Chapitre 2 : Premier combat 2/4
La grosse voix d'Eric m'a fait bondir, et il semble être en rogne.
- Je n'arrive pas à dormir. J'ai un mal de fou au dos.
- On a une infirmerie pour ça, je t'y emmène. Tu retourneras au dortoir après, tu n'as rien à faire ici à cette heure-là.
- Je peux y aller seule merci. Je vais réussir à m'orienter.
- Ce n'était pas une question. Décrète-t-il dans un ton très menaçant.
Je le regarde une seconde, le cœur remplie d'une panique incontrôlable. S'il me voit blessée, il va me virer.
- Je vais aller me recoucher. La douleur va disparaître. Ce n'est que dans ma tête.
- Tu as mal où précisément ? Me demande-t-il en appuyant sa main sur ma colonne vertébrale.
Je m'éloigne de trois pas en laissant un râle aiguë s'échapper de ma gorge. Je soupire fortement comme pour faire partir ce mal par ma respiration. Il m'a grillé, il sait que quelque chose cloche. Je le vois à ses yeux azurs qui me somment de lui donner un éclaircissement. Se faire remarquer avant le début de l'initiation est une très mauvaise chose. Je me sens me décomposer face à lui.
- Je te dépose à l'infirmerie. Les médecins là-bas sont soumis au secret professionnel. Je ne saurais donc rien. Chaque novice a le droit de bénéficier de soins infirmiers. Je ne suis pas inhumain comme tu sembles le croire.
- Je ne veux pas. C'est trop risqué... Dis-je la voix tremblante.
- Je vais clairement commencer à perdre patience. Quoi que tu aies, tu n'auras pas à justifier quoi que ce soit. Bouge-toi Laur'. J'ai dépassé mon quota de sympathie avec toi.
Je m'exécute sans broncher. Il m'a effrayé en s'approchant de moi comme s'il voulait m'attraper. On aurait dit mon père pendant un bref moment. J'ai cultivé une peur des hommes qui peut être véritablement handicapante.
Nous marchons dans les couloirs. Le bruit de ses pas devant moi me fait peur, comme s'il m'emmenait à une exécution. Eric, cet homme au visage sans expressions humaine, sombre et dénué de compassion.
À l'infirmerie, le médecin qui s'occupe de moi est ébahi par ce qu'il voit. Eric lui a exigé de ne pas émettre de questionnement ni de demander mon identité mais je l'entends se parler à lui même. Il s'interroge sur ce qu'il m'est arrivé. Il trouve que mes plaies sont superficielles pour la plupart mais qu'elles sont l'œuvre d'un cinglé. Il me prescrit des antalgiques puis m'a demandé de revenir tous les deux jours. Les soins seront finis la semaine prochaine.
- C'est la première fois que je vois ça. Elle n'a pas pu se faire subir un tel supplice seule. J'espère que la personne responsable de ce carnage sera punie avec sévérité.
- Vous êtes médecin. Pas justicier. Donc vous avez juste l'obligeance de vous la fermer et de ne pas ébruiter ce que vous venez de voir. Vous la soignez et vous retournez à votre train train quotidien. Il ne vaut mieux pas que j'entende quoi que ce soit comme rumeur sinon ça se passera très mal pour vous. Déclare Eric en guise d'avertissement des plus intimidant.
Il m'invite à le suivre sans prononcer un mot. Sur le chemin du dortoir, je le sens anxieux.
- Il va de soit qu'il est important que cet épisode doit être mis sous silence. C'est préférable pour toi, histoire que tu ne paraisses pas faible aux yeux des autres novices. Puis c'est essentiel pour moi, afin que mon autorité ne soit pas remise en cause par une jeune transfert. Tache de dormir, tu vas clairement souffrir demain.
Il me pousse dans le dos pour me faire entrer dans le dortoir. J'ai cru que j'allais lui en retourner une. Il me menace puis m'aide puis me remet un coup de pression. Il a un problème ce type... Il ne veut pas non plus aller me border dans mon lit ? Avec ces péripéties et le médicament, le sommeil ne tarde pas à venir me cueillir.
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- Debout !
Eric hurle dans le dortoir et cogne dans l'armature de nos lits. Je crois que je vais le tuer. Alex a une tête de déterré, le pauvre.
- Attends, il est sérieux là ? Sort Alex avec la voix suave du réveil trop matinal.
- Oui et ça va être ça tous les matins je crois...
- Pff, quel connard. Si quelqu'un pouvait le pousser dans le Gouffre, ça m'arrangerai.
J'émets un très léger rictus avant de partir dans la salle de bain où plusieurs filles s'affairent. Souhaiter la mort de quelqu'un, je trouve ça fort seulement pour un réveil en fanfare... Je pense qu'Alex ne mesure pas ses mots.
Je me douche en quelques minutes tout en essayant de dissimuler mes blessures. Je remets quelques pansements là où je peux atteindre mes plaies. J'attache mes cheveux blond en faisant une tresse que j'enroule afin de faire un chignon. Je laisse couler l'eau du robinet et joins mes mains pour faire un petit bol dans lequel je bois quelques gorgées avant que l'eau ne s'évacue. J'enfile ma veste noire et rejoins Alex qui m'attendais sur son lit dans le dortoir.
- Tu as bien dormis Al' ? Tu sembles exténué.
- Je pensais à mes parents, donc j'ai eu une nuit assez mouvementée. Tu penses qu'on a fais le bon choix ? Qu'on n'a pas été trop ambitieux en venant ici ?
- Il faut croire en nos capacités sinon nous n'allons pas y arriver. Si tu crois en ce que tu fais, tu réussiras. Se convaincre que l'on n'échouera pas, c'est un pas vers une réussite certaine. L'échec n'est pas envisageable.
- Belle philosophie de vie. Se convaincre donc s'interdire de faillir et par ce fait, s'obliger coûte que coûte à parvenir à ses fins. J'espère que tu as raison Laur'.
- Je tente d'y croire aussi même si la réalité de l'initiation rend la chose complexe.
Nous nous rendons à la cafétéria et nous patientons pour prendre un plateau. Ben, le transfert Érudit s'énerve car la queue n'avance pas d'un pouce. Lui, c'est le stéréotype parfait de l'Érudit bien arrogant et surtout bien égoïste. Un jour au lycée, il a essayé de me chercher, et je n'ai pas réussis à me retenir puis je lui ai collé mon poing dans sa gueule. Maintenant, il ne fait plus du tout attention à moi car c'est lui qui a payé mon geste. C'est la seule fois où le statut de leader de mon père m'a servis, même si j'ai passé un très mauvais quart d'heure par la suite.
- Tu es encore dans la lune... Relève l'ex Sincère.
- Oui, excuse-moi. Moi non plus, je n'ai pas beaucoup dormi.
- Tracassée aussi d'avoir quitté tes parents ?
- Je me sens lâche en fait... J'ai abandonné ma mère...
- Non, tu as suivis ton instinct et tu ne vas pas faire ta vie avec ta mère. La faction avant les liens du sang comme ils disent si bien. Et l'humain ne fait pas d'enfant pour l'avoir auprès de lui toute sa vie. Enfin ça c'est dans le principe... Bref, je suis sûr que ta mère comprend tout à fait ton geste Laur'. Je ne pensais pas que c'était ça qui te tourmentait car, pour ma part, c'est plutôt la peur qu'ils m'oublient ou me détestent. Puis je suis dévoré par l'angoisse de me retrouver S-F.
- Nous sommes deux si cela peut te rassurer.
Il esquisse un petit sourire empathique et me laisse passer devant lui. Je prend un plateau, une cuillère ainsi qu'un couteau. La personne devant moi fait deux têtes de plus que moi et les muscles de ses épaules sont très saillants. Cela m'effraie quand je l'entend dire qu'il est novice natif Audacieux. Je me dis que je vais devoir l'affronter et qu'il m'écrabouillera forcément. Je prend un bol de lait avec un peu de chocolat en poudre, deux croissants et un fruit bien mûre. Alex, lui, se sert du fromage et de la charcuterie qu'il agrémente de sauce hyper grasse. Je le regarde un air dégoûté imprimé sur le visage ce qui le fait marrer. Nous nous installons l'un en face de l'autre et commençons à manger sans dire quoi que ce soit. Les rires de la grande gueule Ben m'exaspèrent au plus haut point.
- Quoi ? M'énervé-je devant le regard moqueur d'Alex.
- Tu as l'air de l'apprécier.
- Tu parles. Si je pouvais lui coller une balle dans la tête, je le ferai sans aucune hésitation. Je n'aime pas comment il pense... Le plus fort écrase le plus faible. C'est un suprématiste Érudit qui prône que les Altruistes ne doivent pas être à la tête du gouvernement.
- Les Érudits vont créer leur perte à cause de leur comportement extrême, j'en suis sûr. Ils amplifient les injustices de cette ville et personne n'ose les contredire sauf les Altruistes bien évidemment. Même les Sincères ferment leur clapet face à Jeanine Matthews.
- C'est le Alex Sincère qui me parle là ? Le sondé-je pour le charrier.
Il secoue la tête et affiche un rictus au coin de ses lèvres.
Après avoir mangé, on se dirige vers la salle d'entraînement. Eric et Quatre nous attendent auprès des sacs de frappe d'une couleur orange. Ils sont droit comme des piquets et nous regarde d'un air très sérieux sans afficher une expression amicale qui pourrait nous mettre un minimum à l'aise. L'intimidation a l'air de faire partie de leurs méthodes d'éducation au combat, mais cela ne me dérange pas. Ça me passe au dessus de la tête en fait...
- Bon, la première partie de l'initiation consiste à déterminer si vos facultés physique vous permettent de vraiment devenir un Audacieux. Vous serez classé du plus fort au plus faible. Dans six semaines, les quatre plus faibles deviendront des sans-factions. Vous nous avez choisis et maintenant, c'est à nous de vous choisir. Je tiens à certifier qu'un vrai Audacieux n'abandonne jamais. L'abandon est un acte réservé aux lâches or, nous ne cautionnons pas l'abandon, nous, les Audacieux. Nous donnons une place très importante au courage et non pas à la témérité qui est dénuée d'intelligence. Chacun de vos actes doivent être réfléchis car des vies seront en jeu lorsque vous serez sur le terrain. Donnez-vous à fond car c'est la loi du plus fort ici. Aujourd'hui, vous allez vous entraîner à cogner sur le sac de frappe et vous aurez votre premier combat après le déjeuner. Faites tout d'abord vingt tours de la salle d'entraînement . Allez, bougez vous, on n'a pas que ça à faire.
Toujours de bon poil lui... On se met tous à trottiner. Moi qui me plaignais de ne pas pouvoir courir, là, je suis servis ! Après avoir couru, nous devons nous entraîner à taper sur les sacs de frappe. Je positionne mes poings face à moi et commence à frapper de toutes mes forces comme nous l'a demandé Eric. Se donner à fond et se faire mal a l'air d'être primordial pour qu'il nous laisse tranquille.
- Ta position d'attaque est très bonne et ta défense aussi mais met plus de force dans tes coups. Essayes de frapper avec les pieds maintenant. Me conseille Quatre qui passe derrière moi.
- D'accord mais je ne dois pas essayer de perfectionner mes gestes avec mes poings au lieu de passer directement aux pieds ?
- Je ne t'ai pas demandé ton avis. Lâche-t-il avec froideur.
Il ne faut pas que je me fasse remarquer... Je l'ai déjà assez fait hier soir auprès d'Eric.
C'est plutôt encourageant si je me débrouille bien aux yeux d'un de mes instructeurs. C'est un bon début. Alex, qui est à côté de moi, s'éclate. Il est en mode grosse brute et donne de violent coup au sac qui valse dans les airs. Il est sans arrêt obligé de l'arrêter puis de le stabiliser avant de reprendre l'exercice.
- Al' détends toi. Il ne t'a rien fais le sac !
- Oui, mais ça me défoule. M'explique-t-il dégoulinant de sueur.
- Essaie de viser ou tu peux faire mal. Joue avec ta force mais il ne faut pas que la puissance de tes coups te fasse de mauvais tours.
- Tu es instructrice toi maintenant ? Me taquine-t-il en levant un sourcil.
- Désolée. Loin de moi l'envie de faire la leçon. Je n'y connais rien après tout.
- Non, ne t'excuse pas. Tu as raison, je dois apporter une réflexion à l'endroit que je dois visé pour immobiliser l'adversaire. Tu es une ancienne Érudite donc je pense que niveau science tu t'y connais.
- Je ne vois pas où est la science là dedans...
- Tu es intelligente de nature alors. C'est pas mal !
Je le regarde un peu indécise et il éclate de rire. J'ai du mal à cerner ce qu'il vient de dire mais ses éclats de rire me font rire à mon tour. Eric passe derrière nous, les mains jointent dans son dos, le regard dur comme la roche d'une montagne et la tête droite en signe de fierté.
- Faites tous cent pompes, cinq minutes d'abdominaux en fractionné et une traction.
En fait Eric a un léger penchant pour le sadisme. On exécute son ordre, car on n'a pas vraiment le choix et qu'il est de notre devoir de se former.
Mes muscles sont tétanisés. Ça me fait trop mal mais je veux repousser les limites de mon corps. Plus je m'entraînerai, plus je serai forte. Je pousse sur mes bras du mieux que je peux.
- Ton dos est creusé, tu vas te faire très mal si tu continues comme ça. Contracte les abdominaux pour soulever ton corps. Me recommande Eric, une main posée sur mon ventre.
Il m'a totalement déstabilisé mais je reste concentrée et continue mes efforts tout en suivant ses instructions. Je fatigue fortement, mes muscles tremblent lorsque je leur demande un effort de plus. Les abdominaux vont me soulager un minimum j'espère... Je m'assois, soulève mes jambes et me bascule un peu en arrière pour faire travailler les muscles de mon abdomen. C'est une épreuve d'endurance, tout est dans la tête, il ne faut pas que je lâche.
- Laur', si tu ne respires pas, tu ne vas pas faire long feu. Observe Quatre.
Mes tremblements diminuent vaguement en intensité depuis que je m'efforce à gonfler mes poumons de manière plus récurrente. Je me concentre sur ma respiration afin de transmettre assez d'oxygène à mon corps.
Eric me lance un regard noir quand il me surprend en train de l'observer. Sa carrure m'impressionne et je n'irai pas jusqu'à dire que cela m'attire mais c'est presque ça... Pourtant, cet homme est vil puis cruel. Alex est beaucoup plus sympa et il a ce côté charmeur que j'apprécie de plus en plus même si cela ne fait qu'à peine vingt-quatre heures que je le connais.
Nous commençons à essayer de faire la traction. Je n'y arrive pas...
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