Chapitre 8.3 : Neptune
Vanessa rentra immédiatement chez elle. Malheureusement, la pluie ne l'avait pas épargnée et avant même de grimper dans le bus, elle était déjà trempée. En arrivant à l'entrée de son immeuble, un mouvement vif attira son attention et elle frissonna violemment. Elle se mit sur le qui-vive, prête à affronter tous les dangers, détenteurs ou pas.
Mais ce qu'elle avait pris pour un danger imminent n'était en fait que Shiro. Ce dernier miaula doucement en s'approchant d'elle. Soulagée, elle se rappela de respirer et prit une grande goulée d'air gorgé de pluie.
— Mince, j'ai eu peur...
Le chat poussa un petit miaulement comme pour s'excuser en baissant la tête. Ça lui parut étrange de trouver Shiro là alors que comme tous les chats, il devait détester l'eau et tenter normalement de s'en éloigner le plus possible. Mais elle l'avait trouvé en rentrant comme elle s'était déjà accoutumée à le faire depuis deux mois et quelques. Peut-être que ce n'était pas elle qui avait pris le chat en affection mais plutôt lui qui l'avait adoptée. Curieusement, cette idée était loin de lui déplaire et avant même que son esprit ne lui souffle le contraire, elle se dit que pour cette fois, transgresser les règles ne lui ferait pas de mal.
***
À peine avaient-ils franchi le pas de sa porte que Shiro sauta par terre et s'ébroua aux pieds de Vanessa.
— Te gêne surtout pas, hein, se moqua-t-elle.
Elle le regarda prendre ses marques en évoluant lentement dans le studio, parfaitement à son aise.
« Il y en a au moins un qui se sent chez lui », pensa-t-elle.
Avant toute chose, elle retira ses chaussures et ses vêtements et se sentant déjà mieux sans ses habits mouillés, elle prit une serviette et la jeta sur sa tête. Elle fouilla ensuite son placard à la recherche de chiffons et de vieux habits qui pourraient servir de coussin pour la nuit à son compagnon temporaire et quelque chose pour l'essuyer.
— Viens Shiro, l'appela-t-elle en présentant un vieux T-shirt troué.
Le chat n'hésita pas à s'approcher et resta même tranquille pendant qu'elle le séchait vigoureusement.
— Tu es bien docile pour un chat errant, murmura-t-elle.
Il piaffa comme pour dire : « Hum ! Ne t'y habitue pas trop ! ». Vanessa ne put s'empêcher de glousser alors qu'il ronronnait d'aise.
Elle le laissa finalement et passa sous l'eau chaude de sa salle de bain. Après la douche glaciale qu'elle s'était prise, elle était la bienvenue. Elle n'hésita pas à laisser ses cheveux faire trempette également. Elle prendrait le temps de les sécher après. Pour l'instant, Vanessa voulait juste laisser l'eau couler partout et nettoyer les derniers vestiges de son hésitation, de ses doutes, de ses douleurs, pour ne laisser brûler que la petite étincelle de détermination qu'elle avait ressentie en elle plus tôt. Elle ne voulait pas la laisser mourir, pas maintenant qu'elle avait quelque chose pour éclairer le petit sentier tortueux et sombre dans lequel on l'avait entrainée.
Au sortir de la douche, elle déposa un bol contenant des restes de riz et une sardine devant le chat. Celui-ci lui fit honneur en le dévorant avec avidité. Elle prit ensuite le temps de bien se sécher les cheveux puis elle se coucha.
Shiro grimpa sur son lit sans lui demander son avis et se recroquevilla à ses côtés.
— Bah, si c'est juste pour cette nuit, c'est pas grave, murmura-t-elle alors que son esprit était déjà happé dans ce qu'elle devinait comme étant les prémices d'un drôle de rêve...
***
Vanessa sentit qu'elle n'était plus « là » à proprement parler, qu'elle ne se trouvait plus dans ce qu'on appelait un « lit » ou encore une « chambre ». Toutefois en ouvrant les yeux, elle fut étonnée de ne pas trouver le même décor que la dernière fois.
Ce n'était plus le perpétuel espace sombre et froid auquel elle avait fini malgré elle par s'habituer. Elle ne savait pas vraiment à quoi ça pouvait ressembler, mais les représentations cinématographiques et toutes les photos, montages ou non, qu'elle avait pu voir, ne lui permettaient pas de douter qu'elle se trouvait dans l'espace. Du moins, elle ne pouvait que le voir ainsi, même s'il manquait quelque chose... oui... des planètes peut-être... L'espace était un immense vide constellé d'étoiles et d'étranges vapeurs, presque comme des nuages.
Contrairement à ce qu'on pouvait croire, c'était très coloré. Des étoiles vertes, roses, ou rouges, se voyaient au loin. De légères nuées de toutes les couleurs flottaient tout autour d'elle. Mais voilà, il n'y avait rien d'autre. Peut-être se trouvait-elle dans un quelconque autre système que le système solaire qu'elle connaissait.
Vanessa prit le temps d'étudier ce qu'elle voyait, mais à un moment, un léger changement dans l'atmosphère lui fit comprendre qu'elle n'était plus seule.
— ...
Un murmure s'élevait de quelque part dans ce grand espace.
— Vanessa...
Non, elle n'avait pas rêvé. Quelque chose ou quelqu'un avait bel et bien prononcé son nom. C'était néanmoins le même méli-mélo de voix bizarres qui lui donnaient l'impression de ne faire qu'une et d'être des millions en même temps. La voix venait de derrière elle. Mais en esquissant un geste pour se retourner, elle l'arrêta.
— ... retourne... pas...
Elle ne devait pas se retourner, c'était clair.
— ... doit... parler... voir... non... reprit la voix.
— Je ne dois pas me retourner, c'est ça ? demanda Vanessa.
Elle sentit un vague mouvement, comme la sensation de quelque chose qui se rapprochait mais dans ce système, ce monde, peut-être que ses sensations n'étaient plus les mêmes. Son hypothèse tomba à l'eau quand elle sentit bel et bien un souffle sur son cou.
Elle aurait dû trembler comme une feuille et peut-être même devrait-elle bientôt se réveiller en hurlant, mais forte de sa première expérience dans le vide intersidéral de ses rêves, elle parvint à se contrôler. Elle ne réagirait pas comme les autres fois, rêve ou réalité. Elle prit une profonde inspiration en se demandant si c'était toujours de l'oxygène qu'elle respirait. Mais c'était sans importance pour l'instant.
— C'est toi, n'est-ce pas ? demanda-t-elle à nouveau dans un souffle.
— ... oui... lui répondit la voix sans même qu'elle n'eut à continuer.
Aucune autre voix ne lui parlait dans sa tête pour l'avertir du danger de toute façon.
— Pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi... ça ? demanda-t-elle en écartant ses bras dans un geste vague et impuissant.
— ... peux pas... maintenant... attention...
— Attention ? À quoi ?
— ... Distorsion... attention... rouge... la Grande D...
— Attention à la Distorsion ? Qu'est-ce que c'est ?
— ... peux pas... enfermée... pouvoirs... immenses... doit pas... utiliser... Triangle...
— Je ne comprends pas, s'écria Vanessa en cherchant à se retourner, mais une puissante force la maintint en place. Explique-moi !
— ... temps... non... vie... oui... vie... ne vole pas... ne donne pas... équilibre...
— Quoi ?
— ... prévenir... les autres... enfermée... désolée...
Dans la voix, transparaissait comme du chagrin. Était-ce vrai ? Ou bien simulait-elle pour susciter sa pitié ?
C'en était assez de cette mascarade ! Vanessa puisa dans ses forces, non persuadée que dans ce monde ça puisse marcher, mais elle appela n'importe quoi et la main de fer qui la maintenait fut soufflée comme de la paille. Elle put enfin se retourner et ce qu'elle vit fut encore pire que ce qu'elle avait vu la dernière fois.
Devant elle, juste à quelques centimètres de son visage, se trouvait la même masse noire et visqueuse que la dernière fois, fendue d'une énorme bouche ouverte sur une dentition effilée et aussi pointue que celle d'un requin et d'où s'écoulait un liquide noirâtre à l'odeur pestilentielle.
Elle la sentit, vraiment !
Mais le plus impressionnant, c'était que trônait juste au-dessus de cette bouche, un œil. Un œil globuleux, injecté de sang, qui la fixait.
L'œil cligna plusieurs fois comme s'il tentait de reprendre ses esprits et s'écarquilla de stupeur avant que la masse ne pousse un cri proche du grognement d'un ogre en colère à moins que ce ne soit celui d'un animal blessé. Difficile à dire.
— ... pardon...
Vanessa n'était pas sûre, mais le dernier mot qu'elle avait entendu avait semblé tellement triste. Et l'espace se couvrit d'une couche noire, qui engloutit tout avec elle, les étoiles, la masse, Vanessa, tout...
À Suivre...
©Tous Droits Réservés
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Chapitre 8 terminé. L'identité de l'entité noire est toujours un mystère mais peut-être n'est-elle pas si mauvaise. Qui sait ? En tout cas, de nombreux mystères se profilent à l'horizon et vous n'êtes pas au bout de vos surprises.
À bientôt.😊
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