Chapitre III : Te retrouver
- Je crois plutôt que tu as retrouvé ton chemin...
Je souris légèrement, les larmes qui ont envahis mes yeux me brouillent la vue. Il s'approche rapidement de mon corps, et me serre délicatement contre lui en posant une main à l'arrière de ma tête. Je pleure bruyamment, je ne parviens pas à m'arrêter malgré ma joie de le retrouver.
- C'est fini Laur'. Je suis là.
- Tu étais mort Éric. On me l'a affirmé, j'y ai cru. Je croyais que tu étais mort, putain.
- Je sais... Je suis désolée...
Il me presse un peu plus fort contre son buste tout en me caressant doucement le dos comme s'il voulait me prouver sa réalité. Je m'agrippe à son pull en lin rougeâtre, je ne veux pas le lâcher, je ne veux pas me retrouver ne serais-ce qu'une seconde loin de lui. Ma tête est attachée à son torse. Pouvoir le toucher, c'est me prouver qu'il est bien réel, que ce n'est pas mon cerveau qui me joue des tours.
- Ce n'est pas en t'accrochant à moi comme ça que ça ira mieux Laur'.
- Ce n'est pas que ça ne va pas. C'est juste que j'ai peur d'être dans un rêve.
- Si tu es consciente que tu ne rêves pas, c'est que je suis bien présent ici, avec toi, dans les sous-sols de l'hôpital Fraternel. Le touché peut être une illusion mais pas ta conscience.
Je relève la tête et le regarde. Je pose mes mains sur son visage et plonge mon regard dans les sien. Ses yeux d'un gris bleuté me contemple avec admiration, amour et passion. Il pose son front contre le mien, entremêle mes cheveux entre ses doigts et m'embrasse. Nos lèvres se rencontrent à nouveau, après s'être éloignées pendant quelques secondes. J'enfouis ma tête dans son cou pour prendre une grande inspiration. Une effluve de savon noir et d'azalée vient à mon nez. Mais je reconnais une odeur, celle qui émane de son corps, celle qui est propre à lui, celle qui me fait frissonner.
- Je suis désolée de t'avoir fais subir tout ça.
- Pffff... Ne t'excuse pas... C'est loin d'être entièrement ta faute. Puis, tu es vivant et c'est ça le principal. Mettons de côté le passé et penchons-nous sur le présent.
- Tu sais que ton optimisme perpétuel est incroyable ?
- Ce n'est pas de l'optimisme. C'est juste que c'est mieux de passer à autre chose que de ressasser sans arrêt le passé qu'on ne peut pas changer.
- Hummm... Tu sais que tu es belle ?
- Voyons ! C'est bien connu ! Tous les Érudits sont beaux !
- Vanité et narcissisme ! Le stéréotype du parfait Érudit. Et, je tiens à préciser que tu n'es plus Érudite mais bel et bien une véritable Audacieuse.
- Vu que nous sommes divergents, on entre un peu dans toutes les factions...
- En parlant de ça... Je repense au message des Fondateurs... Ta mère n'était pas si folle que ça à imaginer que des hommes et des femmes nous observaient pour créer un Homme meilleur. Elle venait sûrement de là-bas.
- Oui. Et, j'aimerais en apprendre plus sur ses origines.
- Tu envisages de partir d'ici ?
- Je ne sais pas... L'inconnu m'effraie légèrement, on ne sait pas ce qu'il y a derrière la Clôture.
- Un nouveau monde, une nouvelle vie et une liberté infinie. Je n'ai pas vraiment envie de rester ici et de devoir encore faire des choses qui ne plaisent pas. Viens avec moi, je veux te montrer quelque chose.
Il me dépose sur les épaules un manteau en laine feutrée et m'invite à le suivre en prenant ma main, comme un enfant qui traîne sa mère jusqu'au fruit de son désir. Nous sortons de l'hôpital et marchons pendant peut-être une demie-heure. Le faisceau de sa lampe torche nous guide un peu dans l'obscurité totale de cette nuit à l'air emplie d'humidité. Nous marchons collés l'un à l'autre pour nous tenir chaud et surtout pour renoué avec ce contact tactile qui m'a tant manqué en son absence. Je vois une grande masse noire grandir devant nous, son uniformité me fait deviner que c'est une tour. Le secteur Fraternel n'est pas protégé par la Clôture car afin d'avoir assez de nourriture pour rassasier toute la population, la culture des champs est étendue à l'extérieur de la ville. Donc, cette zone est sécurisée par des rangées de grillages qui ont de multiples caméras et des tours de surveillances.
- Tu es sûr que les hommes d'Evelyn ne vont pas croire que l'on s'échappe ? Ils sont vraiment très cons tu sais ?
- Nous allons juste nous poster en haut de cette tour, ne t'en fais pas.
La porte du grand monstre de béton est ouverte. Nous grimpons les nombreuses marches pour atteindre le sommet de cette tour de guet et quand nous arrivons tout en haut, un souvenir vient me faire face.
- La première fois que j'ai vu l'horizon, c'était avec toi Ric'.
- C'était lors de tes missions de jeune leader, j'étais fou de toi. Maintenant, je suis totalement dingue de ton sourire, de tes yeux, de ta personnalité, de ton corps...
La lune apparaît et sa lueur illumine le vaste monde qui est face à moi. Éric a une main dans mon dos et l'autre sur la rambarde en fer. Les traits de son visage sont éclairés par l'astre nocturne, ce qui lui donne un côté assez mystérieux. Pourtant, je connais très bien cet homme qui semblait avoir deux facettes quand je l'ai rencontré. Je pose ma tête sur son épaule soulagée de pouvoir reposé sur lui.
- Tu voulais me montrer quoi précisément ?
- Le paysage de nuit est magnifique. Tu vas me dire qu'on ne voit pas grand-chose, mais quand il fait jour tu ne perçoit pas les mêmes couleurs. Les nuances de gris, de noir et même de blanc sont juste splendides. Plus tu restes ici dans la noirceur de la nuit, plus ta vision s'habitue et s'adapte à cet environnement sombre. Si on attend plusieurs heures, on verra encore plus de choses. Hier, j'ai vu un cerf manger dans le champ là-bas. C'était la première fois que j'en voyais un...
- Tu envisages de partir de Chicago, c'est ça ?
- Oui... Ce que je voulais te montrer en te menant ici, c'est l'immensité du monde et son infinie grandeur. Je veux prendre un nouveau départ Laur', avec toi, avec ta famille.
- On planifiera ça, je te le promet. Pour le moment, je suis enchaînée à mes erreurs.
- Je suis au courant qu'Evelyn t'a collé avec Edgar... Je veux partir, mais je veux que ce soit le plus organisé possible pour éviter un quelconque accident. Il ne doit plus y avoir de mort Laur'...
- Je suis entièrement d'accord avec toi Ric'.
- Fais ce que te dis Evelyn même si tu dois faire l'hypocrite. Elle ne doit pas avoir de doutes sur ta loyauté.
- Je vais faire de mon mieux, je t'en fais la promesse Ric'.
Mon regard se perd dans une portion de champ où un grand arbre a ses racines qui remontent à la surface. Son feuillage est inexistant en cette période de l'année et je me met à imaginer cet être vivant vêtu d'un bel habit de vert éclatant. Les beaux jours me manquent, voir la nature se réveiller de son hibernation est un spectacle que j'aimerais voir encore et encore. Éric se met derrière moi et met sa tête à côté de la mienne tout en me comprimant près de lui. Je sens ses poumons se gonfler car son torse se soulève et touche mon dos à chacune de ses inspirations. Je trouve ça tellement apaisant de le savoir vivant et de le sentir vivre. Je me retourne et faufile mes bras dans sa veste de Fraternel pour pouvoir lui faire un câlin et aussi pour réchauffer mes mains gelées. Il m'embrasse tendrement mais ce n'est pas un simple baiser comme on pouvait s'en faire avant. Là, c'est bien plus que ça. Je sens son amour se vivifier lorsque nos lèvre se touchent, comme s'il se nourrissait de l'amour que j'ai envers lui, comme s'il venait puiser en moi ce sentiment incompréhensible. Un frisson parcourt mon corps, le froid est en train de coloniser et de paralyser mon corps.
- On va aller se mettre au chaud. Je ne veux pas que tu attrapes froid... D'ailleurs... Tu as mangé ?
- Non... Je suis allée voir Jacob, Tyna, Éthan et Ryan puis je suis partis directement pour te voir.
- J'ai quelques gâteaux dans ma chambre si tu veux.
Nous prenons donc le sens inverse pour rentrer à l'hôpital. Je suis contente de pouvoir quitter mes vêtements pour en mettre de nouveaux plus confortable. Les petits biscuits qu'Éric m'a donné sont fourrés au chocolat et à la noisette. Ils suffisent à calmer mon estomac qui criait famine. Je me glisse dans le lit douillé et me colle à Éric. Nous avons passé presque toute la nuit à discuter. L'envie de dormir a été bien présente, mais mon envie de lui parler a été beaucoup plus forte... J'ai tout de même réussi à fermer l'œil aux environs d'une heure du matin. Bercée par les battements de son cœur, je me suis endormis calme et sereine dans les bras de l'homme en qui j'éprouve un amour sans frontières.
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Réveillée par les gazouillements de Béatrice, j'ai ouvert les yeux à six heures. Johanna a trouvé bon d'envoyer Emmett et ma sœur pour servir de réveil. Nous avons pris le petit déjeuner ensemble, je n'ai pas lâcher ma sœur, elle m'a trop manqué. Pauvre petit être qui n'aura même pas le souvenir d'une mère aimante... Puis, elle n'a pas eu de logement stable depuis que notre mère est décédée, j'espère que ça ne la perturbe pas. J'embrasse sa chevelure blonde et la donne à Éric qui m'offre un doux baiser avant de me voir partir. J'ai frotté le dos d'Emmett pour lui dire au revoir, j'évite de le perturber en lui donnant de l'affection. Il est né chez les Altruistes et a leurs coutumes qui coulent dans ses veines. Il ne peut pas déroger à leurs règles même s'il m'a serré dans ses bras hier soir. D'ailleurs son geste m'a légèrement surprise, je ne m'attendais guère à ce qu'il accepte de donner de la tendresse à son entourage.
- Veuillez-nous tenir au courant de ce qui se passe là-bas. Ça nous aiderait beaucoup pour notre petite association de rebelles.
- Comptez sur moi Johanna.
Je regarde un instant Éric entouré de Béatrice et d'Emmett. Je ne l'ai jamais vu aussi à l'aise avec des enfants. Je me retourne et commence à courir pour ne pas être en retard au point de rendez-vous qu'Edgar m'a fixé hier soir. De la brume flotte au dessus des vergers en fleurs. La rosée éparpillée en fine gouttelettes sur la pelouse fait couiner mes semelles en caoutchouc. Un écureuil gris et noir passe devant moi, il s'arrête plus loin et se hisse sur ses deux pattes arrières pour m'observer. Sa petite truffe humide et ses yeux globuleux me font fondre. Ces petits animaux sont de la famille des rongeurs, ils sont très craintifs et évitent l'homme. Ma mère en avait peur car ils lui font penser à des souris. Je ne suis pas de son avis, puis qu'y a-t-il d'affreux chez un rongeur ? À part la queue, je ne trouve pas d'autres explications. Je viens de sortir du secteur Fraternel, les buildings se dressent devant moi telles les montagnes décrites dans les livres de géologie. Il n'y a pas de nuages noirs aujourd'hui, seuls quelques cumulus viennent prévenir que le beau temps arrive avec le levé du soleil. Le phébus se reflète dans les carreaux des immeubles en montrant ses premiers rayons qui donnent au ciel une couleur orangée voire rosée à certains endroits. Une légère brise vient bercer mes cheveux et me chatouiller le visage. Je me sens beaucoup mieux dans ces rues qu'hier soir où le sentiment d'insécurité m'oppresser fortement. Plusieurs silhouettes se dessinent dans la luminosité d'un lampadaire pour ensuite s'effacer en pénétrant dans l'obscurité d'une ruelle. Je ne me sens pas traquée, je ne me sens pas en danger, et ça faisait très longtemps que je ne m'étais pas sentie en confiance dans cette ville qui est en train de construire son propre tombeau. L'asphalte d'un noir qui tourne au gris est partout, il constitue les trottoirs, les routes et les allées des parcs arborés. Seuls les espaces de jeux pour les enfants sont colorés et nous sortent de ce monde sombre sans lumière. J'ai toujours préféré le secteur Sincères pour son côté chatoyant avec ses milliers de baies vitrées et ses chemins de dalles blanches. Sans parler de l'herbe coupée au millimètre près qui tapissent chaque espace naturel qui persistent dans cet environnement urbain. J'aurais pu choisir cette faction pour son dévouement à faire éclater la vérité et la justice. Les Sincères sont peut-être blessant, mais j'aime leur style de vie. Je ne les trouve pas malfaisant même s'ils peuvent être légèrement énervant. Je n'ai jamais vu un des leurs être atroce dans ses paroles et ses actions. Pourtant, ils ne mâchent pas leurs mots quand la vérité est attaquée par le mensonge. Je reviens à la réalité lorsque la foule apparaît face à moi. Je suis choquée par son hétérogénéité qui est encore pire que quand les factions vivaient ici. Le désordre, c'est ce que je vois, c'est ce qui m'effraie... Plus de factions, plus d'organisation, plus d'équilibre ni d'harmonie. Je crois que j'arriverai pas à me faire à ce nouveau mode de vie. Je regarde les gens et je ne vois plus vraiment qui ils sont même si quelques éléments les trahissent... Je ne vois presque plus ce qui les différencie des autres... Les factions et leurs codes de couleurs ainsi que leurs règles m'aidaient à savoir comment me comporter si j'étais en compagnie d'un membre d'une des cinq clans. Je suis égarée et quand on bouleverse le monde d'une personne, il est fortement probable qu'elle se sente perdue et qu'elle se batte pour retrouver ce qu'elle avait avant. Je me battrai pour retrouver le système des factions, et seul le Bureau peut m'aider à faire cela. J'aperçois Arthur avec Lara, ils ont l'air beaucoup plus proche que d'habitude... Puis ma sœur le regarde attentivement avec un regard passionnel, comme si l'amour avait peuplé son cœur et celui d'Arthur. Je réfléchis un instant... Comment ça se peut qu'ils soient tombés amoureux l'un de l'autre en pleine guerre ? ... Mais oui... Arthur a raccompagné Lara au secteur Altruiste lors de ma mission suicide à la Ruche. Puis, en y réfléchissant, ils ont passé beaucoup de temps ensemble en mon absence. Et elle a demandé directement de ses nouvelles quand Quatre est entré hier dans ma cellule. J'aurais dû le voir, elle qui était dans la lune à observer le plafond et à me questionner sur l'effet qu'a l'amour sur un être humain. Vu que j'aime bien l'embêter, je me faufile entre eux deux et leur souris à pleine dents.
- Ça va ?!
Lara rougit et Arthur détourne son regard d'elle pour me répondre.
- Oui et toi ?
- J'ai vu vous savez qui hier soir.
- Je parie que tu as pleuré comme un bébé !
- Lara ! Si tu avais été à ma place, tu aurais eu la même réaction.
- Rassemblement !
Edgar... Toujours là pour saboter les bons moments celui-là. Je lève les yeux au ciel et baragouine une insulte. J'émets ensuite un signe de tête pour rassembler mes hommes qui viennent tous me saluer. Je ne connais pas la plupart de ces personnes, mais j'ai l'impression que leur fidélité envers moi ne faillirait sous aucun prétexte. Je ne vois pas Jacob et le reste de mes frères. Ils ont du rester dans leur petit appartement avec Tyna. Cependant, je distingue Mike et Liam qui me sourit tout deux en me désignant Edgar du bout du doigt pour faire après un signe horizontal avec leur main en dessous de la gorge. Je secoue la tête face à leurs gamineries et me concentre sur l'homme qui va me donner des ordres... Il est vêtu d'une longue veste noir en cuir qui a un col qui lui monte jusqu'au menton. En dessous, il porte un tee-shirt bordeaux. Ses chaussures sont des bottes trop grandes pour lui qui lui monte jusqu'à la moitié du mollet. Son pantalon est le même modèle que j'avais chez les Audacieux avec une fibre élastique et thermique à l'intérieur.
- Ton code vestimentaire ne correspond pas vraiment à celui qu'Evelyn nous a imposé Ed'...
Il me regarde droit dans les yeux et ricane tout en s'approchant de moi. Je me retiens de rire en voyant Mike et Liam qui font les guignols dans le dos d'Edgar.
- Fermer ta grande gueule, c'est ce que tu devrais faire Laur'.
Je ne relève pas sa remarque et me contente de le regarder tourner en rond. Mes hommes et moi avons formés un arc de cercle pour écouter les directives du sbire d'Evelyn.
- Aujourd'hui, vous allez devoir patrouiller comme des Audacieux ! Vous devez avoir l'habitude car c'est ce que vous faisiez tous avant !
Personne ne rétorque et il vaut mieux le laisser parler. Sa voix monte et cogne les parois de la Ruche pour résonner dans tout l'espace vide qu'ont laissé les habitants de la ville. La grande place en face de l'ancien QG des Érudits s'est vidé d'un seul coup. Néanmoins, quelques personnes déambulent encore sur les pavés gris.
- Vous allez devoir réprimer les personnes qui sont contre le nouveau système politique.
- C'est à dire ?
- Les éliminer.
- Et à quel moment on doit tuer des personnes ?
- Si elles se rassemblent pour protester contre notre système.
- Attend. Tu nous demandes de tuer des gens qui ne sont pas d'accord avec vous et qui donc se rassemblent pour manifester leur mécontentement ? Tu as cru qu'on allait obéir à tes ordres ? Je refuse d'être encore l'auteure d'une tuerie. Trouve-toi un autre monstre.
Il se poste devant moi, croise les bras et me regarde avec dégoût.
- Tu refuses ? Que dis-tu de voir Jacob mourir d'une balle dans la tête ? Ce serait un magnifique spectacle ! Maintenant, tu obéis sinon je tue tes proches un par un. Désormais, tache de ne jamais refuser un de mes ordres.
- Va te faire foutre ! Je ne tuerai pas les miens ! Notre travail d'Audacieux n'était pas de tuer mais de protéger les plus faibles.
La fureur se lit dans ses yeux et je vois son bras prendre peu à peu de la hauteur. Soudainement, Mike se jette sur Edgar et lui colle son poing dans la figure.
- Ne t'avise pas de la toucher car, je te le promet, je te tue.
- C'est bon Mike... On va faire sa patrouille mais, à ma manière.
Edgar se masse la joue tout en me regardant d'une façon qui me glacerai le sang si j'étais seule avec lui. Je fais un signe de bras pour inviter mes hommes à me suivre. Nous allons gravités autour de la Ruche vu que c'est l'endroit le plus fréquenté et le plus sensible de la ville. Je fais des groupes de dix en les constituant de la même façon qu'à la révolte. Chris, Thomas, Aaron, Haley, Albane, Sarah, Stefan, Danny et Arthur sont une fois de plus à mes côtés pour faire régner la « paix ». Edgar arrive en courant vers moi et je ne peux pas me retenir de serrer les poings quand je le vois se mettre face à moi.
- Tu comptes patrouiller sans armes ?
- Pourquoi pas ? Les armes rendent les gens hostiles, tu devrais le savoir vu d'où tu viens.
Il m'attrape le bras et je le met instinctivement par terre d'un coup de genoux dans la cuisse.
- Ne plus me toucher, c'est ce que tu devrais faire Edgar. Je sais beaucoup mieux me défendre que toi, ne l'oublie pas.
- Laisse-moi au moins te donner des armes pour pouvoir rétablir l'ordre s'il le faut.
- On est dispersé en cinq groupes donc va falloir que tu fasses la distribution à tous les autres.
- Pas de problèmes.
Il a changé instantanément de comportement dès que je l'ai mis à terre. J'ai dû l'impressionner... Tant mieux, maintenant je serais sûrement un peu plus tranquille. Une dizaine de minutes se sont écoulées depuis qu'Edgar est partis trouver de quoi s'armer. Nous marchons entre des bâtiments rongés par les bombes et les coups de feu. Je n'aurais jamais cru vivre assez longtemps pour voir les factions se désintégrer sous l'égoïsme Érudit. J'évite de penser au passé qui ne reviendra jamais et essaie de me concentrer sur ce qui m'entoure. La bibliothèque est barricadée de partout pour éviter qu'on accède aux connaissances que contiennent les livres. Evelyn est vraiment contre les Érudits au point d'interdire toute démarche qui suivrait un processus scientifique pour augmenter son savoir. Je ne sais pas vraiment d'où vient cette haine. C'est comme si elle voulait rendre à néant une faction entière... Comme si les valeurs des Érudits étaient un poison qui allait anéantir toute la population. Je n'arrive pas à comprendre ma mère, et je crois que je ne vais plus me prendre la tête à essayer de cerner ses faits et gestes. Nous continuons à patrouiller et croisons Quatre qui part vers la Ruche. Il a l'air ailleurs car il ne m'a à peine souris et a tracé sa route sans venir me voir. Je crois que le jugement de Tris a lieu aujourd'hui, c'est sûrement pour ça qu'il est pressé et tendu. Je tourne dans un boulevard où des personnes circulent en groupe. Aaron marche à côté de moi, il doit avoir envie de me dire quelque chose.
- Je n'ai jamais vu une patrouille si calme... Pas de violence, rien du tout.
- Les gens ont peur, ils se tiennent à carreaux. Puis, la plupart ont perdu des proches lors de la rébellion donc ils sont plus occupés à les enterrer qu'à s'insurger contre un gouvernement comme celui-ci.
- Je ne supporterai pas longtemps de vivre comme ça Laur'. Il faut qu'on fasse quelque chose... Il faut qu'on parte d'ici au plus vite avant qu'Evelyn te commande un massacre.
- J'y travaille... Le problème, c'est que ça risque d'être long. Pour commencer, venez tous habiter dans le secteur Fraternel. Ils sont opposés au régime d'Evelyn et Johanna a créé une sorte d'organisation nommée les Loyalistes. Je ne vous explique pas son but, le nom parle de lui-même.
- Evelyn acceptera qu'on parte tous habiter là-bas ?
- Oh, ne t'inquiète pas pour ça. Je vais exercer mon art de la manipulation en lui léchant les bottes. Ça devrait marcher vu comment elle en manque d'affection de la part de ses enfants.
- Fais tout de même attention. Ne la sous estime pas.
- Je ferai attention Aaron. J'ai su convaincre des Altruistes assez têtus donc je devrais réussir à la persuader.
Nous continuons à faire des rondes autour de la titanesque tour de verre. Il me semble qu'elle mesure cent soixante mètres, ce qui fait d'elle le monument le plus haut de Chicago. Elle a cinquante neuf étages en comprenant l'amphithéâtre où les cérémonies du chois et les cours de mathématiques des Érudits se déroulent. Certaines personnes trouvent que construire un tel bâtiment est une prouesse architecturale et d'autres pensent que c'est défier les lois de la nature. Je ne suis pas vraiment de leurs avis, car je suis sûr que les architectes peuvent faire des constructions beaucoup plus élevées. Puis faut avouer que dépasser les limites fixées par notre monde est l'objectif de l'être humain pour augmenter son niveau de vie. Edgar arrive avec deux hommes qui portent des bacs remplis de pistolets. J'en saisis un et le loge dans mon holster situé à droite sur ma ceinture. Ed' s'éclipse sans prononcer un mot après nous avoir fais sa petite distribution. Je ne sais pas si son silence doit me faire peur, mais ce que je sais c'est que je vais payer très cher le fait de l'avoir fait tomber. Je vais éviter de me retrouver seule avec lui aujourd'hui... Je ne sais pas jusqu'où il peut aller, et je ne désire pas le savoir. Albane et sa fille Sarah sont à côté de moi. Aaron, Haley et Arthur marchent loin devant nous, puis les autres se sont postés à cent mètres derrière nous. Je n'ai jamais été autant détendu avec une arme à feu sur moi, je n'ai même pas enlever le cran de sûreté. Sûrement à cause du fait que je ne porte aucun intérêt à la mission que l'on m'a confiée.
- Edgar vous effraie ? Me questionne Albane.
- Je ne sais pas... Je n'arrive pas à savoir si je dois en avoir peur ou si je dois me sentir en sécurité avec lui.
- Je pense qu'il peut être réellement dangereux pour vous. Ne laissez plus jamais un homme vous atteindre, que ce soit moralement ou physiquement.
- Merci Albane. Honnêtement, je crois que c'est un sadique sans cœur. Il est quelque peu dérangé, mais Evelyn n'est pas loin et je ne la crois pas apte à me voir souffrir le martyr.
- Vous ne la connaissez pas. Une « mère » qui abandonne son enfant peut reproduire son geste. Je ne vous connais pas Laur' mais, je peux vous conseiller de ne pas lui pardonner trop vite au risque d'être déçue par son attitude.
- Ma mère est morte. Evelyn m'a peut-être mise au monde mais elle n'aura jamais autre que le statut de génitrice pour moi.
- Je vous comprend.
- Pour revenir à Edgar, je saurais me défendre s'il va trop loin.
- Il a le pouvoir de vous faire chanter... Ne minimisez pas son pouvoir sur vous.
Je prend les paroles d'Albane très au sérieux comme si c'était la voix de la sagesse qui me disait de prendre mes précautions. Je sais déjà qui sont mes ennemis, mais je ne me méfie pas assez d'eux. Je néglige le fait que toute ma famille soit en danger, et de là-haut, ma mère doit me le reprocher. Je repense à ce vieux proverbe que tout le monde connaît et qui dit de connaître son ennemi pour mieux le combattre. Edgar doit sûrement avoir une faille et il faut que je la trouve à tout prix pour pouvoir le faire plier à la première occasion qui s'offre à moi. Il va falloir que je joue l'hypocrite avec mes rivaux, je vais devoir faire taire mon côté sincère pour miser sur la carte du mensonge Érudit. J'observe Sarah qui a exactement la même carrure que sa mère. Toutes deux se ressemblent même si les fossettes et les yeux d'Albane n'apparaissent pas sur le visage de sa fille qui a les yeux bleus. C'est un cas très rare chez les personnes métisses, et j'aime ce côté exceptionnel qui ressort sur le physique d'une personne car il peut être l'expression d'un caractère hors du commun. Ses cheveux lissés sont attachés avec un élastique rouge et des barrettes. Ce doit être un vrai combat de dompter une chevelure comme la sienne, je suis bien contente d'avoir un tignasse raide qui ne me demande pas une lutte chaque matin pour la ligaturer. Tout à coup, un groupe de personne surgit de nulle part en courant vers la Michigan Avenue, autrement dit, la place devant la Ruche. Aaron se retourne et me regarde un instant.
- On y va. Tout de suite !
Je brandis mon arme et commence un sprint fou avec mes coéquipiers. Nous apercevons qu'un attroupement s'est formé avec plusieurs centaines de personnes qui hurle une phrase.
- Mort aux factions !
- Mort aux factions !
Je me stoppe nette quand ces paroles parviennent à moi, elles ont l'effet d'un coup de couteau en plein cœur.
- On est censé faire quoi quand il y a des rassemblements qui sont pour le gouvernement ?
- Laisser faire, c'est notre rôle...
- Et d'après l'autre connard d'Edgar, notre travail est semblable à celui des Audacieux ? Bah je ne sais pas s'il sait ce que nous exécutons comme ordre lors d'une patrouille.
- Garde ton sang-froid. Je t'en prie. Restez en arrière, je vais voir ce qui se passe.
J'avance en donnant des coups d'épaule aux gens qui me barrent le chemin. J'arrive au centre du cercle qu'a formé la foule et distingue les cinq coupes de la cérémonie du choix, renversées. Les charbons, le verre, l'eau, la terre et les galets sont mélangés et étalés sur le bitume. Être la spectatrice de la destruction du symbole des coupes est sans doute ce que je redoutais le plus. Lorsque je me suis entaillée la paume de ma main, je me suis délivrée de la prison de Richard. Ces coupes en métal sont la métaphore de ma libération, et je suis horrifiée d'assister à l'anéantissement de l'emblème de ma liberté, de la figure même du choix qui détermine la destinée de chacun des individus vivant dans le système des factions. Voir le contenu des coupoles répandu à même le sol est une vision d'horreur, car il n'y a plus de distinction. Chacun des habitants de cette ville seront différents et seront encore plus divisés... J'avais tant de haine envers les factions avant que la guerre et les révoltes commencent... Aujourd'hui, je suis anéantis et affolée de voir le monde où j'ai vécu s'effondrer comme un château de cartes. Je serre les poings et lève les yeux. Mon regard trouve celui de Tris qui est face à moi, tout autant terrifiée d'être le témoin d'une chose que personne n'envisageait auparavant. Quatre est à ma gauche, il a l'air assommé par l'écroulement de ce système qui nous tenait tant à cœur, qui nous a permis de nous libérer d'un monstre. Edward, est celui qui mène la danse. Vous savez ? Celui qui s'est pris un couteau à beurre de la part de Peter Hayes dans le dortoir des novices transferts. Il fait partie des proches de ma mère avec Edgar, et son œil en moins n'a pas l'air de le gêner plus que ça. J'ai même l'impression qu'il en fait une force, comme si c'était une blessure de guerre dû à un geste héroïque. Il a une sorte de masse dans les mains et la lève pour ensuite qu'elle s'écrase sur les calices en inox. Il les cabosse avec force, ce qui me fait toucher instinctivement mon arme comme si son geste me visait. Le cran de sûreté du pistolet est retiré, je suis prête à l'abattre s'il me porte atteinte encore une fois. Un Érudit trahit par sa coupe de cheveux et ses lunettes bleues s'avance et attrape le manche de la masse. Il faiblit très vite et lâche prise face à la vigueur d'Edward. L'objet tueur des factions s'abat sur le jeune scientifique qui s'écroule et hurle de douleur. Dès lors, l'attroupement s'anime et provoque des mouvements de foule assez dangereux. Quatre se dirige vers Edward et lui saisit le bras.
- Lâche ça !
Mon frère commence à lui donner des coups et Tris vient lui arracher la masse des mains. Elle va vite vers le corps de l'Érudit suivie de Christina. Je ne sais pas vraiment ce que je fais mais je prend mon arme à feu et vise sur Edward. Son geste était violent et inhumain, digne d'une brute sans conscience. Je tire trois fois ce qui suscite une vague de panique, puis j'aperçois Edgar qui m'agrippe le bras.
- Lâche et suis-moi.
J'observe vite fait autour de moi et me rend compte que cinq hommes me visent avec des famas. Je tend mon pistolet et suis Edgar qui ne se donne même pas la peine de me passer les menottes. Il me mène à la Ruche, dans l'ancien bureau de Jeanine. Evelyn est assise sur le rebord de la fenêtre et a une statuette bleue dans les mains qu'elle regarde. Elle relève la tête et me voit.
- En quel honneur viens-tu me voir Laur' ?
- Elle ne vient pas vous voir. Je vous l'emmène car elle a osé tirer sur un sans-faction et a touché plusieurs personnes en même temps.
- Qui a-t-elle tué ?
- Tobias vous le dira. Il me semble qu'il s'occupe du corps.
- Tu comptes désobéir souvent à mes ordres Laur' ? Je t'ai donné un poste, estime-toi heureuse de ne pas être enfermée dans une cellule.
- Parce que c'est un travail de me demander de tuer tout le monde lorsqu'il y a une émeute contre ton gouvernement bidon ?
- Tuer tout le monde ? Non, tu déformes les choses. On te demande de gérer les émeutes sans qu'il y ait de trop grands débordements et non de tuer ceux qui les forment.
- Edgar ne m'a part sortis le même discours tout à l'heure...
- C'est bon... Je voulais juste te tester pour voir si tu étais assez stupide pour exterminer des personnes sans défense...
Evelyn regarde un instant Edgar et fronce les sourcils comme si elle doutait de lui. Je crois voir une faille dans la confiance qu'elle donne à Ed', et je pense que cela ne peut qu'être bénéfique pour moi.
- Edgar, laisse-nous seuls.
Il sort sans broncher et ferme la porte.
- Tu sais que ton comportement est celui de quelqu'un prêt à fuir. Être sans-faction t'a forgé une nouvelle conduite.
- Laur'... Évite de changer de sujet...
- Nan mais c'est vrai. Tu es toujours prête à partir... Je ne t'ai jamais vu installer confortablement dans un siège ou sur une chaise.
- Les sans-factions sont sans arrêt aux aguets. C'est sûrement pour ça que je ne parviens pas à me détendre en m'asseyant dans le fond d'un fauteuil. J'ai toujours peur que quelqu'un vienne profiter de ma sérénité pour me planter un couteau dans le dos.
- Je vois ce que tu veux dire. Je n'étais jamais détendue lorsque j'étais chez moi seule en présence de Richard. Je savais qu'il allait s'en prendre à moi et j'étais sans cesse en train de me préparer psychologiquement à endurer des coups.
- Je suis désolée... Je sais que mes excuses ne répareront jamais mes fautes, mais je veux que tu saches que je t'aime.
- C'est encore difficile à comprendre pour moi mais, avec le temps ça viendra.
- Hummm... Dis. J'ai besoin de ton avis sur le couvre feu.
- Je t'écoute.
- Pense-tu que ce serai mieux que je l'ajuste ? J'avais pensé à faire en sorte qu'il commence à vingt et une heures et qu'il se finisse à huit heures.
- Ça me paraît être une bonne idée. À toi de la mettre en œuvre.
- Je vais aussi mettre en place des tâches à accomplir.
- C'est à dire ?
- Je veux que les hommes et les femmes qui travaillent dans cette ville fassent ce que les sans-factions faisaient.
- Hummm... Fais ce que tu veux. La politique, ça ne m'intéresse pas. Cependant, j'ai une question à te poser.
- Je t'en prie.
- Peut-on aller, ma famille, mes hommes et moi vivre dans l'ancien secteur des Fraternels ?
- Oui, bien sûr. Tant que vous n'êtes pas plus de quatre ex Audacieux dans le même logements, ça me va.
- Tu ferais une exception pour ta fille ? Nous exécutons chacun de tes ordres... On peut avoir plus de droits que les autres non ?
- Je peux faire ça pour toi mais, s'il y a le moindre problème, je te promet que je vous disperse toi et tes proches aux quatre coins de cette ville. Et fais en sorte que Johanna adopte le code vestimentaire sinon elle va se manger quelques balles dans le corps.
- Euh... Oui, je ferai en sorte de la convaincre. Tu peux compter sur moi maman. Merci en tout cas... Ah ! Et... Méfie-toi d'Edgar... Il est quelque peu dérangé, je ne veux pas qu'il te fasse de mal.
- Plus aucun homme n'a d'influence sur moi. Maintenant sors et va t'installer avec tes frères dans le secteur agriculture.
Je pose une main sur la sienne et lui tourne le dos pour partir. Je lui dis une dernière chose avant de m'éclipser.
- J'espère pouvoir t'aimer comme j'aimais Marie. Prend soin de toi et merci pour tout.
Ces deux phrases m'ont fais un mal fou... J'ai dis ça pour augmenter sa confiance, même si je trouve que c'est insupportable de me comporter ainsi. Mais, j'ai déjà eu ma première victoire. Elle m'a demandé de la conseiller et elle a accepté ma demande ce qui m'a surprise. Je pars donc de la Ruche et rassemble tous mes proches pour partir dans le secteur « agriculture » comme dit Evelyn. Johanna sort de la grange qui lui sert de bureau et nous accueille à bras ouvert. Jacob et Ryan ont l'air sceptique de venir vivre ici mais, nous n'avons pas réellement le choix étant donné qu'Éric est en convalescence ici et que Johanna est une alliée très importante.
- J'ai quelques logements libres par ici. Suivez-moi.
Éthan a le regard vide, je me décide donc de lui prendre le bras pour l'entraîner avec le reste du groupe. Je me rapproche de la porte parole de l'ancienne faction des Fraternels. Je peux voir la cicatrice qui lui prend tout le visage, ce qui me fait deviner qu'elle n'est pas une native Fraternelle mais bel et bien un transfert.
- J'ai vu Evelyn aujourd'hui. J'ai pu discuter avec elle et elle demande que vous respectiez le code vestimentaire. Je crois qu'il est bon de se plier un minimum à ses règles pour éviter un conflit de plus grande ampleur. Puis, il nous faut protéger l'anonymat des personnes faisant partie des Loyalistes en évitant que les acolytes d'Evelyn viennent ici surveiller nos faits et gestes.
- Vous avez raison Laur'. Il vaut mieux être dans un cadre de paix en acceptant ses lois. Cela nous permettra d'éviter sa fureur. Merci.
- Merci à vous.
Elle me sourit et nous désigne deux tours en bois comportant trois étages chacune.
- Il y a trois chambres par appartement avec une petite cuisine, salon et une salle de bain. Vous devrez déclarer le nombre et l'âge des personnes qui vivent dans chacune de ces habitations. Nous vous feront des paniers garnis pour vous nourrir même si nous vous incitons à venir vous restaurer sous le dôme. C'est plus conviviale. Si vous avez des questions, venez me voir ou allez demander des renseignements auprès de Laur'. Bonne installation.
Johanna vient vers moi et me chuchote qu'une réunion des Loyalistes aura lieu ce soir à minuit dans la salle de jugement des Sincères. Elle en profite pour me désigner l'immeuble et l'étage qui m'est attribué où Éric doit m'attendre avec Béatrice et Emmett. Je la retiens un instant.
- Vous pensez que je dois leur dire qu'Éric est vivant ?
- Suivez votre instinct Laur'.
J'observe les personnes qui commencent à partir vers leurs nouveaux lieux de vie. Jacob et Mike sont en train de discuter avec Lara et Liam. Je suis toujours accrochée au bras d'Éthan.
- Je dois leur dire pas vrai ?
- J'en sais rien Laur'...
- Jacob !
- Oui ? Tu veux quoi ?
- Je dois leur dire pour Ric' ?
- Essaie d'abord de voir si tu n'as pas de anti Éric dans le groupe après, vois si tu peux leur dire.
- Votre attention s'il vous plaît !
Jacob est désespéré, ça se voit dans son regard. En même temps, je suis son conseil ! Je veux savoir tout de suite, je n'aime pas vraiment attendre surtout quand ça parle d'Éric. Je me met donc sur un rocher pour que tout le monde puisse me voir et m'entendre. J'angoisse un peu mais, je me dis que c'est pour une bonne cause.
- Je vais aller droit au but. Qui n'appréciait pas Éric ?
- Ce n'est pas qu'on ne l'aimait pas, ce sont ses actes qui nous faisaient horreur. Cependant, on sait très bien que la pression que Jeanine lui faisait subir était immense... Après, abattre un enfant... J'ai du mal à le comprendre.
- Je ne comprend pas non plus son geste... Pensez-vous que vous aurez envie de le tuer s'il réapparaissait là, maintenant ?
Des regards interrogateurs sont échangés et un brouhaha monstrueux commence à s'élever dans le ciel. J'ai légèrement peur de ce qui peut se passer si toutes ces personnes apprenaient la survie de Ric'. Je sens une main se poser dans mon dos et des cris d'exclamations. Éric est à côté de moi, face à une petite foule d'ex Audacieux. Je sens mes muscles se contracter sous l'effet de la surprise et de la peur.
- Mais qu'est-ce que tu fais là ?
Il me regarde un instant et me serre contre lui sans répondre à ma question.
- J'ai tué cet enfant pour prouver mon allégeance totale à Jeanine. La veille, elle avait douté de moi et je ne supportais pas le fait que Laur' soit en danger à cause de moi. J'ai appris à ne jamais échouer et à obéir corps et âme au tyran des Érudits. Ça m'en rendait malade jusqu'au jour où je me suis fait peur car j'ai levé la main sur Laur', sur la femme que j'aime. Je ne dis pas que je suis l'être le plus sympathique de cette ville, je dis juste que je suis humain. Je ne supporte pas de voir le monstre que mes parents ont créé en m'enchaînant à Jeanine Matthews. Désormais, si vous voulez me tuer. Allez-y.
Le silence gouverne en maître suprême et même Arthur ne trouve pas quoi dire. Il n'y a pas l'air d'y avoir de rétorques mais, je me méfie quand même. Jacob prend la parole en croisant les bras.
- Je ne connais pas beaucoup cet homme mais, je sais un truc, c'est que son humanité est bel et bien présente en lui. Elle a juste été repoussée afin de survivre et de voir Laur' vivre. Quand on devient leader Audacieux et que notre faction vit dans la corruption des Érudits, je peux vous dire que vous êtes en danger de mort à chaque inspiration, à chaque mouvement, à chaque parole que vous faites. Si on faisait un pas de travers, on pouvait retrouver notre corps ou celui d'un proche au fond du Gouffre. J'ai dû fermer ma gueule et aller dans le sens de Max même quand je trouvais ses actes inhumains. Les factions forment un bon système quand elles ne sont pas manipulées par les Érudits.
Arthur se démarque des autres en sortant du tas d'être humain face à moi.
- Je pense qu'il faut vivre ce que vous avez vécu en tant que leader pour pouvoir vous comprendre. Je prend donc la décision de vous pardonner à tous. Parce que l'on a tous commis des crimes qui méritent d'être punis. J'ai entendu parler du jour où Laur' a abattu un vieil homme de sang froid... Et bien moi, je te pardonne. On entre sûrement dans une nouvelle ère et si on ne s'unit pas pour vaincre Evelyn, on obtiendra jamais ce que l'on voudra.
Les ex Audacieux acquiescent, mais d'autres ont l'air plus préoccupé.
- Je veux bien pardonner, mais comment va-t-on battre Evelyn ?
- Johanna Reyes est à la tête d'une assemblée nommée les Loyalistes. Comme le nom l'indique, cette association existe afin de conserver les factions. Il y a une réunion ce soir dans la salle de jugement au siège des Sincères. Je vous invite à y aller, c'est à minuit. Cependant, il vous faut être le plus discret possible. Le couvre-feu ne nous aide pas et les hommes de main d'Evelyn ne vont pas nous faciliter la tâche. Si vous ne pouvez pas ou ne voulez pas y aller à cause de la journée que nous avons passé, je comprendrai.
- Attends. Nous on peut y aller. Dit Jacob en regardant Tyna.
- Jacob...
- Reposez-vous. On fera office de porte parole et on vous rapportera mot pour mot ce qui a été dis. Nous avons passé tout ce temps cloîtré dans un immeuble, j'aimerais pouvoir bouger et être utile. Maintenant, allez vous installer et reposez-vous.
Tyna a Béatrice dans les bras, elle la berce. Emmett s'est posté derrière moi avec Ryan et Éthan. Mike, Lara, Liam et Arthur sont assis sur un banc. Jacob serre la main d'Éric et lui donne une légère tape dans l'épaule.
- Content de te revoir. J'ai cru que Laur' ne se relèverait jamais...
- J'ai cru que je n'allais jamais vous revoir...
- Bon ! Qui s'installe avec qui ?! S'exclame Tyna.
Je prend la décision de m'installer avec mes frères et sœurs de sang. Je veux laisser Jacob être garant de l'éducation de Béatrice et d'Emmett. Il est donc indispensable que les enfants habitent avec lui et sa copine. Lara a choisis de partager sa chambre et donc son lit avec Arthur... Je prend la décision de ne pas poser de question, je ne veux pas l'embêter avant de voir plus claire dans leur relation. Les appartements sont flambants neuf, ça sent le bois et la cire que l'on met sur les boiseries pour les entretenir et leur donner un aspect brillant. Un canapé et un fauteuil en osier sont disposés à droite avec un meuble ayant une vitre numérique en guise de téléviseur qui a pour utilité d'informer les habitants de ce qui se passe dans leur faction et dans l'ensemble de la cité. Une table ronde et huit chaises sont installées au centre de la grande pièce. Il y a trois chambres dont une avec deux lits individuels. Je m'attarde sur les guirlandes lumineuses accrochées au dessus de mon lit. Ce sont des sphères orange, rouge et verdâtre, elles n'éclairent pas beaucoup mais créent une ambiance de détente. Éric regarde par la fenêtre, les mains posées sur le rebord.
- On sera bien ici.
- Je veux partir Laur'...
- On ne peut pas pour le moment Ric'.
- Je sais bien mais, je ne peux pas te dire de prendre ton temps ni de te dépêcher donc fais comme tu peux pour nous sortir de cet enfer. Notre destin n'est pas là...
- Déjà, il faut que tu restes caché dans cet immeuble. Mike est en train de prévenir chacun des membres de notre groupe que ta survie ne doit pas atteindre les oreilles d'une personne en dehors des deux tours de bois.
- En tout cas tes frères et Lara ont l'air géniaux. J'ai discuté avec Liam, on pense à peu près pareil vis à vis de Jeanine et d'Evelyn. Nan mais qui aurait cru que tu avais une si grande famille ?
- Personne... Je me retrouve quand même avec cinq frères et trois sœurs... C'est un truc de fou et c'est sans doute la meilleure chose qui me soit arrivée dans ma vie... Après toi bien sûr.
- Laur' Scott, je crois que je vous aime.
Je souris et vient l'embrasser en passant une main sur sa nuque.
- Arthur a raison. Une nouvelle ère commence et nos ennemis sont bien différents de ceux que l'on a connu... On est peut-être cinquante, mais il va falloir que l'on redouble d'effort pour parvenir à nos buts.
- Faut trouver un nom à notre groupe ! S'écrie Lara derrière nous.
- Tu as les oreilles qui traînent toi ! N'empêche que tu as raison.
- Pourquoi pas les Conformistes ? On veut conserver les factions donc ça marche !
- Il y a déjà les Loyalistes Lara...
- Oui mais nous on a que des combattants et pas des gens justes, intelligents, dévoués et pacifiques.
- Puis, le système des factions n'est pas si parfait que ça... Ce que l'on veut vraiment, c'est partir d'ici.
- Je sais, je vous ai entendu. Et, je viendrais avec vous. Faut pas se leurrer, on ne rétablira pas les factions.
- Merci Lara pour ton côté lucide ! Cependant, il ne faut pas faire perdre espoir à nos hommes qui veulent à tout prix restaurer les cinq hordes. Puis, je n'ai pas encore décidé si je devais les emmener et il est probable qu'ils refusent de partir d'ici...
- Je pense que tu dois être franche avec eux, tu leur as tout offert. Ils te doivent beaucoup de choses et comprendront ton choix d'aller au-delà de la Clôture sans rien dire. S'ils veulent venir, ils viennent. S'ils veulent pas, ils restent et te remplacent.
- Tu as raison Lara. La division des Conformistes... Ça sonne bien.
Voilà pour le chapitre 3 ! Votez et commentez ! Vous êtes content ? Nos deux tourtereaux se retrouvent enfin ! Il était tant pas vrai ? Bon dimanche à vous et gros bisous de panda ♥
Plan de l'appartement Fraternel de Laur' situé tout à la fin, après le montage chapitral !
Alors toutes les explications que je donne comme ci-dessous apparaîtront dans le « À propos » qui sera rédigé quand les trois tomes seront finis afin de vous expliquer chacun de mes choix.
Le couvre-feu est établis plus tard mais ça ne m'arrangeait pas de le mettre comme dans le livre donc j'ai avancé son établissement qui se fait le lendemain de la mise au pouvoir d'Evelyn (pour moi pas pour Veronica Roth). J'ai aussi avancé la réunion des Loyalistes ainsi que l'évasion de Tris et de Quatre. Le discours d'Evelyn qui donne les règles ne sont pas dans mon livre et pour moi, Tris n'y assiste pas car elle est encore emprisonnée. Cependant, le discours et les règles existent bien dans mon livre pour ne pas profaner l'œuvre de Veronica Roth. J'espère que cela ne vous dérange pas étant donner que la scène avec Edward et les coupes ainsi que la scène de la réunion des Loyalistes sont vraiment dans le livre.
Voici ci-dessous le plan des logements Fraternels où les Conformistes vont vivre.
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