Chapitre 16 : Révélations destructrices 2/4

     Je sors du bureau et prend l'ascenseur puis me dirige vers le dépôt d'armes où Laur' et les patrouilles se préparent. Elle attend auprès des autres. Ses cheveux sont toujours attachés et sa veste est entrouverte. Son regard croise le mien puis s'allume comme quand la connexion d'un circuit électrique s'établit pour qu'une ampoule luise. Un sourire se dessine discrètement au coin de sa bouche.

Je m'approche de Matt, un chef de patrouille du secteur Érudit.

- Matt, tu as deux jours de repos. Laur' te remplace. Profites-en, ce n'est pas près de se reproduire.

- Reçu. Mais tu restes derrière elle pour gérer au cas ou non ?

- Bien sûr. Mais je doute qu'elle ait besoin de moi. Lui signalé-je en échangeant un regard cordial avec lui.

Je fais signe à Laur' de venir me rejoindre.

- On commence quand ? Se hâte-t-elle à me demander. Je n'en peux plus, il faut que je bouge. J'ai l'impression que ça fait un siècle que je n'ai pas couru comme une dératée dans les rues de notre ville. J'ai de l'énergie à revendre !

- Avec ta plaie, c'est clair que ça fait un certain temps que tu n'as pas pu te dépenser. J'espère que tu seras servie en dose d'adrénaline aujourd'hui. Laisse-moi t'expliquer maintenant en quoi consiste ta deuxième mission. Pendant deux jours, tu devras gérer une des patrouilles du secteur Érudit puis tu partiras ensuite une semaine et demie à vadrouiller dans différentes brigades. Il y a cinq groupes par secteur composés chacun de six personnes. Sauf pour les zones sensibles où l'effectif grimpe à douze personnes pour une patrouille. Tu vas justement gérer un quartier à risque. Celui de La Ruche. Tu es la dirigeante de chacun des groupes du secteur donc il te faudra réceptionner les appels de la salle de contrôle pour ta zone de surveillance et aussi ceux des autres chefs de patrouille. Je tenais à te prévenir que c'est sûrement LA mission où tu dois briller. Les Audacieux attendent que tu fasses tes preuves aujourd'hui et demain. Il va falloir que tu performes si tu veux qu'ils croient en leur nouvelle leader. Je compte sur toi pour te surpasser comme tu as pu le faire lors de la sortie nocturne dans l'ancien parc d'attractions quand tu étais novice.

- Compte sur moi. Affirme-t-elle déterminée à faire ses preuves. En revanche, on fait quoi quand un incident est maîtrisé ? Les citoyens posant problèmes, on les embarque ? C'est quelque chose que je n'ai pas pu observer quand j'étais face à mes innombrables écrans.

- Tu peux prendre noms et prénoms pour éviter que la salle de contrôle ait à activer une reconnaissance faciale étant donné que ça prend du temps. Tu l'as bien vu lors des deux dernières semaines. Suivant la nature du problème et sa gravité, tu contactes ce numéro qui enverra un véhicule pour les enfermer dans une cellule de dégrisement où pour effectuer le jugement directement si les faits ne demandent pas d'enquête. Dans le cas où il y a juste eu une altercation sans conséquences. Il y a un simple avertissement envoyé à la direction de la faction dont l'individu est membre.

- Cool mais si je vois un problème lorsque je patrouille et que je le règle par moi-même. Je dois le signaler ? Me stoppe-t-elle dans mes renseignements.

- J'y viens attends un peu et cesse de me couper sans cesse. Tu es insupportable ma parole ! M'agacé-je légèrement

Elle est vraiment hyper intrépide, c'est affreux... J'ai l'impression qu'elle a un détecteur d'anomalies dans le cerveau dès que j'omets un détail ou que je veux la mettre en situation pour lui expliquer. Si elle me laissait finir, elle n'aurait pas autant de questions. Elle fronce les sourcils, je l'ai énervé mais ça m'est égal.

- Tu t'enregistreras dans le téléphone. Lors du premier incident tu diras la date, ton rang donc leader et ton prénom. Après, tu indiques l'heure, la nature du problème avec l'identité du ou des individus. Et s'il y a un souci que tu ne peux pas gérer avec l'effectif de ta patrouille, tu appelles les autres brigades du secteur Érudit et elles viendront en renfort. Tu as des questions ?

- Non. Me signale-t-elle sèchement.

- Tu es susceptible... Je ne t'ai presque rien dit Laur'... Lui souligné-je exaspéré par son comportement.

- Je ne suis pas vexée Éric. J'ai juste un peu d'appréhension du fait que cela commence à faire longtemps que je n'ai pas été sur le terrain. J'ai peur d'échouer.

- Les Audacieux n'ont pas peur. Démène-toi, prouve-leur que tu as l'étoffe d'un dirigeant. Tu es capable d'avoir un aussi haut rang que le miens, j'en suis persuadé. Ne te sous-estime pas car tu as le potentiel pour y arriver. Il faut qu'on y aille. Voici ton équipe. Lance-toi.

Elle s'avance vers eux et prend la parole.

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POINT DE VUE LAUR'

- Je suis Laur', nouvelle leader et donc en formation pour gérer les patrouilles et exceller dans la gestion de conflits sur le terrain. Je remplace pendant deux jours... Me stoppé-je en me tournant vers Éric qui me souffle le nom de leur chef. Matt. Je dirigerai ceux qui sont chargés de garantir la sûreté du quartier où se situe La Ruche comme le fait votre supérieur. Mettez-vous en groupe bien distincts que je puisse voir à quelle patrouille j'appartiens.

Avec soudaineté, les corps bougent comme s'ils étaient totalement assujettis par ma personne. J'ai un sentiment de puissance quand je les vois obéir à mon ordre. Je me rapproche de ma brigade et indique aux soldats que nous partons.

Nous patientons sur le quai pendant au moins dix bonnes minutes avant que le train arrive. Lorsqu'il pointe le bout de son nez dans le bruit assourdissant de ses freins qui crissent, nous courrons pour se hisser à l'intérieur. J'ai eu un peu de mal à monter dedans ce qui a produit une inquiétude chez le leader aux piercings qui me dévisage avec un brin d'angoisse dans son regard.

- Ça tire où j'avais ma blessure...

- Ça va aller ? Me questionne-t-il en se rapprochant de moi puis en dégageant encore plus d'anxiété dans sa posture.

- Oui, ne t'inquiète pas. Affirmé-je en voyant encore plus de peur sur son visage. Éric... Je vais bien. Cesse de te faire du mouron.

- La dernière fois que tu m'as dit ça, tu as atterri à l'hôpital et tu as frôlé la mort.

- Je suis guéris maintenant. Tu le sais très bien. Une cicatrice, c'est raide au début et ça peut mettre du temps pour que la peau retrouve sa souplesse. Fais-moi confiance, je me porte très bien.

Je l'entends souffler avant qu'il se redresse pour reprendre son air sérieux et invincible. J'ai envie de l'embrasser pour le rassurer... Il est tellement charismatique quand il revient à son rôle de leader impassible. Je caresse discrètement sa main mais le train freine un grand coup et manque de me faire tomber. Éric a eu le temps de me rattraper. C'était un animal errant qui a provoqué ce freinage d'urgence. Il vagabondait sur les rails.

- Il faut qu'on descende ! Préparez-vous ! Ordonné-je en me postant devant une porte.

- Mais on ne descend pas là habituellement. Réplique une Audacieuse aux cheveux teintés de bleu.

- Et bien on va descendre ici aujourd'hui ! Allez ! Suivez-moi.

Ils me regardent tous un peu surpris. Éric esquisse un sourire... Il est né chez les Érudits donc il sait très bien par où je vais les faire passer. On prend notre élan et sautons du train. Je fais quelques pas avant de m'arrêter face à la fontaine Buckingham où les chevaux marins crachent un flot d'eau en direction du centre. Je me souviens m'y baigner les pieds à la sortie des cours accompagnée de mes frères et de ma mère. Je souris devant ce lieu à la tendre réminiscence qui vient à mon esprit. Je me rappelle la douceur de la main de ma mère qui me tient pour que je puisse faire le funambule sur le rebord de la fontaine. Je l'entends encore m'insuffler de la confiance en soi grâce à des compliments emplis de bienveillance. Ce genre de moment avec elle, c'est ce qui a enrichi mon enfance qui a été si misérable sous le courroux du patriarche Scott.

- Suivez-moi. Ordonné-je aux patrouilles pour ne pas les faire patienter une seconde de plus.

Je fais un clin d'œil à Éric avant de commencer à courir pour aller au point de rendez-vous qu'est la Ruche. Je les fais passer à côté du minuscule parc Pritzker non loin de l'appartement de mes parents. Nous traversons une très étroite rue qu'il ne connaissent certainement pas. Ce sont des passages que seuls les Érudits savent l'existence. Ils servent de raccourcis quand la foule empêche une circulation fluide dans les grands axes. On détale comme si notre vie en dépend. C'est ça être Audacieux. C'est vivre à fond tant que notre corps nous en donne les moyens. Nous arrivons sans tarder à la tour Willis où la densité de population est à son paroxysme à cette heure-là de la journée.

- Vous pouvez aller vous dispatcher dans les différents points du secteur Érudit. Appelez-moi en cas de problèmes majeurs.

Les patrouilles partent une à une et il ne reste plus que mon groupe constitué de treize personnes au lieu de douze étant donné qu'Éric se devait d'être présent. On commence à faire des rondes autour de l'immense gratte-ciel et aux alentours sans empiéter sur les quartiers des autres brigades. Je me sens mal à l'aise d'être entourée d'Érudits. Le bleu de leurs vêtements ne me rappelle guère les bons événements qu'ont peuplé ma vie ici. Je vois des têtes que je connais, des collègues de mon père, des beaux-parleurs... Leur vanité m'exècre, leur paraître me dégoûte, tout chez eux provoque chez moi du dédain.

Le téléphone commence à vibrer dans la poche de ma veste. Première intervention, il faut que je me concentre. Je le saisis et répond.

- Oui ?

- Il y a deux personnes qui haussent le ton et qui font de grands gestes à côté de la bibliothèque.

- Nous allons intervenir immédiatement. Merci.

Nous nous rendons au plus vite aux abords de la bibliothèque où deux Érudits sont en train de s'égosiller l'un sur l'autre.

- Vous pouvez régler vos problèmes autrement qu'en public et de préférence sans hurler ? Demandé-je calmement pour débuter avec diplomatie.

Les deux hommes se tournent vers moi rouges de colère. Des amis de mon père, vous m'en voyez ravie.

- Tiens Laur' ! Heureux de te revoir ! Alors qu'est-ce que ça fait de déshonorer sa famille ? S'empresse de m'attaquer l'un d'eux.

- La faction avant les liens du sang. Aurais-tu oublié ?

- Tu es bien la fille à ton père. Les factions, vous n'avez que ça à la bouche. De toute manière, les statistiques prouvaient clairement que tu allais faire défection comme l'ont fait tes frères. La probabilité que tu restes parmi nous était infime.

- C'est ça. Je n'en ai rien à branler de vos calculs de merde. Circuler maintenant sinon je me ferais une joie de vous faire arrêter.

Ils me regardent étonnés et réaffichent leur air arrogant avant de fermer leur bouche et de tourner les talons.

- Excuse-moi Laur'. Tu n'as pas pris leurs noms... M'avertit un Audacieux en train de fumer sa cigarette.

- Net'inquiète pas pour ça, je les connais. Dis-je en appelant la salle de contrôlepour leur donner les informations requises et classer cette histoire.

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