cheveux et j'enfile ma veste noire d'Audacieuse posée sur le canapé. Je finis mon café qui est désormais froid mais j'ai une flemme terrible de le faire réchauffer. Je le bois et le pose dans l'évier où Éric a déjà poser sa tasse. Je le cherche sur le balcon où il se trouve bien évidemment... Je m'approche de lui malgré mon cerveau qui m'hurle de ne pas y aller. Il glisse une main sur ma hanche et m'embrasse tendrement tout en me serrant un peu plus fort contre lui. Je sens qu'il est tendu et même s'il ne me le dit pas, je le sais car il est différent. Ce n'est pas du genre à me serrer fort dans ses bras de cette façon dès le matin. Ses baisers sont passionnés, ce qui me donne de légers frissons qui parcourent tout mon corps. Je retire mes lèvres des siennes pour pouvoir le questionner sur son absence.
- Tu étais où ??
- À la Ruche avec Jeanine et Richard...
- Humm... Et me laisser un mot ou même me réveiller pour me le dire c'est trop difficile ??
- Arrêtes Laur'... Me saoule pas dès le matin.
- Nan mais tu es culotté quand même ! Je n'ai pas le droit de faire ce que tu fais mais toi tu as tous les droits !
- Je bossais moi, toi, tu batifolais avec Quatre !
- Bien sûr ! Ce n'est pas une excuse. On se voit ce soir.
Il me saisit le bras et me tire vers lui.
- Tu reste là, je dois te parler.
- Lâches-moi, tu me fais mal !
Je le repousse violemment et m'en vais le plus rapidement possible avant qu'il n'ait le temps de me rattraper. Je cours chez Quatre et entre comme une sauvage ce qui lui laisse à peine le temps de réaliser que je viens de m'infiltrer dans son intimité. Il est torse nu et me regarde avec son air énervé qui me fait éclater de rire.
- Tu fais ça à Éric ??
- Oui, mais ça l'énerve aussi...
Il s'empresse de se rhabiller tout en me posant mille questions sur ma visite faite aux sans-factions d'hier soir.
- Evelyn va bien et elle n'a pas mal pris le fait que j'ai planifié la mort de centaines de sans-factions. Ce sont plutôt les sans-factions qui ont eu du mal à accepter mon aide. Ils ont eu beaucoup de mal à comprendre ma situation car ils ne vivent pas ce que nous vivons, nous, les leaders Audacieux... Enfin bref, Evelyn les a fait changer d'avis et ils diminueront leurs actes de délinquances et ils n'attaqueront plus les patrouilles de démantèlement de camps. Par contre, je dois te dire un truc qui, pour moi, a son importance...
- Je t'écoute Laur'.
- Evelyn a eu une fille qui doit avoir environ quatre ans aujourd'hui. Je l'ai rencontré hier, elle s'appelle Maddy. Je peux même pas t'expliquer à quel point ça m'a fait mal de voir ça...
- Tu es sérieuse ??!! Ça me rend fou de rage, elle n'a jamais su élever un gosse et là par contre elle sait... Tu lui as dit quelque chose j'espère ??!!
- Oui, mais elle m'a fait la moral donc je n'ai rien dit de plus. Je n'avais pas envie de m'engueuler avec elle pour ça, puis Maddy n'a rien demandé donc j'ai préféré ne rien dire de méchant devant elle.
- Humm. Tu aurais peut-être du...
- C'est la seule famille qui nous reste Quatre... On ne peut pas passer notre vie à lui en vouloir. Le mal est fait point.
- Oui... Bref, on va être en retard pour les simulations de ce matin, allons-y.
Je lui fais un signe de tête et attend qu'il soit prêt pour partir aux salles de simu'. Nous marchons dans les couloirs plongés dans la pénombre. Je gonfle mes poumons de l'air chargé d'humidité et j'essaye de me détendre car ma peur de retomber sur un divergent est très grande. Auparavant, je détestais aller dans ces salles qui m'étouffaient par leur étroitesse et leur atmosphère de peur qui me glaçait le sang. J'avais une boule au ventre d'aller confronter mes peurs et maintenant j'ai cette même boule au ventre pour aller observer les peurs des novices... Cette peur de devoir en tuer un s'il s'avère être divergent... Tous, sont rassemblés devant les portes des salles de simulations et ils attendent sans trop vouloir être face à l'une de leurs nombreuses peurs. J'appelle Obi qui est la première à passer avec moi. Son air désinvolte m'énerve déjà mais j'essaye de garder mon calme. Je ferme la porte derrière elle et je l'invite à s'installer sur le fauteuil où elle s'assoit tranquillement. Son visage montre une certaine appréhension mais elle tente de me le cacher pour ne pas paraître faible.
- C'est humain d'avoir peur Obi... N'oublies pas que ce n'est qu'une simulation et que tu ne vas pas en mourir.
- C'est facile à dire...
- Je confirme... Si je pouvais ne pas avoir peur d'être confronter justement à mes peurs, ce serai génial. Mais on a pas tout ce qu'on veut... Tu as fais le choix d'être Audacieuse donc à toi de nous prouver que tu en es une. Bon courage.
J'insère l'aiguille dans le cou d'Obi et déverse le produit dans son corps en poussant avec mon pouce le piston de la seringue. Elle se détend et ferme les yeux doucement. Je me tourne vers mon écran d'ordinateur qui affiche Obi et une petite fille sur un toit. L'enfant a la peau très foncé et ses cheveux forment une multitude de petites bouclettes qui sont attachées par un chouchou vert et quelques barrettes. Ses yeux de couleurs tout aussi sombre que ses cheveux, sont remplis de malice et le sourire que dessine ses lèvres renforce son côté chipie. Elle court le long des murets qui délimitent le toit de l'immeuble. Ses vêtements flottent dans l'air, ils sont en lambeaux ce qui me fait comprendre que la petite fille est une sans-faction. Elle est vêtu d'une veste rougeâtre de Fraternel, de chaussures bleues Érudit, d'un pantalon Audacieux et sous sa veste apparaît un pull gris d'Altruiste. Elle a presque toutes les couleurs des cinq factions sauf celle des Sincères. Son appartenance à aucune des factions me fait penser a ma divergence qui est le contraire du sans-faction ou peut -être la même chose, je ne sais pas vraiment. Les divergents partent souvent trouver refuge chez les sans-factions, donc ils n'appartiennent peut-être pas à une faction mais ils pensent autant Érudit, Altruiste, Audacieux, Sincère et Fraternel, ce qui en fait quand même des citoyens (pour moi). La fille monte désormais sur le muret et elle marche droit devant elle mais le vent la fait vaciller. Elle joue avec la mort en manquant de tomber dans le vide et je vois le corps d'Obi se contracter et son visage se contorsionner. Les battements de son cœur accélère ce que je distingue grâce à l'électrocardiogramme qu'affiche une courbe qui se répète en montant et en descendant. On dirait les massifs montagneux que l'on observait dans les manuels du lycée. Les sommets sont plus nombreux et c'est là que je vois la peur grandissante d'Obi. L'enfant bouclé continue de faire le funambule et il risque de perdre équilibre à tout moment. Obi a l'air transit de peur et elle n'a pas l'air de pouvoir bouger, ni de pouvoir parler. Mon attention retourne sur la petite qui a glissé violemment. Elle se tient au muret et hurle à l'aide. Mon souffle est coupé face à la chute de la petite fille. Obi a les poings serrés et des larmes coulent le long de son visage apeurée et frustrée de ne pas pouvoir agir. Les hurlements sont assourdissants et c'est une vision affreuse de voir les petites mains s'accrocher au muret qui représente ici, la vie ou plutôt la seule chance de survivre. Pendant ce temps là, Obi ferme les yeux et la courbe des battement de son cœur se modifie. Ses inspirations et ses expirations sont plus calme et son buste ainsi que sa tête se redressent d'un seul coup. Elle porte ses mains à son visage et soupire fortement.
- J'ai eu l'impression que ça a duré des heures alors que tu as réussis à surmonter ta peur au bout de quelques minutes. C'est un très bon score.
- Humm...
- Mais tu sais que nous devons tuer les sans-factions ??
- Je sais.
- Tu serais capable de donner la mort à tes parents ??
- La faction avant les les liens du sang.
- Tu dis ça pour me faire plaisir... Je ne serai pas apte d'un tel acte et je ne te vois pas être la cause de la mort de tes parents, ça te tient trop à cœur.
- Vous ne me connaissez pas.
- Oui, mais je connais Éthan et je sais pertinemment qu'il ne traîne pas avec n'importe qui... Ne crois pas que je suis d'accord avec cette extermination de masse...
- Pourtant c'est vous qui avez mis en place ce projet.
- Parce qu'on me l'ordonne et crois-moi c'est une question de vie ou de mort. Enfin bref, Éthan a déjà dû t'expliquer tout ça. Tu peux y aller et fais venir Tris.
Elle me regarde longuement et se lève en direction de la porte. Tris entre quelques secondes après la sortie d'Obi. Elle va sur le fauteuil en silence. Ses longs cheveux blond descendent le long de ses épaules et je distingue quelques fourches aux niveaux de ses pointes. Je déballe l'emballage d'une nouvelle seringue et je plante l'aiguille dans la petite fiole qui contient le sérum pour ensuite le répandre dans le corps de Tris. Je met la seringue à la poubelle et fixe l'écran. Tris est agrippée à une falaise où l'eau est agitée et où les vagues viennent s'écraser sur la roche. Il pleut et le vent se déchaîne de plus en plus. La roche doit être extrêmement glissante à cause de l'eau. Tris ne bouge pas et elle a l'air effrayé par cette masse d'eau qui s'abat sur elle avec force. La falaise est d'une grande hauteur mais le déferlement des vagues vient humidifier les parois rocheuses qui sont perchées tout en haut. De petits creux dans la pierre font que Tris arrive à se tenir fermement sans qu'une vague vienne lui faire perdre équilibre. Les nuages noirs et la pluie battante assombrissent l'endroit qui ressemble à un enfer. Si j'avais le droit, je la sortirai bien de cette simulation qui montre un monde qui paraît d'une réalité impressionnante. Je ne sais pas si je réussirai à me sortir de ce genre de paysage de peur. Les cheveux de Tris sont trempés, de même pour ses vêtements. Je ressens une sorte de pitié pour elle en la voyant être tétanisée par le déchaînement des éléments. Elle tente d'escalader la paroi rocheuse en positionnant soigneusement ses mains et ses pieds sur une prise qui a l'air stable. Son pied glisse et quelques pierres tombent et disparaissent dans les flots agités de la mer. Elle le repositionne rapidement sur une roche plus solide et plus soudé à la falaise, afin d'éviter une éventuelle chute. Une vague vient plaquer le corps épuisé de Tris contre la falaise. Elle pleure et reste figée plusieurs secondes. Elle reprend avec vivacité son ascension vers le sommet de cette falaise. Quelques éclairs se dessinent dans le ciel noir de fureur et des grondements retentissent et résonnent à travers tout cet espace où la mer domine. Tris grimpe avec beaucoup de difficultés mais elle réussit enfin à atteindre son but. Elle se tient debout, sûrement soulagée de ne plus avaler des bolets d'eau salée. Elle s'éveille doucement, son regard est dans le vide.
- Très bon temps Tris. Ta mère est sûrement fière de toi, tu te débrouilles bien. La peur de se noyer c'est ça ??
- Oui...
- Cette peur fait aussi partie de mon paysage de peur.
- Ah oui ??
- Humm. Tu sais d'où vient cette peur ou tu viens de la découvrir ??
- Euh... Je ne sais pas trop.
- D'accord. Bon question basique : Étais-tu consciente lors de la simulation ??
- Non.
- Ok. Pas de problème alors. Tu peux partir et essayes le lancer de couteaux cette après-midi. C'est important de perfectionner ses geste en s'entraînant.
- Oui, j'irai avec Christina. Dis, tu as eu des nouvelles de ma mère ??
- Non, désolée. Je n'ai pas trop le temps en ce moment et je mettrai ta mère et moi même en danger. Tu vois ce que je veux dire ??
- Oui, tout à fait. Ce n'est pas grave, c'est mon choix d'être partis...
- C'est vrai. Bref, les autres doivent passer. Fais entrer Peter.
- Oui, au revoir.
Elle sort de la pièce et je l'entend appeler Peter. Il entre avec son sourire de fourbe qui me donne envie de le tuer. Il s'assoit limite en se jetant sur le fauteuil.
- Comment ça va Laur' ??
- Ferme-là Peter, je ne suis pas d'humeur.
- Ce n'est pas très gentil ça... Ça ne va pas avec Éric ??
Je le regarde noir et saisis le col de sa veste. J'approche mon visage du sien.
- Ouvres une fois de plus ta grande gueule et tu verras ce que ça fait de se prendre un couteau dans l'œil comme Edward.
Il me regarde, interloqué par ce que je viens de dire.
- Et oui, je sais pas mal de choses donc méfies-toi car je peux à tout moment faire de toi un sans-faction.
J'insère brutalement l'aiguille dans son cou ce qui le fait grimacer. Ses muscles se détendent dès que le sérum fait effet. Je déplace mon regard vers l'ordinateur qui dévoile une pièce que je connais plutôt bien. Peter est assit avec le groupe de Sincères et il a l'air crispé. Vous vous demandez sûrement où il se trouve, et bien il est dans la salle de Cérémonie du choix. Marcus se tient sur l'estrade et appelle un à un les novices. J'observe chacune des factions qui se sont rassemblées en ce ce jour important où l'on choisit notre voie. Les Audacieux sont toujours autant agités et font un boucan qui me taperai sur les nerfs si j'y étais réellement. Soudain, un « fermez-là » retentit dans l'amphithéâtre qui retrouve son calme stressant. Marcus adresse un merci à la personne ayant crié ceci. J'ai l'impression que mon souhait de faire régner le silence s'est réalisé... Je me focalise sur la personne qui a donné l'ordre et la personne n'est rien d'autre que moi. Le sérum de simulation se sert d'un souvenir dans l'hippocampe situé dans le cerveau de Peter pour montrer une peur. Et c'est pour cela que j'apparais dans cette peur. Mon coup de gueule a dû marquer Peter pour qu'il s'en rappelle. Ça m'étonne car je n'ai pas tant hurlé que ça...
- Peter Hayes.
Peter se lève doucement et il commence à avancer vers l'estrade où Marcus se tient en tenant la petite lame, qui a pour fonction de faire une entaille sur notre paume, afin de faire couler quelques gouttes de sang dans l'une des cinq coupes. Tous les regards sont tournés vers Peter et c'est la première fois que je le vois autant déstabilisé. Il marche et monte son pied afin d'atteindre l'estrade mais il trébuche et tombe en se rattrapant les mains plaquées sur le sol. Les rires fusent à travers toute la salle mais ce sont des rires démoniaques fait pour mettre mal à l'aise Peter. La moquerie exagérée de la foule fait rougir de honte Peter qui commence à paniquer. Son buste se gonfle et se dégonfle très rapidement mais il se relève, prend le couteau et se taillade la main pour faire couler son sang sur les charbons Audacieux. Il émerge avec un calme qui m'impressionne.
- Peur d'avoir honte ?? Ça m'étonne de toi Peter... Tu aimes tellement te défiler et être sous les projecteurs que ça paraît irréel.
- J'aime que l'on me regarde mais pas de cette façon là. Je suis plus pour des regards admiratifs sur ma personne... Vous voyez Laur' ??
- Si j'étais toi, je surveillerai mes chevilles... Maintenant sors, tu me donnes la nausée.
- Vous êtes d'une gentillesse inouïe Laur' !!
Il me fait son sourire arrogant et tourne les talons sans prononcer un mot de plus et heureusement car il se serait pris mon poing... Je sais, je parais violente mais il me tape sur les nerfs et son respect envers moi est inexistant. J'enregistre sa simulation et sors de la pièce tout en refermant la porte à clé derrière moi. C'est l'heure de déjeuner et j'envoie les deux novices restant à la cafétéria. Je leur ferai passer leur simulation cette après-midi. Je marche dans les couloirs et croisent Éric qui se contente de m'embrasser le front et de disparaître dans l'obscurité des corridors. Il ne m'a même pas parler de notre altercation de ce matin... Il est limite lunatique lui... Je me rend à la cafét' et prend un plateau. Je le garnit de nombreux mets dont une salade, des frites, un steak haché, un yaourt et une poire. Je pose mes couverts auprès de mon assiette qui est plutôt appétissante. J'aperçois Shauna, Jenna et Haley à une table non loin d'Éthan et de Quatre. Mes frères (c'est bizarre à dire) me font tous deux un signe de tête. Je m'assois aux côtés d'Haley qui me sourit faiblement, ce qui interpelle ma curiosité face à cette réaction qui n'a rien de normale chez ma meilleure amie.
- Ça n'a pas l'air d'aller toi ??
- Je me suis prise la tête avec Aaron ce matin et il ne m'adresse plus la parole... Même pas il m'adresse un regard... J'ai l'impression d'être invisible...
- Vous vous êtes pris la tête à propos de quoi exactement ?
- J'ai refusé l'ordre d'éliminer un sans-faction en public et Max a eu le retour de ça... Il en a parlé à Aaron qui m'a engueulé comme quoi c'est lui qui prend quand je fais quelque chose de mal... C'est vrai qu'épargner la vie d'un innocent est quelque chose de très mal !!
- Haley... Tu as totalement raison mais il faut que tu comprennes que ceux qui s'opposent aux ordres ont de sérieux problèmes et ils entraînent leurs proches avec eux, surtout les leaders... Il réagit comme ça pour te protéger et pour se protéger, ce n'est pas contre toi.
- Humm... Mais ça m'énerve qu'il ait autant peur des représailles.
- C'est comme ça et pas autrement Haley... Laur' a raison. Aaron a une priorité dans sa vie et c'est te protéger donc vas lui parler et ravales ta putain de fierté pour t'excuser.
- Oui... Je lui parlerai ce soir.
- Pour te rassurer, je passe ma vie à m'engueuler avec Éric à propos de « mes écarts de conduite » comme il dit si bien. Après, j'ai accepté d'être leader donc j'en assume les conséquences... Aaron a accepté d'être leader et toi, tu l'as accepté aussi et tu le savais qu'il y aurait des contraintes...
- Oui mais pas ces contraintes là Laur'... Tu es de plus en plus inhumaine je trouve... Tu as vu comment tu as tué le sans-faction l'autre jour ?? Tu deviens comme Éric...
- Je n'ai pas la conscience tranquille d'avoir tué quelqu'un de sang froid et arrêtez de me comparer à Éric car vous ne le connaissez pas. C'est facile de se fier aux apparences les filles. Bref, je vous laisse.
Haley m'a blessé en disant ça puis le comportement d'Éric m'exaspère en ce moment donc ça accentue mon mal être. Entre avoir appris que ma mère bio' a eu une fille, et de me prendre la tête avec Éric et de ne pas avoir le soutiens de mes amis dans ce que je fais, c'est la total. Il n'y a que Quatre qui a l'air de me soutenir... Je dépose mon plateau mais Max m'interpelle et me demande de le suivre pour parler dans son bureau. Je m'assois en face de lui comme quand je devais donner un projet Audacieux pour devenir leader. Il me sourit brièvement et commence à débiter ce qu'il a à me dire.
- Laur'... Je peux savoir ce que tu faisais dans le Sud du secteur Altruiste et qu'ensuite tu t'es aventurée dans la zone des sans-factions ??
- J'avais besoin de prendre l'air... J'étouffe ici et j'ai ce besoin de courir dans de grand espace puis je voulais faire du repérage chez les sans-factions. J'en ai marre de jouer à cache cache avec eux et je souhaitais juste repérer des planques potentiellement habitable.
- Une vraie Audacieuse Laur', c'est ce que tu es et je ne douterai jamais de tes capacités. Mais je trouve que c'est un peu imprudent et irréfléchis de ta part d'aller seule dans une zone qu'on ne connaît pas et qui est totalement hostile à nous, les Audacieux.
- Je sais mais j'avais envie de courir et de me rendre utile en même temps. J'éviterai que ça se reproduise.
- Si ! C'est une bonne idée de faire ce genre d'excursion nocturne mais vas-y avec d'autres Audacieux. Bon je voulais te parler d'autre chose Laur'.
- Je vous écoute Max.
- Je suis inquiet car tu as l'air épuisé en ce moment et j'ai peur que tu ne craques. Je pense que tu devrais faire une pause et prendre quelques jours de congés.
- Non, il est hors de question que je me retrouve à ne rien faire de mes journées. C'est une mauvaise passe et je vais m'en sortir... C'est juste qu'Éric est extrêmement tendu et je m'en prend plein la figure donc ça m'épuise un peu mais ce n'est rien d'alarmant. Je vais me reprendre très vite mais s'il vous plaît je veux continuer de gérer les novices et ça jusqu'au bout de leur initiation. Je veux que ma mission aboutisse.
- Oui. Mais sais-tu pourquoi Éric est tendu en ce moment ?
- Pour le plan contre les Altruistes...
- Exact et tu ne voudrais nous donner un coup de main ?? Ton aide serait précieuse, nous avons besoin de ton ingéniosité.
- Non merci. À vrai dire je ne veux pas en entendre parler avant que ma mission d'exterminer les sans-factions ne soit fini.
- D'accord, c'est bien dommage. Bon, j'ai beaucoup de travail et toi aussi donc retournes faire passer les simulations aux novices. Et merci infiniment pour ton dévouement, ton père doit être fier de toi.
- Humm... Bonne journée à vous Max. Au revoir.
Je sors du bureau un peu énervé par les dernières paroles de Max mais je suis satisfaite de moi. J'ai pu regagner sa confiance et je suis sûr qu'il n'a désormais aucun soupçons sur mes sorties répétées. Je pars en direction des salles de simulations où les deux novices attendent leur passage. J'appelle Danny qui entre avec la peur de dessinée sur son visage. Il s'allonge sur le siège tout en serrant les poings pour faire sortir son stress de la manière la plus facile pour lui. Je déverse le sérum dans sa carotide et son corps se relâche au fur et à mesure que le produit envahit le cerveau. La première image que dévoile l'écran est bien évidemment Danny mais dans un endroit qui ne m'est pas familier car c'est celui des Sincères. Il est dans une sorte d'arène faite de verre où la couleur blanche et noire dominent. Je ne comprend pas du tout... Danny est un natif Audacieux... Pourquoi serait-il dans l'enceinte Sincère ?? Pleins de questions se bousculent dans mon esprit mais impossible d'y répondre. Des personnes entrent dans l'arène mais les Audacieux sont plus nombreux. Danny est assit au premier rang et il change d'expression quand un homme entre dans l'arène. Cet homme est un Audacieux qui doit avoir la quarantaine ou plus. Je ne sais pas vraiment. Ses cheveux sont grisonnant et son visage est très dur, ce qui me fait vaguement penser à Richard ou encore à Marcus... Jack Kang approche, une seringue à la main.
- Nous sommes rassemblés ici pour le procès de Monsieur Liebnecht qui est coupable de meurtre envers sa femme : Catherine Liebnecht. Nous allons le soumettre au sérum de la vérité pour avoir un aperçu des faits et surtout son point de vu face à ce meurtre sans doute prémédité.
Jack Kang insère l'aiguille et s'écarte un peu de l'homme qui dégage une atmosphère pesante. Danny a l'air vraiment très très mal, son cœur s'emballe et sa respiration perd route.
- Monsieur Liebnecht, avez-vous tué votre femme ?? Et si oui, pourquoi un tel acte ??
- Oui, j'ai tué ma femme. Je l'ai tué de mes propres mains en pleine nuit pendant que notre fils dormait. Je l'ai étranglé et j'ai lâché prise que quand elle a arrêté de se débattre. J'ai vu la vie la quitter et je suis heureux qu'elle ne soit plus de ce monde. Une Audacieuse doit être forte et ne dois jamais faiblir et elle ?? Ce n'était qu'une faible depuis le début. Je ne souhaitais pas qu'elle ait un impact sur notre fils Danny qui ne va par tarder à faire son choix. Son incompétence me pourrissait la vie et sa mort ne fut que bénéfique pour mon fils et pour moi. Vous rendez-vous compte de cette puissance que l'on ressent lorsque l'on ôte la vie à une personne ?? Non, sûrement pas ! C'est une forme de courage de tuer. Éliminer la vermine est du ressort des Audacieux et seul un vrai Audacieux a déjà ressentit ce sentiment de puissance extrême. Sa vie ne valait rien !
Danny est en pleine panique face à ce que son père vient de dire. Ses larmes coulent le long de son visage et sa colère est très visible. Il se lève brutalement et hurle à son père qu'il n'est qu'un monstre sans cœur. Il choisit d'affronter sa peur en disant ceci et il continue en essayant de le frapper mais des Audacieux interviennent pour le calmer. Il émerge à côté de moi, il est encore en transe et il pleure. Je suis déstabilisé par ce que je viens de voir et par les pleurs incessants de Danny.
- C'est fini Danny... Ce n'est qu'une simulation, ça n'a rien de vrai.
- Si... Mon père a réellement tué ma mère...
- Je suis désolée... Je ne sais pas quoi dire...
- Ce procès a été le pire jour de ma vie... J'aurai du avoir la force que j'ai eu dans cette simulation car dans la réalité, je n'ai rien pu dire. J'ai juste continué à pleurer comme un gamin et je m'en veux, je m'en veux de ne pas lui avoir dit ce que je pensais avant sa mort.
- Le passé est le passé Danny et crois-moi, ce n'est pas bon de vivre toute sa vie avec des regrets. Ce qui est fais est fais et tu ne peux pas revenir en arrière. Sois fort et vis dans le présent sans oublier ça car c'est une partie de ton identité.
- Oui, vous avez raison... Je dois vivre au jour le jour et regarder l'avenir sans être trop dans le passé... Vous n'êtes pas si inhumaine que ça en fait... Pourquoi laisser une image négative aux autres ??
- Vous n'êtes pas mes amis et s'il n'y a pas ce rapport instructeur/élève qui se crée, vous ne réussiriez jamais. Molly doit passer sa simulation, je te parlerai bien encore pendant des heures du rôle de leader et d'instructeur mais ce n'est pas le moment. Tu peux sortir par la porte arrière. Bonne après-midi à toi Danny.
- Merci Laur'.
Je souffle quand il ferme la porte et j'essaye de marcher un peu pour oublier les abominables paroles du père de Danny. Je bois quelques gorgées de l'eau que contient ma bouteille et pars ouvrir la porte à Molly qui doit être en stress. Elle s'allonge sur le fauteuil et met une mèche de ses cheveux bruns derrière son oreille pour me dévoiler son cou que je m'empresse de piquer (ça fait un peu sangsue ou vampire mais ce n'est pas grave!). Je n'en peux plus de faire passer des simulations que je trouve totalement affreuses et torturantes. Molly est dans un verger de Fraternels, elle marche dans les rangées de pommiers. La couleur du vert est resplendissante et le soleil accentue le vert pétillant des feuilles d'arbres. Quelques abeilles butinent le reste de pollen que contiennent les dernières fleurs du pommier à droite de Molly. Tous les autres arbres ont des pommes déjà bien mûres, ce qui me donne une envie irrésistible d'en manger une. Je me souviens qu'avec ma mère, on allait chercher des framboises quand il faisait beau. Les Fraternels nous accueillaient bras ouvert et nous mangions avec eux le midi. C'était de bon moments que je ne risque pas d'oublier... Je me gavais de framboises au point d'en avoir mal au ventre ce qui avait le don d'énerver ma mère qui me trouvait égoïste car je n'en laissais pas aux autres. Molly continue de marcher mais elle change de rangées en passant sous un arbre. Un chien est à quelque mètres d'elle ce qui la fait réagir directement car son corps se raidit. Il s'approche d'elle sans vraiment y faire attention mais il change d'expression quand elle recule d'un pas. Il monte les babines et émet un grognement sourd qui la fait paniquer. Il se jette sur elle et la mort à plusieurs reprises au bras, elle hurle et se débat en lui donnant de violent coups de poing. Elle réussit à se lever et l'achève d'un coup de pied dans les côtes. L'animal gémit de douleur et abandonne son envie féroce de la tuer en partant du côté opposé à elle. Molly se réveille brusquement et se lève pour tourner en rond, ce qui me stress.
- Ce n'est pas si méchant que ça un chien... Je ne pensais pas qu'on pouvait en avoir peur à ce point là.
- Et bien vous le savez maintenant. Au revoir et bonne après-midi Laur'.
- ... Merci.
Je suis surprise de son départ pressé, ce n'est pas trop son genre enfin j'ai peu entendu parlé d'elle mais ce que je sais c'est qu'elle aime bien tenir tête. Je sors de la salle de simulation, la ferme et me rend chez Éthan et Ryan. J'entre sans toquer car c'est ma nature et je ne déroge jamais mes habitudes !
- Putain ! Rentrer en toquant tu sais faire ?!
- Non mais Ryan ! Tu as cru que j'allais savoir ouvrir une porte en toquant un jour ?? Tu a de l'espoir toi !
- Oui, un peu trop d'ailleurs... Tu voulais quoi sinon ??
- Vous voir mais Éthan n'est pas là ??
- Non, il doit être avec Obi...
- Ouais... Pas grave, je vais pouvoir te faire chier le reste de l'après-midi !
- Cool. Assis-toi, je t'en prie. Tu veux boire un truc ?
- Je veux bien un verre d'eau s'il te plaît Rayou.
- Tu es casse couilles, j'ai horreur de ce surnom merdique.
- Rayou !!! Rayou !!!
- Ferme-la Laur'... Sinon ça se passe bien ta mission « tuer les sans-factions » ??
- Mouais... À part me faire engueuler par Max et par Éric, c'est tout ce que je gagne... J'ai tué un sans-faction de sang-froid, j'ai rentré dans la gueule de Max, je passe ma vie à m'engueuler avec Éric et mes amis croient que je deviens inhumaine... Je suis limite en train de regretter d'avoir choisis d'être leader...
- Arrêtes de te poser trop de questions Laur'... Depuis toute petite tu fais ça mais ça ne sert à rien du tout. Quoi que tu fasses et quoi que tu dises il y aura des effets positifs et négatifs donc cesses de te torturer l'esprit. Tous tes choix auront des répercutions qui seront bonnes et mauvaises... Puis tes amis ce ne sont pas des amis car ils ne te comprennent pas... Moi, je te soutiens car je ne réussirai même pas à encaisser toutes les responsabilités que tu as.
Ce qu'il vient de me dire m'a touché même si c'est dit d'une façon un peu brute mais c'est Ryan quoi... Je me sentais franchement seule et incomprise mais lui, il est là et il est compréhensif. Que demander de plus ?? Des larmes perlent et dévalent mes joues.
- Merci Ryan...
- Pleures pas Laur', c'est normal que le frère le plus chiant vienne te soutenir.
- Pfff tu es bête...
- Je t'aime aussi petite sœur. Maintenant tu arrêtes de pleurer et tu vas casser la gueule à tout le monde !
Je rigole.
- Genre je peux te casser la gueule ??
- Euh... Non désolé...
Je viens le serrer dans mes bras mais j'essaye une attaque furtive de chatouilles que je regrette au bout de quelques minutes. Je suis étalée par terre et pleure de rire (oui cinq ans d'âge mental à dix sept ans mais bon...). Éthan rentre et fait les gros yeux pour ensuite secouer la tête et partir s'affaler sur le canapé. Je me relève et offre un bisou sur la joue de mes deux frères. Je sors de leur appartement pour aller manger à la cafétéria avec Quatre qui doit sûrement être avec Zeke mais ça ne me dérange pas. J'arrive dans la cafétéria où un monde fou s'est installé pour se restaurer en cette soirée d'hiver. Je remplis mon plateau et prend quelques muffins au chocolat qui sont entreposés sur une table à côté des comptoirs. Je pousse Quatre pour m'asseoir à côté de lui, il me lance un regard noir qui se change en regard plus doux dès qu'il comprend que ce n'est personne d'autre que moi qui le bouscule. Zeke mange sans dire grand-chose, en fait il est plus concentré à observer une fille qui est assise à la table d'à côté.
- Tu comptes baver sur elle toute la soirée ou tu vas te décider à aller la voir ??
- Pas ce soir Laur'. Je l'observe et apprend à connaître ses petites habitudes comme ça, elle croira que je la connais très bien et elle acceptera de sortir avec moi.
- C'est un peu glauque comme approche...
- Ça marche toujours alors je continue.
- Mais tu les aimes vraiment ??
- Non, c'est juste pour m'amuser. On est jeune alors autant en profiter. Tu ne passeras pas ta vie avec Éric hein...
- C'est clair qu'avec ton approche, je ne resterai pas bien longtemps avec lui. Cependant ton approche est médiocre... Digne d'un connard qui joue avec les filles...
- Tu es un peu coincée Laur'... Faut rire un peu...
- Zeke, laisses-là.
Il secoue la tête et continue de manger son assiette. Je chuchote un merci à Quatre qui me répond par un sourire. Vous savez ?? Le léger sourire totalement craquant de Quatre... Je ne sais pas comment ça se fait qu'il soit encore célibataire ! Je mange mes muffins et en donne un à mon frère qui a la flemme de traverser toute la cafét' pour prendre qu'un seul de ces délicieux gâteaux. Zeke nous dit au revoir et part en direction de la Fosse.
- Ça va Laur' ??
- Pas vraiment... Et toi ??
- Oui. Qu'est-ce qui ne va pas ??
- Je me suis prise la tête avec Éric ce matin, Haley m'a blessé avec ces propos et Zeke... N'en parlons même pas de lui... Puis j'ai encore du mal à avaler le fait qu'Evelyn ait une fille dont elle s'occupe avec amour...
- Je comprend... C'est une accumulation mais ça va aller mieux Laur'. Tu aimes Éric et c'est le principal. Il ne peut pas être aimé de tous avec ce comportement là. Et je tiens à te rassurer à propos d'Evelyn car moi aussi, la pilule a du mal à passer.
- Humm...
- Je dois y aller. À demain et prend soin de toi.
- Merci, à demain Quatre.
Je le regarde partir et cherche Éric que je trouve assit à quelques mètres des comptoirs. Il est seul et n'a pas touché à son assiette, ce qui m'inquiète fortement. Je pose mon plateau vide et m'approche de lui avec précaution, de peur qu'il soit énervé et qu'il me jette une réflexion à la figure. Je caresse délicatement son dos avec ma main et me colle à lui.
- Je t'aime.
- Je t'aime aussi Laur'... On rentre ??
Je lui dis « oui » d'un signe de tête et le suis jusqu'à notre appartement où il s'allonge sur le canapé. J'allume une petite lampe et tire les rideaux de la fenêtre ainsi que ceux de la baie vitrée trop court pour tout recouvrir. Je retire ma veste et la pose sur le porte-manteau qui manque de tomber avec le poids que fait le vêtement d'Éric qui est déjà accroché. Je détache mes cheveux et me passe un peu d'eau sur le visage.
- Laur' ?? Viens.
- Qu'est-ce qu'il y a ??
- Je dois te parler... J'avoue que tu as bien embobiné Max. Il n'a vu que du feu à ton histoire de repérage pour ta « mission ». Par contre, moi, je n'y crois pas un mot.
- Et alors ??
Il se lève et se colle à moi ce qui fait que je me sens ridicule face à sa masse de muscle. Son air est plutôt menaçant et ça ne me rassure pas du tout.
- Tu te rappelles ?? On doit tout se dire et tes mensonges commencent à me taper sur les nerfs.
- J'ai le droit d'avoir mes secrets. Tu n'as pas besoin de savoir toute ma vie Éric. Laisses-moi respirer.
Il me prend les poignets et les serre un peu.
- Tu as fais quoi hier soir ??
- J'avais besoin de respirer... J'en ai ras le bol d'être ici, c'est étouffant cette atmosphère.
- Je ne te répéterai pas trois fois la question Laur'. Tu as fais quoi hier soir ?? Tu foutais quoi dans la zone des sans-factions ??!
- Tu radotes ! Je viens de te répondre !
Il serre encore plus mes poignets ce qui me fait reculer jusqu'à ce que mon dos touche la paroi froide du mur en béton gris.
- Tu faisais quoi hier soir ??!!
- Lâches-moi... S'il te plaît...
- Je vais péter un câble Laur'. Répond !
- Je suis allé voir les sans-factions pour les mettre en garde ! C'est bon tu es content ?? Tu as eu ta putain de réponse ! Maintenant, tu vas faire quoi ?? Me tuer peut-être ??!
- Putain mais tu joues à quoi ??!! Tu veux te faire tuer ??!! Tu es vraiment inconsciente ! Traîner avec des lâches, c'est tout ce que tu sais faire de toute manière ! Je te préviens, si j'apprends une fois de plus que tu es sortis du secteur Audacieux, tu t'en rappelleras toute ta vie.
- Vas-y, dis-moi ce que tu feras ?! Tu m'enfermeras ?? Tu me frapperas ??! Tu es incapable de me faire du mal ! Puis traîner avec des lâches ?? Oui, je suis d'accord ! Tu es lâche, tu n'as jamais su dire non à tes parents et encore moins à Jeanine ! Tu n'es qu'un pantin que l'on manipule comme on le souh...
- La ferme !!
Il vient de donner un coup de poing dans le mur juste à côté de moi. Je me raidis, je ne sais pas de quoi il est capable. J'ai l'impression d'avoir mon père face à moi. Il me fait un mal fou à tenir mes poignets sans les relâcher une seconde. Je suis en larme et tremble de peur, je n'arrive pas à me contrôler. Aie-je quitté une prison pour retourner dans la même ??
- Éric... Sil te plaît...
Il redonne deux coups de poings dans le mur et un cri de panique sort de mes entrailles sans que je ne le veuille. Je pleure de plus bel et pose la main qu'il a relâché sur sa joue. Il pose son front contre le mien, il est en pleurs aussi et je sens la panique monter en lui. La colère a gagné son corps sans qu'il ne s'en rende compte.
- Je... Je... Je suis désolé... Je ne sais pas pourquoi j'ai fais ça.
Il s'écarte de moi et met ses mains sur ses cheveux.
- Qu'est-ce que j'ai fais... ??
J'ai du mal à comprendre sa réaction mais tout ce que je sais c'est que ce n'était pas lui qui agissait. Ce n'était pas le Éric amoureux et protecteur qui me serrait les poignets avec force. Ce n'était pas l'homme qui m'a recueillis et qui m'a aidé tout au long de l'initiation qui a tenté de me frapper. Je lui en veux mais pas vraiment... C'est assez paradoxal comme sentiment... J'essaye de calmer mes pleurs et m'assois sur le canapé où il vient de prendre place sans émettre aucun son.
- Tu as vu ce que la pression fait de toi ?? Tu as failli me frapper Éric et ne me dis pas que je suis entièrement fautive. Je pardonne ta réaction mais je ne pardonne pas à tout les coups donc reprend toi et vite s'il te plaît. Car, ce n'est pas ma vie que tu va perdre mais c'est moi tout entière. Je ne supporterai pas plus longtemps tes angoisses qui déroutent en violence. Je vais dormir chez Jacob cette nuit, je ne pars, je te le promet mais j'ai besoin de te laisser seul pour que tu réfléchisses à tes actes. Je t'aime...
Il n'ajoute rien à ce que je viens de lui dire et il ne me retient pas. Il a sûrement vraiment besoin de se retrouver avec lui même. Ça me brise le cœur de devoir le laisser seul parce qu'il a l'air totalement perdu et épuisé. Je prend une grande inspiration et sors de l'appartement pour aller chez Jacob qui m'accueille convenablement. Il me pose tout plein de questions et je lui répond qu'un « ça va, ce n'est juste qu'une engueulade ». Il déplie son canapé et me met une couverture sur celui-ci tout en me donnant un oreiller qu'il avait rangé dans une armoire. Il m'embrasse la joue et part se recoucher auprès de Tyna qui dormait déjà à mon arrivée. Je m'allonge dans les draps encore froid et je commence à sentir ce vide en moi, ce vide qu'à formé cette dispute qui a failli tourner au cauchemar. La douleur la plus atroce n'est pas physique, elle est bien mental car on ne peut rien contre ce mal et seul le temps peut dissiper ses effets. Je rapproche mes genoux vers mon buste et me met à pleurer car il n'y a que ça qui puisse me soulager. Pleurer jusqu'à l'épuisement et s'endormir le cœur déchiré par cette douleur insoutenable qu'Éric m'a infligé. Le pardon est pourtant la seule solution car je sais pertinemment qu'il m'aime et que je l'aime et que cet acte n'était pas méchant. Cet acte était le fruit d'une frustration qui dure depuis quelques mois et qui devait s'exprimer. La colère est l'une des passions les plus blessante de la nature humaine...
Le temps fera-t-il bonne effet sur ces blessures encore fraîches ? Est-ce que tout ira mieux dans deux semaines ou est-ce que tout ira au plus mal ?? Est-ce que la fin de l'initiation des novices marquera un nouveau départ ?? Sûrement, mais je ne pense pas que ce sera un bon départ... Que se passera-t-il dans deux semaines ?? Est-ce qu'Éric sera plus indulgent avec moi ?? Est-ce que notre couple est fais pour perdurer dans le temps ?? Encore une multitude de questions qui viennent déranger mon esprit si tranquille autrefois.
Voilà pour le chapitre 8 ! J'espère qu'il vous plaît ! Je posterai le chapitre 9 dans normalement deux semaines mais ce n'est pas sûr car le BAC approche à grand pas et je manque de temps pour écrire. Je ne vous promet rien mais peut-être que vous saurez la suite dans deux semaines. Merci à vous tous pour vos lectures, vos votes ainsi que vos commentaires qui me font réellement plaisir. Je suis désolée pour le temps d'attente mais mon avenir se joue dans les deux mois qui suivent donc je préfère consacrer mon temps libre sur mes études même si ça me fait franchement chier (désolée pour le terme) de ne pas pouvoir écrire la fiction qui me tient tellement à cœur. Donnez-moi vos avis à propos de Laur' et d'Éric en laissant un petit commentaire ! Même si je sais que Laur' est pour le moment déplaisante mais dans ce chapitre, son humanité refait tout de même surface. Votez et commentez !! Bon dimanche à vous tous !!! Bisous de pandas !! ♥♥♥♥♥♥♥♥
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